Si vous aviez cette chance de rompre, ne serait-ce que quelques jours, avec le ramadan et le jeûne du wahhabisme-malikite gangrénant le système cérébraux-digestif, il n’y a qu’à quitter le très morose aéroport de Dar-el-Beïda d’Alger, en direction d’Istanbul sur les ailes de Turkish Airlines, la compagnie de la République de Turquie.
REPORTAGE. A l’aéroport international d’Istanbul situé sur la rive nord de la petite péninsule sur la Mer Noire, vous êtes bien dans la cité des Sept Collines bien mélangée à l’histoire des empires de Byzance et celle des Ottomans.
La petitesse nord-africaine s’anéantit au milieu d’un gigantisme architectural qui s’impose à la frontière d’un Orient qui émule un Occident sans pour autant trop l’imiter. L’image de l’Istanbul des mulets des trabendistes algériens s’efface de suite dès votre sortie de ce mastodonte ultra-moderne situé à peine à 45 km du centre historique de Sultanahmet en vous faisons traverser de paradisiaques parcs naturelles « militairement » protégés.
Il faut ajuster sa montre à l’heure du dimanche universel dans cette ville au 3000 000 mosquées dont une bonne partie sont des églises et cathédrales dont les reliques chrétiennes sont encore conservées sous de légères peintures blanches protectrices d’un patrimoine auquel les turcs sont bien fiers d’en être les héritiers.
A Alger, l’idéologie radioactive du confrérisme islamiste continue à croire que la Turquie est un Etat islamique. C’est un pays englué par l’ignorance et la vue de la seule place de l’Hippodrome au cœur du quartier historique permet de sentir que nous sommes bien dans une immense école de ce laïcisme bien oriental et marqué par une particularité bien voyante.
Des groupes de touristes européens et asiatiques foulent des marches en granit que des fidèles et des curieux ont presque effacées et ce durant des siècles, pour entrer au grand hall de la Mosquée Bleue, celle du Sultan Ahmet. Ils se dirigent vers l’immense salle des prières tout en enlevant leurs souliers en les portant dans leurs mains. Ils se mettent à observer les fidèles, ils sont à peine une quarantaine devant un imam qui récite à chaque raqraâ un verset du Coran. Des portables et appareils de photos s’agitent dans la foulée à prendre des souvenirs de chaque angle de ce somptueux édifice.
Le dôme flamboyant, autour duquel de nombreux carreaux à motifs variés et de la calligraphie bien épuisée, minimale et moderne, se dresse avec majesté. Ils se pressent de sortir en observant avec intérêt l’aide des femmes barricadées avec de basses séparations en bois. Tout ce spectacle est harmonieusement organisé par une séparation entre les fidèles qui pratiquent leur tarawih sans se préoccuper du reste de l’univers.
A quelques centaines de mètres, la merveilleuse Haga Sophia, la Sainte-Sophie que l’on peut voir tel un haut-lieu saint de la coexistence de deux prophètes et leur univers bien opposé. Plus loin, les malheureuses cohortes des tours opérateurs ignorent que la plus intéressante des mosquées de la ville est celle du Sultan Suleymane Kanouni, dite Suleymanye qui, dans une partie de la ville s’élève avec grandeur sur le golfe du Corne d’Or.
A l’intérieur et avant de se diriger vers la grande salle des prières, il faudrait faire une petite visite aux sarcophages élevés sur les tombes du sultan, de sa sœur, de son frère et de sa fille. A l’extérieur, non loin de la chambre funéraire du sultan, une construction mitoyenne, elle indique la tombe de la fameuse Huyem ou Roxanne qui a été immortalisée dans l’imaginaire féminin par la série télévisée turque.
On ne risque pas d’être bousculé par la masse de touristes, ils sont ailleurs bien loin. Sur les lieux, au son du dikr qui venait de la grande salle des familles sont regroupées autour de thermos de thé et des plats de confiseries bien miellées et pas trop sucré. Un petit groupe d’étudiantes s’adonnent aux selfies. L’une d’elle avec un très beau khimar en soie grille une ultime cigarette avant de rentrer à la maison.
