11.9 C
Alger
Accueil Blog Page 3

Marseille pour tous : une dynamique citoyenne entre en phase de structuration

1
Marseille pour Tous
Marseille pour Tous en campagne. Crédit image : DR

Réunis hier, jeudi 18 décembre 2025, à leur permanence de campagne située rue Colbert, dans le 1er arrondissement de Marseille, les initiateurs du mouvement Marseille pour Tous ont présenté leurs premiers soutiens et précisé les prochaines étapes de leur engagement en vue des élections municipales de mars 2026.

Cette réunion est une séquence qui marque la fin de la phase de lancement et l’entrée dans une organisation plus opérationnelle.

Porté par Erwan Davoux et Nora Preziosi, le mouvement se revendique citoyen, ouvert et sans étiquette partisane. « Il faut changer la manière de faire de la politique », affirme Erwan Davoux, tête de liste pressentie pour la mairie centrale. À ses côtés, l’ancienne présidente de 13 Habitat, Nora Preziosi, conduira la liste du 13e-14e arrondissement. Tous deux dénoncent un système politique jugé éloigné des réalités du terrain et affirment vouloir replacer les habitants au cœur des décisions.

Sécurité, école, propreté, culture, vie associative, solidarité : les thématiques mises en avant répondent aux préoccupations quotidiennes des Marseillais. Le mouvement promet un « nouvel élan » fondé sur la diversité des profils et des quartiers, avec un programme qui se veut participatif et construit avec les habitants.

Huit personnalités ont été présentées comme soutiens officiels du mouvement : Élisabeth Saïd, restauratrice et militante associative du Panier, première élue noire au conseil municipal de Marseille (2008-2014) ; Romain Barres, avocat marseillais ;

Des soutiens issus de la société civile

Isabelle Laurent, ancienne adjointe des 1er et 7e arrondissements ; Akim Mimoun, citoyen engagé des quartiers populaires ;

Julie Bagdikian, consultante en communication ; Saïd Ouichou, médecin généraliste emblématique des quartiers nord ; Marielle Acunzo, avocate au barreau de Marseille ; et Sébastien Moullet, engagé professionnellement et associativement.

Deux figures de soutien témoignent

Akim Mimoun, militant engagé issu de la mouvance de gauche dont il dit ne plus se reconnaître aujourd’hui, explique son choix : « Avant, tout le monde avait un programme que l’on déposait dans les boîtes aux lettres. Mais à peine un tiers était réellement appliqué. » Une désillusion qui l’a conduit à rejoindre Marseille pour Tous. « Ici, le programme sera construit avec les habitants », affirme-t-il.

Élisabeth Saïd, ancienne élue municipale, insiste sur la nature transversale du projet : « Ce mouvement n’est ni de droite ni de gauche. Il va travailler avec des Marseillais de cœur. Donner la parole aux habitants est essentiel pour construire un programme qui leur convient et qui doit être appliqué. »

En s’entretenant avec Saïd Ouichou, celui-ci nous a confirmé qu’il sera candidat dans les 15e et 16e arrondissements, renforçant l’ancrage du mouvement dans les quartiers nord de la ville.

Un calendrier désormais fixé

L’inauguration officielle de la permanence est annoncée pour le 10 janvier 2026. La finalisation des listes par arrondissement est prévue d’ici fin février, avant l’entrée dans le cœur de la campagne municipale.

Marseille pour Tous entend ainsi se positionner comme une alternative aux forces politiques traditionnelles, face à la droite menée par Martine Vassal, à la gauche sortante et aux autres listes en présence.

Rappel — Lancé le 11 novembre 2025 par Erwan Davoux et Nora Preziosi, Marseille pour Tous se positionne comme une alternative citoyenne aux listes traditionnelles en vue des élections municipales de mars 2026. Le mouvement se présente comme libre, ouvert et sans étiquette partisane, avec l’ambition de rapprocher les habitants de la politique et de renouveler les visages des élus locaux.

Djamal Guettala 

- Publicité -

Le Pentagone dit avoir frappé «plus de 70 cibles» en Syrie

0
bombardier américain
L'armée américaine bombarde des positions de Daech en Syrie.

L’armée américaine a frappé «plus de 70 cibles à de multiples endroits dans le centre de la Syrie avec des avions de chasse, des hélicoptères et de l’artillerie », a indiqué le commandement militaire américain pour le Moyen-Orient, le Centcom, sur X vendredi 19 décembre.

Il a précisé que l’opération avait débuté à 16 h 00 heure de Washington (21h00 TU) et que « plus de 100 munitions de précision » avaient été employées pour « éliminer des combattants du groupe État islamique, des infrastructures et des sites d’armement », a annoncé le chef du Pentagone Pete Hegseth sur X.

Il s’agit d’une « réponse directe » et d’une « déclaration de vengeance » après l’attaque qui a coûté samedi la vie à deux militaires américains et un traducteur à Syrie, a-t-il ajouté, en affirmant : « Aujourd’hui nous avons traqué et tué des ennemis. Beaucoup d’ennemis. Et nous allons continuer ».

RFI

- Publicité -

Your Party, le difficile retour de la gauche britannique

0
Londres
Londres. Image par Mathew Browne de Pixabay

Ulcéré par les promesses non tenues du Brexit et la crise du coût de la vie, le peuple britannique a usé quatre premiers ministres conservateurs en huit ans.

Le 4 juillet 2024 il donne sa chance au Labour, espérant un virage social. Mais Keir Starmer, leader de l’opposition depuis 2020, s’est préparé à tout l’inverse : violente purge de son aile gauche, apaisement des marchés, gages donnés aux tabloïds… Les piliers de sa politique sont la restriction des prestations sociales, le militarisme et la chasse aux étrangers.

