Il n’y a rien de plus difficile à appréhender que l’existence de la raison et de l’irrationnel, étymologiquement son contraire. Car ils n’ont pas de matérialité visible (pléonasme !) puisqu’ils sont de l’ordre de l’esprit. Et celui-ci est justement ce qui distingue l’être pensant aux autres créatures vivantes.
Toute la journée nous entendons « Il a raison », « c’est raisonnable », « il réfléchit avec raison », « il agit raisonnablement » et nous pourrions citer bien d’autres variations qui évoquent la raison.
Revendiquer que ses actions et affirmations naissent d’une pensée rationnelle est un réflexe de tout moment, une base de conversation quotidienne entendue comme une confirmation de validité d’une opinion. Et c’est là le souci, que ce soit une validation de la pensée juste et comme une sentence irrévocable.
On peut s’imaginer combien est encore plus surprenant l’expression « j’ai raison !». La belle affaire, que la vie serait simple, si nous évoquions aussi facilement la raison pour valider une certitude que personne ne peut remettre en question.
Depuis l’antiquité la philosophie n’a cessé de réfléchir sur ce concept très évasif. Comme à mon habitude, je vais m’éloigner des grandes références philosophiques à ce sujet pour aller au plus simple. Mais qu’est-ce la raison, d’une manière simple ?
Deux portes d’entrées simples et usuelles s’offrent toujours à nous, le dictionnaire et l’étymologie. Logiquement la définition du dictionnaire découle directement de l’étymologie. Du latin rationem, c’est la faculté de calculer, dans le sens de choisir le chemin le plus adapté. En quelque sorte de choisir la position qui est conforme à ses propres sentiments ou opinions.
J’agis donc rationnellement si je suis en conformité avec le souci de préserver mes intérêts, de n’importe quel ordre soient-ils.
Oui mais voilà, la traduction de l’origine étymologique ne peut être aussi facilement prise dans son sens littéral. Les définitions sont aussi nombreuses que les dictionnaires et encore plus tortueuses par la philosophie, c’est pour cela que je l’écarte souvent dans mes écrits. Elle nous est indispensable mais sa nature est de poser beaucoup plus de questionnements que d’apporter des vérités. C’est d’ailleurs son rôle éminemment instructif.
Non seulement la traduction est relative aux personnes et doctrines mais le temps finit par crée une distorsion encore plus grande selon les lieux et les cultures. Il y a ainsi dans le mot raison une relativité si complexe qu’il n’y a aucune certitude de la vérité lorsque je dis « j’ai raison ! ».
La raison est-elle la protection de mes intérêts que décide pour moi la société ? Il faut indéfiniment soumettre l’emprise collective à la liberté de trouver le chemin moi-même.
La raison est-elle dictée par la loi qui est l’expression commune des intérêts collectifs dans une démocratie. C’est certainement une excellente voie qui a mis des millénaires à s’imposer. Mais là encore, mes intérêts sont-ils conformes à la décision majoritaire ? Ma raison est-elle la raison commune ?
Mais alors, au-secours !, je ne m’en sortirai jamais pour arriver un jour à dire « j’ai raison ! » avec la certitude qu’elle est une vérité que j’assume et que je brandis sur un ton si affirmatif à la face des autres ?
Eh bien non, la raison n’existe pas comme la vérité non plus. L’objectif de l’être humain est une quête perpétuelle de toujours les éprouver, les surveiller et ne pas hésiter à les remettre en question. La raison est la vérité du moment que ressens l’individu pour agir selon ses intérêts, pas celle de toujours.
La civilisation humaine a trouvé une approche qui semble être la meilleure pour ne pas être trop loin de cette vérité sans la certitude de l’atteindre. La validité d’une vérité scientifique ou tout simplement du discours quotidien demandent un processus argumentaire, des références et une preuve par l’expérimentation pour l’une et par l’expérience pour l’autre. Et lorsque tout cela a été fait, rien n’est définitif et peut être régulièrement remis en cause.