A la question de voir certains visiteurs turcs ne pas pratiquer la fatiha face aux tombes de ces dignitaires musulmans, la réponse est un peu plus claire : « Ici, la levée des deux mains n’est pas une exigence. Nous l’évoquant en silence dans notre cœur et notre esprit ».
Dans la très belle et immense salle des prières, des fidèles sont regroupés autour de leur imam invoquant des dikr religieux et à la fin de la cérémonie ils dégustent des halwa traditionnelles en prenant du thé bien bouillante
A Istanbul, si un taxieur kurde musulman vous rappelle avec insistance et gestes catégoriques qu’en Turquie, il n’y a jamais eu de peuple turc, mais un ensemble de nations disparates et variées allant de la Méditerranée à la frontière du Ouïgour chinois, il faut tout juste apprécier les propos en évitant de contrarier son nationalisme pro-kurde. Si un autre, vous fait comprendre qu’en Turquie, il y a 98 % de musulmans et 2 % de « restes » limitez-vous au terme générique et salvateur de « Allah ye Barek !» sans trop appuyer son fondamentalisme kurde. Les dissidences au sein du PKK ont totalement aliéné la cause du Kurdistan.
L’islam de Turquie est totalement ignoré par les Algériens du wahhabisme malikite, tout comme ils ignorent encore que durant la colonisation française, il y avait 03 muftis à Alger, un hanafite, un malikite et un ibadite.
La membrane idéologique du salafisme politique mijote à la sauce étatique aveugle tellement qu’il est impossible au plus imam algérien de concevoir que la république d’Atatürk compte 75 % de musulmans qui se partagent en hanafites et adeptes du rite maturidite, originaire de Samarkand en Ouzbékistan. Ce dernier est une école théologique issue de l’Achaârisme, rival de la théologie rationaliste des Mutazilites. A leur côté, 12% sont des fidèles et adeptes de la tarîqa Bektâchî-Alaouite venue de l’ancienne Albanie royaliste. Le reste de la population se partage les rites Jaafari, Chafiite, Coraniste et Achaâriste, au sein desquels 30 % de jeunes qui se déclarent « sans croyance » selon un sondage turc de 2020.
Cette mosaïque confessionnelle nous la retrouvons dans l’ensemble de cette Méditerranée orientale jusqu’à la mer Caspienne. A Istanbul, un microcosme parmi d’autres est représentatif de cette richesse culturelle, le Grand Bazar où l’on retrouve une joaillerie tenue par deux chrétiens d’origine syrienne : Abdallah le catholique et Robert de l’église orthodoxe grecque.
Le prénom du premier est une réelle aberration qu’il doit au régime de la féodalité républicaine des Assad. En dehors de cela, il est tout fier de vous présenter sa collection de cartes de visites de familles algériennes qui s’approvisionnaient chez lui en or, platine et pierres précieuses durant 40 ans. « Il y a surtout une richissime famille de Tlemcen qui venait chaque année acheter plein de bijoux pour tous ses membres », dira-t-il avec grande fierté. D’autres, originaires de Constantine, d’Oran, d’Alger, d’Annaba et de bon nombre de villes algériennes laissent derrière elles une très belle impression d’excellents connaisseurs et de payeurs chichement généreux.
Sur cette question de la présence en Turquie d’un bon nombre de nos « compatriotes », il est intéressant de savoir qu’au hasard des rencontres que la ville d’Antalya, sur la rive sud de la Turquie est la nouvelle concentration d’Algériens de toutes les catégories et beaucoup d’entres eux ont transité par Istanbul. Certains qui sont restés dans l’ex-capitale ottomane ont préféré investir dans de grands magasins de luxe dans le quartier de Teksim.
C’est à Istanbul aussi que la finance de l’ex-FIS a fait le bonheur des banques turques et d’autres compradores islamistes algériens se joindront à eux pour alimenter le réseaux des superettes et petits bazars d’Algérie. Les plus malheureux se sont ces jeunes harragas qui en tentant de traverser la frontière bulgare, ignorant les dangers des monts forestiers de cette région sont tombés entre les mains de l’armée et des gardes-frontières qui leur ont fait subir de lourds sévices et reconduit aux autorités turques, ils passeront par l’un des enfers carcéraux de Turquie : Edine.
