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lundi, 10 novembre 2025
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« L’odeur de la sardine » : polar et mémoire d’une guerre jamais finie

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L'odeur de la sardine

Dans L’odeur de la sardine, paru le 3 septembre 2025 chez Fayard, Serge Raffy, romancier et journaliste d’investigation, signe un roman à la croisée du polar et de l’histoire, qui plonge au cœur des traumatismes encore vivaces de la guerre d’Algérie. Avec une précision journalistique, il mêle enquête policière et exploration de la mémoire collective, dans un récit où passé et présent s’entrelacent de manière troublante.

L’histoire s’ouvre sur un crime énigmatique : l’exécution, en pleine nuit sur les quais de la Seine à Paris, de Charles Bayard, ex-patron de la police judiciaire. Un meurtre qui interroge : simple règlement de comptes ou affaire d’État ? Bayard portait un secret qui le hantait depuis ses années de service, un passé guerrier dont les cicatrices psychologiques restent intactes. Julien Sarda, ancien chef de la brigade criminelle de Paris, est chargé de l’enquête par le ministère.

Avec une équipe hétéroclite – de jeunes officiers de la DGSI et de la DGSE, un archiviste doté d’une mémoire d’éléphant et un conseiller ministériel aux allures inoffensives – il s’aventure dans un labyrinthe d’indices, de fausses pistes et de mémoires fragmentées.

Le roman alterne minutieusement les scènes de l’enquête policière et les retours sur le passé de Bayard. Raffy explore la complexité du personnage, solitaire et discret, dont les actions passées ont façonné le cours d’événements majeurs, tels que la traque des terroristes d’Action directe à Vitry-aux-Loges.

À travers cette approche, l’auteur ne raconte pas seulement une enquête : il revisite la mémoire de la guerre d’Algérie, en révélant ses traumatismes, ses non-dits et les séquelles qui traversent encore les consciences françaises et algériennes.

Dans son avant-propos, Raffy explique son choix du « conte de faits » : un récit hybride, entre fiction et réalité, qui permet de fouiller les zones sombres de la mémoire et d’explorer l’intimité des hommes confrontés à l’histoire. Loin de se limiter à la narration des événements historiques, le roman fait émerger la dimension psychologique et émotionnelle de la guerre. Il souligne qu’on ne revient jamais intact d’un conflit, et que la guerre d’indépendance algérienne continue de peser sur les deux rives de la Méditerranée, avec son cortège de culpabilité, de remords et de secrets.

Pourtant, derrière la noirceur et les blessures, Raffy fait percevoir des éléments positifs : la littérature devient un vecteur de transmission de la mémoire, et un outil pour faire face aux traumatismes.

Le roman met en lumière la résilience humaine, la capacité des hommes à chercher la vérité et à confronter leur passé. À travers le travail méthodique de Sarda et de son équipe, le lecteur découvre aussi l’importance de l’intégrité, du courage et de la persévérance, valeurs essentielles dans l’enquête comme dans la mémoire collective.

Le récit est également une réflexion sur la face sombre du gaullisme et les tensions franco-algériennes qui persistent dans les archives et les mémoires. Raffy rappelle que l’histoire n’est pas figée : elle se raconte, se transmet et se revisite à chaque génération. À ce titre, L’odeur de la sardine n’est pas seulement un roman policier : c’est un voyage au cœur des douleurs enfouies et des secrets qui façonnent encore notre présent.

Entre suspense, quête de vérité et exploration historique, le livre de Serge Raffy captive autant qu’il interroge. Il confronte le lecteur à des réalités que l’on préfère parfois oublier, mais propose aussi un chemin de compréhension et de réconciliation intérieure, rappelant que le passé, aussi douloureux soit-il, peut servir de socle pour construire une mémoire collective éclairée et partagée.

L’odeur de la sardine s’impose ainsi comme un roman policier et historique à la fois, brûlant d’actualité et profondément humain. Une lecture exigeante, qui met en lumière les blessures laissées par la guerre d’Algérie tout en valorisant la résilience, la mémoire et l’intelligence de ceux qui cherchent à faire la lumière sur les zones d’ombre de l’histoire.

Djamal Guettala

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Mondial 2026 : l’Algérie et la Guinée font nul, l’Ouganda s’en frotte les mains

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Supporters de l'EN
Les supporters algériens déçus.

L’Algérie n’a ramené qu’un point de son match contre la Guinée après un match nul bien terne (0-0) lundi. Un résultat qui n’arrange aucune des deux équipes, qui avaient besoin de points. L’Algérie pour assurer la qualification pour la Coupe du monde et la Guinée pour garder l’espoir de terminer barragiste.

L’Algérie, en cas de victoire, aurait pu commencer à préparer son voyage pour les États-Unis l’année prochaine, tant son avance sur l’Ouganda aurait été grande, même si pas impossible à combler mathématiquement. Sauf que les Fennecs, accrochés par une Guinée vaillante, ont concédé le match nul au Stade Mohamed V de Casablanca. Le match ayant été délocalisé, car la Guinée ne possède pas de stade homologué pour disputer un éliminatoire pour la Coupe du monde.

Si les hommes de Vladimir Petkovic ne sont pas parvenus à ouvrir le score, c’est en partie par leur manque de liant dans leur attaque, un Mohamed Amoura imprécis face au but et un capitaine Riyad Mahrez pas assez influent sur le jeu. Mais surtout, car dans le but adverse, Moussa Camara, le gardien de Simba, a été impérial. Il a remporté deux duels face à Amoura en première période et continué de faire régner la loi dans sa surface en seconde.

