28 mars 2024
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La parole est d’argent, le pétrole est d’or !

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Laboratoire d’expérimentations de toutes les idéologies venues de tous les horizons, l’Algérie peut s’enorgueillir d’avoir fait la preuve vivante de leur inefficacité et de leur perversité. Le colonialisme français, le nationalisme arabe, le socialisme soviétique, l’islamisme,  le terrorisme, le libéralisme.

Aucune idéologie n’a développé l’économie du pays, n’a rempli le couffin de la ménagère, n’a créée des emplois productifs durables, n’ construite un Etat juste et prospère. Il en sera de même de celle des droits de l’homme et de la démocratie. Elles sont comme des « météorites » tombées du ciel. « On ne mesure pas la puissance d’une idéologie aux seules réponses qu’elle est capable de donner mais aussi aux questions  qu’elle parvient à étouffer ». La fin du vingtième siècle a été marquée incontestablement  par l’effondrement des idéologies matérialistes (socialisme et capitalisme) et le sursaut des religions monothéistes. L’extrême concentration du pouvoir politique dans le bloc socialiste a suscité le déclin du communisme.

L’extrême concentration des richesses  à l’intérieur de l’Occident va provoquer la chute du capitalisme. « Dieu nous donne des bras mais ne construit pas les ponts ». Toutes les luttes idéologiques ont plongé le pays dans la misère, l’ignorance, la violence et ouvert la voie à des invasions étrangères sous toutes les formes (de l’occupation coloniale du territoire à l’accaparement du marché local par les multinationales en profitant d’une « rente de sous-développement » que leur offrent gracieusement les élites autochtones en mal de reconnaissance)

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L’abondance de ressources en gaz et en pétrole « à bon marché » engendrent des rentes rocardiennes pour le pays parce que leurs coûts et prix de revient sont très faibles et les prix de ventes sur le marché international très élevés du moins dépassant de loin le prix d’équilibre. L’économie se porte bien tant que le cours est élevé, le pays s’effondre en même temps que cours si ce n’est pas le cas. Certains pays comme l’Algérie fondent toute leur économie sur ces rentes et négligent le développement de leurs industries et surtout de l’agriculture. Ce qui à long terme pose des problèmes difficiles à résoudre. C’est ainsi que Etat et société sont devenus addictifs à la rente pétrolière et gazière.

Le pétrole agit sur la société et sur l’économie comme de la cocaïne. Il provoque une dépendance physique et psychique forte à la fois sur l’Etat, la société et sur l’économie.

Quand le prix baril du pétrole rit, la gestion pleure, l’Etat pavoise, la société se tait, le ciel s’éclaircit, les oiseaux gazouillent, la vie est belle, c’est l’ivresse. Elle est de courte durée. Le réveil est brutal. C’est la gueule de bois. Un bon café, les choses rentreront dans l’ordre.

Le prix du brut s’effondre, les langues se délient, l’Etat s’affole, la société se meurt, le ciel s’assombrit, les oiseaux émigrent, la vie est terne, les funérailles s’organisent. La fin est proche. Aujourd’hui le « pot de miel » s’est renversé, le patient est dans un coma profond.

La solution médicale serait la désintoxication mais cela prendra nécessairement du temps qui fait cruellement défaut d’autant plus que le sujet n’est pas éveillé mais endormi.

Deux techniques soit l’hypnose soit l’électrochoc. L’hypnose a fait la preuve de son inefficacité. Seul un électrochoc peut le faire sortir de son long sommeil. Un réveil qui peut lui être fatal ou salutaire. Beaucoup de gens pauvres se résignent pour une raison ou une autre et par désespoir de cause se remettent à Dieu.

Alors que les riches « parvenus » produits par le régime se sentent souvent coupables de leurs richesses sachant qu’ils ne l’ont pas méritées, c’est  pourquoi ils sont pressés de s’en débarrasser soit en le dépensant de manière intempestive, soit en le plaçant à l’étranger de façon anonyme car une fortune acquise honnêtement ne fuit pas le pays et ne craint pas le regard de la société. Ce n’est pas la richesse ou la pauvreté qui posent problème mais l’origine de l’une comme de l’autre.

Le problème n’est pas de perdre la partie mais de truquer le jeu. C’est la tricherie qui fait trébucher. On recourt à l’émission de billets (la facilité) au lieu de changer de billet (la difficulté) pour résorber le déficit budgétaire de l’Etat.

Pourront-ils survivre en dehors de l’Etat et des hydrocarbures ? Evidemment, on ne guérit pas une plaie en y retournant le couteau comme on ne peut pas la laisser en l’état,  elle risque de gangréner tout le corps d’autant plus qu’il est imprégné de miel. On peut se relever d’un traumatisme certes mais jamais  du royaume des morts. Il est vrai qu’après un traumatisme collectif, causé par deux guerres (guerre de libération et guerre civile) en l’espace de quelques années, plonge chaque algérien dans un état de choc violent.

Après le choc, on redevient comme un enfant à la recherche d’un père protecteur. C’est la stratégie de choc elle peut être salutaire comme elle peut être mortelle. Tout dépend de la conviction des leaders et de leurs capacités à mettre en œuvre des réformes structurelles profondes. On peut chercher les responsables sans jamais trouver des solutions.

Il n’y a pas de solution individuelle à un problème collectif. Une cohésion sociale suppose la mise à nu des difficultés et la volonté d’y faire face sans échappatoire et sans faux fuyant, de façon solidaire en faisant appel à la raison.

La survie du patriarcat a très certainement intérêt à encourager le  triomphe de la défaite. Cette mentalité qui consiste à se dire « après moi le déluge » ou «fais-moi vivre aujourd’hui et jette moi dans l’enfer demain ne peut durer ». Elle condamne nos enfants de façon certaine. C’est dire que la situation est complexe et les causes multifactorielles.

Nos problèmes ne tombent pas du ciel mais ont poussé sous nos pieds. L’essentiel du jeu économique et sociopolitique consiste donc à capturer une part toujours plus importante de cette rente et à déterminer les groupes qui vont en bénéficier. Il donne à l’Etat les moyens d’une redistribution clientéliste. Il affranchit l’Etat de toute dépendance fiscale vis-à-vis de la population et permet à l’élite dirigeante de se dispenser de tout besoin de légitimation populaire. Elle dispose des capacités de retournement extraordinaire étouffant toute velléité de contestation de la société. Il sera le moteur de la corruption dans les affaires et le carburant des violences sociales. Il a l’art de faire la guerre et d’initier la paix. Il est à la fois le feu et l’eau.

Il agit tantôt en pyromane, tantôt en pompier. C’est un philtre magique qui perpétue les régimes monarchiques et dictatoriaux en semant la corruption (l’opium) en période de « vaches grasses » et en récoltant la violence (le bâton) en période de « vaches maigres » sous le regard amusé des démocraties occidentales ; « cachez moi ce sein que je ne saurais voir » dira un personnage de Molière. « Ce sont les mouches qui vont vers le pot de miel et non le pot de miel qui se déplace vers les mouches ». Les forces de changement n’existent que dans les discours et jamais dans les faits.

Le défi majeur à relever est d’empêcher qu’une population qui a goûté à la sécurité, au confort et à la facilité de sombrer dans la peur, la famine et le chaos. Car un faible niveau de développement et ou de modernisation n’apporterait qu’amertume et désespoir. Faut-il faire appel aux morts pour régler les problèmes des vivants ?

Dr A. Boumezrag

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