Cette énième trahison des classes populaires fait exploser le système politique, avec les racistes en embuscade. Des émeutes éclatent en août, virant au pogrom contre les étrangers. En mai 2025, le parti d’extrême droite Reform UK remporte haut la main les élections locales, et son chef Nigel Farage est donné gagnant des élections générales de 2029. Refusant de s’y résigner, la gauche radicale semble bien décidée à construire une alternative.

Un parti tant attendu

Depuis un siècle, le scrutin majoritaire à un tour favorise la domination des conservateurs et des travaillistes. Des signaux faibles, certes, indiquaient une contestation du bipartisme : essor du SNP en 2007, des Lib-Dems en 2010… Mais les “socialistes”, marginalisés au Labour depuis 1983, étaient éparpillés en groupes concurrents à l’audience plus ou moins confidentielle.

En 2015, l’accession surprise de Jeremy Corbyn à la tête du Labour donne l’occasion à ce courant politique d’atteindre le grand public. Si l’expérience se referme après l’échec aux élections générales de 2019, elle prouve qu’un programme radical peut rassembler des millions de gens. Lorsque les sociaux-libéraux reprennent les commandes du parti, l’idée d’un parti autonome réémerge. D’autant que sous l’impulsion de son chef de cabinet, l’intrigant Morgan McSweeney, Starmer multiplie les exclusions. Sous couvert (déjà !) de lutte contre l’antisémitisme, il suspend Corbyn du groupe parlementaire et du parti en 2020.

Dès l’entrée de Starmer à Downing Street, la rupture de la gauche avec le Labour s’accélère. D’abord, le gouvernement maintient le plafond des allocations familiales au-delà de deux enfants. Introduit en 2010 par les Tories, c’est un symbole des politiques d’austérité antipopulaires. Sept députés, dont Zarah Sultana, ancienne syndicaliste étudiante et élue de Coventry South, seront suspendus du groupe pour avoir voté sa suppression.

L’implication de l’armée dans la guerre à Gaza (notamment via des vols espions depuis la base chypriote d’Akrotiri), dans un pays où des millions de citoyens manifestent contre le génocide, crée aussi une profonde fracture. Le classement du collectif Palestine Action comme organisation terroriste et l’arrestation de centaines de protestataires vient achever le processus. « La place de Starmer est à La Haye » devient un slogan populaire.

Enfin, Starmer se rapproche de l’extrême droite sur l’immigration. Le 12 mai 2025, après le triomphe de Reform aux élections locales il durcit encore le ton, déclarant « nous risquons de devenir une île d’étrangers » – une formule rappelant furieusement Rivers of Blood, le discours de sinistre mémoire d’Enoch Powell qui appelait à la « remigration » en 1968.

Tout cela renforce la nécessité d’une offre politique à gauche du Labour, d’autant qu’en juillet 2024 le parti a déjà été concurrencé dans des dizaines de circonscriptions. Corbyn est réélu triomphalement comme indépendant à Islington North. Quatre « indépendants pro-Gaza battent les travaillistes, plusieurs autres candidats les mettent en danger. Au printemps 2025, l’idée est devenue certitude : la gauche radicale doit voler de ses propres ailes.

La guerre des deux rouges

Dans un pays où aucun grand parti de gauche radicale n’existe depuis des décennies, une question se pose : qui est légitime pour le diriger ? À l’été 2025, deux équipes tentent de s’accorder sur un processus commun. La première, dirigée par Corbyn et les 4 élus indépendants, considère que l’ex-leader du Labour est le mieux placé, ayant rassemblé 13 millions de voix sur son programme en 2017. La seconde, proche de l’ancien maire du North of Tyne Jamie Driscoll, est plus critique envers l’héritage corbyniste et propose un binôme Corbyn-Sultana. Le 3 juillet, une majorité de participants acquiesce à ce principe – sans qu’il soit toutefois acté aux yeux de Corbyn.

Zarah Sultana décide alors de prendre l’initiative. Quelques minutes plus tard, elle annonce son départ du Labour et la co-fondation d’un parti avec Corbyn. Les cinq autres députés sont stupéfiés. Après de longues tractations, le processus reprend. Un site internet yourparty.uk est lancé le 24 juillet. En quelques semaines, 800 000 personnes s’y inscrivent ! Cependant, la confiance n’est pas rétablie entre les fondateurs. Le 18 septembre, Sultana lance unilatéralement un portail d’adhésion. Après plusieurs menaces de procès, les deux camps acceptent d’entamer la désescalade. Mais il est trop tard : la guerre factionnelle a engendré beaucoup de confusion. Lorsqu’un portail “légitime” ouvre, seules 50 000 personnes rejoignent Your Party.

La dispute ne procède certes pas de questions techniques. Connectée aux radicalités de la jeunesse, Sultana porte une ligne intransigeante, se revendiquant socialiste, antisioniste et antimonarchiste. Corbyn, quant à lui, est moins explicitement clivant, plus soucieux de relayer les revendications des mouvements sociaux. Rapidement, Sultana se confronte aussi à Adnan Hussain, député de Blackburn, sur la question de la transidentité. Revendiquant le « conservatisme social »de l’électorat musulman, ce dernier finira par quitter Your Party, de même que Iqbal Mohamed.

Le verdict de Liverpool

C’est donc à couteaux tirés que se prépare la conférence fondatrice, les 29 et 30 novembre à Liverpool. Précédée de 22 conférences régionales et d’un processus d’amendement en ligne des documents fondateurs, elle a lieu en présence de 3 000 adhérents tirés au sort et de délégations du PTB, de la France Insoumise ou encore de Die Linke. En suivant l’événement à distance, tous les adhérents peuvent voter au même titre que ceux sur place.

