5 mai 2024
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Nazim Hikmet soutiendrait-il El-Kadi Ihsane ?

El Kadi Ihsane
Le procès d’El Kadi Ihsane est celui de la presse libre

« Il faut vivre malgré les bourreaux. Cette volonté de vivre pour le combat, beaucoup d’entre vous l’ont. Je cite le nom d’Abane avec amour et respect», notait le poète et dirigeant communiste turc Nazim Hikmet en s’adressant aux détenus politique algériens en novembre 1952.

Le texte du message de solidarité du poète turc aux détenus algériens durant les procès du «complot du PPA» a été publié sur Alger Républicain du 30 novembre 1952 en pleine campagne mondiale pour la Paix contre les guerres au Viet-Nam, en Malaisie et en Corée menées par le bloc Atlantique contre l’Union soviétique et la nouvelle Chine.

À travers son message, Nazim Hikmet apportait non seulement le soutien de son parti à la campagne pour la paix de ses camarades algériens, mais aussi aux jeunes nationalistes qui tentaient de passer à l’action armée libératrice. À la publication de ce texte, l’immense poète turc, tout comme le mouvement national algérien ignoraient encore l’existence de l’O.S., mais il s’inscrivait déjà dans le soutien et la solidarité avec les détenus de la fraction révolutionnaire du MTLD et sa jeunesse révolté et structuré. Un tel appui s’adressait aussi aux jeunes cadres du PCA qui confirmeront leur adhésion au programme de la lutte armée anticolonialiste quelques années plus tard.

Mais que vaut cette symbolique historique en soutien à des prisonniers politiques de 1952 en rapport avec ceux que l’on qualifie, aujourd’hui, de prisonniers d’opinion en Algérie ?

Le grand poète turc, après avoir passé 13 ans dans les geôles de la dictature kémaliste, sait que le procès et l’entrée en prison sont vécus comme une dépossession de l’image de soi et que toute écriture solidaire de la part de ceux qui sont du dehors en direction de ceux qui sont du dedans, est une forme de lutte pour ne pas se perdre, permettant la reconstitution du récit de cette cohérence de soi et sur son vécu. C’est un besoin vital tant pour le «solidarisant » que pour le « solidarisé » que d’écrire dans une mouture qui va à l’encontre de ce lieu austère et sécuritaire, qu’est la prison.

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Celles et ceux qui gisent dans ces lieux de l’exclusion, diront tout comme Pierre Goldman en 1975, que « je voulais être jugé sur les fats. Je refusais qu’on prétendit les déduire de ma propre personnalité ». Ils ont fini par être jugés et pris en zone (étymologie du mot prison) pour être contraint de survivre dans ce lieu, après avoir vécu des années à façonner leur corps, leur idée et leur devenir.

Qu’ils soient berbéristes, marxistes, humanitaires alternatifs ou d’une quelconque idée qui permet d’avancer et aidant chaque individu d’être visible à l’encontre de l’exclusion, ils méritent une solidaire adhésion non en direction de leur idéal de lutte qui se discute en situation de liberté, mais envers leur statue qui exige de leur porter la voix qui leur a été interdite par une justice, que Robert Badinter considère comme celle qui « est aussi une incarnation ratée de cette exigence de justice » (in, L’exécution, 1973, p. 35).

Le rappel mémoriel entre détenus politiques d’antan et ceux d’aujourd’hui est toujours à faire et avec un intérêt certain. Sommes-nous aussi loin du rapport historique qui lie la question nationale et coloniale de la question démocratique au point de ne plus voir que toutes les luttes menées par les Algériens, sur le plan des libertés démocratiques étaient étroitement imbriqués à la question d’indépendance politique en contexte colonial.

Avons-nous déjà été éloignés de ce contexte ? Ou sommes-nous en train de reproduire les mêmes réflexes de l’incarcération de celles et ceux qui ce sont forgés le long de leur existence des valeurs et des idées contraires à ceux qui n’ont fait que changer le fusil d’épaules, poursuivant la politique contre indépendantiste de se soumettre à de nouveaux hégémonismes.

La condamnation arbitraire d’El Kadi Ihsane et le silence des vaincus !

Le cadre politique et social d’une Algérie encore semi-féodale, dans laquelle se mène le balais des arrestations ciblées, les procès contre les activistes d’opinions diverses et les peines sont infligées sous la bannière d’une manu pulita  démantelant le «gang» d’une bourgeoisie rentière et parasitaire. Ce déboulonnement se réalise dans le redéploiement d’une frange de cette même bourgeoisie en direction du pôle hégémonique sino-slavophile avec un leurre idéologique que développent les bourgeoisies affairistes monopolistes d’Etat. La semi-colonialité de cette frange de la bourgeoisie compradore trouve bien son suc dans certaines pratiques politiques du mouvement national lui-même.

El-Kadi Ihsane pour mémoire

Depuis l’avènement du mouvement national algérien, la bourgeoisie coloniale a toujours cherché la voie de la compromission avec la capitalisme colonial et son bloc Atlantique. À l’indépendance politique du pays, elle-même qui résultat d’un compromis entre bourgeoisies et maîtres tenanciers, le compradore national se terrait durant le régime du colonel Boumediene (contexte mondial oblige), pour se déployer enfin dans l’ensemble des appareils de l’Etat qui a été soumis à de multiples pressions et embargos avec le début de la fin de l’hégémonisme social-révisionniste tant à Moscou qu’à Pékin.

