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Enseignants, nos « vies » pour nos élèves, notre honneur pour nous 

Opinion

Enseignants, nos « vies » pour nos élèves, notre honneur pour nous 

« On ne peut pas réformer l’Education nationale sans les enseignants » Lionel Jospin

Comme beaucoup de mes collègues, il me reste, quoi, trois, quatre, cinq ans à fouler et à sillonner encore l’estrade pour pouvoir prétendre à la retraite « légale »? Je n’en sais plus très bien. Je ne compte plus les années… Celles que j’ai passées en classe, dans les couloirs et la cour de mon école, Je ne compte pas les jours, même les périodes de vacances que j’ai passés avec mes élèves pour des activités artistiques. Leur faire aimer le théâtre, la chanson, la musique… Les arracher à la monotonie et à la discipline « épuisantes » de la classe. Du « cours ». Ouvrir d’autres « fenêtres » que celles de la salle de classe  dans laquelle est confinée et cloisonnée l’Ecole. Notre Ecole. Voir un peu plus loin… Je ne compte pas pour la simple raison que nous je ne suis un « calculateur », un  épicier. J’aime faire ça. Beaucoup d’autres collègues s’y consacrent aussi… Certainement. Sans tambour ni trompette. Dans l’ombre.

A chaque fois que je croise d’anciens élèves, on ne s’empêche pas de me demander si j’ai pris ma retraite. « Non, pas encore, je bosse toujours »… Une réponse qui étonne et qui est souvent reçue comme une plaisanterie…Et pourtant… Comme tant d’autres collègues, j’avais l’intention d’opter pour  la retraite anticipée. La loi sur la retraite en a décidé autrement. Au nom de l’austérité. Haro sur l’enseignant. Ce « pestiféré ». Ce « égoïste ». Ce « preneur d’otages ». Ce « malade ». Ce « fainéant ».

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Les régimes de retraite des autres corporations de métiers moins pénibles, des « sinécures »,  ne sont pas concernés et restent privilégiés. « Engraissés ». Malgré les décideurs, ceux qui continuent à se jouer de l’école, devenue ce vaste laboratoire d’expérimentations  pédagogiques. Malgré ceux qui continuent à se jouer de nos enfants, de nos élèves, ces eternels cobayes. Malgré ceux qui ont pris en otage cette école et, par voie de conséquence, toute la société, nous aimons notre métier. Nous ne sommes pas de ceux qui pensent qu’il vaut mieux n’avoir pas d’école que d’en avoir une mauvaise. Le premier de tous les malheurs assurément, c’est de n’avoir pas d’école. La nôtre est ce qu’elle est. Nous la voulons meilleure, performante.  On n’en peut plus! Je n’en peux plus… Qu’est-ce qui peut encore nous motiver alors, devant tant d’incompréhensions,  d’adversité, de désolation ? Notre métier que nous aimons passionnément…

Nous ne savons pas faire autre chose. Nous ne sommes pas des affairistes et, encore moins, des affairistes véreux… Nous ne sommes pas des importateurs de voitures, ni de croquettes pour chiens ou de lingettes pour chats. Nous n’exerçons pas notre métier dans les bureaux. Dans les salons. Nous ne sommes pas des syndicalistes de carrière aux cols blancs. Nous ne sommes pas des députés, une tâche tellement « contraignante », pour pouvoir voter des lois sur-mesure, en notre faveur. En faveur des métiers pénibles, comme celui d’enseignant, de médecin, ou d’infirmier…

Nous sommes des enseignants. Ce n’est pas un choix de carrière, c’est un choix de vie. Nos « vies » pour nos élèves. Nos enfants. Notre honneur  pour nous. Vous pouvez opérer toutes les ponctions sur les salaires que vous voulez. Vous pouvez « commander » toutes les décisions de justice que vous voulez. Nous ne sommes pas prêts à marchander notre dignité. C’est aussi celle de nos élèves. Vos enfants. Les nôtres.

Auteur
R.  Zenati, enseignant

 




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