La récente vague de décisions visant à écarter la langue française des institutions publiques et privées en Algérie ne relève plus du simple ajustement linguistique, mais s’apparente de plus en plus à une politique d’exclusion ciblée.

Derrière des arguments de souveraineté ou d’alignement avec les normes internationales, se cache une logique idéologique claire, portée par des cercles arabo-islamistes influents, bien implantés dans l’administration et les sphères décisionnelles. Le tout avec la bénédiction d’Abdelmadjid Tebboune et le clan qui le soutient.

Des entreprises publiques telles que la SEAAL (Société des Eaux et de l’Assainissement d’Alger) ont récemment remplacé la langue française par l’anglais et l’arabe sur leurs factures. Les facultés de  médecine  se préparent à abandonner le français au profit de l’anglais dès 2025-2026. Le secteur du sport, la compagnie nationale de transport  aérienne, Air Algérie et même les correspondances administratives suivent le pas.

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À première vue, il s’agit d’un basculement linguistique stratégique, mais une lecture plus profonde révèle une volonté manifeste de rompre avec un héritage linguistique accusé d’être colonial — un procès récurrent dans les discours populistes.

Ce qui interpelle, ce n’est pas la volonté d’adopter l’anglais, langue de la science et de la technologie, mais bien la manière brutale, précipitée et sélective dont la langue française est bannie, sans tenir compte des réalités sociolinguistiques du pays. La majorité des enseignants universitaires, des professionnels de santé et des chercheurs continuent de produire et d’enseigner en français. Les bibliothèques regorgent d’ouvrages scientifiques en langue française. Pourtant, on feint d’ignorer cette réalité dans une course politisée vers un « désenvoûtement culturel » aux relents idéologiques.

Les initiateurs de cette politique ne cachent plus leur appartenance à une mouvance arabo-islamiste qui a toujours entretenu une méfiance viscérale à l’égard de la francophonie, perçue comme un vestige de domination culturelle. Le discours officiel, lui, maquille cette croisade sous les atours d’une modernisation linguistique, alors qu’il s’agit souvent d’un repli identitaire. Or, on ne construit pas une identité nationale en éradiquant une langue, surtout lorsqu’elle continue d’être un outil de savoir, de communication et de mobilité sociale pour des millions d’Algériens.

La rupture avec le français ne semble pas découler d’un processus démocratique ni d’une concertation nationale. Elle s’inscrit plutôt dans une logique autoritaire, décidée en haut lieu, et appliquée par des fonctionnaires zélés, souvent plus soucieux de leur positionnement idéologique que de l’efficacité administrative ou pédagogique. La marginalisation du français n’est pas seulement un acte symbolique : elle fragilise l’accès au savoir, aggrave la fracture linguistique, et accentue l’isolement de nombreux professionnels.

Dans une Algérie plurielle, marquée par une diversité linguistique et culturelle, la sagesse commanderait une politique inclusive, valorisant toutes les compétences linguistiques disponibles. Loin d’être une faiblesse, le multilinguisme est une richesse stratégique, que certains veulent aujourd’hui sacrifier sur l’autel d’une identité rigide et exclusive.

Samia Naït Iqbal

8 Commentaires

  1. La vérité est la partie cachée de l’iceberg est indéniablement les Francophones qui n’est autre que la l’écrasante majorité de la Kabylie. Cela conduit au nivellement par le bas (règne de la médiocratie) et ainsi, l’arabe-baathiste attaque en réalité (et à réussi) cette composante de la population . Sinon, ou est la place d tamazight dans tout ça? Comment décréter cette volonté politique illico-presto pour une langue étrangère et en faire fi pour une langue dite pourtant officielle? Ma conclusion: si ce pouvoir avait à choisir en une Algérie amazigh et une Algérie Judeo-sioniste, la question ne se posera pas. Tel est la réalité.

  2. Oui à l’anglais, mais à la place de l’arabe, qui n’est ni une langue fonctionnelle, encore moins véhicule identitaire. C’est en arabe que benbadis louangeait le colonialisme.

  3. Reconnaissons aux adeptes de la langue de la mort, l’alliance des arabistes et des musulmanistes, d’avoir su très bien manœuvrer.
    A la majorité dardjophone, ils ont facilement pu faire croire qu’ils sont arabes. Le vieux ostracisme du moyen âge envers les musulmans non arabes continue de bien fonctionner, de faire des ravages. Regardez aujourd’hui encore la Kabylie orientale au delà de Ziama et vous aurez le topo du déni de soi. Bref, c’était un jeu que de faire avaler aux dardjophones non seulement qu’ils sont définitivement arabes mais que la promotion de la langue morte, l’arabe, c’est la promotion de leur langue, langue très maternelle que leurs mamans ne comprennent pas. Quant à la langue de ceux qui sont moins majoritaires, elle est moins sacrée que la dardja-assimilée-arabe; elle est inutile donc et est légitimement sujette à la répression. Qu’importe l’histoire, qu’importent les réalités du terrain.
    Pour enfoncer le clou de l’exclusion des kabyles et des citadins, l’alliance des arabistes et des musulmanistes a habilement manœuvré pour expulser les francophones des positions de direction d’abord, puis des postes techniques. Cette fois c’est en confondant langue française et colonialisme. C’est comme si tout locuteur francophone est colonialiste ou allié du colonialisme. Cela va de soi que le locuteur arabophone de langue morte, lui, n’est pas colonialiste mais, heuh, libérateur. Place donc à langue de heuh heuh à la place du français.
    Ne soyons donc pas dupes de l’intérêt de ces gens pour l’anglais. Une langue performante certes, mais une langue qui n’a aucune assise culturelle, sentimentale ou fonctionnelle. Les langues ne se sont changeables pour de vieilles chaussettes. Son introduction ne vise rien d’autre que d’enfoncer encore plus la langue morte dans le paysage, faute de dialecte compréhensible dans le coin.
    Par le renforcement de la langue morte, c’est aussi l’assurance qu’une chape de plomb veille à ce que l’esprit critique et rationnel soit exclu. Et c’est l’assurance d’une prédation en paix pour les prédateurs.

