Christophe Nobili, journaliste au Canard enchaîné, dénonce depuis août 2022 des soupçons d’emploi fictif au sein même de la rédaction de l’hebdomadaire satirique centenaire. Il pourrait être licencié contre l’avis d’autres journalistes.
Le palmipède se serait-il pris dans ses filets ? C’est à le croire, si l’on observe ce bras de fer qui l’oppose à un de ses journalistes.
Au sein de la rédaction du Canard enchaîné, Christophe Nobili n’est pas n’importe qui. C’est lui notamment qui révèle l’affaire François Fillon en 2017, des soupçons d’emploi fictif qui visent alors la femme de l’ancien Premier ministre français.
Une affaire d’emploi fictif qui touche maintenant le journal lui-même. Courant 2022, Christophe Nobili soupçonne la compagne d’un ancien dessinateur du journal, André Escaro d’avoir été rémunéré pendant 25 ans par le Canard enchaîné, sans y avoir travaillé. En août 2022, les administrateurs expliquent alors qu’André Escaro, statutairement à la retraite, a continué à dessiner pour le Canard jusqu’en juin 2022, mais la rémunération était touchée par sa femme, qui l’épaulait.
Le journaliste dépose en mai 2022 une plainte contre X et une enquête pour « abus de biens sociaux » et « recel d’abus de biens sociaux » avait été ouverte. Le 8 mars, il sort Cher Canard (JCLattès), un livre dans lequel il revient sur cette affaire qui a révélé des fractures au sein de la rédaction, sur fond de conflit entre générations.
Mise à pied du journaliste
Pour la direction, c’en est trop. Elle contre-attaque dimanche soir en mettant à pied le journaliste et annonce « une procédure pouvant conduire à un licenciement ». « Cette décision a été prise après la parution de son livre, et ses multiples déclarations à la presse et dans les autres médias », poursuivent les administrateurs. Christophe Nobili dénonce, « la violence inouïe » de cette procédure.
C’est désormais une crise ouverte. Vingt-sept membres du journal soutiennent Christophe Nobili contre ce projet de licenciement. « Quelles que soient les réserves que chacune et chacun, au sein du journal, peut avoir à propos de l’ouvrage Cher Canard […], nous, salariés du Canard enchaîné, estimons que ce projet de licenciement constitue une sanction totalement disproportionnée », écrivent-ils.
S’opposer à toute forme de censure, c’est en effet la marque de fabrique du Canard enchaîné. D’où cette question posée par le syndicat SNJ-CGT après la mise à pied du journaliste : « Le Canard enchaîné se prendrait il pour [Vincent] Bolloré ? » Avec AFP