Mercredi 5 mai 2021
L’embarras économique de l’Algérie
L’Algérie est, semble-t-il, condamnée à vivre des moments très difficiles dans les mois, voire les années à venir. Notre pays est paralysé par un statu quo politique insoutenable, alors qu’il se trouve confronté à une crise économique et sociale majeure qui touche gravement toutes les catégories de la population, en particulier les plus démunis.
Les grèves et les mouvements sociaux dans les secteurs de l’Education, la santé et les services publics reflètent un état généralisé de déliquescence. En témoignent le manque de liquidités au niveau des postes, les coupures d’eau récurrentes dans la capitale et ailleurs dans l’Algérie profonde, les pénuries de produits de base, etc.
En réalité, depuis 2020, les autorités publiques ont procédé à la dévaluation du dinar dans l’espoir d’augmenter les recettes budgétaires qui entrent dans les caisses du Trésor public, en convertissant les recettes des exportations en devises provenant des ventes des hydrocarbures à l’étranger. Or, une telle dévaluation n’a eu comme effet que la baisse du pouvoir d’achat des ménages entre 2020 et 2021.
En conséquence, l’indice de l’inflation (2,6% fin janvier dernier) a déséquilibré notre économie, largement dépendante de la rente pétrolière, provoquant une rupture de confiance sur le marché économique.
Le pouvoir va-t-il opter, désormais, pour une nouvelle dévaluation du dinar ? Pas sûr ! Car, déjà testée, en vain, entre 2014 et 2016, lors du choc pétrolier ayant vu les prix du baril chuter à plus de 70 % en 2 ans, mettant ainsi un terme à une période de prix historiquement élevés, débutée en 2003, celle-ci a montré ses limites.
D’ailleurs, pendant cette période, il y a eu une dépréciation du dinar de 28% dans le taux de change par rapport au dollar américain, sans qu’aucun programme global d’ajustement ou d’accompagnement n’ait été engagé en parallèle. Ce qui aurait mis en évidence l’inutilité de la procédure et son impact négatif sur les équilibres budgétaires de l’Etat.
En effet, l’exécutif Djerad sait pertinemment que l’accroissement des recettes budgétaires d’hydrocarbures en dinars, à travers la dépréciation du taux de change de la monnaie nationale n’est qu’un levier d’ajustement des ressources budgétaires avec une petite marge de manœuvre. Autrement dit, elle n’est qu' »un moyen d’ajustement partiel et artificiel des recettes du Trésor », pour reprendre les propos de l’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie Mohamed Loukal. En clair, l’Algérie gagnera-t-elle quelque chose si jamais elle baisse ou déprécie la valeur de sa monnaie puisqu’elle ne produit presque rien d’essentiel et dépend de l’étranger pour ses importations ?
Question embarrassante pour l’exécutif alors que l’on sait que celui-ci a refusé catégoriquement et l’option de l’endettement extérieur et celle de la planche à billets ! Grosso modo, la dépendance structurelle de l’économie algérienne, vis-à-vis des importations n’a laissé aucune chance de réussite à l’éventuelle «manœuvre financière» de dépréciation de la monnaie nationale.
Que va faire alors le chef de l’Etat Abdelmadjid Tebboune face à des réserves de change qui s’épuisent, un secteur des hydrocarbures sans grandes perspectives, l’absence d’une vision économique cohérente pour assurer un développement durable, les graves conséquences de la crise de la Covid-19, des secteurs entiers sans productivité ni valeur ajoutée concrète, un front social sur le qui-vive ? Wait and see !