Les mauvaises performances du système éducatif algérien sont aujourd’hui décriées par tout le monde. En effet, que ce soit à l’issue du cycle secondaire ou même après l’obtention d’un diplôme universitaire, il s’avère que de nombreux étudiants n’ont pas acquis les compétences de bases pour pouvoir s’insérer dans un domaine quelconque de travail. Pour quelles raisons ? Comment en est-on arrivé là ? Peut-on encore envisager des solutions ?
L’objectif de cet article n’est évidemment pas le dénigrement. Mais, pour trouver le bon remède, il faut le bon diagnostique. Et si la maladie est grave, le déni ne saurait être un remède.
Les causes de l’état actuel de l’école relèvent de plusieurs les aspects : le manque de moyens matériels, l’inadéquation des contenus enseignés par rapport à la demande sociale ; et surtout, le manque d’enseignants et de formateurs qualifiés, soit le moteur même de la machine scolaire.
Certes, des réformes ont été initiées afin d’apporter des améliorations, mais de façon sporadique, et les résultats allaient de mal en pis. Quelles en sont les raisons ? nous ne pouvons pas analyser le problème de manière complète dans le cadre d’un article de presse ; nous nous limiterons à un seul aspect : la méthode selon laquelle ces réformes ont été menées. Comme il semble qu’il n’y ait pas eu d’études scientifiques dans ce domaine, nous nous référons à notre propre expérience d’enseignant, ayant exercé de longues années à l’Éducation nationale et à l’Université.
En fait, de notre point de vue, trois problèmes essentiels sont à relever : 1- Le fait que les dites réformes soient toujours «importées» et dictées «d’en haut» ; 2- la prégnance de la bureaucratie ; 3- la liberté limitée pour l’enseignant dans l’exercice de sa tâche.
Or, l’évolution, la modernisation de la pédagogie n’a jamais été le fait de bureaucrates derrière leurs bureaux, dans les ministères ou les académies. Toutes les grandes idées novatrices concernant l’éducation ont pris naissance dans les classes, chez des enseignants, au contact permanent des élèves, observant ceux-ci, analysant leurs réactions, évaluant leurs progrès et leurs difficultés, innovant en matière de solutions.
Ainsi, au regard de l’histoire, les grandes idées-forces de l’éducation ont été d’abord l’oeuvre d’acteurs de base qu’étaient les enseignants tels que Freinet, Dewey, Cousinet… pour citer quelques pionniers dont s’inspire encore la pédagogie moderne, et pour citer quelques-uns parmi les plus récents : Meirieu, Puren, Cuq, Gaonac’h, Dehaene…. Certains d’entre eux étaient de simples instituteurs au départ. Il est vrai que des idées peuvent émaner de philosophes (Rousseau…) ou autres scientifiques en relation avec le domaine de l’éducation (Piaget…), comme il est vrai qu’actuellement la recherche se fait au niveau universitaire par des équipes pluridisciplinaires. Toujours est-il que l’évolution, les innovations en pédagogie, se basent toujours sur des expériences de terrain, incluant la participation d’un ou de plusieurs praticiens.
En fait, c’est en tâtonnant, après des essais, des erreurs, des corrections, que l’enseignant arrive à peaufiner une méthode, une démarche pédagogique. Et comme avec l’évolution des sciences, y compris celles en rapport avec l’éducation (la didactique, la psychologie de l’enfant, la sociologie…) les savoirs et les savoir-faire sont en constante évolution, l’enseignant doit avoir une marge de manœuvre, doit pouvoir donner libre cours à sa créativité afin d’effectuer les adaptations nécessaires à des nouveautés, ajuster ses pratiques en conséquence, innover lui-même au besoin…
Évidemment, on peut toujours s’inspirer de l’expérience d’autres pays, mais à condition d’apporter les ajustements correspondant à la réalité dans laquelle on vit. Ce qui suppose une liberté suffisante. Or cette liberté de l’enseignant pose problème dans notre pays.
En effet, si dans les années 1960-début des années 70 (en référence à notre propre expérience) la responsabilité de l’action pédagogique relevait en premier lieu de l’enseignant, peu à peu le corps administratif s’arroge presque tous les pouvoirs.
La logique voudrait que, dans un domaine comme celui de l’éducation, où les risques d’erreur peuvent avoir des conséquences irréparables , lorsqu’on veut procéder à une réforme, un débat soit instauré, si ce n’est publiquement (de façon à ce que les parents s’impliquent), du moins au sein du personnel pédagogique, afin que chacun comprenne bien son rôle, notamment le corps enseignant, puisque c’est lui qui est censé mettre en pratique la réforme. Or, tout arrive à la base sous forme d’injonctions.
