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Julian Assange et le cocotier

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Julian Assange et le cocotier

La justice britannique, contre toute attente, refuse d’extrader Julian Assange, au motif non pas qu’il soit lésé dans ses droits de journaliste ou de vice de forme – encore moins de fond –  dans la procédure, mais au risque de suicide qu’il encourrait dans les geôles états-uniennes. 

On le dit amoindri physiquement, et surtout psychologiquement, après avoir souffert toutes sortes de tortures. Notamment durant ses derniers mois de refuge dans l’ambassade équatorienne, avec le changement de cap de la nouvelle administration du pays sud-américain, sous l’actuel président Lenín Moreno, et le nouveau staff de la chancellerie.

Les Équatoriens, pressés par la justice [Administration] américaine, remirent Julian Assange aux mains des Anglais pour l’entame d’une procédure d’extradition aux États-Unis. Le 11 avril 2019, la police britannique sortit de force le fondateur de WikiLeaks du siège diplomatique, mettant ainsi fin à son refuge équatorien qui aura duré 7 ans. 

Il croupit depuis dans la prison londonienne, de haute sécurité, de Belmarsh. Soumis à un régime très strict, entouré de prisonniers de la pire espèce, condamnés pour divers crimes et terrorisme, Julian Assange est enfermé seul dans une cellule, ne communiquant avec personne depuis des mois.

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Il a droit d’être sorti de son trou une heure par jour, et seul dans un autre espace très réduit. Souffrant d’une maladie pulmonaire, entre autres, à peine si on lui concède une visite médicale. Il ne reçoit pas de visite non plus de ses avocats, depuis les huit derniers mois. Il est complètement coupé du monde extérieur que ses proches le disent souffrant d’autisme. 

Son calvaire d’isolement continuera tout le temps qu’auront duré ses comparutions devant la juge Vanessa Baraitser, car enfermé dans une cage de verre. Techniquement, le secret de la stratégie de défense fut impossible, du fait que le contact entre avocat et son client est mis à rude épreuve. La partie de l’accusation, elle, n’a pas manqué de fausser le jeu, ajoutant ou quittant des chefs d’accusations, en dehors des délais établis, parfois au cours même de l’audience, multipliant les entorses, au mépris de la loi qu’elle prétend défendre.

Les assistants sociaux, les ONG de protection des droits de l’Homme et autres, triés sur le volet, sont parqués dans des salles annexes, pour en suivre le déroulement à travers des écrans à plasma. On se plaint ainsi, et souvent, des dysfonctionnements autant techniques qu’administratifs. Sur le plan des retransmissions, il y a toujours eu des défaillances liées soit au son, soit au courant électrique. Ou même les deux à la fois. 

Maintenant que la justice britannique décide de ne pas extrader le fondateur de WikiLeaks, et que la partie de l’accusation peut se réserver le droit de faire appel, l’on se pose des questions sur la sincérité de la décision. Même si celle-ci est à saluer et en soi un grand triomphe dans un combat inégal, entre David et Goliat.

Julian pourrait-il enfin être libéré, pour pouvoir se soigner et reprendre ainsi ses forces, la bataille est loin d’être terminée ? Car prendre une telle décision, ne pas l’extrader, et le maintenir en détention ne serait pas cohérent. Il a déjà assez payé son courage de journaliste racé et affranchi, toutes ces années qu’ont duré ses persécutions injustes. 

L’Histoire retiendra que ceux-là mêmes qui se targuaient d’être chantres de la liberté d’expression, défenseurs de l’information comme un droit inaliénable de savoir pour tous, qui ont fait leur beurre sur son dos en se servant à tout va des « câbles » de sa plate-forme de WikiLeaks, certains en ont même brillé avec des best-sellers, l’on lâchement laissé tomber seul dans la disgrâce. Pour ne pas dire qu’ils l’ont jeté à la vindicte de ses détracteurs. Pire, pour se faire une bonne conscience, du coup l’on se plaît à lui discuter sa déontologie de journaliste, le qualifiant plutôt de « lanceur d’alerte », jouant ainsi sur les mots.

Julian Assange a le mérite de secouer le cocotier, dans le sens d’en finir avec le paternalisme sclérosant qui caractérise jusque-là la noble vocation du journalisme et de s’être attaqué aux puissants. Ces derniers fussent-ils des États. La dichotomie est désormais toute tracée, il y a les « techniciens » de l’information qui excellent dans le nombrilisme, l’opportunisme et le servilisme, il y a les dévoués corps et âme, de façon désintéressée, au métier d’informer, quitte à en payer le prix fort.  

Auteur
Mohamed Ziane-Khodja

 




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