Ceux qui ont l’amabilité et la patience de me lire savent que je conclus très souvent de la même manière en invoquent l’instruction et l’éducation.
C’est elle et seulement elle qui construit une vigilance de toujours avoir un discernement sur les choses pour éviter la rigidité des pensées définitives qui nous sont imposées. Le scientifique comme celui qui affirme à une table d’un café « j’ai raison ! » savent au plus profond d’eux-mêmes, si nous supposons qu’ils ont reçu tous les deux une instruction et une éducation, que c’est un effet de langage. (Boire un café en simulant une fausse querelle à haute voix n’est pas contraire à l’état d’instruction).
Mais j’ai oublié un dernier point pour situer la relativité de la raison que je vais invoquer, avec un grand humour provocateur, soit la très célèbre réplique de Michel Audiard dans un film. Je vais l’utiliser en dérivation, « Lorsque les gens de 60 kilos parlent aux gens de 120 kilos, les gens de 60 kilos disent aux gens de 120 kilos qu’ils ont raison ».
Franchement, vous voyez combien il est parfois aventureux de prétendre « j’ai raison ! » avant d’évaluer la puissance de la même affirmation chez un autre. C’est ce qu’on appelle le conformisme de la raison, non ?
Boumediene Sid Lakhdar
De mon côté je préfère ne pas avoir raison que l’être à tort.
Quand on est sûr d’avoir raison, on n’a pas besoin de discuter avec ceux qui ont tort.
Citation de Wolinski, que je partage à 💯/💯.
Azul, tu as raison !!!
Voyons, je pense que ce dont ton texte parle est plutot le CONSENSUS, et non las raison. C’est le consensus qui a besoin de s’adresser et tenir compte des autres. La necessite’ du « Je » est biensur celle d’apporter une information necessaire pour donner un sens a l’affirmation. Quelle est donc cette info necessaire dont il s’agirait, celle de l’appartenance de cette raison, relativement a celle(s) d’autrui. La necessite’ quand a elle est dans le besoin de distinguer quelque chose (avis, position, perception…. declaration) de celle(s) d’autrui. En d’autre terme tu soumet l’hypothese d’absence de consensus. Oui le consensus seulement, car l’existence d’autres point de vue/affirmation est admission que d’autres possibilite’s existent, ou mieux encore qu’elles sont aussi possibles !!!
Cette interrogation du consensus n’aura de reponse qu’a travers la science, c.a.d. la verification. Ainsi, l’interrogation devient necessairement une hypothese a verifier ou pas par un scientifique. Cela se fera par confrontation a la realite’ – D’ou toute la force de des Sciences Physiques. Moi je dirais que plus il y a de physiciens, plus il y a de raison. Si la proposition propose’e, c.a.d. l’affirmation suppose’e dans l’affirmation est en relation avec la sentimentalite’ des Humains, on se retrouve dans le domaine de la moralite’, et d’une maniere ou d’une autre dans le champs religieux – c.a.d. MAL BARE’S !!!
Trouve le boutton OFF dans ta tete, et appuis-le !!! au risque de te voir, impuissant, devenir un habitoux !!!
Il y aussi cette histoire ; Maurice va voir le Rabbin de son village pour se plaindre de Daniel ;
Rabbi, je me suis disputé ce matin avec Daniel il m’a dit ceci je lui ai répondu cela et patati patata … ai-je eu tort ? Le Rabbin lui répond, non, Maurice, tu as eu raison.
Quelques minutes après c’est Daniel qui va voir le Rabbin ; il lui raconte sa version de la dispute, et demande aussi s’il avait raison. Le Rabbin lui répond : «oui tu as eu raison, Daniel ».