Ainsi, vers 1975-76, on a voulu mettre en place «l’école fondamentale polytechnique», un système «importé» d’un pays de l’Europe de l’Est, censé préparer les élèves à la fin du cycle moyen, soit à continuer au lycée, soit à aller vers la formation professionnelle, soit encore à être «orientés vers la vie active», c’est-à-dire exclus, mais supposés armés de notions techniques élémentaires qui leur permettraient de s’insérer dans le monde du travail.
J’enseignais alors au collège et on avait confié à un certain nombre d’enseignants (dont je faisais partie) l’expérimentation du premier dossier du nouveau programme de français de 1ère AM. Nous avions rédigé des comptes-rendus et on nous avait réunis à Alger (pour la région centre du pays) sous l’autorité de quelques inspecteurs généraux.
En toute liberté, nous avions soumis des réserves importantes, ainsi que des propositions de corrections, dont une grande partie étaient approuvées par les inspecteurs. Mais à la rentrée de septembre, dans le nouveau manuel qui était distribué, le fameux dossier n’avait subi aucune modification – pas une virgule ! – par rapport à la version qui nous avait été soumise pour expérimentation.
En fait, sous la pression des effectifs à scolariser et des échéances fixées par l’administration, la priorité était donnée aux statistiques à afficher et au respect des délais promis, plutôt qu’à la qualité du travail. D’ailleurs, le cycle «fondamental» qui devait initialement durer 10 ans (6 ans au primaire et 4 ans au collège) a été amputé d’une année au niveau du collège, ce qui a provoqué un chamboulement dans les programmes et a créé, trois ans plus tard, un «embouteillage» au niveau du lycée, avec l’arrivée en 1°AS de deux promotions en même temps (l’une après 4 ans au collège et l‘autre après 3 ans seulement).
La durée de 4 ans pour le cycle moyen n’a été rétablie que bien plus tard, (c’est-à-dire après bien des dégâts), et encore en réduisant le cycle primaire à 5 ans au lieu de 6, comptant sur la compensation d’un «préscolaire», qui tarde toujours à se généraliser à l’heure actuelle.
Cette course contre la montre dans un domaine qui ne la supporte pas comme celui de l’éducation a des effets néfastes : les recrutements d’enseignants sans niveau suffisant, l’accélération — parfois absence totale — de leur formation, provoquent une baisse de niveau désastreuse. Plus grave encore, ce recrutement massif touche même des cadres au haut niveau de la hiérarchie, d’où parfois infiltration d’incompétences, donnant lieu à des décisions inadéquates, voire à des dérives.
Or, en principe, toute réforme scolaire devrait faire l’objet d’un suivi, d’une évaluation périodique sur la base de rapports d’enseignants, de chefs d’établissements et d’inspecteurs, afin d’apporter les adaptations et les modifications nécessaires. Dans les faits, il n’en est rien. A titre d’exemple, les inspecteurs sont tenus de rédiger chaque trimestre un rapport de leurs activités, incluant des remarques et des suggestions destinées à régler les problèmes au fur et à mesure qu’ils apparaissent.
Parfois, les solutions ne nécessitent qu’un simple feu vert des autorités. Mais les responsables de la Direction de l’Éducation au niveau la wilaya insistaient sur les délais de remise de ces rapports mais n’en donnaient aucune suite (du moins dans la décennie 2000, où j’exerçais le métier d’inspecteur). Je pense que le problème de l’enseignement réside aussi là : l’esprit bureaucratique qui accorde plus d’importance aux formalités administratives qu’au travail de fond.
La bureaucratie constitue une force d’inertie qui bloque toute initiative émanant de la base, alors que celle-ci pourrait prendre en charge des problèmes parfois très simples au départ, mais qui se complexifient au fur et à mesure que les solutions tardent à venir.
En effet, il a fallu attendre plus d’une dizaine d’années pour remettre en cause la méthode «structuraliste» appliquée à l’École fondamentale, notamment pour les langues. C’était une méthode marquée par le béhaviorisme qui était déjà remise en cause à l’époque dans les pays où elle avait vu le jour. Basée essentiellement sur la mémorisation (avec les fameux «exercices structuraux» ), elle ne laissait pas suffisamment d’initiative à l’élève, pas plus qu’à l’enseignant. Celui-ci, vu le manque de formation dans la majorité des cas, se croyait obligé de suivre à la lettre le manuel officiel et les fiches pédagogiques déjà préparées qui l’accompagnaient. Il ne faisait qu’«exécuter les exercices» (expression assez courante alors chez des enseignants), parfois sans en comprendre les objectifs.