On évoque encore des cas de jeunes Algériens menés de leur passeport et voulant passer les frontières de l’Europe, finiront par être la proie favorite de leurs passeurs qui les renverront à la maffia locale. On leur séquestre durant toute une année leur pièce d’identité et ils devront rejoindre les réseaux de drogues et de prostituions ou encore de la criminalité organisée. « Les Algériens sont très appréciés sur ces questions. Ils travaillent avec sérieux et courage » aime-t-on nous faire entendre. Avec de tels réseaux, Istanbul et le reste du pays renouent avec la tradition bien historique du « devchirmé » ottomane, dont la séquestration des jeunes enfants des villes et villages des territoires conquis et en faire une armée de mercenaires pour soumettre d’autres nations à l’Empire.
Un autre visage de l’Algérie se dessine à nos regards. C’est entre la Mosquée Bleue et le musée de l’université de Marmara que l’on découvre que le petit-fils d’un des compagnons de l’émir Abdelkader est bien installé à vous accueillir dans son magasin de confiseries traditionnelles et ses étalages d’épices et de préparations de thés variés enfin toutes prêtent à l’utilisation.
Saïd Oudjani, ce Syro-Algérien est heureux d’arborer son extrait de naissance délivrer par les AE algérienne et vous montre avec une fier insistance qu’il est de Mekla de Tizi-Ouzou. « Mon grand-père est retourné en Algérie dans son village natal de Kabylie. Je suis allé une fois et je retourne quand c’est possible, et j’ai beaucoup d’amis là-bas même à Alger. C’est un plaisir de se retrouver dans son pays », rétorque-t-il dans un parfait algérien. De l’autre côté du magasin, sa grand-mère et dans un anglais à l’accent turc, vous invite à venir prendre le ftour du ramadan tout en vous indiquant « qu’ici tout est halal ni alcool ni porc, et soyez les bienvenus ». Le ton est à la tolérance et au respect des valeurs et des croyances de chacun. Le jeune et robuste ami turc de notre Algérien de Kabylie, vous choquerait – peut-être ! – en vous disant qu’il venait tout juste de terminer sa prière du Asr et qu’il ne fait pas le ramadan.
Le Bosphore n’est plus à l’heure des mythes littéraires d’un Pierre Loti ou celle d’Agata Christie. Le Français est certes très respecté à Istanbul et son nom est inscrit dans une rue, un café sur les hauteurs de la ville ou porté sur quelques établissements scolaires. Il est surtout li é à sa venue à Constantinople au début du XXe siècle avec une délégation d’experts militaires français à la demande du sultan ottoman de l’époque intéressé par l’artillerie de la puissance coloniale.
Le détroit est une des cartes maîtresse de la politique étrangère de la Turquie, on déverse quelques 3000 containers de diverses marchandises dans les ports d’Istanbul et ceux de la mer intérieure de Marmara, une mer bien amère selon la dénomination turque, mais aussi celle par qui transit de nombreuses richesses déclarées ou non faisant le bonheur de la grande bourgeoisie compradore turque. Ces quantités inestimables de marchandises en produits pétrochimiques notamment, sont destinés à des marchés parallèles allant jusqu’à financer des activités militaires de toutes sortes.
S’il y a un lieu où l’on se rassasie de voir le train de vie de cette bourgeoisie impérialiste turque, il y a lieu de traverser le tunnel de 100 mètres de profondeur sous le détroit du Bosphore et se rendre à la colline de çamlica du côté asiatique de la ville. Vous remontez la très modernes tours des télévisions de 587 mètres de haut au-dessus de la mer et au 34e étage vous avez droit à l’époustouflante vue panoramique du Grand Istanbul, mais aussi des superbes villas avec piscine regroupées à l’américaine dont celle du président Erdogan durant son passage de maire de la ville. C’est sur cette colline qu’il érigea sa grande mosquée de 90 millions de dollars US, une « merveille » dans l’art de la bétonnière !
A quelques heures de la fin de l’hégémonie de l’AKP, de la finance des pays du Golfe, l’exhibitionnisme phallique des tours d’affaires et des logements de grands luxes élevées ici et là, démontre qu’il y a eu une certaine dynamique économique et financière qui envierait certaines capitales européennes soumises à la gangrène du capitalisme sauvage.