L’Ouganda profite du match nul

À force d’occasions manquées, les Algériens ont bien failli se faire surprendre. Aliou Baldé, bien lancé en profondeur, a crocheté le gardien Alexis Guendouz et frappé dans le but vide. Youcef Attal, qui avait bien anticipé, a sauvé le but sur la ligne en se jetant. Pas de but, donc dans cette partie, ce qui n’arrange aucune des deux équipes. À commencer par le Sily national (11 points après le match) qui voit la place de potentiel meilleur deuxième en vue des barrages, occupée par l’Ouganda avec 15 points, s’éloigner sérieusement.

Quant à l’Algérie, elle voit cette même équipe de l’Ouganda qui s’est imposée en parallèle contre la Somalie (2-0)  lui grignoter deux points de sa confortable avance au classement de ce groupe G. Les Fennecs, premiers du groupe, n’ont plus que quatre points d’avance sur les Ougandais.

L’Algérie devra gagner contre la Somalie le 8 octobre pour être certaine de valider son billet pour la Coupe du monde, sinon le dernier match des éliminatoires, prévu contre l’Ouganda justement, risque d’être brûlant. La Guinée, elle, devra gagner au Mozambique pour garder un peu d’espoir.

La Tunisie qualifiée

Longtemps bousculée par la Guinée équatoriale, la Tunisie a finalement décroché dans les dernières secondes la victoire (1-0) qui la qualifie à la Coupe du monde. Les Tunisiens disputeront le Mondial pour la septième fois de leur histoire.

Au bout de la dernière action, du dernier contre, et dans les dernières secondes du temps additionnel, la Tunisie a arraché sa qualification pour la Coupe du monde 2026. Elle est d’autant plus belle que la Tunisie a beaucoup souffert face à la Guinée équatoriale dans cette rencontre comptant pour la 8e journée des éliminatoires.

La Tunisie avait besoin d’un succès face à la Guinée équatoriale, mais elle aurait signé pour un partage des points pendant la seconde période tellement la domination du Nzalang était totale. La Guinée équatoriale, avec ses increvables Emilio Nsue, Iban Salvador, Coco ou Pablo Ganet, avaient véritablement envie de montrer qu’elle ne méritait pas cette 4e place dans la poule H.

Et les Aigles ne sont pas passés loin de leur première défaite dans ces qualifications. Très près même quand Emilio Nsue, à bout portant, échoue devant Aymen Dahmen dont la parade finit sur la barre tranversale (81e). Le gardien du CS Sfaxien a été le héros de la Tunisie en écœurant les Équato-guinéens, en repoussant leurs quatre tirs cadrés du match.

Avec Rfi

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Rencontre littéraire au CCA-Paris avec Jacqueline Brenot

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Jacqueline Brenot sera l’invitée du Centre culturel algérien à Paris (CCA) autour de son ouvrage « Autant en emporte l’enfance. Algérie, à l’encre des mémoires ».

Jeudi 25 septembre 2025 à 19h Centre Culturel Algérien, Paris

Modération : Philippe Tancelin, poète

Tempête sous un crâne pour cette fillette qui découvre le vrai visage de l’Algérie colonisée des années 1950.

Plus le soleil éclabousse la ville blanche, plus l’enfant scrute le monde dissymétrique et indigne qui l’entoure. Rien ne lui échappe depuis cette place animée du bas de la Casbah, ni des rues qui conduisent à l’école où se côtoient des populations si diverses.

La guerre en crue, avec son cortège d’espoirs et d’épreuves, contamine les esprits et fait grandir vite. Témoin d’événements quotidiens révoltants, la fillette relate et interroge au plus près des situations, tout en rendant hommage à l’engagement de son père pour l’indépendance du pays.

Au-delà de l’intime, Autant en emporte l’enfance explore le rapport à l’altérité, la quête de justice et la liberté pour un avenir meilleur : des questions universelles et toujours brûlantes d’actualité.

Jacqueline Brenot

Née en Algérie, elle vit entre la région parisienne et Alger. Professeur de Lettres, plasticienne lettriste, conceptrice d’ateliers d’écriture et de théâtre, auteure, elle contribue à des revues, magazines et ouvrages collectifs. Depuis 2018, elle est chroniqueuse littéraire en Algérie. Autant en emporte l’enfance est son huitième livre.

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Djamel Zenati, l’intellectuel populaire et militant de la démocratie

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Djamel Zenati

Souvent, les hommages se murmurent trop tard, lorsque le silence a déjà pris possession des voix. Rompre avec cette habitude, c’est reconnaître, de son vivant, ceux dont la parole et l’action et la réflexion appartiennent déjà au patrimoine moral et politique d’un pays.

Djamel Zenati est de ceux-là : militant infatigable, incorruptible, enraciné à la fois dans les réalités populaires et dans la haute tradition de la pensée politique, nourrie par l’expérience concrète de son peuple. Depuis plus de quarante ans, il occupe cette ligne fragile où la réflexion n’est pas un luxe académique, mais un instrument de libération.

Il est un intellectuel populaire — et l’expression, ici, n’a rien de condescendant. Elle désigne celui qui, nourri par l’histoire et les réalités vécues de son peuple, le droit et l’économie politique, refuse le jargon des cénacles pour restituer aux concepts leur force vive, traduite dans une langue que le peuple peut s’approprier sans qu’elle perde sa rigueur.

Ni universitaire enfermé dans une tour d’ivoire, ni tribun populiste distribuant des illusions, Zenati est ce pédagogue intransigeant qui parle à la fois la langue des livres et celle des places publiques, qui cite Abane Ramdane et Karl Marx dans la même phrase, sans jamais se couper de l’expérience quotidienne des Algériens.

Ses années universitaires à Tizi-Ouzou furent marquées par l’effervescence intellectuelle et l’engagement au sein du Mouvement culturel berbère. En avril 1980, il a vingt-deux ans lorsque éclate le Printemps berbère, dont il est l’un des initiateurs et, peu après, le plus jeune détenu politique. Les manifestations pour la reconnaissance de l’identité amazighe et des libertés fondamentales sont réprimées dans la violence.