Le premier jour, Sultana fait encore monter la pression autour du slogan « Maximum Member Democracy ». Se dépeignant comme l’alliée des militants face aux bureaucrates « sans nom et sans visage », elle proteste contre l’expulsion de membres du Socialist Workers Party. Le dimanche, elle prononce un discours offensif contre les Tories, le Labour et les milliardaires. Polarisant le débat, elle remporte la plupart des votes. 80 % des votants décident d’affirmer « le socialisme » comme ligne politique, et 69 % de permettre à des membres d’autres organisations, aux vues compatibles avec Your Party, d’y adhérer. Concernant le leadership, le vote est plus serré (51,6 %) mais donne aussi l’avantage à Sultana qui réclamait une direction collective – une position de repli suite au refus par Corbyn d’un binôme.

Your Party s’ancre donc très à gauche, avec un rejet du fonctionnement pyramidal du Labour et un poids important accordé à Zarah Sultana. Mais les longs mois de conflit ont laissé leurs traces : donné à 18 % pendant l’été, le nouveau parti n’est plus qu’à 12 % à l’automne. Il doit aussi composer avec Zack Polanski, le charismatique leader des Verts élu sur une ligne radicale le 2 septembre.

En plus de parvenir à accorder ses différentes sensibilités et de s’ancrer dans les luttes, Your Party devra rapidement se préparer aux élections locales de mai 2026, lors desquelles seront aussi élus les parlements écossais et gallois. Celles-ci, en effet, confirmeront ou non l’essor de Reform UK. La gauche radicale saura-t-elle déjouer le face-à-face mortifère entre libéraux et nationalistes ? Désormais, fait majeur compte tenu de l’histoire politique britannique, elle dispose en tout cas d’un parti pour ce faire.

Antoine Guerreiro 

Analyse politique co-fondateur du média en ligne « Nos Révolutions »

Cette chronique est réalisée en partenariat rédactionnel avec la revue Recherches internationales à laquelle collaborent de nombreux universitaires ou chercheurs et qui a pour champ d’analyse les grandes questions qui bouleversent le monde aujourd’hui, les enjeux de la mondialisation, les luttes de solidarité qui se nouent et apparaissent de plus en plus indissociables de ce qui se passe dans chaque pays.

Site : http://www.recherches-internationales.fr/ 

https://shs.cairn.info/revue-recherches-internationales?lang=fr

- Publicité -

À Marseille, un cercle de silence interpelle sur les droits des migrants

0
Marseille, un cercle de silence interpelle sur les droits des migrants au cœur de la féérie de Noël
Marseille, un cercle de silence interpelle sur les droits des migrants au cœur de la féérie de Noël. Crédit photo : Djamel Guettala.

En pleine période des fêtes, au milieu des guirlandes et des chalets du marché de Noël sur la Canebière, un petit groupe de citoyens forme un cercle immobile et silencieux. C’est le Cercle de silence, une manifestation pacifique qui, depuis 2008, dénonce l’enfermement et l’exclusion des personnes sans papiers.

Organisé chaque troisième jeudi du mois à l’angle du Cours Saint-Louis et de la Canebière, ce rassemblement non violent réunit entre une dizaine et une quarantaine de participants. Il est soutenu par un collectif d’associations – La Cimade, le CCFD-Terre Solidaire, le Réseau Éducation Sans Frontières (RESF), le Secours Catholique, entre autres – et proteste contre la banalisation des centres de rétention administrative, les expulsions forcées et les violations des droits humains.

Une manière de célébrer le 18 décembre

La manifestation prend une résonance particulière cette année, le 18 décembre ayant été la Journée internationale sur la protection des droits des migrants et de leurs familles. Une date trop souvent passée sous silence dans les médias, que le Cercle de silence choisit de mettre en lumière. Par son silence et sa présence, le mouvement rappelle que les droits humains ne prennent pas de vacances, même en période de fêtes.

Les participants exposent des pancartes évocatrices : Le slogan emblématique de La Cimade, « Il n’y a pas d’étrangers sur cette terre », rappelant que l’histoire de France est faite de brassages migratoires.

« Construisons des ponts, pas des murs ! », accompagné d’images de migrants en mer Méditerranée.

Des appels à participer « même cinq minutes », pour rendre l’action accessible aux passants pressés.

Des photos d’enfants derrière des barbelés, symboles d’innocence bafouée, et des messages comme : « Leurs racines sont d’ailleurs, mais leurs vies sont ici. »

Le contraste avec l’ambiance festive du marché de Noël – chalets artisanaux, vin chaud et illuminations du 22 novembre 2025 au 4 janvier 2026 – est saisissant. Les militants choisissent délibérément ce lieu passant pour interpeller les consciences au milieu de l’agitation joyeuse.

Né à Toulouse en 2007 à l’initiative des franciscains, le mouvement des Cercles de silence s’est étendu à toute la France. À Marseille, il perdure sans interruption depuis 17 ans, témoignant d’une indignation intacte face aux politiques migratoires. « Le silence est une autre façon d’agir », expliquent les organisateurs. Une présence calme pour rappeler que derrière les chiffres, il y a des vies humaines.

En cette fin d’année, le cercle marseillais invite une fois de plus à la solidarité : un message humaniste qui résonne particulièrement en période de fêtes. Le prochain rassemblement aura lieu le troisième jeudi de janvier 2026, au même endroit. Tout le monde est invité à s’arrêter, ne serait-ce que quelques minutes.

Djamal Guettala 

- Publicité -

Louisa Hanoune plaide pour une « année de détente » politique 

4
Louisa Hanoune
Louisa Hanoune a l'habitude de servir de béquille au pouvoir en place. Crédit photo : DR

À l’approche d’échéances politiques déterminantes, la secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, appelle à une détente politique fondée sur une amnistie générale des prisonniers d’opinion.

Dans une intervention devant les militants du bureau Alger de son parti, elle articule revendications démocratiques, défense de la souveraineté nationale et participation électorale, esquissant une sortie de crise par l’apaisement et le jeu institutionnel.

