Téhéran, Qom, Ispahan, Mashhad… Ces noms évoquent la richesse d’une civilisation millénaire, et non un terrain de confrontation militaire. Pourtant, dans la nuit du 13 au 14 juin 2025, plusieurs sites du nord de l’Iran ont été ciblés par des frappes israéliennes. L’attaque, qui n’a pas fait de victimes civiles selon les autorités iraniennes, a bouleversé les plans de nombreux voyageurs maghrébins, pris dans une situation géopolitique qui les dépasse.
Parmi eux, le journaliste et animateur tunisien Ala Chebbi. En séjour touristique avec son épouse, il a livré un témoignage rassurant, mais non sans inquiétudes.
« Là où nous sommes, tout est calme. Les Iraniens continuent leur vie, et les touristes aussi. Nous avons même croisé des Américains. » Alaa Chebbi sur Express FM, le 14 juin
Le couple se trouve loin des zones visées, dans l’ouest iranien, mais reste bloqué dans le pays, la fermeture de l’espace aérien ayant cloué au sol tous les vols commerciaux. Chebbi espère rejoindre la Turquie par voie terrestre, une solution envisagée par d’autres ressortissants tunisiens… et algériens.
Discrète mais réelle : la présence algérienne en Iran
Les autorités algériennes n’ont pour l’heure émis aucun communiqué officiel. Mais selon plusieurs sources, notamment des agences de voyage contactées à Alger, des Algériens se trouvent bien en Iran, certains pour des circuits culturels, d’autres pour des pèlerinages à Qom ou Mashhad.
« On avait plusieurs groupes prévus en mai-juin. Certains ont annulé à la dernière minute. Mais il y en a encore là-bas. »
Les familles de ces voyageurs, notamment dans l’est algérien, multiplient les appels aux consulats. Mais aucune cellule de crise n’a encore été activée officiellement à ce jour.
La diplomatie culturelle prise de court
Depuis des mois, l’Iran multiplie les invitations officielles à destination des pays du Maghreb. Journalistes, influenceurs, écrivains et religieux ont été conviés à « découvrir l’Iran authentique ». Ala Chebbi faisait partie de ces visiteurs curieux, séduits par le patrimoine perse et les paysages du plateau iranien.
Une autre délégation tunisienne, attendue cette semaine à Téhéran, a vu plusieurs de ses membres décliner à la dernière minute. Parmi eux, le journaliste Samir Ouafi, qui a tenu à exprimer publiquement son soulagement :
« Je remercie les organisateurs pour l’invitation, mais j’ai préféré rester à Tunis. Le contexte était trop incertain. »
Une fascination qui résiste à la tension
Malgré les tensions, l’attrait de l’Iran reste intact. Chez les Tunisiens comme chez les Algériens, la culture perse, la philosophie chiite ou encore la poésie soufie exercent une réelle fascination. Certains voyageurs algériens, souvent de confession chiite ou amateurs d’histoire islamique, considèrent même leur séjour comme un pèlerinage spirituel.
Mais l’épisode de cette semaine montre combien cette fascination se heurte aux réalités de la géopolitique régionale. Le rêve d’un Iran apaisé, accessible, s’est heurté aux missiles d’un conflit qui, une fois de plus, déborde ses frontières.
Que faire en cas de blocage en Iran ?
Des numéros d’urgence ont été activés par l’ambassade de Tunisie. Du côté algérien, les familles appellent à des mesures rapides.
Ala Chebbi, malgré la tension, continue d’incarner cette curiosité méditerranéenne qui regarde l’Orient avec intérêt et respect. Pour lui comme pour les Algériens présents sur place, la priorité est désormais le retour. Un retour que chacun espère rapide, sécurisé — et sans nouvelles secousses.
Mais au-delà de la situation d’urgence, cette affaire rappelle aussi combien les liens culturels entre l’Algérie et l’Iran, souvent tissés dans la discrétion, sont bien réels. Des échanges parfois religieux, parfois intellectuels, toujours empreints d’un désir de comprendre. Et ce sont peut-être ces ponts, fragiles mais persistants, qui survivront aux frappes et aux silences diplomatiques.
Djamal Guettala