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Le Hezbollah confirme la mort du chef militaire Ali Tabatabaï dans une frappe israélienne

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Ali Tabatabaï
Ali Tabatabaï tué par une frappe israélienne au Liban. Photo : DR

L’armée israélienne a mené ce dimanche 23 novembre une frappe sur la banlieue sud de Beyrouth. L’attaque visait, selon le cabinet du Premier ministre Benyamin Netanyahu le « chef d’état-major du Hezbollah », Ali Tabatabaï, accusé par Israël d’avoir « dirigé le renforcement et l’armement » du parti chiite.

Dans un « bilan définitif », le ministère libanais de la Santé a fait état de cinq morts et de 28 blessés dans l’attaque israélienne. L’armée israélienne avait affirmé avoir éliminé Ali Tabatabaï. Le Hezbollah a confirmé dimanche soir la mort de son chef militaire.

Inconnu du public au Liban, Haïtham Tabatabaï, qualifié par Israël de « chef d’état-major » de la formation pro-iranienne, est le plus haut commandant militaire du Hezbollah à être tué depuis le cessez-le-feu, conclu il y a près d’un an, rapporte le correspondant de Rfi à Beyrouth, Paul Khalifeh. Âgé de 58 ans, ce Libanais de père iranien a pris les rênes de l’appareil militaire du parti chiite après l’élimination par Israël de la plupart de ses hauts commandants lors de la guerre de l’année dernière.

Signe de l’importance du personnage, le secrétaire général du Conseil de sécurité iranien, Ali Larijani, a présenté ses condoléances aux dirigeants du Hezbollah. La première réaction du parti est venu du vice-président de son Conseil politique, Mahmoud Comati, qui a accusé Israël d’avoir « franchi la ligne rouge ».  Cet ancien ministre a laissé entendre que le Hezbollah pourrait riposter à l’assassinat de son chef militaire. Cependant, le communiqué confirmant la mort de Haïtham Tabatabaï publié en soirée du 23 novembre se contente de brosser le portrait du chef militaire et ne contient aucune menace de vengeance.

Le Hezbollah accuse Israël d’avoir « franchi une ligne rouge »

Si l’État hébreu est accusé d’avoir franchi « une ligne rouge », l’armée israélienne avait affirmé plus tôt ce dimanche avoir tué Ali Tabatabaï lors de la frappe le visant, menée contre un immeuble résidentiel de la banlieue sud de Beyrouth. L’armée « a frappé dans la région de Beyrouth et éliminé le terroriste Haitham Ali Tabatabaï, chef d’état-major du Hezbollah », a-t-elle déclaré dans un communiqué, qualifiant l’homme « d’agent clé et vétéran » du mouvement pro-iranien.

Pour la première fois depuis le 5 juin dernier, des appareils israéliens ont tiré trois missiles guidés sur un appartement situé dans un immeuble du quartier de Haret Hreik, au cœur de la banlieue sud de Beyrouth. 

Dans un premier temps, le Hezbollah n’avait pas confirmé sa mort. Le vice-président du Conseil politique du parti chiite, a déclaré à la presse que le Hezbollah voulait d’abord s’assurer « de la personne visée » avant une éventuelle riposte et a évoqué une « coordination avec les autorités libanaises ». Mahmoud Comati a accusé Israël d’avoir « franchi une ligne rouge », ajoutant que « toutes les options sont sur la table ».

Rfi

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Libye : rapprochement entre la Turquie et le camp de l’Est libyen dirigé par le maréchal Haftar

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Saddam Haftar, fils de l'autoproclamé maréchal Haftar en visite en Turquie.
Saddam Haftar, fils de l'autoproclamé maréchal Haftar en visite en Turquie. Crédit. photo : @Saddam Haftar.

Le rapprochement se consolide entre la Turquie et le camp de l’Est libyen dirigé par le maréchal Khalifa Haftar. Un rapprochement déjà bien entamé depuis le début de cette année 2025, mais cela s’accélère. Les visites entre les deux parties sont incessantes.

Il y a deux jours, Saddam Haftar, vice-commandant général de l’Armée nationale libyenne (ANL) et qui effectue désormais tous les déplacements à l’étranger à la place de son père, était reçu à Ankara, par le ministre des Affaires étrangères et par celui de la Défense.

Au-delà du caractère politique et économique de cette visite – la troisième de Saddam Haftar en Turquie en 2025 – elle acquiert une valeur géostratégique pour la Turquie.

Ankara cherche à rééquilibrer les rapports avec les parties libyennes pour mieux défendre ses intérêts, dans ce pays, et pour en demeurer l’acteur majeur et le plus influent dans ce dossier.

Consciente de la nécessité de traiter avec la partie la plus forte en Libye – représentée par l’ANL – Ankara double la mise sans laisser tomber l’ouest libyen avec qui la relation est constante et plus ancienne.

Ce rapprochement qui ne fait que se confirmer avec l’Est libyen inaugure une nouvelle période de coopération, afin de redessiner la carte d’influence de la Turquie non seulement en Libye, mais aussi en Méditerranée et en Afrique centrale. Historiquement, la Libye constitue la porte d’entrée pour cette région d’Afrique.

