Un parti militant pour l’indépendance de la région du Rif au Maroc a officiellement ouvert mardi un bureau à Alger, une démarche qui risque d’exacerber les tensions déjà vives entre les deux voisins du Maghreb. Le Parti national rifain, qualifié de « groupe de séparatistes » au Maroc, a été constitué en Belgique en septembre 2023.
Lors d’une conférence de presse organisée à l’occasion de l’ouverture de ce bureau, le représentant à Alger du « Parti national rifain », Farouk Al-Rifi, a affirmé que « le Rif a été spolié de ses terres » et que sa formation « défend l’indépendance » de cette région, selon un correspondant de l’AFP sur place.
Il a assuré que son parti entendait porter la question du Rif devant les instances de l’ONU « en raison des crimes odieux » commis selon lui par le pouvoir marocain.
Il parlait devant un drapeau de l’éphémère République du Rif autoproclamée il y a une centaine d’années. Une République née dans la guerre menée par Abdelkrim El Khattabi contre l’occupation espagnole et française au début des années 1920.
L’ouverture de ce bureau, annoncée pendant le week-end, a suscité des réactions indignées dans la presse marocaine qui a critiqué l’Algérie pour l’avoir autorisée.
Le site d’informations marocain Le 360 a ainsi évoqué un « projet bidon » et « une énième provocation qui a tout de l’acte désespéré, de la part du pouvoir » algérien. « Il s’agit là d’un véritable casus belli qui, normalement, appelle une réaction officielle et ferme », a ajouté ce média.
Le journal marocain L’Opinion s’interroge : « Le silence des médias officiels et privés cacherait-il des divergences entre les différentes factions d’un régime traversé par de profondes luttes intestines entre les différents services secrets qui s’avèrent être les véritables décideurs de l’ombre ? »
Un mouvement de contestation a agité la région du Rif, dans le nord-est du Maroc, entre 2016 et 2017.
Le mouvement populaire du Rif, région berbérophone historiquement frondeuse, avait été déclenché par la mort à Al Hoceïma, en octobre 2016, d’un vendeur de poissons, broyé dans une benne à ordures en tentant de s’opposer à la saisie de sa marchandise.
Des centaines de militants de ce mouvement de contestation socio-économique avaient été ensuite incarcérés, selon des estimations d’associations. La plupart ont purgé leur peine ou ont été graciés.
Alger a rompu ses relations diplomatiques avec Rabat en août 2021, dénonçant une série d' »actes hostiles » de son voisin, concernant en particulier le Sahara occidental, la normalisation avec Israël ainsi que le soutien aux indépendantistes du Mouvement d’autodétermination de la Kabylie (MAK) qu’Alger a classé comme organisation terroriste. Le régime algérien a fait porter au mouvement que dirige Ferhat Mehenni même des accusations d’incendies de la Kabylie. Des militants du MAK sont aussi lourdement condamnés dans la ténébreuse affaire Djamel Bensmaïl, tué à Larbaa Nath Irathen
Par ailleurs, la question du Sahara occidental, considéré comme un « territoire non autonome » par l’ONU, en l’absence d’un règlement définitif, oppose depuis des décennies le Maroc au Polisario, dont l’Algérie est le principal soutien.
Yacine K.