La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, a appelé à une approche plus clémente et à une détente politique face à des dossiers judiciaires qu’elle juge sensibles, lors d’une allocution devant les militants du bureau de wilaya d’Alger de son parti.

Évoquant le dossier des condamnés à mort dans l’affaire du lynchage à mort de Djamel Bensmail à Larbaâ Nath Irathen, survenu à l’été 2021, elle a souligné que plusieurs personnes avaient été arrêtées, jugées et lourdement condamnées, certaines à la peine capitale, y compris, selon elle, des individus interpellés pour leur simple présence sur les lieux des faits.

Louisa Hanoune a également plaidé pour la libération de Chérif Mellal, ancien président de la JS Kabylie, estimant son incarcération injustifiée. Elle a affirmé qu’aucun crime économique ne pouvait lui être reproché et qu’il n’existait, selon elle, aucun lien entre lui et le Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK).

La cheffe du PT a enfin demandé l’élargissement de l’ancien secrétaire général de l’UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd, pour des raisons humanitaires, invoquant son âge avancé et son état de santé.

L’amnistie comme socle du « climat de confiance »

Intervenant dans un contexte marqué par une crispation persistante de l’espace politique, Louisa Hanoune a appelé à faire de l’année 2026 une « année de détente nationale ». Selon elle, la consolidation du front intérieur ne peut se faire sans un geste politique fort en direction des détenus poursuivis pour leurs opinions ou leurs engagements. 

La leader du PT plaide ainsi pour une « amnésie générale », destinée à clore les séquences de tension accumulées ces dernières années. Cette mesure, adressée directement aux plus hautes autorités de l’État, vise à restaurer un climat de confiance entre institutions et société, condition jugée indispensable à la crédibilité du processus politique à venir.

Dans cette perspective, elle a également réitéré ses appels à la levée des restrictions pesant sur les libertés syndicales et médiatiques, estimant que l’apaisement ne saurait être uniquement juridique, mais doit s’inscrire dans une ouverture démocratique réelle.

Le choix du terrain électoral

Malgré ses critiques du contexte politique actuel, Louisa Hanoune a confirmé la participation du Parti des Travailleurs aux prochaines échéances législatives. Un choix assumé, présenté comme un pari sur le changement par les urnes plutôt que par la rupture.

Pour le PT, ces élections constituent un moment « charnière », à la fois pour peser sur les orientations économiques et sociales, et pour renforcer la légitimité des institutions face aux pressions internes et externes. La participation électorale est ainsi conçue comme un prolongement du combat pour la souveraineté, et non comme une caution au statu quo.

Souveraineté nationale et front intérieur

Ce plaidoyer pour l’apaisement s’inscrit dans un discours plus large sur la protection de l’intégrité nationale. Réagissant aux tensions liées aux mouvances séparatistes et aux appels à l’ingérence étrangère, Louisa Hanoune a minimisé leur portée réelle, tout en mettant en garde contre les effets contre-productifs d’une approche exclusivement sécuritaire. Une rhétorique ancienne, chère à Louisa Hanoune depuis les années 1990, années depuis lesquelles elle tient le parti d’une main de fer.

Selon l’inamovible patronne du PT, la meilleure protection contre les tentatives de déstabilisation réside dans le règlement des problèmes internes, l’élargissement des libertés et la réconciliation entre l’État et la société. « L’immunité du pays se construit politiquement », a-t-elle insisté, liant explicitement souveraineté et démocratie.

Une lecture critique des dynamiques régionales

Sur le plan géopolitique et économique, la secrétaire générale du PT a parallèlement durci son discours à l’égard de certaines puissances étrangères, notamment les Émirats arabes unis. Elle a appelé à une révision radicale des partenariats économiques jugés sensibles, estimant que certaines présences étrangères dans les infrastructures stratégiques constituent un risque pour la souveraineté nationale.

Ce positionnement s’inscrit dans une vision cohérente : la défense de l’indépendance économique et politique de l’Algérie va de pair, selon elle, avec la consolidation du front intérieur par l’apaisement et la justice politique. Un front largement fragmenté par le pouvoir autoritaire que Louisa Hanoune justement ne critique point. Bien au contraire, n’a-t-elle pas cautionné les 20 ans de règne de Bouteflika et sa clique ? Comme actuellement, après l’intermède du Hirak/Tanekra, son discours est devenu naturellement « compréhensif » avec le pouvoir.

Samia Naït Iqbal

- Publicité -

Marseille : un an après son ouverture, l’Entrepôt Solidaire de la Fondation CMA-CGM sous le regard du pouvoir politique

0
Macron à l’Entrepôt Solidaire de la Fondation CMA CGM
Emmanuel Macron à l’Entrepôt Solidaire de la Fondation CMA CGM. Crédit photo : Dr

Un an après son ouverture, l’Entrepôt Solidaire de la Fondation CMA CGM s’impose comme un maillon central de l’aide alimentaire à Marseille. La visite du président français Emmanuel Macron sur le site marque une reconnaissance politique d’un dispositif présenté comme un modèle de coopération entre entreprises, associations et pouvoirs publics.

Depuis son lancement, l’Entrepôt Solidaire a permis de doubler les capacités opérationnelles des associations partenaires. Selon les chiffres communiqués par la Fondation, le nombre de repas distribués est passé de 5 à 10 millions, pour environ 100 000 bénéficiaires. Les capacités de stockage ont suivi la même dynamique, passant de 1 600 à 3 300 palettes, tandis que les chambres froides ont doublé de surface pour atteindre 360 m², facilitant la conservation et la redistribution de produits frais et surgelés.

Sur le terrain, ces évolutions ont permis aux associations de renforcer leur action. L’outil logistique mis à disposition améliore la gestion des flux, limite les pertes et élargit la nature des denrées distribuées. Dans un contexte de hausse continue de la précarité alimentaire, cet appui est perçu comme un levier concret pour faire face à l’augmentation des besoins.