De cette lutte pour la reconnaissance pleine et entière de la dimension amazighe de l’Algérie, Zenati tire la conviction que la véritable réalisation ne peut advenir que dans une Algérie démocratique. Il comprend surtout que culture et politique ne sont pas deux sphères séparées, mais « en constante interaction » : la culture est un champ de bataille où se forgent les consciences et où se prépare la souveraineté populaire.

Héritier direct du Printemps berbère, Djamel Zenati établit un lien organique entre ce soulèvement et les mobilisations citoyennes du Hirak : « Le printemps amazigh est incontestablement le précurseur et le catalyseur du combat démocratique en Algérie », affirme-t-il. Cette révolte culturelle n’a pas seulement revendiqué une identité, mais ouvert l’espace des libertés, brisé le monopole du parti unique et posé la question de la souveraineté populaire.

Selon lui, l’insurrection citoyenne d’aujourd’hui prolonge, à bien des égards, le printemps berbère — lui-même ancré dans la lutte de libération nationale — et, « le système n’a pas d’autre choix que de disparaître ». Ainsi, le combat démocratique, l’héritage anticolonial et la revendication d’une pluralité culturelle se rejoignent pour former un même mouvement historique.

Sa pensée politique repose sur un concept central : le pacte de souveraineté. Ce pacte articule deux dimensions : une dimension contractuelle, au sens classique, où la société fonde la légitimité du pouvoir politique ; et une dimension historique, où ce pacte n’est pas universel et abstrait, mais enraciné dans l’expérience algérienne et dans les exigences d’une transition démocratique.

La pensée politique évoquée ici s’inscrit dans la filiation des grandes théories du contrat social, mais elle les transpose au contexte algérien contemporain. Le pacte de souveraineté n’est donc pas conçu comme une construction juridique détachée de la réalité, mais comme un compromis historique, enraciné dans l’expérience collective du peuple.

Sans ce pacte, avertit Zenati, les constitutions et textes normatifs risquent de demeurer des coquilles vides, condamnées à être dévorées par la « norme réelle » – c’est-à-dire ce pouvoir informel, clientéliste et opaque, qui supplante le droit écrit. En ce sens, la référence implicite est aussi à Marx et Gramsci : la norme juridique ne peut survivre que si elle correspond à une hégémonie politique réellement acceptée, issue d’un compromis social partagé.

Pour lui, la transition démocratique consiste à traduire « les exigences du mouvement populaire en pacte historique qui soit de nature à renouveler la perspective historique en Algérie, un pacte qui puisse mettre le pays dans la voie du progrès et du développement ». Toute architecture institutionnelle doit, selon lui, répondre à trois questions radicales : à qui appartient la souveraineté, comment s’exerce-t-elle et pour quelles finalités ? Sa réponse est sans équivoque : « La souveraineté, c’est la capacité inaliénable reconnue au corps des citoyens de décider librement de son destin. » Sans ce compromis historique, issu de l’expérience vécue, la norme écrite reste condamnée à être dévorée par la « norme réelle », ce pouvoir informel qui opère dans l’ombre.

Cette exigence le conduit à défendre l’idée d’une transition démocratique pacifique, graduelle et négociée. Ce n’est pas frilosité, mais lucidité stratégique : l’histoire récente a montré combien les ruptures abruptes peuvent précipiter les sociétés dans l’aventure autoritaire ou la régression sanglante. « L’Algérie n’a pas besoin d’un saut dans le vide, mais d’un chemin clair vers un État démocratique et social », insiste-t-il. La négociation, pour lui, n’est pas compromission mais méthode : elle permet de construire un rapport de forces capable d’imposer des réformes irréversibles et de prévenir le chaos. Mais il se méfie tout autant des « transitions gérées » par le pouvoir, simples manœuvres de survie, que des appels au renversement immédiat sans projet structuré.

Sa critique vise les consensus de façade qui, sous couvert d’unité, dissimulent ambitions personnelles et compromissions. « Le fameux consensus serait alors un simple emballage devant sceller un concubinage avec le pouvoir et couvrir des ambitions ministérielles », avertit-il. Pour Zenati, un tel arrangement ne fonde pas l’unité politique, il la mine. Le consensus, lorsqu’il se réduit à un calcul opportuniste ou à un compromis de circonstances, tue le politique. Dans cette perspective, mieux vaut un désaccord franc qu’une alliance trompeuse. Le désaccord, s’il est ouvert et transparent, peut être fécond : il favorise l’affrontement des idées, stimule la délibération collective et permet l’émergence d’une volonté générale. Ce raisonnement rejoint la critique de Carl Schmitt, pour qui le politique ne naît véritablement que là où le conflit est clairement nommé, c’est-à-dire sur un conflit assumé, et fait également écho à Hannah Arendt, qui voyait dans la pluralité humaine et la confrontation des différences la véritable source de la vie politique et la fin de la politique c’est le début de la violence.

Dans sa lecture de la crise algérienne, le déficit le plus profond n’est pas seulement institutionnel, mais militant. D’où son appel à « réinventer le militantisme » : sortir des postures spectaculaires, renouer avec les luttes concrètes sur le logement, l’emploi, la santé, l’éducation, et « réhabiliter les idées et la production du sens ». Sa « rébellion positive » vise à briser les archaïsmes culturels et les réflexes d’allégeance qui nourrissent l’autoritarisme. Cet appel à « réhabiliter les idées et la production du sens » s’apparente à une exigence arendtienne : redonner à la politique sa dimension de création, de discours et d’action. Pour Arendt, la véritable liberté politique naît de la capacité des citoyens à prendre la parole, à agir ensemble et à inaugurer du nouveau.

