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Le patriotisme est-il une rente viagère ?

REGARD

Le patriotisme est-il une rente viagère ?

Les moudjahidine ont combattu non pas pour des rentes mais pour une Algérie libre, juste et sociale.

A peine indépendante, l’Algérie se trouve sans avenir ! L’histoire est bloquée, prise pour proie par des hommes qui se jettent le passé à la face, au lieu de se donner les moyens d’avancer et de faire avancer avec eux un peuple qui a libéré avec eux le pays.

En écrivant cette phrase, j’ai pensé au personnage de Menouar Ziada, dans le roman « Les Vigiles » de Tahar Djaout. Ancien combattant de la révolution, ce dernier a eu la chance d’avoir choisi le bon camp, celui des « justes et des infaillibles », comme il dit lui-même, durant cette période sanglante qui allait déterminer le destin de la patrie. Néanmoins, une fois la souveraineté nationale acquise, le vieux maquisard aurait pu bénéficier, à l’instar de ses compagnons d’armes, de bien d’avantages : appartement, local de commerce, passe-droits et dérogations renouvelées à dates fixes.

Or, lui se contentait seulement d’un logement et d’une pension substantielle, car, il lui paraissait déjà que toutes « ces merveilles ne pouvaient pas être infiniment à lui et qu’un jour viendrait où, par un juste retour de choses, il en serait dépossédé ». Résistant au petit appétit, Menouar du reste peu intéressé par le pouvoir, croit un peu « naïvement » que le patriotisme est un devoir et qu’il faut continuer à servir son pays avec abnégation et surtout sans contrepartie, comme au bon vieux temps, où les frères  se sacrifiaient corps et âme pour la patrie, sans attendre rien en retour.

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A travers lui, c’est l’Algérie « combattante » d’en bas qui se plaignait de ceux d’en haut, arrivistes sans pitié et profiteurs implacables, en course effrénée derrière les dividendes d’un faux patriotisme dont ils tirent une rente viagère : cumul de pensions, retraites anticipées, fonds de commerce, pouvoir de décision au nom d’un fusil devenu au fil du temps rouillé et boulot assis, comprendre par là des chaises et des fauteuils qui ne sont jamais mieux occupés que par les médiocres!

Deux Algérie (s) son nées dans ce climat de tensions, celle du « bled-flouss » et celle du « bled-nif », celle de « chekara » et celle de « el m’hna », deux lignes parallèles sans aucun point de jonction.

Et puis, le personnage de Djaout, comme tout Algérien honnête, avait envie de crier fort que ce pays « endolori » mais généreux et au large « cœur », appartient à tous ses citoyens et qu’il ne comprend jamais cette obsession maladive de certains, sinon presque la majorité des Anciens de vouloir le défendre contre son propre peuple! Mais diantre, défendre quoi exactement ?

La patrie blessée ou leurs gros privilèges ? Enfin, d’avoir libéré et longtemps régné (eux et leur progéniture réelle ou symbolique) sur cette terre fière leur confère-t-il le droit de tant peser « éternellement » sur elle, de confisquer aussi bien son passé que son avenir, ses richesses que son sang, son honneur que sa dignité, sa vie que son cœur-cerveau ?

 

Auteur
Kamal Guerroua

 




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