25 avril 2024
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Être chrétien en Algérie est un combat

REGARD

Être chrétien en Algérie est un combat

Il faut vraiment avoir un caractère irréductible soutenue d’une foi chevillée, de la persévérance et de la patience pour avoir une vie de chrétien en Algérie.    

L’un des principes des droits de l’homme à savoir la liberté d’exercice du culte est bafoué par le tribunal administratif Tizi-Ouzou, le 27 août passé. Sans faire preuve de déférence, la justice algérienne a débouté la communauté chrétienne en lui refusant d’ouvrir ses églises, situées à Tizi-Ouzou et ses environs, fermées depuis presque un an sur une décision d’un administrateur local notamment le wali.  

C’est confrontés à ces inqualifiables difficultés qu’ils doivent continuer à pratiquer leur religion. Malheureusement, ils ne peuvent s’exciper du fait qu’ils soient tenus de montrer patte blanche.

Il y a trop d’abus dans cette décision qui a soulevé l’ire et l’indignation des fidèles des églises protestantes de la région. C’est d’usage courant de voir ces pratiquants harcelés et persécutés par les autorités politiques et les différents courants religieux islamistes.    

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L’absence de tolérance et de la liberté de culte sont un problème sociétal dans une nation où la religion musulmane est inscrite dans la constitution comme exclusive. Pratiquer sa foi autre que celle proposée par l’État est un acte soumis à un contrôle. C’est-à-dire, il y a une série de conditions auxquelles des individus doivent invraisemblablement se soumettre, et le plus grave, ils doivent s’identifier comme tels. Alors que pratiquer sa foi est une affaire strictement privée, exhiber obligatoirement ses croyances est une atteinte à la liberté individuelle. 

De toute évidence, avoir recours à ce genre de procédés pour étouffer un Algérien de vivre librement sa spiritualité est un moyen de contrôler la société qui aspire à vivre dans la dignité. Un état de fait qui doit être inséparable avec les autres libertés intrinsèques.  

Pourquoi les pays dits de l’Occident offrent cette liberté alors que chez nous est, il devenu un sujet auquel les hautes autorités de l’État doivent se mêler ? La question, avant qu’elle soit paradoxale, elle est politique. C’est une façon de manipuler l’opinion à d’autres objectifs.

Doit-on faire un peu d’exercice sur l’Histoire de la révolution algérienne pour rappeler à ces administrateurs implacables que les chrétiens comme Henri Maillot, Maurice Audin et le juif Fernand Iveton ont été sacrifiés par la France coloniale pour que l’Algérie soit indépendante? 

Pour ne pas oublier l’histoire de Slimane Bouhafs, ce citoyen originaire de Sétif qui a eu des démêlés avec la justice pour une simple raison : avoir affiché sa chrétienté et critiqué la religion musulmane. Il fut condamné à 5 ans de prison en juillet 2016. Après avoir purgé 20 mois, il fut libéré sous la pression médiatique et la solidarité citoyenne. Ensuite il a été obligé de s’exiler en Tunisie avec l’objectif de fuir en Europe afin de s’éloigner du danger qui le guette tous les jours. 

Quelques années auparavant, en mai 2008, on se souvient tous d’une certaine K. Habiba, une fille de Tiaret de confession chrétienne qui fut arrêtée par la gendarmerie et jugée pour trois ans par un tribunal correctionnel pour le fait d’avoir en sa possession la Bible. Elle fut accusée de pratiquer un culte non musulman sans autorisation. Avec un procureur de la République de sa ville qui la narguait avec des questions : « c’est soit le tribunal, c’est soit la mosquée »; « à l’église on t’a fait passé l’examen d’admission céleste? »; « On t’a fait boire l’eau qui t’amènera directement au paradis? », etc.

Un autre fait inquiétant qui devient récurent pendant la période du jeûne, la police procède à des arrestations arbitraires contre ceux qui mangent en publique. Et les avocats n’ont pas de peine à les protéger devant les juges, car il n’y a aucune loi qui interdit un Algérien de manger.

Le mariage avec une étrangère ou un étranger est régi par une loi les obligeant ces derniers à devenir musulmane ou musulman pour qu’il puisse légaliser l’union avec une Algérienne ou un Algérien.

Ces injonctions et ses décisions arbitraires sont des atteintes directes à la liberté, aux droits de l’homme et à la démocratie. 

Bien que, un texte de loi existe pour assurer à n’importe quel religieux de n’importe quelle confession de pratiquer sa foi en toute liberté. 

« Art. 42.1 — La liberté de conscience et la liberté d’opinion sont inviolables. 
La liberté d’exercice du culte est garantie dans le respect de la loi. » (1)

Donc, le refus de donner l’autorisation par les autorités locales aux fidèles de l’église protestante de Tizi-Ouzou de mener leurs services religieux est contrevenant à la loi. Leurs lieux de culte habituels les ont scellés dans la foulée de la révolution citoyenne, alors qu’ils étaient ouverts depuis 1996.  

Le paradoxe, l’Algérie a confirmé son adhésion à la Déclaration universelle des droits de l’homme depuis septembre 1963 ou on peut lire deux articles qui protègent l’individu sur la façon de mener sa foi (2). 

« Article 2

  1. Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.

  2. De plus, il ne sera fait aucune distinction fondée sur le statut politique, juridique ou international du pays ou du territoire dont une personne est ressortissante, que ce pays ou territoire soit indépendant, sous tutelle, non autonome ou soumis à une limitation quelconque de souveraineté. »

« Article 18 

Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction, seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites. » 

En outre, les conventions internationales relatives aux droits de l’homme sont ratifiées par l’Algérie, et elle est membre fondateur du Conseil des droits de l’homme à travers sa mission permanente à Genève.

Sur le terrain, on constate que les engagements de l’Algérie en la matière ne se traduisent pas sur ces citoyens, elle les renie d’une façon impérieuse. 

Finalement, c’est l’absence de la pratique démocratique qui a engendré toutes ces contradictions et ses atteintes aux droits de l’homme.  

Parler aujourd’hui des préalables démocratiques est une nécessité afin de libérer la vie publique de l’emprise d’un pouvoir qui refuse obstinément de comprendre que la société algérienne est engagée d’une manière irréversible à changer le cours de l’Histoire.

Pour construire un État de droit, il faut penser inévitablement au respect des minorités, la liberté de culte et l’égalité des sexes. Ce dont nous sommes bien loin.

Mahfoudh Messaoudene

ww.joradp.dz/HFR/Consti.htm  (Révision constitutionnelle du 6 mars 2016)

  1. Déclaration universelle des droits de l’homme adoptée et proclamée par l’assemblée générale dans sa résolution 217 A (III) du 10 décembre 1948. Adhésion de l’Algérie par l’article 11 de la constitution de 1963. Parution dans le journal officiel (JORA) le 10 septembre 1963.

Auteur
Mahfoudh Messaoudène

 




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