Dans ce recueil lumineux, Youcef Zirem transforme la douleur de l’exil et les blessures du monde contemporain en force de beauté et de tendresse. Entre lucidité et espérance, ses poèmes célèbrent la bonté, la nature et la fraternité, faisant de chaque mot un geste de résistance, où la poésie devient à la fois refuge et acte de foi en l’humanité.
Les étés sans fin de ton sourire est un recueil de poésie publié en 2025 aux Éditions du Net. Ce livre, empreint de douceur, de mélancolie et d’humanisme, poursuit le long parcours poétique de son auteur, Youcef Zirem, déjà reconnu pour ses œuvres mêlant engagement, exil et quête de sens. À travers ce recueil, Youcef Zirem nous convie à une méditation lumineuse sur la paix, la bonté et la mémoire, tout en explorant les blessures du monde contemporain.
Youcef Zirem, écrivain, poète et journaliste algérien, est une voix singulière de la littérature francophone. Né en Kabylie, il a grandi dans un contexte politique et social difficile, marqué par la censure, la violence et la quête d’identité. Très tôt, il s’impose comme un écrivain de la liberté, refusant la compromission et défendant la vérité de la parole poétique. Contraint par les circonstances, il s’exile en France, où il poursuit son œuvre avec la même ferveur, transformant la douleur du déracinement en source d’inspiration.
Son œuvre est vaste et variée : romans, essais, récits et poésies s’y côtoient dans une cohérence remarquable. Parmi ses ouvrages les plus connus figurent La Cinquième mascarade, Le Sésame d’Alger, Libre, comme le vent et Eveiller les consciences. Tous témoignent de sa fidélité à des valeurs essentielles, la liberté, la dignité, la solidarité, et de sa volonté constante de faire de la littérature un instrument d’émancipation. Chez Youcef Zirem, l’écriture n’est jamais gratuite : elle est un acte de lucidité et de compassion, un moyen de redonner sens à l’existence humaine.
Dans Les étés sans fin de ton sourire, cette exigence morale se double d’une sérénité nouvelle. Le poète, sans renoncer à son engagement, choisit une voie plus apaisée, tournée vers la sagesse et la beauté. Il évoque la guerre, la dictature, l’exil, mais aussi la nature, l’amour, la tendresse et la fraternité comme autant de forces de résistance face à la brutalité du monde. Chaque poème, souvent court et méditatif, semble un fragment de vérité, un éclat de conscience qui invite le lecteur à retrouver la simplicité des émotions essentielles.
Le recueil se déploie comme un voyage intérieur. Youcef Zirem y exprime un profond désir de paix, non seulement entre les peuples, mais aussi au sein de l’individu. Sa poésie est une quête d’équilibre : entre l’ombre et la lumière, entre la colère et la compassion, entre la lucidité et l’espérance. À travers des images récurrentes, la lumière, le sourire, la mer, la montagne, le soleil, l’enfance, il tisse un fil symbolique entre l’intime et l’universel. Ces motifs incarnent la permanence du vivant face à la fragilité du monde.
Le rapport à la nature y joue un rôle fondamental. La montagne, la mer ou la pluie deviennent des miroirs de l’âme, des refuges spirituels où l’homme retrouve son essence. Dans la beauté du monde, Youcef Zirem trouve la force de résister à la laideur de la société moderne. Il s’oppose au vacarme, à la superficialité et à l’indifférence contemporaine en célébrant la lenteur, la contemplation, le silence. Sa poésie, tout en douceur, devient une prière laïque, un espace de réconciliation entre l’homme et l’univers.
L’exil, thème récurrent dans son œuvre, traverse également ce recueil. Mais il n’est plus ici une blessure ouverte : il devient une expérience initiatique. Loin de sa terre natale, le poète apprend à habiter le monde autrement, à transformer la nostalgie en lucidité. L’exil devient le lieu d’une double appartenance, à la fois douloureuse et féconde : l’enracinement dans la mémoire et l’ouverture à l’universel. Ce mouvement entre le souvenir et l’espoir confère à la poésie de Youcef Zirem une dimension profondément humaine et intemporelle.
L’apport majeur de Les étés sans fin de ton sourire réside dans sa capacité à réconcilier la lucidité et l’espérance. Youcef Zirem écrit sans illusions sur l’état du monde. Il dénonce la violence, la corruption, le racisme, la perte de repères et l’égoïsme triomphant. Pourtant, il choisit de croire encore en la bonté et en la beauté. Son regard est clair, mais son cœur reste ouvert. Le titre du recueil illustre parfaitement cette philosophie : malgré la noirceur des temps, il reste des saisons de lumière dans les visages et les gestes humains. Les “étés sans fin” représentent cette chaleur inaltérable de l’amour et de l’espoir que rien ne peut éteindre.
