20 janvier 2025
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Z’kara fi Air Algérie : quand les stades brisent les frontières

Quand tout est muselé, que les voix se taisent, et que même les comédiens épuisés désertent la scène, il reste un lieu où le rideau ne tombe jamais : les stades. Ces gradins bruyants ne sont pas de simples arènes sportives. Ce sont des tribunaux populaires où l’absurde est jugé, où la frustration devient hymne, et où l’ironie frappe comme un uppercut.

Le dernier chef-d’œuvre en date ? « Z’kara fi Air Algérie : quand les stades brisent les frontières. » Un chant qui raconte une histoire, celle de supporters prêts à tout, même à franchir clandestinement des frontières, pour soutenir leur club, l’Kahla. Ce n’est pas un simple refrain de tribune : c’est un témoignage à pleins poumons, une satire sociale et une moquerie magistrale.

« Z’kara fi Air Algérie. » Rien que ça. Une phrase aussi brute qu’efficace. Pas une plainte sur des sièges inconfortables ou des retards interminables. Ici, c’est un tir à bout portant contre une interdiction qui dépasse la simple question des avions. Le ciel entre deux voisins est verrouillé comme une forteresse, chaque trajectoire aérienne effacée par des querelles politiques aussi absurdes que stériles.

Mais les supporters, eux, n’ont que faire de ces restrictions : « La tiyara la passeport, Takline ala Rabbi » (Ni avion ni passeport, nous comptions sur Dieu). Pourquoi attendre qu’on leur ouvre un ciel interdit quand ils peuvent tout simplement le contourner par la terre ? Pas de visa ? Pas grave. Ils inventent un chemin. « Haragha ala l’houdoud. El wadjeb Younadi » (Traverser les frontières clandestinement, car le devoir nous appelle). Traverser clandestinement des frontières, non pas pour fuir une vie oppressante, mais pour accomplir ce qu’ils considèrent comme une mission sacrée : soutenir leur équipe, leur Kahla.

Dans ce chant, ce voyage devient une épopée moqueuse, une bravade joyeuse qui balaie les barrières imposées par des querelles absurdes auxquelles le peuple n’a jamais donné son aval. Ils passent par Maghnia, glissent par Oujda, et atterrissent à Casablanca. Pas pour renverser des régimes ou bouleverser l’ordre mondial, mais pour quelque chose de bien plus important à leurs yeux : applaudir leur club, leur « chérie, » l’Kahla.

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Ce chant, aussi léger soit-il en apparence, dépasse largement le cadre du football. Il incarne une jeunesse qui, face aux absurdités du quotidien, choisit la dérision comme réponse plutôt que la résignation. Deux voisins, unis par une langue, des traditions et un couscous qu’ils assaisonnent différemment, mais qui préfèrent s’envoyer des missiles verbaux sur les réseaux sociaux. Pendant ce temps, les vendeurs d’armes et les États voyous se frottent les mains, remplissant leurs carnets de commandes sans même lever le petit doigt. Et les supporters, eux ? Ils préfèrent rêver d’une autre rivalité : pas celle des frontières, mais celle de savoir qui a le meilleur gardien, le milieu le plus créatif ou l’attaquant le plus décisif.

Et ce n’est pas la première fois que les gradins algériens transforment l’absurde en art. Souvenez-vous de « La Casa Mouradia » (Le palais présidentiel, transformé en une Casa de Papel locale), ce détournement génial où le clan Bouteflika devenait le protagoniste d’un braquage étatique digne de Netflix, ou encore de « Ma yahakmounach, la Nasa rana fi Casa » (Ils ne nous gouvernent pas, la NASA, nous sommes à Casa), une punchline cosmique pour ridiculiser une gouvernance aussi énigmatique qu’un trou noir. Ces chants voyagent d’un stade à l’autre, transportant avec eux des formules collectives reprises par des foules qui comprennent chaque mot, chaque nuance.

Et le plus beau dans tout ça ? C’est gratuit. Pas besoin d’abonnement premium, ni de câble satellite. Juste des gradins, une passion et une capacité infinie à rire, même de ce qui ne devrait pas prêter à sourire. Traverser des frontières pour un match de foot ? Voilà du génie pur. Absurde, oui, mais brillant. Pas pour une révolution, ni pour une idéologie : juste pour l’Kahla. Parce que parfois, il faut savoir remettre les priorités à leur place.

Quand une foule chante, il y a dans ces refrains plus de vérité que dans des milliers de discours officiels. Une vérité brute, implacable, mais toujours enveloppée d’un sarcasme irrésistible.

Alors, pendant que les tensions entre voisins s’éternisent et que la haine engraisse les cyniques, les supporters, eux, préfèrent briser les frontières – au moins dans leurs chants. Peut-être qu’un jour, leurs refrains seront plus contagieux que la discorde elle-même. Mais en attendant, ils continuent de transformer l’absurde en art, et les gradins en une scène où l’hypocrisie humaine est tournée en dérision, cri après cri, refrain après refrain.

Za3im

4 Commentaires

  1. L’islam et le football sont les abrutisseurs du Ghachi.
    Donc qu’attendre de cet état voyou et du peuple transformé en tubes digestifs zombie, dopé à la religion mortifère.

  2. Naître en « effraction » dans un territoire est une condamnation à l’exil, à l’apatridie, à l’errance, au vagabondage, à la prison!
    Être dépourvu de droits cela signifie être un intrus, un insignifiant, un mort-né… Né pour quêter des droits sans jamais réussir à en avoir, pour quêter un semblant d’existence sans jamais avoir la possibilité d’en jouir.
    C’est plus que Sysiphe !
    On y nait par césarienne…cette naissance contre nature qui sert plus les cliniques que « la patrie ». S’enclenche ensuite une course effrénée pour les vaccins, les couches, le lait,
    La bataille pour la survie démarre sur les chapeaux de roues…et finira en queue de poisson !
    La clandestinité est le lot de tout un chacun, la solitude son viatique !
    Heureusement que le si virtuel paradis est garanti pour les laissés-pour-compte…depuis la première année scolaire, on mobilisera toutes les forces inutiles pour en faire un bon croyant convaincu de toutes les inépties …
    De bons croyants promis au paradis céleste et dépourvus de droits sur terre, les intrus !

  3. Mr Ait Menguellet chante : soyez maudits.
    Il s’adresse aussi bien au pouvoir en place , mais c’est valable aussi pour nous  » la populace que nous sommes.

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