Selon un communiqué de l’ANL, les deux parties ont discuté de la stabilité et de « la coopération militaire entre les deux pays face aux défis sécuritaires » dans la région. Ce nouveau partenariat pourrait également être bénéfique pour les deux protagonistes. Ankara voudrait passer par le port de Benghazi pour exporter sa marchandise vers les pays d’Afrique centrale.

Durant les derniers mois, les accords économiques entre les deux parties se sont multipliés, et Ankara a toujours l’œil rivé sur le gaz en Méditerranée, concentré en face de l’Est libyen. Elle compte devenir le plus grand investisseur de ce secteur et le camp de l’est ne semble plus opposé, comme dans le passé, à accepter ce rôle turc, à partir du moment où l’intérêt est partagé.

RFI

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Tunisie : des milliers de manifestants à Tunis contre l’injustice et pour les libertés

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Manifestations à Tunis contre Kaïs Saied.
Manifestations à Tunis contre Kaïs Saied. Capture d'écran.

Le samedi 22 novembre 2025, la capitale tunisienne a été le théâtre d’une importante mobilisation citoyenne sous le slogan « Contre l’injustice ». Organisée par le Comité de soutien à l’avocat et ex-juge Ahmed Souab, la manifestation a rassemblé des milliers de participants – citoyens, militants, partis politiques et associations – pour dénoncer ce qu’ils qualifient de dérive autoritaire et de restrictions croissantes des libertés publiques.

Le cortège a débuté à la place des Droits de l’Homme pour rejoindre l’avenue Mohamed V, cœur administratif de la ville. Les organisateurs avaient demandé aux participants de porter du noir, d’éviter tout symbole partisan et de respecter un moment de silence avant les slogans, afin de préserver le caractère citoyen de l’événement. Les manifestants ont scandé des messages forts, tels que : « Un président qui ne maîtrise que la menace et l’injustice » et « Libertés… Libertés… l’État policier est terminé », exprimant leur colère face aux arrestations, aux poursuites jugées arbitraires et à l’usage répressif des institutions de l’État.

La marche a également pris une dimension environnementale. Les participants se sont arrêtés devant le siège du Groupe chimique pour dénoncer la pollution industrielle, appelant à la fermeture et au démantèlement des unités polluantes. L’usage de fumée dense visait à symboliser l’impact toxique des activités chimiques sur la santé et l’environnement, intégrant ainsi la défense de l’écologie au cœur de la mobilisation citoyenne.

Plusieurs partis et collectifs politiques ont pris part à la marche, notamment le Courant démocratele Parti républicainle Front El-Takattol et le Collectif Soumoud, soulignant que cette action représentait un moment clé pour la défense des libertés, de la dignité citoyenne et de l’espace public. Selon le comité organisateur, la manifestation du 22 novembre n’est que « le début » d’une série d’initiatives destinées à défendre les droits fondamentaux face à ce qu’ils considèrent comme un recul démocratique.

Cette mobilisation intervient dans un contexte de tensions sociales et politiques en Tunisie. Deux jours auparavant, les journalistes tunisiens avaient organisé des rassemblements dans plusieurs villes pour dénoncer la détérioration de la liberté de la presse, les poursuites judiciaires ciblées et les arrestations de confrères, réclamant l’application stricte du décret 115 encadrant le journalisme.

La marche du 22 novembre témoigne d’une prise de parole collective et déterminée de la société civile tunisienne, décidée à affirmer ses droits et à maintenir la pression sur les autorités pour que liberté et justice restent au cœur de la vie publique du pays.

Mourad Benyahia 

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Aïda Amara : « Je sais d’où je viens »

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Aïda Amara
Aïda Amara. Photo © Pierre Saïah

Publié le 2 septembre 2025 aux Éditions Hors d’Atteinte, Avec ma tête d’Arabe est le premier roman dans lequel Aïda Amara remonte le fil de sa lignée pour affronter un traumatisme longtemps enfoui : celui des attentats du 13 novembre 2015.

Aïda Amara a accepté de revenir, pour Le Matin d’Algérie, sur cette plongée intime où se croisent la mémoire de son père né en Kabylie pendant la guerre d’indépendance, les silences de sa mère originaire d’Annaba et la trajectoire des siens au cœur de la colonisation, de l’exil et des violences politiques.

Journaliste et réalisatrice, Aïda Amara délaisse ici la distance professionnelle pour explorer, sans détour, la part la plus sensible d’une histoire familiale marquée par le racisme, les assignations identitaires, mais aussi par une transmission vivante, une dignité inébranlable et une résilience forgée par les mots et la mémoire. Elle a accepté cet entretien spécialement pour Le Matin d’Algérie.

Le Matin d’Algérie : Votre livre s’ouvre sur le traumatisme des attentats du 13 novembre 2015. Qu’est-ce qui vous a poussé à raconter cette expérience si personnelle sous la forme d’un roman ?