La femme du Rabbin qui avait tout entendu proteste et reproche à son mari d’avoir donné raison aux deux hommes qui se sont disputés pour la même …raison. Le Rabbin regarde sa femme et lui dit : « tu as raison. »
Si on prend le mot »raison » dans le sens de »cause ». Comme dans raison de la colère. Or la colère n’est pas un sentiment rationnel mais émotionnel. Dans ce cas le Rabbin aussi a raison.
Si «avoir raison» c’est être dans le vrai, dire la vérité, c’est là un sujet très ancien qui mérite le détour.
A la base, avant la cité, avoir raison se confondrait sans doute avec avoir du muscle ou une arme assez dissuasive.
La vérité est devenue une notion abstraite avec la civilisation. En Orient elle la vérité se serait légèrement décarcassée de la matière brute pour devenir un attribut du sultan, pharaon, roi, … et des dieux leurs suppléants. Elle n’a pas tellement changé depuis.
Avec la démocratie grecque, avoir raison devant un tribunal, vendredi être en conformité avec la loi, laquelle loi est devenue circonstancielle et abstraite, indépendante d’une quelconque personne physique ou morale.
La philosophie, les arts, les savoirs ont approfondi la notion du vrai. Le moral/immoral, le bien/le mal, le beau/le laid, l’agréable/le pénible, le légal/l’illégal,… tout ça est rendu possible par la cité.
Avec la Grèce soumise à la Macédoine, les sujets abordés par la philosophie ont porté sur l’individu, comment faire face à l’arbitraire: le cynisme et stoïcisme.
A l’époque impériale, romaine, en raison de la censure aussi, on a surtout des stoïciens.
Puis y a la déferlante orientale qui éteint les bougies pour mil ans avant que la renaissance reprenne les spéculations.
Actuellement «avoir raison» est structuré autour de deux idéologies : le capitalisme et le socialisme. C’est ce qui détermine la société, les individus, les productions intellectuelles, les lois, l’esthétique. Du moins jusqu’à la résurgence de ISIS / Daech qui a, elle aussi, sa lecture de qui a raison.
citation:
« ASi «avoir raison» c’est être dans le vrai, dire la vérité, … »
Y a une petite nuance, l’ami !!! dire la viriti? Mais quelle viriti ??? La est la question ! La viriti c’est ce qui est CRU etre vrai ! du coup, A QUI on dit est plus relevant/important que ce qui est dit. Pour reussir, il y a tout interet a controller c.a.d. limiter les croyances a une et la simplifier. Une fois ca regle’, toutes les autres suppositions se simplifient et se resument a un rapport de force. Les Musulmans et Budhistes ont parfaitement resolu la question. Pour les Budhistes, c’est simple, chacun a sa verite’. Pour les Musulmans, ils ont copie’ le parcoeurisme des Jouifs.
« Avec la démocratie grecque, avoir raison devant un tribunal, vendredi être en conformité avec la loi, laquelle loi est devenue circonstancielle et abstraite, indépendante d’une quelconque personne physique ou morale. »
Oublies-pas, que c’est un Grecque Constantin qui a avance’ cette notion de « religion d’Etat ». Ou a-t-il echoue’? Chez-nous !!! Mais ca c’etait avant que Mouh soit rejete’ par derriere. Pour dire, que ces histoires de verite’ et de raison, quelque soit le chemin, se retrouvent dans le RAPPORT DE FORCE, entre ceux qui disent/proposent et ceux qui disposent/decident.
L’Horreur est de constater que tandis que nos ancestres les plus lointains ont su et pu repondre a ce challenge de l’epoque, des siecles et siecles deja, les nouveaux khortis de je ne sais d’ou, sont tout de meme arrive’s a nous remettre dans le meme petrain !!!
Tout le monde s’est dit qu’il n’y a de verite’ que celle qu’on peut formuler comme hypothese et tester pour essayer de la repliquer. Les zinzins algeriens ont trouve’ le parfait protocole experimental:
Je vasir a la chaise
J’etale la colle
je pose mon Q
j’expose mon gros ventre, mon nez-tordu qui n’a rien d’un NIFF et j’attend !!!