28 mars 2024
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Algérie : une cryptocratie entre anathème, affabulation et mythomanie 

DECRYPTAGE

Algérie : une cryptocratie entre anathème, affabulation et mythomanie 

« La victoire obtenue par la violence équivaut à une défaite, car elle est momentanée ». Mahatma Gandhi

 On assiste ces dernières semaines, à une répression féroce et à de véritables rafles (rappelant un passé pas si lointain) de la part du pouvoir contre des Algériens qui manifestent pacifiquement pour plus de dignité, de liberté, et une vraie république démocratique. 

C’est que le Hirak puisant sa force dans sa non-violence a réussi à rassembler les algériens toutes tendances confondues, devenant ainsi, aux yeux des « parrains » de l’Algérie, une réelle menace. 

Il provoqua une onde de choc si forte qu’elle fit tomber bien des préjugés et tabous sciemment entretenus par le « pouvoir » depuis 1962 !

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Et pour la première fois, et dans les rues, les algériens brisèrent le plafond de verre et clamèrent haut et fort ce que tout le monde pensait tout bas !

L’Algérie est bel et bien une cryptocratie. Le vrai pouvoir se trouve entre les mains des généraux et le « Président » qu’une simple potiche !!!Tout le reste n’est que sophisme grossier. 

Le Hirak , a ainsi jeté les bases d’un vrai débat citoyen en déclarant d’emblée  « état civil et non militaire » ! 

Conscient du danger que cela représente pour sa survie une telle prise de conscience, le pouvoir fit semblant au début, de jouer le jeu de « l’ouverture », de laisser faire, en n’envoyant pas ses barbouzes charger les manifestants. Il a tablé sur un éventuel essoufflement du mouvement dans le temps et s’en sortir ainsi à bon compte comme d’habitude.

Mais c’est le contraire qui se produisit : le Hirak ne se laissa pas démobiliser malgré la pandémie et tous les empêchements par les services de sécurité (blocage des routes, menaces, chantages etc.). Il est même sorti renforcé.

Constatant l’échec de sa démarche, le pouvoir succomba à ses habitudes ataviques ; et réagit comme à l’accoutumée par une répression brutale et des dépassements inouïs pour étouffer définitivement ce soulèvement populaire.

Pour faire diversion et créer un climat de peur, Il va jusqu’à créer de toutes pièces des menaces fictives : dangers extérieurs, intérieurs, attentats terroristes imminents, etc.

Et comme si cela ne suffisait pas, et pour terroriser davantage les algériens, il va jusqu’à user dans un pamphlet paru dans la dernière revue militaire El Djeich (juin 2021) d’un vocabulaire menaçant, où il est difficile de démêler le vrai de l’imaginaire. Une fantasmagorie qui laisse pour le moins perplexe ou s’entremêle pêlemêle : Dracula, vampire, diable, Satan, suceur de sang du peuple etc., digne des romans d’horreur d’un Bram Stoker ou de Mary Shelley ! Cela donne un aperçu sur la vraie nature schizophrénique du pouvoir.

Tous ces Algériens qui sortent dans la rue depuis plus de deux ans revendiquent pacifiquement les choses les plus élémentaires et légitimes : liberté, justice, transparence dans la gestion des affaires de l’état, élections libres et transparente ! Ils veulent être des citoyens et non des « objets ».

Un constat patent et pas une simple vue de l’esprit ou partisane : des millions d’Algériens manifestaient contre ce pouvoir et pas seulement quelques milliers comme essaie de le faire passer le premier mandataire du système.

Mais ce pouvoir, se murant dans un autisme politique, ne veut rien entendre. Il est convaincu que le seul moyen de contrer tout débat sain et pacifique remettant en cause sa mainmise totale sur l’Algérie : c’est la répression.

Et ce ne sont surtout pas des élections législatives qui changeront quoi que ce soit !

Une étude allant dans ce sens, très intéressante a été faite par Erica Chenoweth(1) avec Maria Stephan(2)  spécialistes américaines de politique internationale. Elles sont connues pour leurs recherches sur les mouvements de résistance civile non-violents et publiée dans leur livre « Why Civil Resistance Works: The Strategic Logic of Nonviolent Conflict ».  

Elles ont étudié les principales campagnes, violentes et non violentes, pour des changements gouvernementaux dans le monde au XXe siècle (entre 1900 et 2006). 

Elles ont analysé plus de 200 révolutions violentes et plus de 100 campagnes non-violentes. 

Selon les données de recherche qu’elles ont réunies, elles sont arrivées au résultat qu’aucun gouvernement ne peut survivre si seulement 3.5%  de la population se dresse pacifiquement contre lui. 

Leur conclusion est sans appel : quels que soient leurs objectifs et le type de pouvoir qu’elles affrontent, les insurrections non violentes parviennent à leurs fins trois fois sur quatre, contre une fois seulement pour les violentes. En outre, les mouvements de résistance civile offrent une bien meilleure garantie d’un avenir démocratique. 

C’est-à-dire dans le cas de l’Algérie moins de 1.5 million de manifestants !!! Ce qui est très en dessous de ce qu’arrive à mobiliser le Hirak !

Comme toute dictature, la chute de ce pouvoir est inéluctable. Mais reste le facteur temps, qui varie d’un pays à l’autre, et dépend aussi d’autres éléments : situation géostratégique, socioculturelle, religieuse, ethnique etc. qui pourront accélérer ou ralentir (mais jamais empêcher) le processus de l’effondrement de pareilles dictatures. 

Le boycott des élections législatives du 12 juin 2021 vient confirmer le rejet total et sans appel de ce pouvoir (militaire) par la majorité écrasante des Algériens (plus de 80%). Comme disait Abraham Lincoln « On peut tromper une partie du peuple tout le temps et tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps » 

B. R.

Notes

  1. Erica Chenoweth : Ph.D. is the Frank Stanton Professor of the First Amendment at Harvard Kennedy School and a Susan S. and Kenneth L. Wallach Professor at the Radcliffe Institute for Advanced Study. Foreign Policy magazine ranked Chenoweth among the Top 100 Global Thinkers in 2013 for their efforts to promote the empirical study of nonviolent resistance.

  2. Maria Stephan : is an American political scientist. She is the former Director of the program on nonviolent action at the United States Institute of Peace. She studies authoritarianism, protest, and the effectiveness of violent and nonviolent types of civil resistance.

 

Auteur
B. Rachid, consultant

 




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