Aïda Amara :Le traumatisme du 13 novembre est arrivé plus tard dans mon processus d’écriture. J’ai commencé par m’interresser à mon histoire familiale, mon père est né et a grandit en Kabylie pendant la guerre d’indépendance, ma mère vient quant à elle, d’Annaba. C’est en fouillant dans leurs histoires que mon propre traumatisme a refait surface. Je ne pouvais pas raconter mon histoire, sans en parler.

Le Matin d’Algérie : Vous parlez de l’arabité comme d’un fragment de votre identité qui vous a été imposé après le traumatisme. Comment définiriez-vous ce que signifie être une femme arabe en France aujourd’hui ?

Aïda Amara : Je fais la distinction entre les identités qui me traversent (Française, Algérienne, Parisienne) et les assignations venant de l’extérieur, qui, qu’on le veuille ou non, rythment encore aujourd’hui le quotidien des enfants d’immigrés algériens en France. Je me garde bien de définir « la femme arabe en France » parce qu’elle n’existe pas pour moi. Il y a autant d’expériences d’« arabité » qu’il y a de femmes. Ce que nous partageons, en revanche, ce sont le racisme, les assignations, les clichés encore tenaces qui structurent notre expérience « d’Arabe en France », l’idée que nous serions encore un « autre », l’altérité au « nous » national.

Le soir des attentats, quand je témoigne auprès d’un policier, il me dit : «Ce n’est pas de votre faute », comme si je devais me sentir responsable des actes d’un « autre Arabe ». Les jours qui suivront seront du même registre : déchéance de nationalité pour les binationaux, injonction pour les « Arabes » à se désolidariser. Le climat est devenu étouffant.

Le Matin d’Algérie : La mémoire familiale et l’histoire de vos parents occupent une place centrale dans votre récit. Comment vos racines algériennes vous ont-elles aidée à surmonter vos traumatismes ?

Aïda Amara : Après la déflagration traumatique qu’ont été les attentats, j’ai eu besoin de me raccrocher à quelque chose de fort, de tangible. Comme un arbre chahuté par la tempête, je me suis raccrochée à mes racines, mes parents, et à travers eux, l’Algérie. J’ai récolté les récits familiaux que j’avais peur de voir disparaître, parce que, comme le répète souvent mon père, il est un homme de tradition orale. Je me suis intéressée à son enfance passée dans un camp de regroupement pendant la guerre d’indépendance, mais aussi à la vie de ma grand-mère Taous.

En me plongeant dans cette histoire, j’y ai trouvé des modèles de résilience, de dignité, qui m’ont donné la force d’affronter le racisme en France. J’ai aussi pris conscience que je n’étais pas la seule de ma famille à avoir subi la violence armée : ils l’ont vécue avant moi, à travers la guerre et la colonisation. Malgré cela, ils n’ont pas perdu leur capacité à aimer, à transmettre et à résister par les mots. Ma grand-mère Taous était connue pour sa répartie !

Le Matin d’Algérie : Vous êtes journaliste et réalisatrice avant d’être romancière. Comment ces expériences professionnelles ont-elles influencé votre écriture et votre regard sur les événements que vous racontez ?

Aïda Amara : Pour écrire ce roman, j’ai dû laisser la journaliste au placard. Je ne pouvais pas être dans une démarche détachée et analytique comme je le fais dans mes reportages. Je racontais mon histoire, celle de ma famille : c’était intime.

Cependant, je ne peux pas m’empêcher de toujours mettre en perspective ce que je vis. Quand je parle de mon expérience du racisme, ce n’est pas seulement pour me raconter, mais pour mettre un visage — parmi tant d’autres — sur une expérience partagée par des millions de Français.

Le Matin d’Algérie : Le roman explore la question des clichés et des préjugés liés à l’immigration et à l’arabité. Quel rôle espérez-vous que ce livre joue dans la discussion sur ces sujets en France ?

Aïda Amara : J’espère que ce livre pourra ajouter une goutte dans la mer des récits d’enfants issus de l’immigration algérienne en France. Montrer la diversité de nos vécus, ce qui nous rassemble aussi.

Le Matin d’Algérie : Vous racontez avec humour et acuité les micro-agressions du quotidien. Comment avez-vous appris à transformer ces expériences en force et en répartie ?

Aïda Amara : Cela me vient de mon père, qui le tient lui-même de sa mère, Taous. Elle disait en kabyle : « Soyez des agneaux à la maison mais des lions à l’extérieur ! »

Cette image, mon père me l’a transmise : on ne se laisse pas faire.

Face au racisme, on rend coup pour coup, avec les mots pour arme. Quand je lui rapporte une remarque raciste, il me demande toujours : « Qu’est-ce que t’as répondu ? » Enfant, en le voyant répondre aux micro-agressions, je n’avais aucun doute : l’ignorance venait d’en face. Je l’ai toujours vu moralement supérieur à ses agresseurs.

Le Matin d’Algérie : Violence et résilience sont des thèmes majeurs. Comment avez-vous trouvé l’équilibre entre réalité historique et narration romanesque ?

