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Avancez en arrière s’il vous plaît !

REGARD

Avancez en arrière s’il vous plaît !

Parlant de l’Algérie de nos jours, un internaute a exprimé récemment dans un post sur les réseaux sociaux toute sa frustration, sa rage et ses désillusions à propos de cet avenir flou, le nôtre, qui se dessine sur les teintes blafardes de l’incertitude, du désespoir et du pessimisme : « Nous avons le cerveau qui coince. Il coince toujours, insiste-t-il, aux mêmes encoignures pour nous empêcher de vivre au moins le peu de présent qu’on a entre deux systoles ».

Cet internaute, médecin de profession toujours en exercice, a-t-il vraiment tort, quand on voit le degré avancé de la déliquescence auquel sont arrivés nos organismes culturels, nos institutions politiques, nos associations, les comportements de nos rentiers, nos mentalités tout court ?

La jeunesse se sent trahie, affaiblie et abandonnée à son sort, après avoir repris du poil de la bête au moment du Hirak. Un Hirak qui, s’il a échappé aux menées insidieuses de la contre-révolution, a eu, hélas, toute la poisse d’être mis en veilleuse par une « saloperie » de virus, venu des coins les plus reculés de la Chine! Et voilà qu’en conséquence tout pourrit chez nous, y compris ce souffle de liberté qui nous a donné, au départ, de petites promesses de changement.  

« Avancez en arrière s’il vous plaît! », disent les receveurs des bus algérois dans une sorte d’oxymore, quand les passagers encombrés, debout, dans l’allée principale du véhicule, peinent à libérer  des places pour ceux qui montent. De mal en pis, notre pays, comme à l’état de ce bus-là, respire difficilement, en « avançant en arrière » (l’usage de cet oxymore ici vaut toute la symbolique de nos malheurs). 

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Voici un autre  témoignage, non moins reluisant, raconté sur Facebook par un jeune caricaturiste, dont le talent est reconnu sous d’autres cieux, mais qui peine à trouver son élément parmi les siens, après son retour au bercail pour une installation définitive : « L’un de mes amis, écrit-il, est déjà parti à l’étranger, et moi je me « bédouinise » ici avec la médiocratie et des mauvaises graines qui m’entourent à longueur de journée » et comme un autre internaute essaie de le raisonner, le caricaturiste plus rageur, continue sur sa lancée :  » H’raguete rouhi b’rouhi » (je me suis fait arnaquer moi-même!).

Car, même le médiocre poste qu’on m’a octroyé ne me convient pas du tout, si l’on regarde tout le bagage culturel que j’ai acquis durant mes séjours interculturels effectuées un peu partout en Europe, au Canada et aux Etats Unis ! »

« Patientes-toi un peu, et peut-être, tout ira pour le mieux dans les années à venir! » intervient un autre commentateur, de toute apparence, fonctionnaire dans un établissement public, pour apaiser l’amertume du caricaturiste. « Je ne sais pas si tu vas me croire ou non : à l’heure où j’écris ces lignes-là, je suis SDF !

Eh oui ! On dirait que le monde s’est renversé contre moi :  je me loge là où je bosse, jusqu’au point où un planton me rend visite dans mon bureau et me dit, un brin moqueur : « Andak berd h’na, ana aândi chauffage fi dari » (tu as froid ici alors que chez moi, j’étouffe de chaleur grâce à mon chauffage). Ô quel monde  injuste!

Voilà ce qui me pousse à m’organiser avec les deux sous que j’ai amassés ici et à programmer mon départ définitif. Je m’éloignerai de toute cette incompétence, avant que mon niveau baisse et que je tombe, moi aussi, dans cette médiocrité érigée en système bis dans mon propre pays ! » 

Auteur
Kamal Guerroua

 




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