Le building du géant Collins et celui du groupe Trump font partie du paysage urbain, mais ne pourront occulter qu’en février dernier l’inflation est passé à 121,98 % selon l’institut privé des statistiques turc ENAG alors que les officiels ne parlent que des 67,07 %, ne tenant pas compte de la dévaluation astronomique de la lire turque que touche un cadre moyen par exemple à Istanbul.
Sur les 1200 euros, le simple cadre de la municipalité de cette ville paye 500 euros pour le seul loyer, une somme qu’il ajoutera aux autres charges entre eau, électricité et denrées alimentaires qui ne cessent d’augmenter de mois en mois. Si le salaire minimum est de 500 euros, que peuvent permettre les 17 602 lires turques comme descendance à une existence humaine lorsque nous observons que l’ensemble des magasins de tous genres d’Istanbul ne sont fréquentés que par des Russes, des Italiens et quelques Asiatiques, les Stambouli sont presque invisible dans ses lieux.
Il y a une certaine misère en Turquie qui ne se révèle pas au grand étalage, lorsque vous payez votre café turc ou votre jus de grenade, vous saisissez pourquoi le citoyen préfère son Boza à base de pois chiche et de cannelle (il est royalement délicieux, pour l’occasion !). Pour y faire face, le gouvernement d’Erdogan « Efendi » préfère étaler son armada policière au milieu des places publiques et dans les rues d’Istanbul. On ne parle pas de politique à Istanbul. On le fait dans un grand silence en vous disant que même si un juif extrémiste se présente aux élections, l’essentiel qu’il fasse du bien pour le bien être de tout le monde. Naïveté infantile qui montre bien le profond marasme qui y règne, face à la mauvaise distribution des richesses de la Turquie qu’avait édifiée Atatürk.
Les 24 milliards de dollars qu’avait ingurgité Erdogan « Efendi » aux municipalités dans son budget annuel 2024, ne lui ont pas permis de corrompre quoi que ce soit, le vote a eu lieu de 8h30 à 17h en cette journée du 31/3/2024 et c’est la géographie politique turque qui s’est mise le lendemain à clignoter en rouge pourpre et en bleue. L’ampoule électrique qui est le logo de l’AKP s’est finalement éteinte devant le retour des kémalistes du CHP, des démocrates kurdes et autres libéraux.
Mohamed-Karim Assouane, universitaire
(( « Si vous aviez cette chance de rompre… avec… wahhabisme-malikite gangrénant le système cérébraux-digestif, il n’y a qu’à quitter le très morose aéroport de Dar-el-Beïda d’Alger, en direction d’Istanbul (…ou) la finance de l’ex-FIS a fait le bonheur des banques turques et d’autres compradores islamistes algériens se joindront à eux pour alimenter le réseaux des superettes et petits bazars d’Algérie. (…) »
C’est ça la Oumma; enfin, un petit aperçu , une petite mise en bouche.
Ps. ((« Les plus malheureux se sont ces jeunes harragas qui en tentant de traverser la frontière bulgare, ignorant les dangers (…) On leur séquestre durant toute une année leur pièce d’identité et ils devront rejoindre les réseaux de drogues et de prostituions ou encore de la criminalité organisée. « Les Algériens sont très appréciés sur ces questions. Ils travaillent avec sérieux et courage » aime-t-on nous faire entendre. »))
Que rajouter de plus apres ce témoignage d’amour et de fraternité à rendre fièrs même le plus sceptique de nos compatriotes homme ou femme. Ceux qui pensent à tort qu’on est mal vu ou mal apprécié a l’étranger, notamment chez nos frères du moyen orient, doivent se taire a jamais, après avoir pris pour leur garde.
PS. Juste faudrait peut être corriger et remplacer le moment » séquestrer » par un autre plus juste, comme par exemple : « maintenir en qualité d’invités ». Aussi, dire éventuellement : On leur garde chaleureusement, durant toute une année, leur pièce d’identité, le temps de faire découvrir les réseaux de drogues et de prostituions ou encore de la criminalité organisée, pour leur faire des stages et leur apprendre des métiers d’avenir avant de les laisser poursuivre leur chemin chargés d’amour et de diplômes…
Machallah.