Aïda Amara : La partie sur l’Algérie coloniale est romancée, car je n’y étais pas. Chaque chapitre part d’un souvenir familial ; ensuite, j’ai dû créer, tout en faisant beaucoup de recherches. Quel était le quotidien d’un village kabyle pendant la guerre ? Qu’y mangeait-on ? Comment travaillait un forgeron dans les années 1940 ?

Pour les passages sur ma vie parisienne, chaque chapitre devait nourrir le récit. Avec le « je », je voulais éviter le journal intime. Je racontais une histoire de lignée, de transmission.

Le Matin d’Algérie : Votre histoire familiale traverse colonisation, guerre d’Algérie et décennie noire. Comment ces héritages influencent-ils votre perception de la France contemporaine ?

Aïda Amara : Tout ce que je sais de l’histoire entre la France et l’Algérie, je l’ai appris à la maison. À l’école, on en parle à peine.

Connaître cette histoire me permet de comprendre les restes coloniaux en France. Je suis moins chahutée par les clichés racistes : je sais d’où je viens.

A travers l’histoire de ma famille, je comprends mieux ce qui se joue aujourd’hui, notamment la nostalgie de « l’Algérie française » dans l’extrême droite.

Le Matin d’Algérie : Vous insistez sur la nuance et la multiplicité des identités. Comment souhaitez-vous que les lecteurs reçoivent ce message ?

Aïda Amara : Je suis binationale, donc multiple. Mon identité évolue sans cesse.

Comme une mosaïque, je suis faite de fragments : française, parisienne, avec une part d’Algérie, de Kabylie, d’Annaba.

Même dans ma famille, ma grand-mère kabylophone avait besoin d’un traducteur pour parler à ma mère arabophone. Elles étaient du même pays. Il est important de ne pas figer l’identité ni l’imposer aux autres. Accepter les identités plurielles nous enrichit.

Le Matin d’Algérie : Vous avez réalisé podcasts et documentaires sur la mémoire migratoire. En quoi prolongent-ils les thèmes du roman ?

Aïda Amara : Avec ma tête d’Arabe est un livre sur la lignée, avec ses silences. J’ai perdu ma mère jeune et avec elle sa parole.

J’étais déterminée à enregistrer l’histoire de mon père ; à travers lui, j’ai retrouvé celle de l’Algérie. Après mes podcasts, beaucoup d’enfants d’immigrés m’ont écrit pour dire qu’ils n’avaient jamais osé interroger leurs parents. Le silence est encore présent, par pudeur. La mémoire fait vivre le passé et nous ancre dans le présent.

Le Matin d’Algérie : Quels conseils donneriez-vous à ceux qui cherchent à comprendre ou préserver leur héritage familial ?

Aïda Amara : Écouter, enregistrer, écrire. La tradition orale est belle, mais fragile. Laisser des traces est essentiel pour les générations futures.

Le Matin d’Algérie : Quels projets littéraires ou médiatiques après ce roman ?

Aïda Amara : J’aimerais faire vivre ce livre en France et en Algérie, notamment à Annaba, la ville de ma mère. Puis me consacrer à d’autres récits mémoriels, en France et en Algérie.

Entretien réalisé par Djamal Guettala 

Aïda Amara est journaliste et réalisatrice. Née de parents algériens, elle grandit à Ménilmontant, dans le XXᵉ arrondissement de Paris. Après plusieurs années en journalisme télé, notamment pour France TV et Canal +, elle réalise le podcast Transmissions, consacré au parcours migratoire de son père, ainsi que Revenir, un documentaire sur son retour en Algérie. Elle anime également des ateliers d’écriture et de podcast auprès de jeunes avec les médias Le Bondy Blog et la Zone d’expression prioritaire.
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Boualem Sansal s’exprimera dimanche soir sur France 2

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Boualem Sansal

Après sa libération de la prison en Algérie et son retour en France, l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal accordera sa première interview au journal de 20 heures, dimanche, et répondra aux questions de Laurent Delahousse.

Il a été gracié le 12 novembre par l’Algérie après un an de prison. L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal s’exprimera pour la première fois depuis sa libération, dimanche 23 novembre, dans le journal de 20 heures de France 2, a annoncé France Télévisions dans un communiqué. « Après sa libération et son retour en France [mardi], il accordera sa première interview à France Télévisions et répondra aux questions de Laurent Delahousse », a annoncé le groupe public.

Incarcéré en Algérie pendant un an pour certaines prises de position sur son pays natal, Boualem Sansal, 81 ans, a retrouvé la liberté le 12 novembre. Il a été gracié par le chef de l’Etat algérien Abdelmadjid Tebboune, qui a répondu favorablement à une demande des autorités allemandes. L’écrivain, qui était au cœur d’une crise diplomatique entre Alger et Paris, est rentré en France mardi, après avoir d’abord été transféré à Berlin pour des soins médicaux. Il a été reçu par Emmanuel Macron dès son retour.

Boualem Sansal « est conscient qu’il arrive dans un contexte profondément marqué par la difficulté de la relation franco-algérienne et que ce contexte pèse vraisemblablement sur son expression publique », a déclaré à l’AFP Arnaud Benedetti, fondateur de son comité de soutien, qui lui a parlé au téléphone vendredi. Selon Arnaud Benedetti, après France 2, Boualem Sansal devrait prendre la parole lundi à la radio et dans un quotidien national. 