Dans un pays où la norme réelle dévore la norme écrite, où l’idéologie sécuritaire fait de l’armée « non pas la colonne vertébrale de l’État, mais l’État lui-même », Zenati ne cesse de rappeler que la dignité et la liberté ne se mendient pas : elles se conquièrent. « Il n’y a pas de voie royale pour la transition démocratique. Chaque peuple puise dans ses ressources. Les chemins sont singuliers, mais universelle est l’aspiration de l’homme à la liberté et au bien-être. » Sa maxime — « théorie et pratique, réflexion et action ne sauraient être dissociées » — condense un équilibre rare : lucide sur la corruption et la résistance du système, confiant dans la capacité de la mobilisation citoyenne à les renverser.

Qu’il s’agisse des expériences de transition en Amérique latine ou en Europe de l’Est, ou encore des grands conflits mondiaux tels que la question palestinienne, Zenati se distingue par une vaste érudition. Il mobilise les enseignements tirés d’autres contextes sociopolitiques tout en les confrontant de manière critique à la réalité algérienne, sans jamais s’en détacher. Dans Palestine trahie, publié en 2014, il déploie une lecture du système international alliant précision politique et profondeur sociologique. Il y déconstruit les postures officielles arabes face à la cause palestinienne : derrière les discours enflammés, il révèle l’impuissance organisée, les calculs diplomatiques, les connivences tacites avec les puissances occidentales et l’abandon stratégique d’une cause érigée en mythe fondateur. Le terme de « trahison », emprunté à Kateb Yacine, désigne un mécanisme structurel : la rhétorique nationaliste masque la capitulation devant une logique impériale.

Djamel Zenati situe le conflit israélo-palestinien dans ce qu’il appelle le « choc des empires », bien plus que dans le « choc des civilisations » ou les « guerres de religion ». Ce sont, explique-t-il, les rapports matériels — contrôle des ressources, domination des marchés, sécurisation des alliances — qui structurent les alignements. Israël devient « prétexte et base arrière » de l’Occident au Moyen-Orient, réussissant à s’implanter là où la géographie avait échoué : inscrire l’Occident dans l’Orient.

Il en donne aussi une lecture sociologique : la montée de l’islamisme radical, incarnée par le Hamas, résulte de la rétraction des classes moyennes sous la pression de la mondialisation, cherchant refuge dans un repli identitaire. Ce glissement déterritorialise la lutte palestinienne et sert objectivement les extrémismes israéliens en enfermant le conflit dans une guerre sans fin.

Formulé il y a plus d’une décennie, ce diagnostic demeure d’une brûlante actualité : fragmentation régionale, multiplication des ingérences extérieures, persistance des régimes autoritaires. Tant que le Maghreb et le Machrek resteront des terrains de projection pour les puissances impériales et que les élites locales refuseront les « révisions déchirantes » qu’il appelle de ses vœux, la cause palestinienne restera un instrument rhétorique vidé de sa finalité : l’édification d’un État souverain et démocratique.

Sa méthode se résume dans une maxime : « Il faut toujours construire à partir du réel. » Idéaliser le réel mène au populisme, le sous-estimer méne à l’intellectualisme stérile. Le populisme grossit et manipule un instantané ; l’intellectualisme tente de couler la société dans un moule inadapté. Il faut observer, écouter, scruter les ressorts profonds et les conflictualités cachées. Cette approche, mêlant réalisme pragmatique de Raymond Aron et rationalisme critique de Karl Popper, rejette les idéologies globales et les simplifications abusives, valorisant les améliorations progressives validées par l’expérience.

Réaliste dans le discours, optimiste dans l’action, Djamel Zenati incarne un équilibre rare : lucide sur la persistance des structures de domination, confiant dans la capacité de la mobilisation citoyenne à les renverser. Parler de lui au présent, c’est déjà affirmer que l’histoire reste ouverte, à condition d’avoir, comme lui, le courage de la penser, la lucidité de l’analyser et l’honnêteté de la servir.

Chez Zenati, l’engagement intellectuel ne se sépare jamais de l’action politique : analyser, c’est déjà combattre. Et rappeler que la dignité des peuples, qu’ils soient en Palestine, au Maghreb ou ailleurs, ne se négocie pas dans les marges feutrées des conférences internationales, mais se conquiert dans la lucidité, la mobilisation et le refus de la résignation.

Parler de Djamel Zenati au présent, c’est déjà résister à l’oubli. Sa voix appartient au patrimoine moral et politique de l’Algérie, non comme relique, mais comme instrument vivant de combat. Dans ses phrases se croisent l’ombre de Matoub Lounès, la rigueur d’Aït Ahmed, l’écho de la rue algérienne et la discipline de l’intellectuel qui sait que les textes n’ont de force que s’ils sont habités par la volonté populaire.

Rendre hommage à Zenati de son vivant, c’est affirmer que l’histoire reste ouverte, à condition d’avoir, comme lui, le courage de la penser et l’honnêteté de militer.

Prof. Dr. Rachid Ouaissa

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Menacé de mort pour un couscous : le maire de Marseille sous le feu des réseaux

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Benoît Payan

À Marseille, un simple couscous a suffi pour que le maire de la ville, Benoît Payan, se retrouve au cœur d’une tempête médiatique et sur les radars de la haine en ligne. Tout a commencé lors du festival culinaire Kouss-Kouss, un événement qui célèbre la richesse gastronomique marseillaise et la diversité culturelle de la Méditerranée. Ce qui aurait dû rester un moment de convivialité est rapidement devenu un symbole inattendu de violence et d’intolérance.

Des messages insultants et même des menaces de mort ont été publiés sur les réseaux sociaux, accompagnés d’images choquantes, certaines représentant des scènes de pendaison. Le maire a été qualifié de « pauvre con » et accusé d’être « l’idiot utile des Frères musulmans ». Un contexte totalement absurde pour un simple geste : savourer un couscous.