  4. Oui à l’introduction graduelle de l’Anglais mais tout en gardant le Français, une langue que beaucoup d’algériens maîtrisent mieux que l’Arabe. Croire que le bannissement du Français va faire mal à la France et à Retailleau revient à se tirer une balle dans le pied en espérant faire souffrir son adversaire ce faisant. Quant on voit les résultats catastrophiques de la politique désastreuse d’arabisation forcée mise en oeuvre au lendemain de l’indépendance, il y a vraiment de quoi craindre le pire pour l’avenir. « My tailor is rich » ou l’Anglais sans peine. Les promoteurs de cette politique linguistique débile doivent au moins s’en inspirer pour limiter, autant que faire se peut, les dégâts. Et Tamazight dans tout ça? Aux oubliettes comme d’hab. Have a nice day!

  5. Si vous voulez avoir une idée de la richesse des langues parlées imposées en Algérie depuis quelques décennies, il faut écouter le monde sportif local, à part  » brabi n’chalah » ou bien « bi hawli llah » il n’y a rien d’autre. Quant à comparer avec ce qu’exprime Maza un jeune de 19 ans, c’est comme si vous vouliez comparer Goethe avec Bencheikh

  6. Faut toujours des sujets pour amuser la galerie car tout est lugubre Dan’s la nouvelle.
    Qu’ils generalisent plutot l’arabe ! CHICHE. Ils seront les seuls a le parler.
    Ils se retrouvent seuls que ce soit pour le polisario, pour la Palestine ou le gonglage avec les langues.
    A la fin, personne ne parlera aucune langue dans la nouvelle algerie sauf leurs progeniture.
    Un jour, une autre equipe de la junte nous dira que tout est du khorti mais il sera trop tard pour les analphabetes trilingues.

  7. Encore une Maghrébine francisée jusqu’à la moelle qui a écrit ce texte.
    L’anglais est le première langue utilisée dans le monde des affaires, c’est une bonne chose pour l’essor économique de l’Algérie.
    Au vu des tensions avec la France, c’est une bonne chose de passer à autre chose autant pour les français que pour les algériens, les deux opinions publiques ne peuvent plus se supporter.
    Concernant la maghrebine qui veut encore la langue de l’ancien colonisateur, on devrait lui raser la tête.

  8. Si on veut être un pays-civilisation dignes de nos ancêtres de la grande NUMIDIE, ayons l’ambition d’être nous-même, ne nous méprisons pas, ayons une très grande ambition, celle de ne plus
    être ni orientaux, ni occidentaux mais enfin nous mêmes ALGERIENS en promouvant et en officialisant la seule langue qui nous représente tous, qui est comprise et pratiquée dans tout le pays, qui est le fruit de siècles de brassage linguistique et que le génie du peuple a patiemment forgée : il s’agit de la DARIDJA, l’ARABE ALGERIEN composée de tous les apports historiques et basée sur une grammaire berbère (c’est pour ça que les arabes orientaux ne la comprennent pas). Le fellah ignorant pourra accéder à la culture universelle en lisant des journaux écrits dans cette langue, il suffira de lui apprendre l’alphabet et il pourra lire et COMPRENDRE ce qu’il lui est impossible aujourd’hui avec l’arabe littéraire ou le français. C’est cette langue qui unit l’Algérie aujourd’hui même sans que l’on s’en rende compte. Les grands peuples ont compris que c’est leur vraie langue qui les sauvera, la langue américaine est différente de l’anglais, la Turquie, l’Ukraine, les pays baltes et d’autres pays le comprennent. Les autres langues en Algérie seront des langues régionales ou d’enseignement et auront toute la liberté d’évoluer. Cette langue Algérienne, on la voit déjà dans la publicité sur les bus, sur les panneaux, dans les feuilletons télé, le peuple l’utilise dans les sms et personne ne pense à dire: MAIS C’EST CELLE LA NOTRE VRAIE LANGUE, qu’elle s’utilise en caractères latins ou arabes ne pose aucun problème (sauf aux enragés de l’idéologie) c’est le temps et l’usage qui le déterminera. Tous les Algériens ou presque la parlent, il ne reste qu’à l’écrire et l’officialiser. Voilà l’avenir pour notre pays et notre peuple qui utilisera enfin la langue qu’il a inventé lui même au long des siècles pour écrire des romans, des poèmes, des pièces de théâtre que tous les Algériens pourront lire, en attendant -et ça se fera très vite- que des gens écrivent des traités d’agronomie pour montrer à nos paysans comment cultiver la banane et autres plantes. Un peu plus tard, on pourra en faire une langue d’enseignement et de sciences. L’Algérie, en étant elle même entrera réellement dans l’histoire et fermera cette longue parenthèse qui la sépare de la Numidie dont on ne peut restaurer la grandeur en la ressuscitant telle qu’elle était mais telle que son peuple est devenu plus de vingt siècles plus tard, c’est à dire l’ALGERIE actuelle avec son peuple à l’identité unique: LES ALGERIENS ! Osons l’horizon civilisationnel, grandissons !

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