18 avril 2024
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AccueilChronique1962 : cessez-le-feu. 2022 : cessez le jeu… la partie est finie !

1962 : cessez-le-feu. 2022 : cessez le jeu… la partie est finie !

Indépendance

La révolution du 1er novembre 1954 a été enfantée par les massacres du 08 mai 1945, a grandi dans les maquis de l’intérieur et fût adoptée à l’âge adulte par l’armée des frontières qui en fera son étendard.

En posant la violence comme solution ultime au drame de la colonisation, la révolution du 1er novembre 1954 a été amenée à faire de l’armée, la source exclusive du pouvoir en Algérie.  Forts de cette légitimité historique, les dirigeants algériens vont faire du secteur des hydrocarbures la source exclusive des revenus du pays rendant obligatoire le recours aux importations pour satisfaire les besoins du marché local notamment en biens de consommation finale (se nourrir, se vêtir, se loger, se soigner, s’armer, s’informer, s’instruire, voyager, s’éteindre …).

Le pétrole et l’armée vont former un couple inséparable où le pétrole va jouer le rôle de mère  nourricière éternelle et l’armée de père protecteur invincible d’une population infantilisée Un régime politique à hégémonie militaire durable entretenu par une rente pétrolière et gazière a pris forme  C’est une tendance lourde de l’histoire de l’Algérie contemporaine.

Ses racines remontent à la lutte de libération. Pour affronter l’armée coloniale les mains nues, il fallait recourir aux trésors d’imagination, de clanisme, de solidarité, d’audace, de malice, et de fourberie enfouis dans les profondeurs de la société algérienne en partant du fait que «la ruse supplée à la force : si on n’est pas lion on se fait renard ».

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L’Algérie a arraché son indépendance par l’emploi de la ruse, elle a raté son développement par manque d’intelligence. Elle n’a pas su « coudre la peau du renard avec celle du lion ». Elle ne pouvait pas le faire. Elle ne disposait ni fil ni aiguille.

Les lions ayant regagné les leurs. Les lionceaux les rejoindront un peu plus tard. Les villes désertées seront envahies par les renards.. Ils vont occuper le haut du pavé. « Les herbes seront plantées dans les baignoires et des poules seront élevées dans les balcons », signe prémonitoire de ce que sera demain avec les bâtiments qui poussent comme des champignons sur les champs agricoles.

La révolution algérienne n’a pas eu le génie de  « quitter la peau du renard pour revêtir celle du lion ». C’est ainsi que les vertus de la lutte de libération se sont transformées en obstacles dans la phase de construction du pays qui nécessitait de l’intelligence, une intelligence tuée dans l’œuf au cours de la lutte armée.

Si durant la lutte de libération nationale, la guérilla était une stratégie destinée à libérer le pays de l’occupation coloniale, une fois l’objectif atteint, les mêmes moyens politiques et militaires  serviront à encadrer population et à organiser le territoire, en vue  de s’emparer et de  conserver le pouvoir. 

Quels sont ces moyens ? Nous en citons quelques-uns : l’obéissance aveugle aux ordres, la loyauté inconditionnelle à l’égard des chefs, la prise de décision dans la clandestinité, le camouflage pour se fondre dans l’environnement, l’organisation des embuscades pour surprendre l’ennemi. Passons les sommairement en revue la loyauté envers le chef est un principe cardinal de la révolution « celui qui n’est pas avec moi et contre nous ».

Au maquis, il fallait s’entourer d’hommes  de confiance, pour éviter la traîtrise. Une fois la paix retrouvée, les gestionnaires devaient s’entourer de gens compétents pour mener à bien la construction du pays. La confiance ne devant pas être une priorité de l’heure. Ce qui n’a pas été le cas «Tout clou qui dépasse, interpelle le marteau ». C’est ainsi  que les compétences seront neutralisées et les professionnels poussés à l’exil. Quant à  l’embuscade, c’est une tactique familière de guérilla.  

Hier, affronter l’armée française en raz campagne aurait été un suicide. Aujourd’hui, agir en terrain découvert serait perdre le pouvoir. « Nous sommes toujours en embuscade même en terrain découvert. Une troisième méthode héritée de la lutte de libération, c’est la technique du camouflage. Lorsque le combat prend de la hauteur (l’aviation), se dérober aux regards adverses devient une question de vie ou de mort. 

Aujourd’hui, il faut se mettre à l’abri du regard des nouvelles technologies de communication. Un obstacle inattendu, comment devenir invisible dans une ère de plus en plus en plus visuelle ? Une autre règle de la révolution algérienne c’est de garder le silence et de veiller au secret. .La loi du silence instaurée par le MALG, reconduite par la SM et poursuivie par le DRS s’est imposée à la façade civile de la gestion économique et financière du régime militaire en place. C’est la clandestinité du pouvoir. Il n’apparaît pas au grand jour. La lumière l’effraie. L’ombre le rassure. Il veille la nuit et se repose le jour. Il est tenu d’avancer «masqué ». Pour cacher sa véritable nature au regard de l’étranger, il se camoufle derrière une façade civile. 

A l’intérieur des administrations et des entreprises, toute personne jugée  compétente et intègre sera vite neutralisée ou poussée vers l’exil. Par contre, ceux qui se soumettent au donneur d’ordre, le plus souvent de manière anonyme par téléphone souvent vont bénéficier des privilèges et des avantages. Une politique qui n’incite guère à briller mais à s’effacer. 

Il n’est pas nécessaire de travailler, il suffit d’obéir. Si par inadvertance vous contestez l’ordre établi, la carotte vous est aussitôt retirée, et vous devenez plus rien au regard de la société. Vous ne faîtes plus partie de la tribu mais de la plèbe (el ghachi). Votre carnet d’adresses est obsolète et le téléphone ne sonne plus. Par contre, si vous faites preuve de promptitude, de docilité et de servitude, vous aurez droit à une autre carotte. La violence est un héritage du passé, la corruption un produit du présent. 

Les deux réunies préludent d’un avenir sombre. Avec les années qui passent, la dilapidation des ressources rares, l’usure des hommes de pouvoir, l’obstination à se maintenir en poste malgré l’âge avancé, l’impatience de la jeunesse à se prendre en charge, le poids colossal des problèmes accumulés, le bâton a perdu de sa rigidité, de sa droiture et la carotte de son attrait, de sa saveur. L’argent facile ne fascine plus et l’emploi du  bâton est inopérant. 

On se trouve en présence d’un pays tiraillé par une génération de nationalistes  portée aux commandes par une guerre de libération en phase d’extinction et les exigences d’une jeunesse bridée par ses aînés, avide de progrès économique et de libertés démocratiques. 

Dr A. Boumezrag

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