Si Boualem Sansal a bénéficié de l’intervention du président allemand pour retrouver la liberté après une condamnation arbitraire à 5 ans de prison ferme, il reste encore dans les prisons algériennes près de 250 détenus d’opinion. Deux d’entre eux (Mohamed Tadjadit et Cherif Mellal) mènent depuis une semaine une grève de la faim. Le régime de la dyarchie Tebboune-Chanegriha a imposé un régime autoritaire, démantelant tous les leviers de l’Etat de droit.

La rédaction avec AFP

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Économie : le PIB ralentit légèrement au 2ᵉ trimestre 2025

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Importations
Les importations ont bondi. Crédit photo : DR

Selon la dernière note trimestrielle de l’ONS, le PIB de l’Algérie a enregistré une croissance de 3,9 % au deuxième trimestre 2025, contre 4,5 % au premier trimestre. Malgré ce léger ralentissement, la croissance reste supérieure aux niveaux des années précédentes, portée par les secteurs non pétroliers et le dynamisme de la demande intérieure.

Le PIB en valeur courante atteint 9 410 milliards de dinars, soit une progression de 5,1 % par rapport à la même période en 2024, avec une inflation modérée de 1,1 %.

Le secteur des hydrocarbures a connu une reprise limitée (+1,5 %), tandis que le commerce et l’électricité/gaz affichent des taux de croissance de 6,7 % et 9,7 % respectivement.

Les exportations totales ont légèrement progressé (+0,5 %), mais les importations ont bondi de 30,6 %, surtout dans les biens (+34,1 %). La consommation finale totale a augmenté de 3,7 %, soutenue par les ménages (+3,9 %) et les administrations (+3,1 %).

L’économie algérienne affiche ainsi une croissance solide mais prudente, avec un poids croissant des secteurs non pétroliers et un maintien du rôle moteur de la demande intérieure.

La rédaction

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Atmane Mazouz : « Si l’Algérie veut éviter le déclassement… »

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Atmane Mazouz, président du RCD
Atmane Mazouz, président du RCD. Crédit photo : Hamid Arab

Tribune. « Ces derniers jours, au fil des discussions pressantes avec des amis de divers horizons, des opérateurs économiques au bord de l’asphyxie et de citoyens déboussolés, incapables de faire face à la flambée des prix et à l’insécurité matérielle qui s’installe, un constat s’impose avec une force implacable : la dévalorisation du dinar n’est pas un simple indicateur technique. C’est le symptôme d’une gouvernance en déroute, d’un système qui a renoncé à piloter le destin économique du pays et qui se contente de gérer la survie au jour le jour.

Les entrepreneurs parlent désormais en termes de survie, non plus d’investissement ; les familles parlent d’arbitrages tragiques, non plus de projets. La monnaie, élément fondamental de la souveraineté, est devenue le baromètre d’un effritement plus profond : celui de l’État, de sa vision et de sa capacité à protéger sa population.

Il faut le dire sans détour : ce qui arrive au dinar face à l’euro et au dollar n’a rien d’une fatalité. La dépréciation continue résulte d’un mode de gouvernance fondé sur l’improvisation permanente, l’opacité décisionnelle et l’incapacité chronique à anticiper.

Le Projet de loi de finances 2026 en fournit une illustration éclatante.

Les recettes prévues y sont limitées à 8 009 milliards de dinars, alors que les dépenses explosent à 17 636 milliards, creusant un déficit abyssal équivalent à 12,4 % du PIB.

Un déséquilibre budgétaire d’une telle ampleur fragilise mécaniquement la monnaie nationale : un État incapable d’équilibrer ses comptes est un État qui dévalue.

Dans un pays où plus de 90 % des recettes en devises proviennent des hydrocarbures, fragiliser le dinar revient à fragiliser l’État lui-même. Les responsables politiques qui se félicitent du rebond ponctuel des prix du baril feignent d’ignorer que la structure de l’économie demeure inchangée depuis des décennies : une économie de rente, dépendante de l’extérieur pour s’alimenter, se soigner, produire et même se projeter.

Le PLF 2026 le confirme : 657 milliards de dinars sont encore nécessaires pour subventionner les produits de large consommation (céréales, lait, huile, farine), massivement importés. Chaque glissement du dinar renchérit ces importations, creuse la facture extérieure et alimente l’inflation.

L’État, pour maquiller ses déficits, joue sur la dépréciation monétaire comme on manipule un artifice comptable. Le gonflement artificiel des recettes en dinars issues des exportations d’hydrocarbures, par le simple jeu du taux de change, n’est pas une stratégie économique : c’est un leurre. Dans le PLF 2026, la masse salariale représente 33,6 % du budget, soit 5 926 milliards de dinars, preuve qu’une grande partie des ressources sert à maintenir une administration hypertrophiée plutôt qu’à investir dans la création de richesse. Le reste est absorbé par les transferts sociaux, qui atteignent 2 812 milliards de dinars, dont plus de 420 milliards pour l’allocation chômage et 424 milliards pour les retraites. Tout cela pour soutenir une société affaiblie, mais sans créer les conditions de sa résilience.