Malgré ces menaces, Benoît Payan a choisi de ne pas céder. Sur X, il a publié un message clair et ferme : « Menacé de mort pour avoir mangé un couscous… je ne céderai évidemment rien et jamais. Marseille est une ville du vivre-ensemble et nous ferons tout pour que cela continue, malgré les intimidations, extrême droite ou pas. » Une prise de position qui illustre bien la volonté de l’édile de défendre l’ouverture et la tolérance dans une ville marquée par sa diversité.

La situation a suscité des réactions de soutien. Plusieurs personnalités politiques ont rappelé que les divergences ne doivent jamais justifier la haine ou la violence. Le député LFI Sébastien Delogu a souligné que « aucun de nos désaccords politiques ne doit surpasser la nécessité de faire bloc face aux attaques des racistes et de l’extrême droite ». Une déclaration qui résonne comme un rappel à l’ordre face aux intimidations virtuelles et réelles.

Le festival Kouss-Kouss, né en 2018, met en avant la richesse et la diversité culinaire marseillaise. Les couscous présentés lors de l’événement sont autant de variations qui reflètent les multiples communautés de la ville.

La participation de Benoît Payan avait pour objectif de célébrer ce patrimoine et de renforcer le vivre-ensemble. Mais, à l’ère des réseaux sociaux, même un plat partagé peut devenir le point de départ d’une polémique virulente.

Cette affaire rappelle que, dans certaines villes et contextes, le quotidien peut se mêler aux tensions politiques et sociales de manière inattendue. Pour Marseille et son maire, le couscous devient plus qu’un plat : il symbolise la tolérance, le dialogue et la résistance face à la haine. Et face aux menaces, la ville et son édile restent fermes : le vivre-ensemble ne se négocie pas, même à la saveur d’un couscous.

Djamal Guettala

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France : François Bayrou tombe, le gouvernement renversé

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François Bayrou
Le gouvernement Bayrou tombé

L’Assemblée nationale n’a pas accordé sa confiance au gouvernement de François Bayrou ce lundi 8 septembre. Le Premier ministre est contraint de démissionner.

Les députés ont renversé François Bayrou en lui refusant la confiance à une nette majorité (364 contre, 194 pour). François Bayrou, premier chef de gouvernement de la Ve République à être renversé lors d’un vote de confiance, présentera sa démission au président Emmnauel Macron mardi matin, selon l’un de ses proches.

Le Premier ministre François Bayrou s’est exprimé pendant environ 45 minutes, engageant la responsabilité de son gouvernement sur un ton sombre et alarmiste, dans un hémicycle alternant entre calme et moments d’agitation. « Cette épreuve de vérité comme chef du gouvernement, avec l’assentiment du président de la République, je l’ai voulue », a-t-il déclaré.

Lors d’une conférence de presse lundi 25 août, le Premier ministre avait annoncé qu’il engagerait ce 8 septembre la « responsabilité du gouvernement » devant l’Assemblée nationale réunie en session extraordinaire, pour trancher la « question centrale » de « la maîtrise de nos finances » et valider le principe de son plan d’économies budgétaires.

RFI

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La cinglante gifle des 7 adolescents haraga au régime algérien

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Les adolescents algériens arrivés clandestinement à Ibiza
Les adolescents algériens arrivés clandestinement à Ibiza

Un soir d’août, la mer s’est chargée de dire tout haut ce que le régime algérien tait depuis trop longtemps. Sept adolescents, encore à l’âge où l’on devrait rêver de football, d’études ou d’avenir, ont arraché un chalutier de pêche pour se jeter dans la Méditerranée. Leur destination n’était pas une terre promise mais simplement un ailleurs, Ibiza, une île espagnole qui n’a rien d’un Eldorado mais qui, pour eux, représentait déjà plus de vie que leur propre pays.

La traversée n’était pas un caprice ni une aventure romantique ; c’était une fuite désespérée, un geste de survie. Ce n’était pas seulement un vol de bateau, c’était un vol d’avenir, celui qu’on leur avait confisqué. Chaque vague qu’ils ont affrontée était un acte d’accusation contre un régime qui, depuis des décennies, ferme les yeux sur la souffrance de sa jeunesse. La Méditerranée, ce soir-là, n’était pas une frontière, elle était une scène où se jouait la tragédie d’un pays qui pousse ses enfants à s’évader de leur propre patrie comme on s’évade d’une prison.

En Algérie, la harga n’est plus une échappatoire clandestine, c’est devenue une obsession nationale. Dès l’adolescence, elle s’impose comme une idée fixe, un horizon gravé dans l’inconscient collectif : partir, brûler les frontières, échapper à une vie immobile. Ce n’est pas un choix réfléchi, c’est un réflexe de survie. À seize ans, ailleurs on rêve de l’université, de projets, d’amour ; ici, on rêve seulement de la mer, de l’autre rive, d’un ailleurs où l’on respire. Les chiffres parlent avec cruauté. Les départs de mineurs non accompagnés se multiplient, les embarcations interceptées se comptent par dizaines, et les côtes espagnoles, italiennes ou françaises voient chaque année déferler cette jeunesse en fuite.

La harga n’est plus marginale, elle est devenue un rite funeste de passage, une initiation collective où l’on échange l’espoir d’une vie contre la certitude du danger. Et ce danger n’effraie plus personne, car ce que redoute la jeunesse algérienne n’est pas la mer mais de rester enfermée dans un pays sans avenir. Ce phénomène n’est pas une folie individuelle, il est un verdict collectif. Si l’exil clandestin devient la norme dans l’imaginaire de toute une génération, c’est que le pays a failli. La harga n’est pas le problème, elle est le symptôme. Et ce symptôme, tragiquement, révèle une société qui ne produit plus de rêves mais des fuyards.

