18 mai 2024
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Pourquoi ne voulons-nous pas débattre ?

Tajmaat

Dans tous les pays démocratiques, le débat est un signe de vitalité et de maturité politiques ! L’argumentaire étant le seul outil des empoignades verbales ! Il n’est pas rare que des positions, à l’origine diamétralement opposées, finissent par converger vers un consensus majoritaire quand on en vient au dernier recours, le vote !

Qu’en est-il chez nous ?  Ne parlons pas des débats stériles à l’Assemblée populaire qui ne représente rien d’autre qu’une chambre d’enregistrement chargée de donner un semblant de légitimité aux manigances politiques venues d’en haut !

Dans mon enfance, les problèmes de communauté dans mon village étaient réglés par Tajmaat. Une assemblée constituée de représentants de chaque famille. Les débats étaient parfois, pour ne pas dire souvent, houleux aussi, et l’argumentaire soutenu. Je ne me souviens pas de vote quelconque, mais si personne ne contredit le dernier à avoir pris la parole alors l’avis de ce dernier est adopté !

De nos jours, les comités de village fonctionnent à peu près sur le même principe ! De nombreux différends familiaux, essentiellement concernant les sempiternels problèmes d’héritage, sont régulièrement solutionnés par ces comités, évitant ainsi d’inviter une justice et des lourdeurs administratives qui se soldent par une perte de temps et d’argent que la majorité ne peut pas se permettre !

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Qu’en est-il des débats entre citoyens de différents horizons politiques ? Depuis que les vagues incontrôlables de la vie nous ont déposés en région parisienne, il nous est souvent arrivé d’assister à des débats vifs, frisant souvent l’invective, entre citoyens, quand bien même les uns et les autres sont quasiment du même bord !

Toujours dans mon enfance, au bar de mon père, à Nancy, je me souviens que kabylophones et arabophones vivaient en communauté des plus fraternelle, même si les échanges entre les uns et les autres se faisaient strictement en arabe algérien. Les arabophones ne faisant aucun effort pour essayer d’apprendre le kabyle.

De nos jours, une fracture impossible à colmater sépare les deux communautés. On le voit dans les bars, du moins, ceux qu’il m’a été donné de visiter. Les kabyles ont leurs brasseries et les arabophones les leurs, et une haine viscérale (n’ayons pas peur des mots) semble s’être installée entre les deux communautés, les uns traitant les autres de séparatistes et les autres traitant les premiers d’Algérianistes !

Pour autant, les berbérophones s’entendent-ils vraiment entre eux ? Pas si sûr ! Autonomistes, Algérianistes, indépendantistes, khobzistes, « FLN-toxistes », islamistes, etc., tous ces groupes semblent camper sur des positions inamovibles ! Les uns croyant avoir plus de légitimité et d’assise populaire que les autres. Gageons que si tout ce beau monde acceptait une rencontre quelconque dans un endroit neutre, les débats se feraient à couteaux tirés !

Mais quid de nos peuplades ? Possède-t-on de données utiles basées sur de quelconques sondages d’opinion pour avoir une distribution à peu près correcte de la carte politique du pays afin que les uns et les autres puissent jauger de leur popularité et que nous, citoyens lambda, puissions nous y retrouver ?

Évidemment, le pouvoir ne verrait pas d’un bon œil un état des lieux qui lui serait défavorable. Pourtant il n’a pas de quoi fanfaronner par rapport à son assise populaire. Il suffit de reproduire les chiffres des dernières élections présidentielles, qu’il a lui-même fourni, pour s’apercevoir du ridicule de sa popularité : à la louche, on nous a annoncé un taux de participation de 40%, et Tebboune « élu » avec 60% des voix, par excès.

On a donc, dans le meilleur des cas, un Algérien sur quatre qui aurait voté pour notre Président ! Mais gageons que pour les prochaines élections, Tebboune sera désigné par des chiffres bien plus conséquents !

Ah mon pauvre peuple ! tout le monde rêve de te séduire ou te confisquer mais personne ne veut t’écouter !

Le jour de la saint glinglin, peut-être ?

Kacem Madani

 

2 Commentaires

  1. l’Algérie met fin au débat.
    Rappelons nous la dissolution et l’interdiction des assemblées après la l’échec du soulèvement de la Kabylie en 1871. L’Algérie de 62 a pérennisé et accentué cet état de fait. Rien de nouveau donc. Ou alors quelque chose m’a échappé; qu’on me l’explique; je suis preneur; je ne ne demande que ça.
    On m’objectera que 54, 56, … un élan idéaliste est certes nécessaire pour mettre fin au colonialisme; … Mais au delà, la réalité profonde revient au galop. Tue le temps de la guerre – que faire sinon – elle refait surface une fois la contrainte coloniale évacuée. Et cette période, faut-il le rappeler, a renforcé encore plus la négation de l’héritage de Kahina entamée il y a des siècles et renforcé par les génocidaires Al Mohades. Cet héritage est, que l’ont soit conscients ou pas encore, est l’unique élément essentiel, le chaînon indispensable, pour voir d’où l’on vient et le chemin pour un avenir viable. Ce n’est pas pour rien que l’Algérie s’acharne pour effacer cet héritage. L’ironie est que l’on s’offusque que l’état algérien adopte une telle attitude. C’est le dévier de sa vocation.
    Nos ancêtres, avec leurs moyens, dans l’isolement où ils étaient du monde, ont su garder i3essassen et leurs expression politique, tajma3t, piliers d’une civilisation tout droit et sans détours venus de l’antiquité. Certes, il eut à certains moments quelques concessions de façades à l’islam, regrettables mais imposées par les circonstances., mais c’était pour avoir un peu de répit, un peu de temps pour semer les champs, attendre raffut et espérer une éclaircie au milieu des âges obscures.
    Les arabisés et islamisés sont certes sur la terre de leurs ancêtres tout comme nous; et pour cause, ils sont en majorité écrasante d’extraction berbère. Un compromis paraît néanmoins difficile dès lors qu’on a affaire à deux conceptions du monde différentes : la civilisation du citoyen qui a recours à son assemblée et à ses divinités multiples pour gérer ses différends, d’un côtés; et celle du sujet entièrement à la disposition du calife, de l’imam, eux mêmes serviteurs mais manipulateur d’un maître absolu et totalitaire, plus grand et inquestionnable, de l’autre.

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