Sa poésie, dépouillée et sincère, rappelle que la résistance ne passe pas toujours par le cri, mais aussi par la douceur. Elle réaffirme que la vraie révolte peut être spirituelle et esthétique : celle qui consiste à préserver sa capacité d’émerveillement malgré la dureté du monde. Chez Youcef Zirem, le poète devient un veilleur, un témoin de la douleur mais aussi un semeur de lumière. Sa parole, claire et musicale, agit comme une flamme fragile mais tenace dans la nuit du désenchantement.
L’impact de cette œuvre s’inscrit dans la continuité d’une poésie engagée mais apaisée, qui s’adresse à la fois aux exilés, aux rêveurs et à tous ceux qui refusent le cynisme contemporain. Youcef Zirem prolonge la tradition des poètes humanistes pour qui l’écriture n’est pas un ornement, mais un devoir moral. Il s’inscrit dans la lignée d’auteurs tels que René Char, Nazim Hikmet ou encore Tahar Djaout, qui voyaient dans la poésie un moyen d’éveiller les consciences et de sauvegarder la dignité de l’homme.
Sa poésie n’a rien d’élitiste. Par son style limpide et sa musique intérieure, elle s’adresse à tous. La clarté devient ici une forme de résistance à la complexité factice du monde moderne. Dans une époque saturée d’images et de mots vides, Youcef Zirem redonne au verbe sa valeur de vérité. Sa langue est simple, mais elle vibre d’une profonde intensité spirituelle. Elle révèle que la beauté n’a pas besoin d’emphase : elle réside dans la sincérité du regard et la justesse du mot.
Ce qui rend son œuvre particulièrement touchante, c’est sa capacité à unir la pensée et la tendresse. Youcef Zirem ne sépare jamais l’intellect du cœur. Ses poèmes témoignent d’une rigueur de réflexion, il médite sur le temps, la mémoire, la condition humaine, mais aussi d’une grande douceur. L’amour, l’amitié, la compassion et le pardon y occupent une place centrale. Le poète y apparaît comme un être vulnérable mais courageux, conscient de la finitude de l’existence, et décidé à en faire malgré tout un chant d’amour.
Son engagement n’est pas politique au sens étroit du terme : il est moral et poétique. En refusant la haine, il défend une autre forme de lutte, celle de la bienveillance. Il oppose au désespoir du monde la clarté de la poésie. Sa voix s’adresse à tous ceux qui cherchent un sens dans un univers troublé. Ainsi, Les étés sans fin de ton sourire devient un espace de respiration, un lieu où l’on peut encore croire à la beauté des mots, à la fraternité, à la puissance du rêve.
Le rôle du poète, tel que Youcef Zirem le conçoit, est celui du gardien de l’humanité. Il veille sur les valeurs menacées, la liberté, la justice, la bonté, et préserve, par la parole poétique, ce qui reste d’humain dans un monde déshumanisé. Il ne se contente pas de dénoncer la laideur : il travaille à la transfigurer. Il fait de la poésie un art de la réparation, un moyen de redonner au monde un visage plus doux. En ce sens, il est à la fois témoin et guérisseur.
Les étés sans fin de ton sourire est un recueil d’espérance lucide. Youcef Zirem y conjugue la tendresse du cœur et la rigueur de la pensée pour rappeler que, même dans un monde blessé, la poésie demeure un acte de résistance et de foi. Il ne s’agit pas d’un espoir naïf, mais d’une confiance exigeante, conquise au prix de la lucidité. Loin de toute idéalisation, Youcef Zirem choisit de croire en la vie, en la beauté et en la bonté des êtres.
Ce livre prolonge son engagement humaniste et poétique : il invite à ne jamais renoncer à la lumière, à préserver le sourire face aux tempêtes, à voir dans chaque geste de générosité la promesse d’un monde meilleur. Le sourire évoqué dans le titre devient le symbole même de cette philosophie : un sourire qui traverse les épreuves, qui défie la tristesse, qui incarne la persistance du bien.
Les étés sans fin de ton sourire n’est pas seulement un recueil de poèmes, c’est une leçon de vie. Par la clarté de son verbe et la pureté de son regard, Youcef Zirem nous rappelle que la poésie a encore un rôle à jouer dans notre époque : celui de guérir, de relier et d’éclairer. Son livre est une invitation à la tendresse, une célébration du courage tranquille de l’amour, et une foi inébranlable dans la beauté du monde.
Ainsi, à travers ce recueil, Youcef Zirem nous laisse un message d’une actualité brûlante : même dans les heures sombres, il existe toujours un été intérieur, une lumière que rien ne peut éteindre, celle des sourires, des gestes de paix et de la poésie, qui demeure l’ultime refuge de l’humanité.
Brahim Saci
Les étés sans fin de ton sourire, Éditions du Net, 2025