La Banque d’Algérie, qui devrait être le dernier rempart contre l’arbitraire, n’est plus qu’une chambre d’exécution. Son absence d’indépendance et le silence opaque qui entoure ses décisions privent le pays d’un outil essentiel de stabilisation.

Lorsqu’une banque centrale cesse d’être un acteur crédible pour devenir un instrument politique, la monnaie cesse d’inspirer confiance. Et lorsque la confiance disparaît, toutes les digues cèdent.

Dans les marchés et les foyers, cette crise se traduit par une inflation brutale. L’essentiel des produits étant importés, chaque glissement du dinar entraîne mécaniquement une hausse des prix. Le PLF 2026 table sur une croissance de 4,1 %, présentée comme la preuve d’un redressement hors hydrocarbures.

Mais cette projection repose davantage sur la communication que sur une dynamique réelle : aucune politique industrielle structurée, aucune stratégie agricole souveraine, aucune vision pour l’innovation.

Le pari gouvernemental sur une croissance « non pétrolière » relève davantage du vœu pieux que de la planification.

Pendant ce temps, l’informel prospère. Le fossé entre le taux officiel et le taux parallèle des devises traduit une vérité simple : les Algériens ne croient plus en la valeur de leur monnaie. Et comment pourraient-ils y croire quand l’économie formelle est accablée par l’arbitraire administratif, l’instabilité réglementaire et l’absence de visibilité ?

Depuis plus de vingt ans, l’Algérie est privée d’une vision économique cohérente. Les institutions qui devraient contrôler, réguler, alerter ou corriger ont été neutralisées. Le Parlement n’exerce aucun contre-pouvoir réel. La Cour des comptes est muselée. Les autorités de régulation sont devenues symboliques. Dans ce contexte, les dépenses publiques sont orientées selon des priorités politiques, non économiques.

Ainsi, pour la quatrième année consécutive, plus de 20 % du budget général est consacré à la défense. Sans débat, sans transparence. Un choix qui dit tout : préserver le système avant de préserver la société.

Dans un tel paysage, comment s’étonner que la confiance internationale se soit effondrée ? L’opacité totale qui entoure les conditions d’investissement, l’arbitraire des décisions administratives, l’instabilité fiscale et réglementaire éloignent les partenaires sérieux. Le pays se retrouve isolé au moment même où sa monnaie se dégrade et où son économie s’étouffe.

Ce qui se joue aujourd’hui n’est pas un simple débat technique sur la valeur du dinar : c’est un enjeu de sécurité nationale. Une monnaie qui s’effondre affaiblit l’État, ses institutions et sa souveraineté. Plus le dinar chute, plus le pays dépend des financements extérieurs, des importations vitales, du bon vouloir de ses partenaires. Une trajectoire dangereuse pour un pays doté de ressources considérables, mais incapable d’en faire un moteur de prospérité.

Face à cette situation, il faut rappeler que la stabilité d’une nation ne repose ni sur des manipulations monétaires ni sur des artifices comptables.

Elle repose sur la transparence, sur l’État de droit, sur des institutions solides et sur la création de richesse. Redresser le dinar exige une réforme profonde de la gouvernance économique, une indépendance réelle de la Banque d’Algérie, un investissement massif dans la production nationale, et une réorientation des dépenses publiques vers l’avenir plutôt que vers la survie.

La dévalorisation du dinar est le miroir d’un système politique à bout de souffle, incapable de se réformer, sourd aux alertes, détaché des réalités vécues par le peuple. C’est un avertissement majeur : un pays qui laisse glisser sa monnaie sans stratégie laisse glisser avec elle sa stabilité, sa cohésion et sa souveraineté.

Si l’Algérie veut éviter le déclassement, elle doit ouvrir sans délai la voie à un changement de gouvernance, à une transition démocratique et à une modernisation économique capable de répondre aux attentes de ses citoyens comme aux défis du monde. L’heure n’est plus aux expédients ni aux discours rassurants. L’heure est à la vérité, à la responsabilité et au courage politique.

C’est la survie du pays qui se joue maintenant.

Atmane Mazouz 
Président du RCD

Cette tribune nous a été envoyée par son auteur.

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Marseille : la librairie Transit dénonce une campagne diffamatoire après la soirée du 12 novembre

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La librairie Transit
La librairie Transit. Crédit photo : Le Matin d'Algérie

Dans un communiqué publié le 20 novembre 2025, la librairie Transit, à Marseille, revient sur les incidents survenus lors de la présentation du livre Le sionisme, une invention européenne, organisée le 12 novembre en partenariat avec le collectif Tsedek, en présence de l’autrice Sonia Dayan-Herzbrun et du réalisateur Eyal Sivan.

La librairie Transit explique que la soirée a été « momentanément perturbée » par un petit groupe de manifestants. Ces derniers, malgré leur revendication de lutter contre l’antisémitisme, ont refusé l’expression de voix juives critiques de la politique du gouvernement israélien menée par Benjamin Netanyahou.