Fort de ces résultats, la Fondation CMA CGM annonce le développement de quatre nouveaux Entrepôts Solidaires, en France hexagonale et dans les territoires ultra-marins. L’objectif est de déployer un modèle jugé efficace et réplicable, capable de soutenir rapidement les réseaux associatifs locaux.

À partir de 2026, le dispositif sera complété par un programme de mécénat de compétences. Les collaborateurs du groupe CMA CGM pourront s’engager durablement aux côtés des associations, notamment dans les opérations logistiques, au-delà des collectes annuelles auxquelles ils participent déjà. Cette évolution confirme le rôle croissant du secteur privé dans l’organisation de l’aide alimentaire.

Si l’efficacité du modèle est aujourd’hui largement mise en avant, la visite présidentielle souligne également un glissement plus large des politiques sociales vers des partenariats public-privé. L’Entrepôt Solidaire améliore la distribution de l’aide, mais ne répond pas aux causes structurelles de la précarité alimentaire. Les associations, tout en saluant le soutien logistique, rappellent la nécessité d’un engagement public durable pour garantir l’accès à l’alimentation.

L’Entrepôt Solidaire de Marseille apparaît ainsi comme un outil performant et utile, qui renforce l’action associative à court terme. Il illustre une coopération inédite entre acteurs publics, privés et associatifs, tout en posant la question centrale du rôle de l’État dans la lutte contre la précarité alimentaire à long terme.

Synthèse Djamal Guettala 

- Publicité -

Tunisie : Mohamed Bougheleb devant la justice pour une « publication » inexistante !

0
Mohamed Bougheleb
Mohamed Bougheleb. Crédit image : DR

Le journaliste tunisien Mohamed Bougheleb a comparu vendredi 19 décembre 2025 devant la chambre criminelle de la Cour d’appel de Tunis, pour répondre à l’affaire dite de la « publication », initiée par une universitaire et qui lui avait valu, en première instance, une condamnation à deux ans de prison.

Ce dossier, qui avait déjà provoqué de vives réactions dans les milieux journalistiques et des organisations de défense des droits de l’homme, illustre une fois de plus les tensions autour de la liberté d’expression en Tunisie.

Dans une déclaration faite à Ultra Tunisie, son frère et avocat, Me Djamel Eddine Bougheleb, a précisé que « la séance a permis l’audition complète de Mohamed Bougheleb concernant la publication inexistante et la manière dont ce dossier semble avoir été instrumentalisé pour le poursuivre ». La défense a présenté de nouvelles notifications au parquet et a demandé le report de l’audience afin de pouvoir examiner le dossier dans son ensemble et plaider de manière complète. Selon Me Bougheleb, la cour a fait preuve d’une grande compréhension et examinera après la séance la possibilité de fixer une nouvelle date d’audience.

Avant sa comparution, le journaliste avait lui-même dénoncé ce qu’il considère comme une procédure injuste. Dans un message publié deux jours avant l’audience, il écrivait : « Si je suis renvoyé à la prison de Mornagui, que l’on retienne qu’il s’agit d’une procédure injuste et que ma détention ne vise qu’à m’effacer définitivement. »

 Mohamed Bougheleb affirme n’avoir jamais écrit la publication incriminée et ne pas connaître la plaignante, dénonçant un processus visant à le réduire au silence.

L’affaire remonte à juillet 2025, lorsque le tribunal de première instance de Tunis avait condamné le journaliste à deux ans de prison, en se fondant sur le décret numéro 54. À l’époque, Me Nafaa El Aribi, avocat de Bougheleb, avait souligné que la publication incriminée n’avait jamais été prouvée techniquement et que le jugement n’était pas assorti d’exécution immédiate. 

Cette condamnation avait suscité une vague de critiques et d’indignation, tant au sein des médias que parmi les organisations de défense des droits humains, considérant le jugement comme un détournement de la loi pour intimider un journaliste indépendant.

Mourad Benyahia 

- Publicité -

Ligue 1 Mobilis (13e journée) : l’USMK confirme, le CSC aussi

0
Football

L’USM Khenchela et le CS Constantine ont réussi leurs sorties lors de la deuxième partie de la 13e journée du championnat national de Ligue 1 Mobilis, disputée ce vendredi.

En visite chez le MC El Bayadh, lanterne rouge, l’USMK n’a pas raté l’occasion d’aligner un troisième succès de suite en s’imposant sur le score de 2 buts à 1. Grâce à un doublé du Camerounais Etouga (41’, 71’), les Khenchelis enchaînent les bonnes performances et s’installent au pied du podium (4e – 20 pts).

De son côté, le MCEB n’arrive toujours pas à gagner le moindre match et aligne un septième revers consécutif (16e – 3 pts).

À l’Est du pays, le CSC a mis fin à la bonne série du Paradou AC. En effet, les Académiciens, qui restent sur quatre victoires de rang, ont subi la loi des Constantinois (2-0) dans cette partie où tout s’est joué durant les dix dernières minutes. Les Sanafir ont pris les devants à la 80e minute par Mouaki, avant de faire le break dans le temps additionnel sur un superbe lob signé du Nigérian Omoyele (90’+3).

Avec 18 points, le CSC remonte à la 5e position, alors que le PAC reste à la 12e place (13 pts).

Dans les autres rencontres, jouées jeudi, le MC Alger a enregistré sa première défaite de la saison en s’inclinant sur le terrain du nouveau promu, le MB Rouissat (1-0), l’ASO Chlef a renoué avec la victoire en disposant du MC Oran (1-0), alors que le derby de la capitale USM Alger – ES Ben Aknoun s’est terminé sans vainqueur (2-2).

