26 avril 2024
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« La situation des droits de l’homme en Algérie est insoutenable »

Salah Dabouz

« La situation des droits de l’homme en Algérie est insoutenable »

Salah Dabouz, l’infatigable militant et avocat des dossiers touchant aux droits de l’homme. Photo Liberté

 Salah Dabouz, avocat et défenseur des droits de l’homme, dresse dans cet entretien un état des lieux sans concession de la situation des droits de l’homme en Algérie. L’homme est réputé pour son franc-parler et son courage à affronter un système judiciaire des plus asservis au pouvoir politique.

Le Matin d’Algérie : La liberté d’expression est consacrée dans la constitution, comment les autorités trouvent-elles encore des artifices pour arrêter et empêcher les activités de l’opposition et de la société civile ?

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Salah Dabouz : Il est bien connu que ceux qui violent la loi en Algérie en toute impunité, ce sont les autorités, d’un côté vous avez une constitution qui contient des dispositions « sous forme de belle phrases » qui garantissent des droits aux citoyens, mais d’un autre côté, vous n’avez aucun mécanisme efficace qui peut servir aux citoyens de moyens de protection contre tous les abus d’autorité qui sont commis tous les jours. Les rassemblements permis par la constitution sont traités comme des attroupements interdits par le code pénal sans que les conditions légales d’attroupement ne soient réunies. Non seulement les juges qui acceptent de commettre de tels « fautes » ne sont pas punis, ils peuvent être punis si justement ils appliquent la loi dans de tels situations, et le citoyen n’a aucun moyen de le faire, car il s’agit bel et bien de violation de la loi par ceux qui sont appelés à la faire respecter.

Depuis la libération de Kameleddine Fekhar, on ne parle plus des autres détenus mozabites. Pouvez-vous faire un point sur leur situation ?

Il existe encore beaucoup de détenus dans le cadre de la détention provisoire qui sont poursuivis mais dont les dossiers sont vraiment vides. Je citerais par exemple Bakir Alouani, accusé de faux et usage de faux, mais l’accusation ne présente même pas de document qui peut être frappé de faux. Vous avez aussi Smaïl Abbouna qui est en détention car c’est le frère du militant Salah Abbouna refugié en Espagne en ce moment, son tord est de posséder l’emblème amazighe dans son armoire, un fanion que le reste des Algériens sortent dans les stades et attachent à leur balcon fièrement, mais qui reste interdit au Mzab. Mellal Abdelaziz est quant à lui détenu parce qu’un de ses amis a publié le contenus d’une lettre dénonçant de graves dépassements d’une directrice d’école.

Les autres dossiers sont ceux de Slimane Bouhafs, Merzoug Touati et Said Chitour qui laissent l’ombre de sérieux doute sur le fonctionnement de la justice dans notre pays.

Je suis convaincu que Slimane Bouhafs a été condamné parce qu’il est de confession chrétienne. Etant son avocat, je suis resté sous le choc de savoir qu’il avait été arrêté et jugé sans la présence d’un avocat le 31 juillet 2016, alors qu’il ne savait même pas qu’il s’agissait d’une audience de jugement. Nous avons bien souligné ça en deuxième instance, ce qui devait conduire normalement à une annulation du jugement pour vice de forme, mais la cour avait décidé de confirmer le jugement même si elle avait réduit la peine. Merzoug Touati est accusé d’intelligence avec un pays étranger par des policiers à la base d’un dossier où les services de renseignement plus spécialisés pour traiter de tels affaires ne sont bizarrement pas présents, et où des personnes citées par le juge d’instruction pour argumenter l’accusation de Merzoug ne sont pas convoquées pour les identifiées et le confronter, bien que Merzoug avait demandé leur convocation. Mais pour Said Chitour, je ne peux pas faire de commentaire car d’un côté je n’ai pas connaissance de son dossier, et de l’autre côté il a des avocats qui sont bien placés pour faire des commentaires sur son cas si cela est nécessaire.

Quel est le quotidien d’un défenseur des droits de l’homme aujourd’hui en Algérie ?

Si vous voulez que je vous parle de mon quotidien à moi, je vous dirais simplement que je passe une grande partie de mon temps à répondre aux sollicitations des citoyens pour ce qu’ils endurent, et je vous assure que certains dépassements sont choquants, et vous avez des médecins, des enseignants, des juges, des avocats, des syndicalistes, des ouvriers, des citoyens qui subissent l’inquisition car ils sont musulmans ahmadites. Des détenus qui meurent dans les prisons car malades et mal pris en charge et j’en passe. La situation des droits humains en Algérie est insoutenable selon ce que je constate.

La situation e la presse est peu enviable. Que vous inspire l’action de Hadda Hazem obligée de faire une grève de la faim pour défendre l’avenir de son journal ?

Hadda Hazem que j’ai visitée dans son bureau au deuxième jour de sa grève de la faim est une femme courageuse, elle résiste à un abus d’autorité commis contre elle par de hauts fonctionnaires qui voudraient la réduire au silence d’après ce qu’elle m’a expliqué. Mais derrière cette action, elle mène aussi un combat pour la liberté de la presse, selon ses dires, elle pense que le fait qu’elle soit une femme a encouragé ceux qui cherchent à lui fermer son journal, et elle a décidé de résister à toutes ces injustices. Je lui ai apporté mon soutien et je lui ai dit que je suis solidaire de son combat qui s’inscrit parmi les objectifs pour lesquels nous luttons qui sont la liberté de la presse, la liberté d’expression, l’égalité de tous les citoyens devant la loi et la non-discrimination entres les hommes et les femmes.

 

 

Auteur
Hamid Arab

 




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