Selon la librairie, ce même groupe mène depuis une « campagne d’insultes et de calomnies » sur les réseaux sociaux, allant jusqu’à associer Transit à des accusations aussi graves que le nazisme ou l’antisémitisme. Des attaques que la librairie qualifie d’« ignobles ».

Transit rappelle dans son texte que ses principes reposent sur un engagement clair contre toutes les formes de racisme — qu’il s’agisse d’antisémitisme, d’islamophobie ou d’autres discriminations. Elle affirme qu’elle « ne se laissera pas intimider » et qu’elle poursuivra son travail éditorial en accueillant les auteurs et les ouvrages qu’elle juge nécessaires.

Soutien des adhérents

En tant qu’adhérents, nous exprimons notre solidarité pleine et entière avec la librairie Transit. Nous soutenons son engagement constant pour la liberté d’expression, la pluralité des voix et la lutte contre toutes les formes de racisme. Nous dénonçons les tentatives d’intimidation dont elle fait l’objet et réaffirmons notre confiance dans le rôle indispensable qu’elle joue au sein de la vie culturelle marseillaise.

Mourad Benyahia 

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Dominique Hamdad-Vitré : « Parler plusieurs langues c’est habiter plusieurs mondes intérieurs »

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Dominique Hamdad-Vitré
Dominique Hamdad-Vitré/ Crédit photo : DR

Entre les déchirures de l’histoire et les élans du cœur, Le fils de la Française, odyssée d’un natif de Kabylie, publié par Dominique Hamdad-Vitré le 31 juillet 2025 dans la collection Graveurs de Mémoire — raconte bien plus qu’un parcours individuel : il révèle ce que signifie grandir dans les fractures laissées par la colonisation, l’exil et les identités qui se cherchent.

Dans ce récit courageux, Dominique Hamdad-Vitré ne se contente pas d’évoquer la Kabylie et la France comme deux territoires géographiques : il en fait deux forces qui tirent, bousculent, forgent, et parfois blessent.

Entre une enfance façonnée par les montagnes kabyles et un destin qui se déploie en Europe, il interroge les silences familiaux, les migrations forcées, les amours impossibles et les contradictions d’un pays qui accueille mais qui exige souvent qu’on se renie. Son livre s’inscrit dans cette zone sensible où la mémoire intime rencontre la mémoire collective, où l’on comprend que chaque identité née dans l’entre-deux est un combat quotidien, mais aussi un espace d’invention et de résistance.

Le Matin d’Algérie : Votre livre raconte un parcours entre la Kabylie et la France. Comment décririez-vous ce double enracinement et l’impact sur votre identité ?

Dominique Hamdad-Vitré : Je vis ce double enracinement comme une tension créatrice, mais aussi comme une source de richesse. Être à la fois kabyle et français, c’est vivre entre deux histoires, deux langues, deux imaginaires. Loin de me diviser, cela m’a offert une vision élargie du monde. J’ai longtemps cherché à réconcilier ces deux parts de moi avant de comprendre qu’elles ne demandaient pas à être unifiées, mais simplement écoutées et honorées.

Le Matin d’Algérie : Dans votre récit, l’enfance en Algérie occupe une place centrale. Quels souvenirs ont le plus marqué votre regard sur le monde ?

Dominique Hamdad-Vitré : Les souvenirs qui m’habitent encore aujourd’hui sont ceux de la terre et des odeurs. Je me souviens des longues journées rythmées par la lumière en été et par la neige sur les montagnes en hiver. Cette lumière organisait le temps et façonnait mon regard, m’apprenait à m’émerveiller des choses simples. Elle m’a aussi très tôt sensibilisé aux blessures de l’Histoire.

Le Matin d’Algérie : Vous évoquez les silences et les non-dits familiaux. Comment ces expériences ont-elles façonné votre rapport à la mémoire et à l’écriture ?

Dominique Hamdad-Vitré : L’écriture est devenue pour moi un acte de réparation, un espace où les ombres pouvaient parler. Écrire, c’est rendre audible ce que l’histoire familiale n’a pas su, ou pas pu, nommer.

Le Matin d’Algérie : L’adolescence et la découverte de l’Europe constituent un tournant. Que représente pour vous ce passage vers un monde plus vaste ?

Dominique Hamdad-Vitré : Cela a été un moment de vertige, mais aussi de libération. Découvrir l’Europe, c’était m’arracher à mes repères initiaux, élargir mes horizons, questionner mes croyances. C’était aussi prendre conscience de mon altérité. Ce déplacement géographique a provoqué un déplacement intérieur, me permettant de me confronter à moi-même autrement, avec plus de lucidité, mais aussi plus de tendresse.

Le Matin d’Algérie : L’amour et la rencontre en Autriche jouent un rôle important dans votre odyssée personnelle. Pouvez-vous nous parler de ce que ces expériences vous ont apporté ?