Concernant les deux dernières parties au menu de cette manche, elles auront ce samedi. La JS Saoura sera l’hôte de l’ES Mostaganem (15h00), alors que le CR Belouizdad en découdra, à domicile, avec l’Olympique Akbou (18h00).                     

Résultats partiels de la 13e journée :
ASO Chlef – MC Oran1 – 0
MB Rouissat – MC Alger1 – 0
USM Alger – ES Ben Aknoun2 – 2
MC El Bayadh – USM Khenchela1 – 2
CS Constantine – Paradou AC2 – 0
ES Sétif – JS Kabylie18h00
Samedi :
JS Saoura – ES Mostaganem15h00
CR Belouizdad – Olympique Akbou18h00
Classement de la Ligue 1
#EquipesPtsJ
1MC Alger2510
2Olympique Akbou     2112
3MC Oran2113
4USM Khenchela2013
5USM Alger  1912
6CS Constantine 1812
7ES Ben Aknoun1711
8MB Rouissat1611
9JS Kabylie1611
10JS Saoura1612
11CR Belouizdad1410
12ASO Chlef 1313
13Paradou AC  1313
14ES Sétif1312
15ES Mostaganem912
16MC El Bayadh313

Mohamed Kermia – Radio Algérie Multimédia

- Publicité -

Hichem Sifer et la déchéance du cerveau

0
APN
L'Assemblée nationale populaire.

J’avais déjà rédigé dans Le Matin d’Algérie un article sur la déchéance de la nationalité. Un vieux projet de modification du code de la nationalité algérienne qui resurgit. L’Etat algérien s’ennuie car il faut à un régime totalitaire trouver chaque jour une idée qui corresponde à sa nature. Voilà un de ses jouets qui est ressorti du placard. 

L’Assemblée Populaire Nationale (APN) vient d’examiner ce 17 décembre, en présence du ministre de la Justice Lotfi Boudjemaâ, une proposition de loi modifiant le code de la nationalité algérienne de 1970.

Le texte, porté par le député Hichem Sifer, prévoit l’introduction de la possibilité de retrait de la nationalité algérienne d’origine aux auteurs de certains faits commis à l’étranger et qui portent gravement atteinte aux intérêts du pays.

C’est vrai que cette possibilité pénale existe aussi en France et dans plusieurs pays dans le monde. Il faut dire que pour le régime algérien, c’était surprenant qu’elle ait été remisée au placard pendant un long moment.

Mais en avait-il réellement besoin ? Il disposait de tellement de jouets qui persuadent beaucoup de ne pas en arriver à bouger le moindre petit doigt.

L’Assemblée Populaire Nationale va donc être gratifiée d’un bout de pain pour lui faire donner le sentiment qu’elle existe et qu’elle a du pouvoir. Vous rendez-vous compte, les députés, représentants de la nation, mandataires de la souveraineté nationale et bla, bla, bla…

Cela va leur donner un hochet pour qu’ils s’amusent car eux aussi s’ennuient. A force de voter sur ordre des lois liberticides de ceci et de cela, le travail devient effectivement une routine ennuyeuse. 

Mais si les députés sont portés à l’honneur, nous aussi. Figurez-vous qu’on est visé par le texte proposé. Hichem Sifer, tel un avocat avec des effets de manche et une posture du haut de la tribune à la Jaurès, vociférant le droit, la patrie, les chouhadas et bla, bla, bla…

Il propose, le brave homme, des dispositions pour lutter contre « les attaques flagrantes et manifestes contre les symboles et les fondements de l’État, perpétrées par des personnes de nationalité algérienne « qui s’estiment hors de portée de la loi en raison de la protection dont elles bénéficient auprès de pays connus pour leurs politiques hostiles à l’Algérie ».

Répétons-le, le cadre légal (si on peut exprimer ce mot pour le régime algérien) est le code de la nationalité de 1970 qui n’a pas été abrogé. Dans sa rédaction initiale la déchéance de nationalité ne concernait que les personnes qui avaient acquis la nationalité algérienne. L’acte est qualifié de crime (ou délit selon le cas) contre la sûreté de l’État. C’est dire le nombre de citoyens susceptibles d’entrer dans cette définition puisque même le murmure pouvait être qualifié de crime contre la sûreté de l’État. Inutile de rappeler que les moustaches du colonel, maître de l’Algérie à cette époque, frémissaient au moindre souffle.

Le nouveau projet de 2025 que propose le sympathique Hichem Sifer étend la déchéance de nationalité à toute personne né Algérien et qui commet des actes graves à l’étranger. Mon Dieu, j’y suis !

Enlever à une personne sa nationalité, quelle idée ! Et de me traiter de vendu à la France, j’ai eu la même réaction lorsque de nombreuses personnalités françaises avaient voulu faire resurgir cette lubie envers ceux qui avaient la double nationalité et avaient rejoint les groupes terroristes qui commettaient des crimes envers les citoyens de leur pays. Je parle de la procédure de sanction pénale pas d’une éventualité à ce que je sois terroriste islamique. Je déteste les babouches.

Absolument la même réaction mais, vous, monsieur Sifer et vos amis, vous me fatiguez, c’est tous les jours, pour tout et rien à la fois que vous me cassez les oreilles avec vos menaces. Cette fois-ci, la dernière en date (il y en aura une la semaine prochaine), il s’agit de m’enlever ma nationalité.

Au passage pour le lecteur qui l’ignore, il y a une différence dans la sémantique juridique entre la perte de nationalité et la déchéance de celle-ci. La première est un acte volontaire d’une personne qui en prend une autre. La seconde est une action de l’État qui la supprime à la personne. 

Monsieur Hichem Sifer, ce sont mes parents, mon pays et mon amour pour ce dernier qui me l’ont donnée. Ce n’est pas un excité comme vous qui va me l’enlever. Vous êtes bien plus minuscule en comparaison avec mes parents, mon pays et mon amour envers lui.

