Mardi 29 juin 2021
Pouvoir : anéantir la révolution et l’espoir d’un statut particulier pour la Kabylie
Après avoir réalisé ses trois objectifs : l’élection présidentielle, la constitution et les législatives, il reste à mettre fin définitivement à la révolution citoyenne et à l’espoir d’un statut particulier pour la Kabylie.
À ce stade, la société algérienne qui a choisi le pacifisme comme moyen de lutte pour mettre fin à un système politique autoritaire rencontre de facto des difficultés pour le faire. En revanche, le pouvoir continue à refuser de l’écouter, il utilise ces méthodes et ces stratégies pour le faire. Entre les deux un grand fossé s’est creusé, la dernière élection législative l’a bien confirmé avec la forte abstention. La situation est factuelle, c’est une impasse politique qui donne du fil à retordre, à la fois, pour le pouvoir et les citoyens.
Ces derniers temps, le CNLD dénombre plus de 300 prisonniers d’opinion qui croupissent en prison. Ils étaient arrêtés soit pour des délits d’opinions; pour avoir manifesté; pour avoir réclamé la justice sociale; pour avoir soutenu les détenus; pour avoir dénoncé les dernières élections; pour avoir réclamé l’indépendance, l’autonomie ou un statut particulier pour la Kabylie; ou pour avoir tous simplement réclamé le changement.
Les dernières arrestations contre Bouaziz Ait-Chebib d’AKAL, Hamou Boumedine du RPK, et celles de Mira Moknache, Lounes Hamzi avec d’autres militants du MAK ont fait réagir la société civile dans son ensemble. Pour le pouvoir qui essaie de les confondre sciemment avec Rachad, héritière naturelle du FIDA (organisation terroriste du FIS) est une provocation directe contre la Kabylie.
Curieusement, c’est le plan « zéro Kabyle » qui est en train de se mettre en exécution. C’est une démarche dangereuse bien élaborée dans les laboratoires des services qui vise à sacrifier une région qui pose problème pour sauver le système.
Faire appel aux islamistes est une action assumée pleinement, selon la dernière entrevue du chef d’État avec la chaîne qatarie, El-Jazeera, travailler avec les fondamentalistes religieux n’est plus un problème. C’est une affirmation qui donne des frissons, car elle mettra en danger la nation algérienne.
Pour les deys, l’Émir Abdelkader, Messali El-Hadj où le pouvoir, la Kabylie a toujours fait l’objet d’une convoitises pour être à leur solde. On la sollicite, on la soudoie ou bien on la menace afin de s’associer à des conflits.
Grâce aux Kabyles que les Turcs ont réussi à chasser les Espagnols de certaines villes côtières comme Jijel, Bejaia et Alger. Si la France a pu s’établir en Algérie, c’est grâce à la lâcheté de ses mêmes Turcs et aux accords Tafna qu’Émir Abdelkader a signés avec le général Bugeaud. Tout le contraire de Fadhma N’Soumer (morte prisonnière à Tablat en 1863), Cheikh El-Mokrani (mort au combat près de Bouira en 1871), son frère Boumezrag avec ses enfants (envoyés prisonniers en Nouvelle-Calédonie en 1873) et Cheikh Aheddad (mort à la prison de Constantine en 1873). Ce n’est pas de la polémique, mais c’est de l’Histoire, c’est une réalité.
La France a fini par quitter l’Algérie grâce particulièrement à l’irréductibilité des Kabyles, sans remettre en doute l’implication des autres régions.
Invraisemblablement, le pouvoir a-t-il la crainte de tomber à cause de ses mêmes Kabyles incrédules? À savoir son acharnement contre ces derniers et le fait que toute une région n’a pas participé aux trois derniers scrutins sont des signes prodromes. Le divorce entre la Kabylie et les autorités n’est plus un secret, c’est une situation qu’il faudrait bien considérer. Penser au système des régions ou fédéraux n’est plus un tabou, c’est une issue.
Dans l’intérêt de tout le monde, il reste aux élites kabyles avec l’implication du citoyen de définir clairement le projet d’un statut particulier à la Kabylie dans un débat serein qui désacralise les idées saugrenues. En même temps, au pouvoir de cesser ces provocations, de libérer les prisonniers, de ne plus voir le Kabyle comme un terroriste, et de ne plus voir l’Algérien comme un demi-citoyen.
Dans l’intérêt de la nation algérienne, les résolutions de la Soummam sont d’actualité pour une solution politique, il reste à les remettre à table pour en débattre.