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La liberté de la presse dans le couloir de la mort

La liberté de la presse en Algérie n’a jamais été aussi chimérique ces 30 dernières années que sous le régime de Tebboune. Une atmosphère de répression verticale plombe toute forme de critique à l’égard du pouvoir en place.

En ce 22 octobre, on peut dire que le régime a mis la dernière pelleté sur le cercueil de cette presse qui a connu des heures de courage et d’impertinence.

« Je ne peux plus écrire une ligne sans que mon rédacteur en chef ne reformule et arrondisse les saillies, s’alarme ce journaliste quinquagénaire d’un quotidien arabophone auparavant critique. Il est temps que je prenne ma retraite, ça devient irrespirable pour moi ».

Depuis l’arrivée d’Abdelmadjid Tebboune au pouvoir et la répression du Hirak, le paysage médiatique algérien est marqué par une surveillance accrue, des arrestations arbitraires et une censure systématique de toute parole ou écrit libre.

L’emprisonnement d’El Kadi Ihsane, journaliste et directeur de Radio M, illustre parfaitement cette situation alarmante. Pas seulement, l’unanimisme ambiant que renvoie la presse dans sa globalité renseigne sur l’absence de toute liberté de ton. Journaux et médias audiovisuels sont réduits à la fonction de simples courroies de transmission de la propagande officielle.

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En l’espèce, El Kadi Ihsane reste l’un des rares journalistes qui ont refusé de renoncer à sa liberté d’écrire et de faire le télégraphiste d’un régime  qui ne conçoit la presse que comme un service de communication entièrement voué à ses lubies informationnelles et à l’enfumage de l’opinion publique.

El Kadi Ihsane a été arrêté en 2021 dans un contexte où le gouvernement commençait à museler toute voix dissidente. Son emprisonnement n’est pas un cas isolé, mais fait partie d’une stratégie plus large de répression qui vise à faire taire les plumes critiques. Les médias indépendants, qui ont longtemps joué un rôle essentiel dans la diffusion d’informations critiques et la défense des droits humains, sont désormais confrontés à un environnement hostile et arbitraire.

L’absence de critique du pouvoir en Algérie est frappante. Les médias d’État, sous contrôle total des autorités, ont perdu leur rôle de médias d’information. Ils sont des instruments publics privatisés par le régime. En face, les rares voix indépendantes sont systématiquement réprimées, étouffées ou emprisonnées.

Cette situation est exacerbée par des lois restrictives qui criminalisent la critique journaliste et facilitent la censure. Les journalistes qui osent aborder des sujets sensibles, comme la corruption ou les violations des droits de l’homme, risquent des poursuites judiciaires, voire la prison. Et leurs journaux la fermeture.

Les récentes réformes législatives n’ont pas amélioré la situation. Bien au contraire, elles ont renforcé les outils de contrôle et de censure. Les autorités algériennes justifient ces mesures en invoquant la sécurité nationale et la lutte contre « les discours de haine ». Mais l’objectif est ailleurs.

Plusieurs leviers de contrôle et neutralisation des journalistes sont mis en place. Il y a les coups de fil intimidants, la suspension de pages publicitaires, ou l’envoi d’inspecteurs des impôts et autres limiers des finances. Si cet arsenal ne suffit pas, les autorités actionnent la justice avec son lot de périls, comme une fermeture administrative du média, voire l’emprisonnement.  

Aujourd’hui en Algérie, plus aucun journal ou chaîne de télévision n’ose critiquer la moindre mesure du chef de l’Etat, d’un ministre, un wali ou quelque autorité que ce soit. La répression systématique des voix critiques, couplée à une législation restrictive, a créé un climat de terreur dans les chefferies de rédactions. La liberté d’expression est dans le couloir de la mort.

Pourtant afin que le journalisme puisse jouer son rôle de contre-pouvoir, il est essentiel de garantir la sécurité et la liberté des journalistes. Mais par qui ? Plus aucune organisation n’est à même de se dresser comme protectrice des journalistes. Même les ONG de défense des droits humains, comme la LADDH, sont interdites.

Sous Tebboune, l’Algérie s’enlise dans un autoritarisme renouvelé, éloignant le pays de ses aspirations démocratiques largement portées par la rue algérienne pendant le printemps 2019.

Yacine K.

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