Mercredi 26 février 2020
Zones d’ombres
« Le Hirak a sauvé l’Etat algérien de l’effondrement », aurait déclaré récemment le président Tebboune dans un entretien accordé à la chaîne de télévision russe RT.
L’aveu du président vaut son pesant d’or, non seulement au regard de l’ampleur des dégâts occasionnés par le clan Bouteflika au pays, mais aussi la circonstance où il a été fait, c’est-à-dire à la veille du premier anniversaire du Hirak populaire. En vérité, au bout de vingt ans de règne sans partage, l’Algérie s’est retrouvée orpheline d’élite, de partis politiques structurés, de culture, d’éducation, d’enseignement supérieur, d’économie, de diplomatie, etc. Aucun secteur n’est épargné par la mauvaise gestion, la bureaucratie, la corruption, et le pays saigne de partout, à cause de la fuite accélérée des cerveaux et les perspectives économiques bouchées.
Lors de la rencontre gouvernement-walis, tenue le 16 février dernier au Palais des Nations, le nouveau locataire d’El-Mouradia s’est même permis d’interrompre son discours, chose très rare d’ailleurs, pour inviter l’assistance à visionner un reportage poignant, qui montre la situation précaire de l’Algérie profonde : des citoyens qui se plaignent depuis des décennies du manque d’infrastructures vitales sans jamais trouver la bonne oreille qui les entend, des élèves qui rejoignent leur école sur des bennes de camions et de tracteurs, des jeunes livrés à eux-mêmes, sans travail ni structures de distraction, la malvie de certains quartiers, sans eau ni électricité, ni moins encore la moindre commodité de vie.
Le reportage ayant ému plus d’un parmi les présents dans la salle, a touché aussi des millions Algériens derrière l’écran, qui découvrent que leurs responsables les ont enfin « découvert », dans leur galère quotidienne, leurs misères matérielles, leurs soucis interminables avec des responsables locaux, souvent, véreux et sans scrupules. Mais de telles images sont-elles seulement l’apanage de l’Algérie profonde ? Malheureusement que non ! Toute l’Algérie est en butte à ces maladies transmises par « le syndrome de la rente » qui corrompt pervertit les moeurs, dévie les comportements et sabote les mentalités.
L’urgence, toute l’urgence, c’est de renouer avec le peuple, et pour renouer avec ce dernier, aucune panacée universelle n’est possible, sauf « l’abécédaire démocratique » dont la règle n°1 est la transparence. Celle-ci, avec les réformes démocratiques et structurelles, étant à même de rétablir la confiance du citoyen lambda, déçu de la prestation officielle, et d’ouvrir la voie pour une refondation de la maison algérienne sur de nouvelles bases.
Autrement dit, réaliser un changement en profondeur du système dans sa globalité, lequel débouchera sur le New Deal algérien. Puissent enfin toutes ces zones d’ombres du passé disparaître, et se transformer en zones de lumière, pour le bien de tous?