8 mai 2024
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Les conséquences d’une révolution inachevée

OPINION

Les conséquences d’une révolution inachevée

L’Algérie est dans la phase la plus difficile. Des citoyens préfèrent mourir en Méditerranée que de patienter ou de lutter pour avoir un avenir meilleur. 

C’est le désespoir qui pousse des familles entières à prendre le risque pour une émigration clandestine improbable sur des embarcations surchargées. Les images qui nous arrivent des côtes espagnoles et algériennes sont insupportables, elles ont alerté l’opinion nationale et internationale. Les scènes dramatiques où on voit des mères de famille avec enfants repêchées sur les rivages et plages résument en effet la situation du pays.

L’occasion qui s’est présentée pour les Algériens un certain 22 février 2019 n’a pas été saisie d’une manière à créer une dynamique pour peser dans un processus de changement. La révolution qui a donné un grand espoir particulièrement pour la jeunesse et la femme algérienne est prise en otage.

Sauf à la considérer comme un rapport de force, sinon c’est une contestation populaire qui se résume à un ras-le-bol que chaque citoyen algérien a essayé d’exprimer à sa façon. Individuellement, il y a eu des expressions qui méritent d’être examinées pour reconnaître le génie et l’intelligence des manifestants. Un pacifisme soutenu par de l’humour et la bonne humeur a donné du fil à retordre à un pouvoir qui a tout fait pour pousser la société algérienne à la dérive.

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Dommage. A défaut de s’organiser et d’accepter nos altérités, la révolution dite du sourire qui a pris une forme d’attitude dilatoire est restée à faire des marches chaque vendredi sans lendemain. L’élite politique est réduite à faire du populisme au lieu de relayer les messages envoyés par une société en panne de perspective et débattre les idées émanant des cercles de réflexion. D’autres acteurs politiques, soit par cupidité, jalousie, égoïsme, et  par compétition malsaine ou par calcul, ont contribué à une impasse dont  nous ne pourrons sortir sans conséquences. C’est une chape de plomb qui s’abat sur la société.

Donc, aujourd’hui si le pouvoir se réorganise pour accentuer son autoritarisme, il faut bien se poser des questions qui gênent ou bien se remettre en cause. Si les militants sont injustement incarcérés se retrouvent presque abandonnés et sans une solidarité bien déterminée sur le terrain, il faut bien en assumer un certain sentiment de culpabilité sur leur sort.

On vient de vivre l’un des étés les plus dramatiques et le plus chaud. Les arrestations arbitraires, le Covid-19 et les incendies ont créé des frustrations et des désillusions chez la majorité des Algériens, c’est un désespoir programmé par un pouvoir qui ne cesse de proférer des menaces.  

Aujourd’hui, la situation devient intenable, la dégradation du pouvoir d’achat qui s’ajoute à un lot de problèmes cités plus haut pousse le citoyen à prendre le large sur des embarcations de fortune.

Avec de telles circonstances, il est difficile d’imaginer l’avenir sans perspective politique. Les deux années de la révolution n’ont pas été suffisantes pour mettre sur pied un projet de transition par exemple. Et pourtant, on a été alerté à temps, en mars 2019, par des femmes comme Djamila Bouhired et par des hommes comme Dr Sadi.

Sans doutes, beaucoup d’analystes avaient déjà exprimé les conséquences d’une révolution inachevée, c’est comme détruire sa propre maison avec l’espoir de la reconstruire sur de bonnes bases, mais au final, rien n’est fait, le projet fut abandonné et se retrouver sans abri et aller chez les voisins pour trouver un certain refuge.

Donc, la famille algérienne vit actuellement une conséquence, elle se retrouve livrée à elle-même et sans protection, et elle cherche à partir pour trouver refuge ailleurs que dans son propre pays. Et l’Europe est un endroit sûr qu’il faudrait atteindre. 

Il y a de quoi leur donner raison pour comprendre leurs inquiétudes, car du jour au lendemain les Algériens découvrent des « ennemis » auxquels ils n’ont jamais été associés. Le Marocain et le Kabyle deviennent des cibles à abattre. La manière avec laquelle a été sacrifié le hirakiste Djamel Bensmail à Larbaa Nath-Iraten pour discréditer la Kabylie est plus qu’inadmissible, c’est un crime d’Etat. C’est une exécution bien orchestrée sans aucune magnanimité.

L’associer au pays voisin le Maroc est une vieille pratique. L’affaire de Cap Sigli est encore dans les mémoires des Algériens, le scénario est cousu de fil blanc. Un avion marocain qui survolerait le ciel algérien de l’ouest à l’est sans qu’il soit repéré est la pire des humiliations pour un État. Comment est-ce possible ?

La situation actuelle exige qu’elle soit gérée avec beaucoup de lucidité afin d’éviter des mésaventures comme celle de mourir en Méditerranée où tomber dans le piège de la provocation et de la propagande.

Pour ne pas finir en marge de l’Histoire, il est à chacun d’avoir une responsabilité pour parer aux conséquences inévitables.

Auteur
Mahfoudh Messaoudene

 




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