L’Algérie est un pays riche, mais ses enfants vivent comme si elle était pauvre. Le paradoxe est insoutenable. Sur un sol gorgé de pétrole et de gaz, dans un pays immense et fertile, la jeunesse végète, sans emploi, sans perspectives, sans avenir. Le chômage frappe de plein fouet, les diplômes se transforment en papiers inutiles, les rues en terrains vagues d’ennui. Tout est verrouillé, l’économie, la politique, la société. Ce verrouillage n’est pas une fatalité géographique, il est le fruit d’un régime qui, depuis des décennies, a bâti un système sur la rente, la corruption et l’immobilisme.

Le pouvoir s’est figé comme une statue de sel, incapable de se réformer, incapable de se remettre en cause. Les promesses de l’« Algérie nouvelle » se sont dissoutes avant même d’avoir existé. La modernité n’est qu’un slogan, l’innovation une chimère, et l’espoir un luxe que l’État ne distribue plus. Ainsi, l’avenir s’est refermé comme une porte verrouillée. Les jeunes n’ont devant eux que deux options, la soumission à une vie étroite ou la fuite vers l’inconnu. La harga devient alors le seul geste de liberté dans un pays où tout est confisqué, la parole, le vote, le travail et même le droit de rêver. Le régime, en verrouillant les horizons, n’a pas seulement étouffé les ambitions, il a condamné sa jeunesse à chercher ailleurs ce que son propre pays refuse de lui donner.

Ils étaient sept, sept adolescents dont les visages auraient dû se refléter dans les bancs d’une école ou dans les éclats de rire d’une rue animée. Mais en Algérie, leurs rires se sont éteints dans le silence d’un avenir muré. Alors ils ont pris un chalutier, comme on arrache une clé pour s’évader d’une cellule. Leur traversée n’a pas été un jeu, mais une fuite désespérée, dix heures à affronter les vagues, dix heures à jouer leur vie sur une mer qui avale plus de rêves qu’elle n’en sauve.

À Ibiza, leur arrivée a fait le tour des réseaux sociaux. Des enfants perdus qui, par un geste insensé, ont crié au monde entier la faillite de leur pays. Car ce départ n’est pas un fait divers, c’est un verdict. Ces sept adolescents sont l’incarnation d’une jeunesse abandonnée, un miroir tendu à un régime qui préfère fermer les yeux plutôt que de voir ses propres enfants le fuir. Leur audace tragique est en réalité une accusation implacable. Si des mineurs choisissent la mort plutôt que de rester, c’est que l’Algérie n’offre plus rien.

Chaque kilomètre qu’ils ont parcouru sur la mer est une gifle au pouvoir en place, une gifle silencieuse mais éclatante. Ils n’ont pas seulement volé un bateau, ils ont volé leur liberté au nez d’un régime qui ne leur laissait que des murs. Et leur geste restera, qu’on le veuille ou non, un réquisitoire contre l’Algérie officielle, celle qui célèbre des victoires imaginaires alors que ses enfants désertent en masse.

Le drame des sept adolescents n’est pas un accident isolé, il est la conséquence directe d’un système politique qui a trahi sa jeunesse. Le régime algérien aime répéter les mots creux de l’« Algérie nouvelle », mais dans les faits, il ne propose que de vieilles recettes, réprimer la contestation, distribuer la rente à une élite infime et laisser les jeunes se consumer dans le chômage et l’ennui.

Chaque départ clandestin est un référendum silencieux, des milliers de « non » adressés à un pouvoir qui ne sait ni gouverner ni inspirer. La harga est la plus implacable des oppositions, celle qu’aucune police ne peut étouffer. Quand un adolescent prend la mer, il ne vote pas, il s’évade, et dans ce geste se lit la faillite de tout un État.

Le régime a échoué sur tous les plans, incapable de créer des emplois, incapable de bâtir une économie moderne, incapable de donner à ses jeunes l’envie de rester. L’école produit plus de désillusion que d’avenir, l’université plus de diplômés en exil que de cadres en Algérie. La jeunesse, autrefois présentée comme la force vive de la nation, est aujourd’hui un poids encombrant dont le pouvoir ne sait que se débarrasser.

Le pire n’est pas seulement cet échec, mais l’indifférence glaciale avec laquelle il est assumé. Les autorités se félicitent de statistiques vides, de projets fantômes, tandis que les embarcations continuent de partir chaque nuit. Il n’y a pas de plan, pas de vision, pas de courage. L’Algérie officielle se regarde dans le miroir de ses slogans et refuse de voir que ce miroir est brisé.

Sept adolescents, un bateau volé, une mer déchaînée, voilà l’image la plus fidèle de l’Algérie d’aujourd’hui. Un pays qui pousse ses enfants à fuir n’est pas un pays en vie, c’est une patrie en agonie. Chaque traversée clandestine est un aveu. Le peuple ne croit plus aux promesses, la jeunesse ne croit plus à l’avenir et la Méditerranée devient le seul chemin vers l’espoir. L’État algérien pourra multiplier les discours, brandir les slogans d’une « Algérie nouvelle », mais la vérité s’écrit sur les flots nocturnes, dans ces embarcations qui partent chaque soir de nos côtes. C’est là que se mesure l’échec d’un régime, à la vitesse avec laquelle il perd ses enfants. Car un pays qui ne sait pas retenir ses jeunes est un pays sans futur.

Un pays qui préfère le silence de ses dirigeants aux cris de sa jeunesse est déjà condamné. Et l’histoire retiendra non pas les proclamations officielles, mais l’image de ces sept adolescents qui, par leur fuite tragique, ont signé l’acte d’accusation le plus implacable. L’Algérie a laissé partir ses enfants parce qu’elle n’a pas su leur offrir une raison de rester.

Hassina Rebiane

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Tunisie : la Cour d’appel confirme la condamnation de Mourad Messaoudi

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Mourad Messaoudi
Mourad Messaoudi condamné

La Cour d’appel de Tunis a confirmé, vendredi 5 septembre 2025, la condamnation de Mourad Messaoudi à huit mois de prison ferme. Ancien juge révoqué, Messaoudi est accusé d’avoir accordé des avantages pour influencer les électeurs lors de la présidentielle de 2024, des accusations qu’il rejette catégoriquement.