Pendant ce temps, la recherche avait déjà changé de cap, avait basculé vers un nouveau paradigme. D’après les études sur les processus d’apprentissage, il s’avère que celui-ci n’est pas une une accumulation de connaissances, mais une modification, une correction par l’élève lui-même de connaissances qu’il a déjà acquises, en les mettant en rapport avec les connaissances nouvelles.
L’apprentissage n’est pas une transmission mécanique de connaissances mais résulte des interactions entre l’enfant et son environnement matériel et surtout humain : les personnes avec lesquelles il échange au sein de sa famille d’abord, puis à l’école. C’est pourquoi les enfants dont les parents et les enseignants ont un bon niveau de formation ont moins de difficultés à se former eux-mêmes. Bourdieu parle de «capital culturel», qui ne désigne pas seulement l’étendu du savoir chez les parents mais aussi les schémas de pensée, la mentalité, les valeurs acquises suite à ce savoir. «On n’enseigne pas ce que l’on sait, mais ce que l’on est», disait Jean Jaurès il y a plus d’un siècle. D’où l’importance à accorder à la qualification des enseignants, pas seulement donc sur le volet des compétences académiques, mais également sur celui de l’éducation proprement dite, c’est-à-dire du «savoir-être» (sens des relations humaines, goût du travail bien fait, esprit de rigueur, etc.)
Au fil du temps, on assiste à une baisse de niveau de plus en plus dramatique. Même en langue arabe, matière qui a pourtant toujours joui d’un volume horaire au-delà des normes, la qualité est absente : niveau de recrutement des enseignants insuffisant, méthodes archaïques, dont certaines héritées de l’école traditionnelle, comme le «parcoeurisme» ou les châtiments corporels (récemment encore, une vidéo scandaleuse circulait sur les réseaux sociaux, montrant une enseignante tapant à l’aide d’une règle sur les doigts de ses élèves…) .
Les «innovations» dictées par l’administration peuvent parfois prendre la forme d’une simple circulaire : par exemple, la réduction de la durée des séances de cours à 45 minutes au lieu d’une heure, dans le cycle primaire. Théoriquement, cette réduction, appliquée seulement dans certains établissements de pays avancés, permettrait une meilleure concentration, un engagement plus actif, une progression correspondant mieux au rythme des enfants… Le quart d’heure restant était destiné en principe à une récréation, qui a toute son importance pour le bien-être physique et mental des élèves à cet âge-là.
Mais chez nous, cette «innovation» n’avait même pas été suffisamment expliquée aux enseignants, si bien que dans la pratique on n’a fait que réduire l’horaire de présence des enfants à l’école en jumelant à chaque fois deux séances de 45 mn en une seule de 90 mn ! En plus de l’objectif ainsi manqué, un problème nouveau a surgi : les enfants passant moins de temps à l’école, les parents qui travaillent se retrouvent avec des difficultés à gérer leur garde, difficultés rendues encore plus complexes par le système de «double vacation» dans les établissements où il est de mise.
On pourrait parler de la même manière d’autres réformes telles que l’introduction de l’«approche par compétences» au niveau de l’Éducation nationale, du système LMD au niveau universitaire… Menées à la hussarde, le manque de formation (et même d’une simple information parfois) a fait que dans le premier cas, les enseignants exploitaient les nouveaux manuels selon les anciennes méthodes, et dans le second cas, plaquaient simplement, aux intitulés des nouveaux modules, ce qu’ils avaient compris des contenus qu’ils avaient eux-mêmes reçus en tant qu’étudiants .
