Jeudi 21 novembre 2019
Crever l’abcès de la traîtrise en cours
Il faut crever l’abcès, en pointant du doigt l’origine du malaise. La corruption n’est pas la cause, mais la face visible de l’iceberg. Nos institutions, déjà frêles et sans consistance, n’ont pas résisté à l’avalanche des dégâts qui les a submergés. Si elles ont facilement cédé, c’est parce qu’elles n’ont pas d’assise forte ni d’architecture viable à même de les maintenir debout, face à l’orage qui les frappe.
La culture de l’homme providentiel, sauveur éternel de la nation, conjuguée à celle de « l’Etat-providence », pourvoyeur sans contrepartie de biens et de services à la collectivité, ont tué avec le virus de la rente et cela durant plusieurs décennies, toute idée de citoyenneté chez le petit-peuple.
Celui-ci a appris à attendre toujours ce « sauveur », ce « surhomme », ce « Zaim » qui sort du lot, qui lui fait des discours-fleuve sur le nationalisme et le socialisme à la télé, qui lui parle sans jamais finir du patriotisme et de la révolution, qui lui cite sur le bout des doigts les méfaits de la colonisation et de la France, qui lui rappelle cette fierté d’être Algérien dans toutes les circonstances et malgré toutes les tempêtes, qui le « réprime » au nom de la discipline et des valeurs maîtresses de la nation, tout en l’assurant de son attention et de sa protection de père.
Or, les faux modèles du « zaimisme » qu’il a connus n’ont fait malheureusement que dans la surenchère et la division, en achetant sa paix contre les sous des barils du pétro-dollar. Ils ont brisé les idéaux révolutionnaires, bradé l’économie du pays et exploité son sous-sol pour leurs seuls intérêts, détruit les principes fondateurs de l’Etat moderne, à savoir : la citoyenneté et la démocratie, dévié toute une jeunesse de la véritable trajectoire d’édification nationale, en la poussant soit au larbinisme et à l’assistanat, soit à l’exil. Les retombées de tels agissements ont creusé le fossé qui séparent nos dirigeants du peuple jusqu’au point où ce dernier réclame une seconde indépendance! Si les récriminations sourdes de la société, enfouies par crainte de représailles politiques ou bureaucratiques, ont pu voir le jour, c’est que le pourrissement a atteint le stade de « l’intolérable ».
Se taire aujourd’hui, c’est donner sa langue au chat, c’est accepter que l’on nous colle piteusement au dos l’étiquette de la traîtrise.
La société dit non au report sine die de la solution démocratique : le retour au choix du peuple, le seul décideur de sa propre destinée. Elle s’est libérée de sa peur et veut enterrer à jamais ce qui l’a ankylosé et l’a frappé dans sa santé et son moral.
D’où la conclusion suivante : pour juguler les effets de la crise actuelle, il n’est plus utile d’acter une contre-révolution par le biais des médias lourds d’Etat, mais de procéder dans les meilleurs délais à une « contre-réforme », totalement différente de celle du régime du passé. Monter une frange de la population contre une autre, en espérant récolter de bonnes dividendes, n’est qu’une pure illusion. Décidément.