La répression politique dans l’Algérie de l’après-1980 forme une démonstration de force à l’encontre de chaque grand ou petit mouvement qui tentait d’exprimer des idées opposées aux «constantes valeurs de la nation» ou «les intérêts suprêmes du pays».

Déjà, à cette époque, l’Ihsane d’aujourd’hui avait forgé son discours de la contestation contre les tergiversations et autres anomalies de la classe dirigeante en nette position de tirer sur tout ce qui bouge. Le militant communiste révolutionnaire est pleinement engagé dans toutes les luttes et toutes les discussions qui lui ont valus d’outrageantes incarcérations de la part d’une classe dirigeante réactionnaire.

Si Nazim Hikmet était encore de notre temps, aurait-il le même réflexe avec le même intérêt d’apporter son soutien aux prisonniers d’opinions en Algérie ? C’est à l’instant même où nous posions cette question qu’il nous paru et d’une façon très modeste d’apporter ce qui suit.

Nous avions eu à collaborer avec Ihsane durant sa direction de la rédaction du quotidien La Tribune à un moment où les luttes pour le devenir même d’une Algérie qui allait basculer en «Djazaïrstan». Le souvenir de son combat à l’intérieur même de la rédaction afin de faire passer ou non, nos contributions sur Jean Amrouche et Henri Cachin-Kréa ou encore sur les deux pages centrales, d’un long article sur le champs de tir militaro-spatial français de Hammaguir à apprécier, démontrait de ses capacités intellectuelles à mettre en valeur cet ensemble d’indices et d’indicateurs touchant à notre mémoire historique. Nous n’étions qu’un jeune correspondant régional auprès de sa plume et de celle de la regrettée Baya Gasmi.

Durant les quelques escapades que nous faisions dans le grand «chantier» de l’inoubliable rédaction, nous ne pouvons omettre que son dévouement militant aux idées du GCR-PST et, notamment, ses attitudes éthiques et morales à mener un débat politique, surtout sur le volet économique, dans le respect et l’écoute de la diversité des propos d’analyses. Il y a eu de divergentes lectures de la situation de l’heure et avec El-Kadi Ihsane, nous n’étions pas dans les salons de la petite bourgeoisie pourrie gâtée. On ne peut évacuer de son existence, de telles rencontres, de tels débats ou de telles collaborations, minimes dans le temps soient-elles.

Face aux regrettés El-Hadj, Radouane Osmani et Saïd Chikhi, autour des amitiés politiques de certains «Lulistes» de l’ex-ORT, à celles des «dogmatiques» du MCA, c’est l’expérience brésilienne d’un PT de masse qui s’invitait à la discussion et passé par le tamis des expériences algériennes. Des amitiés où les questions de principes sont interrogées à chaque instant et dans toute cette pluralité, toutes les opinions ne perdaient de vue que l’Algérie est en train de s’enfermer de plus en plus dans l’uniformité islamiste réactionnaire et où il est «religieusement» interdit de porter la contradiction.

Depuis ces années Ihsane, il y a eu de nouvelles appréciations de situations qui sont venues frapper à nos portes. L’Algérie du temps de Nazim Hikmet, aimée et respectée des communistes et des marxistes de part le monde, ne s’est pas trop éloignée des lieux comme Bossuet et Djen Bou-Rezg.

Mohamed-Karim Assouane, universitaire

 

1 COMMENTAIRE

  1. Ohqarbi que quand je lis une certaine littérature algérienne j’ai beau me suer mes dernier pauvre neurones je n’arrive pas à comprendre le texte je me demande si j’ai vraiment appris à lire où est-ce l’école buissonnière de Guezgata qui ne m’a rien appris.

    Yakhi vous êtes tous témoins de notre temps, alors dites-moua si c’est ce texte qui est très élaboré nagh c’est notre société qui est trop compliquée et ne saurait être rendue par des mots simples.

    Je me demande comment des génies pareils se sont faits blousés comme des gogos par des ignards qui ont réussi à leur ravir le pouvoir ya Sidi. Ils sont champions pour vous passer en guise de défense un aveu de culpabilité. Comment ya Boundyou ces terribles ténors du barreau ont raté leur procès contre l’histoire, comment? Difwa je me dis que la nature ne les a pourvus d’un cerveau si complexe de surdoué que parce que ça ne sert à rien d’être intelligent. Ad qaren tkusiten kan tardest nagh immi b’uccen.

    Moua , je me dis que si la nature ne m’a pourvu que d’un nombre limité de neurones c’est uniquement pour que je ne me complique pas trop la tâche pour décrire Guezgata qui ne mérite pas plus qu’un balayage superficiel car au fond il n’y a vraiment pas de quoi raconter et pour que je ne me force pas à inventer. Je crois que c’est ainsi qu’est née la mythologie Guezgatienne où Jeddi Nosore a apprivoisé les cerbères qui surveillaient la sortie de notre village. Et comment avec son armée il vainquit les hordes sauvages qui tentaient de nous envahir. Et les Français qui n’ont jamais réussi à entrer dans notre village ce n’est pas parce qu’un village comme Guezgatta ne les interressait pas ou parce que Guezgata ne figurait sur aucune carte de géographie ,c’est parce qu’on les a repoussés.

    Je me demande pourquoi nous n’avions pas eu un Si Muhend qui nous aurait écrit un poèmedu genre : tamurt iznuzen a3quc.

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