Dominique Hamdad-Vitré : C’est une histoire d’amour fulgurante, qui a laissé en moi une trace à la fois lumineuse et incandescente. Un amour interdit, traversé de contraintes et de choix douloureux, mais porteur d’une intensité rare. Il incarnait toute la complexité de ces rencontres qui bouleversent une vie, entre passion, beauté et souffrance. Cet amour m’a aidé à grandir, à aimer avec plus de justesse et de vérité. Il marque un point de bascule dans ma quête d’identité.

Le Matin d’Algérie : Votre parcours professionnel en France, entre enseignement et ingénierie, semble intimement lié à votre réflexion sur l’identité et la transmission. Comment conjuguez-vous ces deux dimensions ?

Dominique Hamdad-Vitré : Mon parcours a toujours gravité autour de l’humain et de la transmission. De conseiller d’éducation à enseignant, chaque étape m’a permis de comprendre que l’éducation dépasse le cadre scolaire : elle touche à la construction de soi. Ma formation scientifique m’a apporté la rigueur, mais c’est dans la relation pédagogique que j’ai trouvé ma véritable vocation. Transmettre, pour moi, c’est relier les savoirs, les cultures et les générations.

Le Matin d’Algérie : Vous êtes un polyglotte et un passeur de cultures. Quel rôle la langue et la communication ont-elles joué dans votre cheminement ?

Dominique Hamdad-Vitré : Les langues ont été des clés. Elles m’ont permis de créer des ponts, de décoder les nuances, de faire entendre ma voix. Parler plusieurs langues, ce n’est pas seulement maîtriser des codes, c’est habiter plusieurs mondes intérieurs. Cela m’a permis de ne pas être prisonnier d’un seul récit. Chaque langue m’a apporté une manière différente d’aimer, de penser et de rêver.

Le Matin d’Algérie : L’exil et la résilience sont des thèmes récurrents dans votre livre. Comment avez-vous appris à transformer blessures et silences en force ?

Dominique Hamdad-Vitré : Par l’écoute, l’introspection et le refus de la victimisation. J’ai compris que mes blessures portaient une énergie qu’il me fallait orienter. La résilience est née du choix de ne pas renier mes douleurs, mais de les transformer en matière vivante. Les silences ne m’ont pas réduit au mutisme ; ils m’ont poussé à créer une parole habitée.

Le Matin d’Algérie : Votre écriture explore le lien entre mémoire et humanité. Comment percevez-vous le rôle de la littérature dans la compréhension des trajectoires personnelles et collectives ?

Dominique Hamdad-Vitré : Issu d’une formation scientifique, je ne viens pas du monde littéraire. Mon rapport à la langue s’est d’abord forgé dans l’exactitude, la logique et le concret. Ce n’est que plus tard, en m’ouvrant à la littérature et à la philosophie, que j’ai découvert une autre dimension du langage : celle de l’intériorité, de la nuance et du questionnement. C’est cette rencontre tardive avec les mots qui m’a donné envie d’écrire. Les langues que je parle – kabyle, français, arabe, anglais, allemand – m’ont permis de naviguer entre les cultures, de m’adapter, mais aussi de porter en moi plusieurs voix, plusieurs mémoires. La communication, pour moi, n’est pas qu’un outil : c’est un pont. Un pont entre les mondes, les générations, les blessures et les espérances.

Le Matin d’Algérie : Quels conseils donneriez-vous à ceux qui, comme vous, naviguent entre plusieurs cultures et tentent de trouver leur place ?

Dominique Hamdad-Vitré : Je leur dirais de ne pas chercher à trancher entre leurs identités, mais de les accueillir toutes, même lorsqu’elles semblent contradictoires. De transformer la fracture en ressource. La complexité n’est pas un obstacle, c’est une richesse. Il ne s’agit pas de choisir, mais d’harmoniser. D’oser être soi, pleinement, même si cela dérange les cases prédéfinies.

Le Matin d’Algérie : En écrivant ce récit, avez-vous découvert des aspects de vous-même que vous ignoriez ?

Dominique Hamdad-Vitré : Oui. L’écriture a été un miroir révélateur. Elle a fait émerger des émotions que j’avais enfouies, des souvenirs que je croyais oubliés. Elle m’a permis d’entrer en dialogue avec mes rêves, mes ancêtres et mes contradictions. J’ai découvert en moi une force de réconciliation que je n’imaginais pas. Et aussi une capacité à aimer le passé, même dans ses zones d’ombre.

Le Matin d’Algérie : Si vous deviez résumer en une phrase ce que vous souhaitez transmettre à vos lecteurs à travers Le fils de la Française, que diriez-vous ?

Dominique Hamdad-Vitré :Je dirais : il est possible de faire de ses racines un envol, de ses blessures une lumière, et de son histoire un pont vers l’autre.

Entretien réalisé par Djamal Guettala 

Dominique Hamdad-Vitré

Ingénieur électronicien et enseignant à Paris depuis plus de trente ans, Dominique Hamdad-Vitré est issu d’une double culture franco-kabyle. Polyglotte et passionné par la transmission, l’écriture et la réflexion politique, il a été distingué par les Palmes académiques. Son œuvre explore les liens entre identité, mémoire et humanité.
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