Me retirer ma nationalité algérienne ? Il faudrait ne pas avoir bu le café le matin de votre proposition pour en venir à des élucubrations de cette sorte.  

Calmez-vous, monsieur Sifer, à vouloir supprimer ou modifier ce qu’il est impossible de supprimer ou de modifier, vous allez attraper une tendinite à trop gesticuler.

La preuve, même l’école ne l’a pas réussi pour vous.

Boumediene Sid Lakhdar

- Publicité -

Djenadi Moncef : « Je voulais rendre justice à l’Aurès–Nememcha et à Ben Boulaïd »

0
Moncef Djenadi
Moncef Djenadi. Crédit photo : DR

Le livre Aurès–Nememcha, témoignages des compagnons de Mustapha Ben Boulaïd, éditions Chihab de Moncef Djenadi restitue la mémoire vivante de la révolution dans la wilaya I, à travers le récit de ceux qui ont vécu les événements de première main.

Né de plusieurs années de rencontres avec les moudjahidine de la première heure, l’ouvrage éclaire le rôle central de Ben Boulaïd et de ses compagnons dans le déclenchement du 1er Novembre 1954 et les combats de l’Aurès–Nememcha, notamment les batailles d’Ifri Leblah, Khengat Maache, Akrich à T’kout, Kimel, Tababoucht et El Djorf.

L’ouvrage a pour objectif de rétablir certaines vérités et de corriger les rumeurs propagées par des personnes malveillantes qui ont terni la glorieuse épopée de Mostefa Ben Boulaïd et de ses valeureux compagnons, tout en rendant hommage aux chouhada et en rappelant l’importance de défendre l’histoire et l’indépendance de l’Algérie. Écrit en français et traduit en arabe à la demande des lecteurs, le livre s’adresse à toutes les générations et entend transmettre une mémoire vivante.

Le Matin d’Algérie : Comment l’idée de ce livre a-t-elle germé en vous, et pourquoi avoir attendu aussi longtemps avant de le publier ?

Moncef Djenadi : L’idée m’est venue très tôt, mais j’ai dû interrompre le projet à cause de la montée du terrorisme à Bouira, où j’ai été engagé pour le combattre. Après ces événements, je n’ai pas pensé à l’édition. À mon retour à la daïra de T’kout, j’ai vécu au quotidien avec les moudjahidine du 1er Novembre, notamment Mostepha Boucetta, surnommé « Amine, le détenteur des secrets », bras droit de Ben Boulaïd. Après ma retraite, j’ai repris complètement mon manuscrit. Comme on dit, à quelque chose malheur est bon : j’ai décidé de l’éditer et de me lancer dans l’écriture, en 1988.

Le Matin d’Algérie : Vous citez plusieurs figures de la Révolution que vous avez côtoyées. Comment avez-vous recueilli et vérifié leurs témoignages ?

Moncef Djenadi : En tant qu’officier d’administration au secteur militaire de Batna, j’ai rencontré la plupart des moudjahidine de la première heure. Ensuite, au cabinet du wali de Batna, le défunt Mohamed Seradj, ces rencontres se sont multipliées. Tout a commencé lors de la commémoration du martyre de Ben Boulaïd, les 22 et 23 mars 1984 : j’ai voulu connaître la vérité sur sa mort. Pour vérifier les informations, j’ai recoupé les témoignages, en interrogeant chaque témoin individuellement sur les mêmes faits.

Le Matin d’Algérie : Pourquoi avoir centré votre ouvrage sur la région des Aurès–Nememcha, souvent méconnue dans les grands récits de la guerre d’indépendance ?

Moncef Djenadi : L’Aurès–Nememcha constitue le cœur de la Révolution du 1er Novembre. Ben Boulaïd avait pour objectif de tenir dix mois pour permettre aux autres zones de s’organiser. Ce défi a été relevé par les combattants et la population, qui ont résisté à la répression de l’armée française. Si cette région reste méconnue, c’est parce qu’on a voulu qu’elle le soit : l’Aurès n’a pas écrit son histoire, laissant ce vide profiter à d’autres par jalousie ou sectarisme.

Le Matin d’Algérie : Comment décririez-vous le rôle spécifique de Mostefa Ben Boulaïd dans le déclenchement du 1er Novembre 1954 ?

Moncef Djenadi : Ben Boulaïd a été le véritable artisan du soulèvement. Né dans une région indomptable, marquée par des insurrections successives depuis le XIXe siècle, il a milité très tôt pour l’indépendance par les armes. Il a fondé l’Organisation Spéciale en 1947 et, après son démantèlement en 1950, a su préserver sa structure par le secret et le cloisonnement. Il a financé les armes avec ses propres moyens et choisi les hommes qui allaient constituer son armée. Sans lui, le 1er Novembre n’aurait pas été possible.

Le Matin d’Algérie : Vous consacrez un chapitre aux batailles de la région. Que symbolisent-elles dans l’histoire de la lutte armée ?

Moncef Djenadi : Ces batailles sont essentielles pour comprendre la résistance dans l’Aurès–Nememcha. La bataille d’Ifri Leblah a duré trois jours avec des accrochages à Ifri Leblah, Sakiet Cheurfa et Hmarkhadou. Khengat Maache, Akrich à T’kout, Kimel et Tababoucht montrent l’héroïsme des combattants de l’ALN face à un ennemi supérieur en nombre et en armement. À Akrich, plus de 150 soldats français ont été tués par seulement 6 combattants de l’ALN. La bataille d’El Djorf, en septembre 1955, est encore plus marquante. Encerclés par plus de 30 000 soldats français, 300 combattants de l’ALN, dirigés par Abbas Laghrour, Adjel Adjoul, Sidi Hani Louardi, Guetal et d’autres, ont infligé de lourdes pertes à l’ennemi : 700 tués, 450 blessés, 3 avions abattus et 3 chars détruits. Du côté de l’ALN, 75 chouhadas et un blessé. Cette bataille est étudiée à ce jour à l’école prestigieuse de Saint-Cyr et est considérée comme la mère des batailles de l’ALN.*

Le Matin d’Algérie : Quel témoignage vous a le plus bouleversé ou marqué parmi ceux recueillis ?

