Mardi 22 janvier 2019
Samir Bouakouir dénonce un possible « putsch électoral »
L’aveuglement du pouvoir à nier l’impasse politique intégrale et à vanter, contre toute évidence, la « stabilité institutionnelle » conduira le pays au cœur d’une tempête dévastatrice.
En lieu et place d’une révision déchirante et la mise en œuvre d’un processus politique consensuel et constituant, le pouvoir prend le risque d’organiser des élections présidentielles dans un contexte politique extrêmement délétère.
A défaut de réunir les conditions politiques préalables à une vraie consultation démocratique, c’est à une guerre des clans, par candidats interposés, que seront conviés les Algériennes et les Algériens.
Le caractère non démocratique de cette élection autorise en effet toutes les manœuvres dilatoires et favorise toutes les tentations aventurières.
Les risques de fractures irrémédiables sont patents. Depuis des mois, les luttes internes ont pris des proportions alarmantes et n’épargnent aujourd’hui aucune institution, y compris l’Armée.
En l’absence d’arbitrage politique, il est à craindre que l’affrontement dégénère en un conflit ouvert impliquant la société avec toutes les conséquences dramatiques que l’on n’ose imaginer.
L’instrumentalisation et la manipulation des facteurs régionaux, linguistiques, ethniques ou religieux laissent augurer du pire pour le pays.
La remobilisation de cercles militaro-démocrates à l’origine du coup d’Etat de janvier 1992 autour de la candidature d’un ancien général à la retraite ou d’un ancien premier ministre de Bouteflika, ou des deux, porte les germes et renferme les « codes » d’un possible putsch électoral.
Au-delà d’un cinquième mandat, ou d’une non-candidature de Bouteflika, la succession ne dérogera pas à la règle non-écrite de l’alternance clanique. Qu’elle intervienne avant ou après le 18 avril.
La « continuité », revendiquée ici et là par les appareils et organisations du pouvoir, n’est aucunement, contrairement à la légende politique de ces derniers mois, celle d’un Bouteflika mais bel et bien celle d’un système militaro-policier qui se dissimulera à nouveau derrière une nouvelle façade civile.
En effet, à l’encontre des « analystes» de service et des « plumitifs » de circonstance, le système de pouvoir n’a jamais subi de recentrage stratégique autour de la Présidence.
Ni présidentialisation ni démilitarisation, l’Etat Civil clamé ici et là n’est qu’une grossière escroquerie politique destinée à leurrer les partenaires étrangers de l’Algérie.
Face à ces périls, cautionner un nouveau coup de force électoral reviendrait à se rendre complice d’un inéluctable désastre national.
Les patriotes et les démocrates authentiques ne doivent en aucune manière céder aux chants de sirènes des officines du système sur une prétendue élection ouverte et l’imminence d’un changement pour ne pas sacrifier les bases de principe sans lesquels la démocratie ne saurait advenir.
Face à une échéance électorale porteuse de tous les dangers, renouer avec le projet national pour parachever démocratiquement la construction de l’Etat National demeure la priorité stratégique.
Samir Bouakouir,
Ancien porte-parole du FFS.