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Révolution du Sourire, Gaïd Salah et l’armée

TRIBUNE

Révolution du Sourire, Gaïd Salah et l’armée

Doucement, mais sûrement, Gaïd Salah cristallise l’ire populaire contre sa personne. Cette vindicte est méritée. Mais, elle présente un risque pour la Révolution du Sourire. Elle peut être instrumentalisée pour éluder le traitement d’une question essentielle à la réussite de l’émancipation nationale : la primauté du civil sur le militaire.

À partir du CNRA du Caire, qui s’est tenu en août 1957, les militaires n’ont jamais cessé d’être vecteurs ou acteurs de la patrimonialisation de l’État. Ce qui a pour conséquences de faire de la carrière militaire une voie privilégiée d’“ascension sociale”. L’armée n’est donc plus, ce qu’elle a vocation à être, le siège de l’intelligence autour de la question névralgique de sécurité nationale. Elle est devenue le lieu de stratégies et d’arbitrages politicards et affairistes. Il est peu flatteur de relever que seules les organisations criminelles organisées amalgament de la sorte trois facteurs qui, en démocratie, doivent être cloisonnés : les armes, l’argent et le pouvoir. Il est donc aisé de comprendre que notre révolution n’est pas confrontée au seul Gaïd Salah, ou même aux chefs de l’armée ; mais qu’elle doit s’atteler à traiter de la place de l’armée dans l’architecture de l’État à construire.

Pour neutraliser le potentiel républicain, présent dans les effectifs de l’armée, ses chefs actuels recourent aux purges et aux règlements de comptes. L’état des lieux est vite fait. Alors que la moyenne d’âge du commandement (Directeurs centraux, chefs de forces, commandants de régions, commandants d’écoles et des grandes unités) avoisinerait les 70 ans ; celle des officiers radiés et mis en retraite atteindrait, compte à lui, laborieusement la cinquantaine ! Le constat est exactement le même pour ce qui concerne le niveau de formation et de qualification des deux collèges. La situation est dramatique.

Dans la future République démocratique, outre la concrétisation de l’impératif de la primauté du civil sur le miliaire, il s’agira de reconstruire l’armée sur des bases modernes de professionnalisme et d’efficience. Dès l’amorce de la transition, Il va falloir traiter des questions de structures, de méthodes, de moyens et de personnels.

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La place de l’armée dans la nouvelle architecture et la définition d’une nouvelle doctrine de sécurité nationale sont des questions sur lesquelles la réflexion doit être abordée dès maintenant. D’autant que de sérieux indices font peser des suspicions sur les chefs actuels.

Il faudra éviter toute légèreté dans cette question. L’objectif est d’éloigner l’armée et du champ partisan et du monde des affaires, tout en la hissant à un haut niveau de technicité et de professionnalisme. Il faudra sonner l’appel et mobiliser toutes les compétences nationales cumulées dans la communauté du renseignement et de la défense. En plus de l’application sereine des dispositions de l’ordonnance de 2006 (la loi Ghediri), ceux qui, en intégrant l’armée, voulaient réussir en politique ou dans les affaires doivent la quitter ou en être radiés. Seuls ceux qui ont la vocation des métiers des armes doivent y rester.

On voit donc que la réflexion doit porter ’au-delà de l’objectif immédiat de dégager Gaïd Salah et ses complices les plus impliqués. Sans peur, sans crainte et sans complexes, c’est une pensée stratégique qu’il faut avoir au plus vite. Même si c’est avec 62 ans de retard…

 

Auteur
Mohand Bakir

 




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