L’uniformisation, confondue avec l’égalité des chances, est un autre «fléau» de l’école algérienne. Il est aberrant que le même programme à une virgule près soit dispensée à la même cadence et de la même manière aux quatre coins du (vaste !) territoire national. Alors qu’un même objectif pédagogique peut être atteint à l’aide de supports différents, d’activités différentes, de méthodes différentes, selon les moyens disponibles, les avantages ou les contraintes de l’environnement… On oublie souvent que l’objectif final de l’enseignement n’est pas le volume des connaissances (des programmes) mais la formation de l’esprit, le développement des facultés intellectuelles de l’être humain (développement de l’intelligence, de l’esprit critique, d’analyse, faculté d’adaptation…)
Par ailleurs, l’apprentissage est d’autant plus efficace qu’il résulte d’échanges, d’interactions entre des individus ou des groupes ayant des connaissances et des expériences diversifiées. Ne dit-on pas que c’est du débat que jaillit la lumière ? Mais avec des discours uniformisés, peut-on avoir des débats ? peut-on avoir de la lumière ? C’est plutôt la sclérose du savoir, et partant, la sclérose de l’esprit…
On pourrait ainsi multiplier les exemples de réformes contre-productives, dont certaines s’apparentent même à du sabotage. Mais envisageons plutôt des solutions. Première question qui vient alors à l’esprit : dans la situation actuelle, par où commencer ? Le système fuit de partout, les carences sont criardes à tous les niveaux. Cependant, un problème crucial, fondamental, conditionne tout le reste : le manque de formation chez les enseignants. C’est donc par là qu’il faut commencer : la formation de formateurs qualifiés.
Afin de relever le niveau d’instruction de la population et œuvrer à l’émergence de cadres qualifiés selon les exigences de l’industrialisation, dès la fin du XVIII° S. (en Allemagne dès 1753, le pays ayant pris une avance sur le plan culturel et scientifique suite notamment à la Réforme de l’Église — Martin Luther…) mais surtout au cours du XIX°Siècle, les pays européens érigèrent des «écoles normales», établissements de formation des enseignants, en commençant par le niveau supérieur. La formation y était de haute qualité : des personnalités telles que Pasteur, Taine, Bergsone, Sartre… avaient été normaliennes (Cf. Wikipédia).
En Algérie, l’École normale de Bouzaréah fut fréquentée par Albert Camus, Émmanuel Roblès, Mouloud Feraoun… Dotés d’une culture consistante, les professeurs comme les instituteurs, avaient le statut de fonctionnaires de l’école publique, et leur mission était, en plus de l’enseignement, d’éclairer et de moderniser la société, en insufflant des valeurs républicaines : esprit citoyen, respect des autres, altruisme, solidarité, etc.
En France, il y eut deux types d’écoles normales : les écoles normales «primaires» pour la formation des instituteurs et les écoles normales «supérieures» pour la formations des professeurs du secondaire et des universités. Ces dernières, très sélectives, étaient (et sont toujours) hissées au rang des grandes écoles, ouvertes à la formation d’une élite qui a fait avancer la recherche dans toutes les branches du savoir (voir la notoriété de «Normale Sup» en France). Beaucoup de «normalien(ne)s» sont devenu(e)s des personnalités célèbres du monde culturel et scientifique, ou ont accédé à de hautes fonctions de l’État.
C’est grâce à ce système que, dans les pays développés (même aux États-Unis), la formation d’une relève est assurée non seulement pour l’encadrement de l’enseignement, mais aussi pour la recherche et l’innovation dans tous les domaines. C’est là qu’il y a de la recherche pour le renouvellement des méthodes pédagogiques, pour ce qui nous concerne.
En Algérie, pendant le période coloniale, il y avait trois écoles normales d’instituteurs (profil de sortie : BAC + 1) : à Alger, à Oran, et à Constantine. Les E.N.S. (BAC+4) étaient centralisées en France «métropolitaine». A l’indépendance, pour répondre aux besoins urgents du pays, des écoles normales étaient crées dans chaque wilaya pour la formation d’«Instructeurs du Plan de Scolarisation», avec des sections francisantes et des sections arabisantes. Elles recrutaient avec le niveau de «Fin d’études primaires» ou le niveau de 6ème, pour la préparation du B.E.G. Les programmes étaient les mêmes que ceux de l’enseignement général, avec en plus quelques matières spécifiques.
A l’issue du B.E.G, les «élèves-maîtres» suivaient une année de formation pédagogique, alliant des cours théoriques et des stages pratiques. Une fois sur le terrain, ils continuaient leur formation à distance, encadrés par leurs inspecteurs, afin d’accéder au gade d’instituteurs. Pour le cycle secondaire, la formation des enseignants était assurée dans les trois écoles normales héritées de la colonisation, devenues E.N.S.
C’est avec les quelques promotions formées dans ces établissements que l’école algérienne a démarré réellement, et les résultats étaient appréciables. Les bacheliers de l’époque pouvaient suivre sans difficultés, et parfois même avec brio, des études dans les universités et autres écoles d’ingénieurs en Europe ou ou en Amérique.
Mais ce système ne dura pas. Dès le début des années 1970, voulant mettre les bouchées doubles, on convertit les écoles normales en I.T.E. (Institut de Technologie de l’Éducation), avec un cursus écourté et des programmes spécifiques : la dégradation commençait.
