Cette année est la soixantième année d’indépendance et d’existence de la République algérienne démocratique et populaire, selon la vulgate officielle.
1992 fut l’année du trentième anniversaire de l’indépendance ainsi que celle qui marqua le début d’une guerre civile qui s’étala sur une quinzaine d’années. Un cauchemar que le peuple algérien a subi debout.
30 ans après l’Algérie, la « nouvelle Algérie » comme l’on aime à la qualifier dans certains milieux, est toujours en guerre contre elle-même avec plus de 300 détenus d’opinion dans les geôles de cette nouvelle République. Triste palmarès pour ce pays devant lequel le monde entier était en admirable au printemps 2019. Le peuple du Hirak/Tanekra, fier et orgueilleux sorti réclamer du pouvoir un changement profond à la hauteur des aspirations de Novembre 1954.
Tandis que de l’autre côté de la Méditerranée, la France commémore sans célébrer bien sûr, le 19 Mars 1962, le cessez-le-feu, aboutissement des longues négociations d’Evian ici en Algérie, dans le camp du peuple vainqueur on fait le mort. Pire, on cultive l’ambiguïté historique.
Comme l’a si bien souligné le Président français, Emmanuel Macron, passivité et immobilisme ont caractérisé l’attitude du pouvoir algérien sur la question mémorielle depuis l’indépendance. C’est le moins qu’on puisse dire sous le règne de Tebboune.
Mis à part le récit tronqué et déformé d’une révolution qui fut grande, au service d’une propagande langue de bois et dépassée, le pouvoir algérien s’est complu dans le déni, le rejet et souvent l’oubli en ce qui concerne la chose historique et mémorielle depuis 1962.
Aujourd’hui encore, 60 longues années après, le pouvoir algérien est figé face à sa mémoire et son histoire.
Expositions photos, documentaires, court métrages, longs métrages, livres, colloques, forums, réunion à l’Elysée sont réalisés dans l’hexagone en ce mois de mars 2022 tandis qu’en Algérie mis à part un communiqué laconique et creux du chef de l’Etat sur la mémoire diffusé par l’APS c’est un silence abyssal du gouvernement et de l’Etat. Aucun documentaire, aucun film, pas d’ouvrages, hormis ceux des rares historiens courageux qui ferraillent contre la censure et le black-out qui frappe les archives du FLN/ALN.
Le gouvernement a brillé par son silence. Aucune initiative, pas de colloque national, aucune festivité officielle. A croire que ceux qui dirigent l’Algérie ont peur des morts de cette grande guerre d’indépendance !
La classe politique, si sourcilleuse est elle aussi aux abonnés absents. Il y a décidément comme un immobilisme mortifère qui paralyse le pays.
Le 19 Mars 1962 se résume-t-il donc rien qu’à ce terne message de Monsieur le Président ?
Cette date est la date de naissance de la République algérienne qui a aujourd’hui soixante ans. Ce qui est peu pour une nation mais qui peut être considéré comme long au regard de toutes les épreuves vécues par ce peuple de cette même nation durant ces soixante ans.
Alors qu’attendez-vous Monsieur le Président pour fêter et non célébrer ce 19 Mars et ces soixante années d’indépendance ?
Sofiane Ayache
Howard Zinn, le grand historien de la classe ouvrière étatsunienne, écrivait : « tant que les lapins n’auront pas leurs propres historiens, leur Histoire sera racontée par les chasseurs ». Dieu merci, nous commençons à produire nos propres historiens, qui racontent notre propre Histoire. Même si, pour l’instant, seuls nos compatriotes de la diaspora disposent à la fois de la liberté d’expression et de la documentation nécessaire pour ce faire.
Tebboune attend le 1er et le 2 novembre 2022 pour offrir la révolution algérienne, celle de Abane (entendre de la Soummam) à la ligue arabe. Comme Abdelkader, rapatrié par Boukherrouba et sa clique, pour l’imposer comme fondateur de l’« Etat-Nation », Tebboune entend terminer cette manœuvre puante en l’inscrivant dans le giron de la ligue arabe comme patrimoine commun à tous les arabes.