18 avril 2024
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Carburant, grisbi et mauvaise manière

“Quand la morale fout le camp, le fric cavale derrière.” Jacques Prévert

Tous ceux qui possèdent une voiture connaissent le prix d’un plein de carburant lorsqu’ils se rendent dans une station-service et savent ce que leur coûte ce combustible qui pèse désormais beaucoup sur leur pouvoir d’achat.

Les prix ont commencé à se faire sentir lorsque les premières mesures pour faire reculer la pandémie du Covid-19 ont été prises. Et l’invasion de l’Ukraine a accéléré le processus puisque l’Europe occidentale, Allemagne en tête, ont toujours dépendu du géant russe pour l’importation du pétrole ainsi que du gaz. Faire un plein aujourd’hui peut revenir à plus de 100 € que ce soit pour l’essence ou le gasoil.

Pour faire un geste politique et parce que les élections présidentielles et législatives pointaient leur nez, il convenait pour l’exécutif de faire un petit geste. Le gouvernement a pensé au plus simple : une réduction de 18 centimes par litre de carburant. C’est toujours bon à prendre et c’est une évidence. Mais là aussi, le gouvernement s’est mis le doigt dans l’œil, et profondément, pour nous faire gober la pilule.

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D’abord parce  les 18 centimes dont il s’agit profitent à tous les automobilistes, donc à ceux qui sont payés au SMIC et à ceux qui dirigent une grande entreprise ou qui ont un emploi de haut-fonctionnaire, à ceux qui conduisent une vieille guimbarde qui date de Mathusalem et à ceux qui pilotent une Lamborghini flambant neuve. Cette réduction s’applique à des chômeurs qui doivent utiliser leur voiture brinquebalante pour trouver du travail ou des richissimes propriétaires d’un 4X4 de luxe qui descendent vers la Côte d’Azur par l’autoroute du soleil pour rejoindre leur villa de vacances.

Récemment, dans un journal d’importance nationale, trois grands patrons de très grandes entreprise, ceux d’Engie, de Total Energies et d’EDF, ont publié une tribune dans laquelle ils nous exhortent à consommer l’énergie qu’ils produisent avec parcimonie sinon avec modération. En dehors du fait que ces entreprises n’ont prospéré et ne se sont enrichies que parce que nous n’avons jamais eu d’autre choix que d’acheter leur production et que leurs actionnaires ne peuvent se gaver que parce que nous n’avons pas d’autres moyens que de nous soumettre à leurs diktats, il est toujours difficile d’accepter ce genre d’oukase.

Le plus beau, c’est que cette tribune a été publiée pour nous culpabiliser. « Economiser l’énergie, c’est augmenter le pouvoir d’achat et c’est aussi réduire les émissions de gaz à effet de serre », nous apprend le PDG de Total dont la rémunération annuelle approche des 6 millions d’euros et qui ne dépense aucun centime ni pour l’achat des ses voitures et encore moins pour son carburant. Sans parler de ces pipelines, chauffés construits pour acheminer vers nos stations le précieux carburant, qui traversent plaines et océans et qui émettent des millions de tonnes de CO2 annuellement. Ou quand la dignité ne fait plus partie du discours irresponsable.

Allez, bonne continuation mais n’oubliez surtout pas d’éteindre la lumière des toilettes en sortant, d’aller au travail sur votre vélo, de débrancher l’ordinateur et de vous faire cuire un œuf au soleil.

Kamel Bencheikh, écrivain

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