Notons qu’en Europe, si le niveau de l’université semble avoir baissé avec le système LMD, les grandes écoles n’ont pas perdu de leur qualité : elles sont toujours restées très sélectives et ne sont pas astreintes à subir des réformes sans y apporter les adaptations qu’elles jugeaient adéquates. Ces établissements ont toujours joui d’une autonomie pédagogique.
Si l’on veut réellement améliorer les choses, on doit tirer de ces expériences les leçons qui s’imposent : dans l’enseignement, la formation d’une élite est inévitable. En Algérie, nous avons un certain esprit égalitariste, mais nous devons admettre que c’est l’élite qui peut se multiplier elle-même et assurer des formations à des niveaux inférieurs, et non l’inverse.
On devrait donc commencer par créer des établissements d’excellence dédiés à la formation d’une élite suffisante (à l’instar de ce qui semble être tenté pour l’informatique et certaines technologies, avec la création d’écoles supérieures spécialisées). Ces établissements fonctionneront en tenant compte de l’évolution des savoirs et savoir-faire universels et des technologies de la communication.
Il est difficile de repartir à zéro, mais tout n’est pas encore perdu. Pour démarrer, il y a encore en Algérie quelques compétences qui pourraient être mobilisées immédiatement pour la formation de formateurs, mais il y a aussi la diaspora qui pourrait constituer une ressource intéressante, comme il est possible également de recruter des cadres à l’international sur concours et sous contrat individuel (sans passer par des conventions interétatiques dont nous avons déjà fait la mauvaise expérience…) Une partie des formations pourrait se faire d’ailleurs à distance ou sous forme de séminaires périodiques.
Évidemment, cela nécessiterait des conditions attractives : offrir des salaires et des avantages sociaux intéressants. Il y a lieu de rappeler que, si jusqu’à la fin des années 1970 les enseignants étaient motivés, travaillaient avec enthousiasme pour la plupart , c’est parce que les salaires et les avantages de la profession offraient une véritable promotion sociale : pouvoir d’achat assurant un niveau de vie «moderne», droit au logement de fonction gratuit pour les enseignants du primaire, prime de logement pour ceux qui n’en avaient pas besoin, prime de zone déshéritée, etc. Pour les P.E.M. et P.E.S., les communes étaient tenues de les loger (des programmes étaient réalisés à cette fin par l’O.P.G.I.). Ainsi traités, les enseignants pouvaient jouer le rôle de modèles, de référence pour les jeunes générations.
En plus d’un confort matériel, l’enseignant — comme l’intellectuel en général — a aussi besoin d’un confort moral : une liberté au niveau de l’action pédagogique, une liberté d’exprimer son opinion, de débattre, de prendre des initiatives etc. L’université devrait jouir d’une autonomie dans la gestion pédagogique. Le savoir ne devrait pas dépendre d’une bureaucratie.
Si l’on veut donc redresser la situation et mettre un frein à (et pourquoi pas inverser) la fuite des cerveaux, il faut investir dans la ressource humaine, qui, elle seule — et non les ressources naturelles — peut assurer le développement du pays dans tous les secteurs. En somme, si l’on veut faire progresser l’Algérie, peuple et pays, il faut ré-insuffler à la jeunesse le goût des études et de l’effort (ce qui offre les vraies perspectives d’avenir), afin qu’elle soit à même de produire et non seulement de consommer, les biens matériels dont elle a besoin, mais avant tout… les idées !
Hadj-Moussa, Maître de conférences en retraite.
Irrécupérable ?
Absolument, biidhnilah, hamdoulah, machalah.
In3el din limayhabnach en plus.
Oulaaa! De quoi parlez vous Monsieur? J’ai chuté lourdement à la fin de votre contribution et … complètement sonné de revenir à la dure réalité. De quoi et à qui parlez vous cher Monsieur ? Ceux qui président à la destinée du pays, visionnaires et sensés sont nos politiques et le plus savant à bien dit: ‘former nos chérubins jusqu’à l’apprentissage complet du coran en terminale pour leur remettre le diplôme du BAC’! Cet énergumène est le miroir des autres et ils ont tous les leviers de l’éducation nationale. De quoi et à qui parlez vous Monsieur ? Ceux qui vous sont toute ouïe ont beaucoup alerté sur la décadence de l’école mais sont non seulement réduits au silence mais taxés de réactionnaires et d’anti ´oumaiste (ouma!). La question revient au galop comme le naturel : ou va l’Algerie? Vers la fuite en avant à sacrifier des générations encore !