Selon son avocat, Me Samir Ben Amor, cette décision soulève de sérieuses interrogations sur le respect des droits de la défense. « La peine a été confirmée sans que mon client ne soit entendu et sans qu’aucune plaidoirie n’ait été présentée », a-t-il dénoncé, qualifiant le jugement de « scandale juridique ».

Pour l’avocat, cette affaire illustre un contexte judiciaire tendu, où les procédures peuvent sembler expéditives, en particulier dans les dossiers liés aux élections et à l’administration publique.

Mourad Messaoudi avait été arrêté en août 2025 à son domicile d’Ezzahra, suite à un mandat d’arrêt émis après le jugement en appel. L’affaire avait déjà fait grand bruit lors de son procès initial, notamment en raison du profil de l’accusé : ancien juge connu pour son implication dans des affaires sensibles et sa carrière marquée par des décisions judiciaires parfois controversées.

Les réactions à cette condamnation sont partagées. Certains observateurs estiment qu’il s’agit d’un signal fort envoyé par la justice tunisienne pour affirmer son indépendance et lutter contre toute tentative de manipulation électorale. D’autres, en revanche, pointent du doigt le processus judiciaire et dénoncent l’absence d’audition de l’accusé, ce qui soulève des questions sur la transparence et l’équité du système.

Cette décision intervient dans un contexte politique et judiciaire tunisien marqué par des tensions croissantes autour des élections, de l’administration de la justice et de la responsabilité des anciens magistrats dans la vie publique. L’affaire Messaoudi rappelle également la vigilance nécessaire face aux accusations de manipulation électorale et à l’importance de procédures strictement conformes aux droits de la défense.

Alors que la condamnation est désormais définitive, les débats sur la légitimité de la procédure et sur l’équilibre entre justice et politique risquent de perdurer. Mourad Messaoudi, de son côté, maintient son innocence et dénonce une décision qui, selon lui, fragilise la confiance des citoyens dans les institutions judiciaires tunisiennes.

Mourad Benyahia 

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Les enfants, ces victimes oubliées de la sale guerre (fin)

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Des enfants dans la guerre
Des enfants dans le tourbillon de la guerre d'indépendance.

Sous quelque angle d’analyse que ce soit, au finish, on est toujours amené à conclure que les comptes et les décomptes concernant les drames liés à la guerre d’Algérie ne sont pas terminés. On est loin du solde de tout compte ! Chacun peut s’en estimer victime, et les victimes se comptent par millions ! 

Quand on est adulte, il est souvent question de bon ou de mauvais choix, qu’il faut à un moment ou un autre assumer, en son âme et conscience. Les militaires gaulois ont assumé le leur, les harkis ont assumé leur part, les vrais et faux moudjahidin les leurs, le Général « Colombey les deux mosquées » le sien, même si au problème Algérie « wa Allahou a3llam » de Gaulle n’a jamais rien compris. Qui a raison, qui a tort dans ces folies de guéguerres meurtrières ? Il ne s’agit pas, plus d’un-demi-siècle après, de questions collectives inconciliables mais de démarches intellectuelles individuelles. Il doit y avoir du bonheur et du malheur impossible à jauger de part et d’autre ! 

Quoique, à voir le sourire servi par Leila Kaddour chaque week-end sur France 2, comparé à la mine éteinte de nos speakerines télés recrutées sur la base du taux de vénération qu’elles portent envers le clan Tebboune, il n’est pas difficile de se faire une petite idée qui ne diverge pas trop de la réalité. Que chacun la fasse, en son for intérieur, pour ne rien remuer de collectif qui fasse ressurgir les souvenirs d’un conflit douloureux, comme le sont tous les autres conflits sur terre, où des minorités audacieuses se sont déchainées et se déchaînent toujours sur des majorités silencieuses sous l’œil désobligeant et inhumain de ceux qui sont aux commandes de l’avenir du monde.

Cependant, quel type de mauvais choix peut-on faire endosser à un enfant de 10 ans pour qu’une grenade lui explose à la gueule, lui fasse traverser un état où la mort se dispute la vie pendant plus d’un mois, et que personne ne lui confère le statut de victime, ni d’un côté ni de l’autre des deux rives de la méditerranée ?

S’il subsiste encore des points litigieux sur lesquels il est bien plus important de se pencher pour y rapidement remédier, il s’agit bien de ces enfants qui portent en eux des blessures de guerre indélébiles, à l’image de celles marquées sur les corps d’Ali et Omar, sans que qui que ce soit ne se soit jamais soucié de leurs sorts.

Ce ne serait que réparation et obligation méritée pour ces victimes que d’être considérées bien plus que des dommages collatéraux d’une guerre qui pouvait être évitée, avec des « si seulement et seulement si » à charge pour une France, majeure supposée à l’époque des faits. Mais cela est encore une autre histoire, que l’on contera peut-être plus tard !

Les hommes se battent toujours pour des causes justes, semble-t-il ! Les injustes c’est comme l’enfer, c’est les autres, n’est-ce pas ? Mais qui parmi nous pourrait se vanter d’être doté de la dose de maturité, de la distance, du recul, de l’impartialité nécessaires dans l’absolu pour distinguer le voisinage du juste milieu entre le Juste et l’Injuste dans ces cafouillages d’inimitiés jamais faciles à mesurer ?