Moncef Djenadi : Les récits des hommes et femmes qui ont choisi la mort plutôt que la capture sont bouleversants. Ces sacrifices, comme celui de Zerouali Amria, montrent l’extrême courage des moudjahidine et donnent un visage humain à la lutte, rappelant le prix de notre indépendance.

Le Matin d’Algérie : Pourquoi avoir choisi d’écrire en français ?

Moncef Djenadi : Ce choix n’est pas politique. C’est avant tout pédagogique et personnel. Mes études, du primaire à l’université, se sont déroulées en français, que je maîtrise parfaitement. Cela permet de toucher un public plus large et d’assurer la rigueur du récit.

Le Matin d’Algérie : Avez-vous hésité à mêler récit historique et témoignages personnels ?

Moncef Djenadi : Non. L’écriture de l’histoire repose sur les archives et les témoignages de ceux qui ont vécu les événements. J’ai vécu avec les moudjahidine de la première heure et j’ai pu rapporter le bon comme le mauvais. Il était essentiel de raconter l’histoire avec objectivité, en donnant vie aux personnages et en rappelant leurs exploits, comme ceux d’Abbas Laghrour, surnommé « le général », traqué par des parachutistes et des légionnaires.

Le Matin d’Algérie : Quel public espérez-vous toucher à travers ce livre ?

Moncef Djenadi : Tous les Algériens, sans limite d’âge, mais surtout les jeunes. Ils doivent connaître et défendre l’histoire de leur pays pour qu’il ne redevienne jamais colonisable. Ce livre est ma modeste pierre à l’édifice de notre mémoire collective, pour honorer nos chouhada et rétablir la vérité sur la glorieuse épopée de Mostefa Ben Boulaïd et ses compagnons.

Le Matin d’Algérie : La traduction vers l’arabe est en cours : que représente cette étape pour vous ?

Moncef Djenadi : La traduction est déjà disponible sur le marché, réalisée à la demande des lecteurs. Elle permet de toucher un public plus large, notamment les jeunes, et de transmettre cette mémoire dans leur langue.

Le Matin d’Algérie : Comment percevez-vous aujourd’hui la mémoire de la guerre d’indépendance en Algérie ?

Moncef Djenadi : Mi-figue, mi-raisin. Il y a du mieux ces cinq dernières années, mais le problème reste la diffusion et la réglementation. Les auteurs perçoivent très peu : pour un ouvrage vendu 1 200 dinars, l’auteur reçoit seulement 120 dinars. Les médias privilégient la poésie ou le roman plutôt que l’histoire. Beaucoup de jeunes ignorent les grandes figures de 1954. Il faut enseigner cette histoire à tous les niveaux et dans les médias, pour qu’elle soit vivante et non seulement commémorative.

Le Matin d’Algérie : En tant qu’ancien cadre de l’administration, pensez-vous que l’État fasse assez pour valoriser ces mémoires locales et ces héros méconnus ?

Moncef Djenadi : Des efforts existent, mais ils restent insuffisants. La mémoire nationale doit être un travail quotidien, partagé entre les ministères des moudjahidine, de la culture, de l’éducation et de l’information. Il faut revoir les programmes scolaires, impliquer les élèves dans les commémorations, créer des concours, et ajuster même les dates de vacances pour permettre la participation directe. La mémoire nationale doit rester vivante.

Le Matin d’Algérie : Si vous aviez la possibilité de vous adresser une dernière fois à Mostefa Ben Boulaïd, que lui diriez-vous ?

Moncef Djenadi : Père de la Révolution, votre nom incarne le courage et le don total. Vous avez placé vos biens, vos convictions et votre existence entière au service de l’indépendance de notre peuple. Mon admiration est sans limite. J’aurais voulu naître à votre époque pour combattre à vos côtés et partager votre destin. Aujourd’hui, je vous rends hommage par ces pages : ce livre est mon acte de reconnaissance pour votre combat et votre sacrifice. Tant qu’il restera un souffle en nous, avec mes compatriotes, nous défendrons l’Algérie et sa mémoire jusqu’à la dernière goutte de notre sang.

Entretien réalisé par Djamal Guettala 

Brève biographie de l’auteur

Moncef Djenadi, ancien chef de daïra de T’kout dans les années 1990 et officier de réserve, a consacré plusieurs années à recueillir les témoignages des moudjahidine de la première heure de la région des Aurès–Nememcha. Son ouvrage Aurès–Nememcha, témoignages des compagnons de Mustapha Ben Boulaïd a été publié en français aux éditions Chihab en 2021 et traduit récemment en arabe. Il a voulu rétablir certaines vérités et corriger les rumeurs malveillantes qui ont terni l’épopée de Mostefa Ben Boulaïd et de ses compagnons.
- Publicité -

DERNIERS ARTICLES

La famine tue aussi à Gaza.

Israël poursuit ses opérations militaires meurtrières à Gaza malgré le cessez-le-feu

0
L’armée israélienne a tué vendredi 19 décembre six Palestiniens, dont un bébé, lorsqu’un obus de char a touché le deuxième étage du bâtiment en...

LES PLUS LUS (48H)

La famine tue aussi à Gaza.

Israël poursuit ses opérations militaires meurtrières à Gaza malgré le cessez-le-feu

0
L’armée israélienne a tué vendredi 19 décembre six Palestiniens, dont un bébé, lorsqu’un obus de char a touché le deuxième étage du bâtiment en...