À l’opposé, concernant Omar et Ali, qui parmi les belligérants de 1954-1962 oserait leur faire endosser quelconque responsabilité dans le cauchemar qu’ils ont vécu ? Reconnaître le statut de victimes aux enfants victimes ignorées de tous, à dédommager au plus vite par tous, est non seulement à espérer, mais à en exiger l’urgence et la nécessité ! Par ailleurs, au-delà de dédommagements concernant les préjudices physiques, si de quelconques excuses se devaient d’être formulées concernant la guerre et ses nombreux atteintes morales, elles se doivent d’être directement présentées aux nombreux Ali et Omar encore en vie, et non pas au groupe de vieillards qui gouvernent le pays par la police et la trique, lesquels s’empresseraient de l’exhiber comme ultime trophée rajouté à leurs indénombrables fourberies !

Pour une paire d’Ali et de Omar encore vivants pour témoigner et exposer leurs blessures au corps, combien d’autres sont déjà partis et enterrés sans avoir pu savourer le moindre instant de reconnaissance à leurs souffrances ? Pour ces morts, c’est trop tard, mais un geste envers les vivants est plus qu’urgent !

Même si, à entendre Emmanuel Macron, la guerre d’Algérie ne concerne pas les hommes et les femmes de sa pétulante génération, personne n’a le droit de botter en touche le drame de ces enfants encore vivants.

Et si, toujours selon Monsieur le président, tout cela est du ressort de l’Histoire ancienne qui appartiendrait désormais aux livres et aux musées, et jamais plus un sujet qui s’inviterait à la conscience de l’Elysée, que faire pour effacer ces traces encore béantes sur la peau des survivants de la sale guerre, ces enfants innocents quasiment déchiquetés à un âge où tout comme les galopins de leur génération, ils jouaient gaiement aux billes, au cerceau et aux sauts de moutons ? Comment peut-on prétendre régler le solde de tout compte entre l’Algérie et la France en ne rendant pas hommage à ces victimes oubliées de tous depuis plus de 50 ans ?

Comment rechigner sur le fait de les dédommager pendant les dernières années du décompte de leurs vies, eux qui ont vu défiler, bon an mal an, tant de printemps et d’étés accordés sur les mêmes blessures marquées à jamais sur les cellules de leurs peaux et dans chaque lobe de leurs cerveaux ? Expliquez-nous donc tout cela, vous qui avez tout compris de la vie, oh Jupiter Macron !

Oui, entre l’Algérie et la France, il est temps de tourner la page, de tout oublier ! car tout peut s’oublier, même les plus coriaces des conflits et des malentendus ! et je crois pouvoir affirmer qu’il ne subsiste dans le cœur de la majorité des algériens aucune trace, ou si peu, de rancœur ou d’inimité envers leurs anciens colons ! En termes d’hostilité, les nouveaux seigneurs des frontières ont réussi le pari de tout récolter !

Mais comment peut-on demander à tous les Ali et Omar encore en vie d’oublier ces blessures visibles sur leurs peaux et certainement enfouies dans les profondeurs de leurs âmes, si on leur refuse le statut de victimes d’une bêtise humaine assumée et consommée entre adultes consentants ; eux les enfants pétillants à qui on a appris dès les bourgeons de leurs fureurs de vivre et de soif d’apprendre, à leur première année de scolarité, que leurs ancêtres étaient…bel et bien gaulois, et non pas…mecquois ? FIN

Kacem Madani

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Plus de 600 harragas algériens débarquent aux Baléares en trois jours

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Harragas
Les Algériens risquent leur vie par mer pour quitter le pays. Photo archives.

Depuis le 15 août 2025, l’archipel espagnol des Baléares a connu l’un des épisodes migratoires les plus intenses de ces dernières années. En l’espace de trois jours seulement, plus de 600 harragas, venus pour la plupart d’Algérie, ont atteint les côtes de Majorque et de Formentera à bord d’une trentaine d’embarcations de fortune.

Selon le délégué du gouvernement espagnol dans la région, Alfonso Rodríguez, il s’agit de « l’une des arrivées clandestines les plus intenses jamais enregistrées en si peu de temps ». La plupart des bateaux sont arrivés de nuit, profitant de conditions météorologiques favorables et des failles persistantes dans le contrôle maritime de cette zone très fréquentée par les passeurs.

Les chiffres confirment l’ampleur du phénomène : au cours du premier semestre 2025, les arrivées illégales dans les Baléares ont bondi de 170 % par rapport à l’année précédente. Une progression fulgurante qui illustre le rôle croissant de ces îles comme porte d’entrée de l’immigration clandestine en Europe.

Cet afflux massif met à rude épreuve les capacités d’accueil et de prise en charge des autorités locales, déjà débordées par une vague migratoire en hausse constante depuis le début de l’année. Les centres de rétention des Baléares fonctionnent au-delà de leurs capacités, obligeant les autorités à transférer une partie des migrants vers d’autres régions d’Espagne.

Derrière ces chiffres, un même drame se répète : celui de jeunes Algériens, souvent diplômés et sans perspectives, qui prennent la mer au péril de leur vie pour fuir la crise économique et sociale qui frappe durement leur pays. Dans certaines embarcations, des familles entières avec enfants en bas âge ont été recensées, témoignant d’un désespoir grandissant.

Les ONG de défense des migrants rappellent que la Méditerranée reste l’une des routes les plus meurtrières du monde, et appellent à une réponse humanitaire urgente. Elles dénoncent également la politique répressive qui criminalise les harragas sans jamais s’attaquer aux causes profondes du phénomène.

Du côté d’Alger, le silence des autorités contraste avec l’ampleur du drame humain. La harraga continue d’être traitée comme un simple problème sécuritaire et judiciaire, alors qu’elle traduit un malaise plus profond, lié au chômage massif des jeunes, à la fermeture politique et à l’absence de perspectives sociales.

Ce nouvel épisode illustre l’enracinement d’un phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur. Pour les centaines de jeunes Algériens qui ont touché les côtes espagnoles à la mi-août, la traversée est avant tout un acte de survie et de désespoir — une fuite vers l’inconnu, au prix du bannissement et de la stigmatisation.

Mourad Benyahia 

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