Mercredi 24 juillet 2019
Gaïd Salah, si vous êtes Algérien c’est que je ne le suis pas !
Né en 1940, vous êtes donc mon aîné de quinze ans. Normalement vous devriez être de ceux que j’avais connus dans mon adolescence et qui ont bénéficié d’une éducation scolaire et sociale autrement plus élevée et respectable à ce que vous êtes aujourd’hui. Je ne reconnais nullement cette génération en vous mais l’image de l’absolu dégoût que notre éducation ressentait envers les abysses de l’humanité.
Rien n’est plus éloigné de nos rêves d’antan, transmis par nos aînés et le système scolaire, que ce que vous êtes devenu. Chef d’état major d’un régime militaire qui emprisonne les libertés, corrompu jusqu’à la moelle. Trop jeunes pour percevoir toute la réalité du monde et de ses dangers, nous avions vu cela dans les films relatant la vie d’individus grotesques et menaçants, en tenue militaire, dans des révolutions lointaines.
Nous avions cependant appris, dès l’école, ce que signifiait votre statut et votre comportement et combien il fallait prendre le chemin inverse pour réaliser une vie d’honnête homme et de respectueux républicain. La plupart d’entre nous avions résolument suivi ce chemin de l’éducation, de l’instruction et de l’humanisme. Il est loin du vôtre.
Nos aînés instruits, ce que vous vous revendiquez être du fait de votre âge et de votre carrière, nous les avions toujours vus avec un livre ou un journal à la main. Ils étaient curieux de tout et admiraient tout ce qui pouvait être la bonne éducation littéraire, scientifique et sociale. En vous, je ne vois rien de cela mais l’inverse de nos représentations.
Vous vous revendiquez être Algérien, c’est donc que je ne le suis pas et que je me trompe depuis soixante-quatre ans. Mon Algérie à moi était celle de l’espoir des libertés et de la bonne éducation en tout. Elle n’a rien avoir avec un dictateur furieux, en tenue militaire.
Toute notre vie a été construite avec une idée de l’Algérie qui tourne le dos à ce que vous représentez. La seule pensée que nous puissions avoir la même nationalité m’est absolument détestable à un point dont vous ne pouvez vous imaginez.
Dans mon Algérie à moi, les militaires sont des fonctionnaires soumis au pouvoir civil, les femmes sont libres, les journalistes intouchables si ce n’est pour rappel à la loi et Dieu est interdit d’entrée à l’école, seulement dans les consciences privées.
Oui, bien sûr que j’ai vécu une jeunesse algérienne avec un autre déluré en tenue militaire, aussi dictateur que la caricature du film de Chaplin. Mais en ce temps-là, nous étions protégés par un rêve qui nous rendait heureux malgré la dictature.
Nous pensions que tous ces immondes individus étaient le passé et que le futur proche serait pour les jeunes Algériens instruits qui allaient construire un monde d’avenir, libéré de l’horreur militaire.
Curieusement, nous avions eu espoir que les générations instruites qui nous avaient précédés allaient reprendre le flambeau à nos côtés. Et dans cette génération, il y avait des gens supposés instruits comme vous. C’est dire combien nous avions vécu dans l’illusion et les enfantillages des croyances de jeunesse.
Vous représentez la plus mauvaise voie pour l’Algérie, celle qui met à genoux la population par la terreur. Votre seul sens du pouvoir est d’écraser, d’interdire, d’emprisonner et d’abrutir vos compatriotes.
Non, Monsieur Gaȉd Salah, nous ne ne sommes pas du même pays, le mien est autrement différent et vous répond de son mépris. Il vous reste des compatriotes comme le professeur Ali Mebroukine qui partagent les mêmes frontières que les vôtres et les mêmes références. Avec cela, vous finirez comme tous ceux qui n’ont eu comme seul soutien que les troubadours du régime militaire.
Je vous plains car votre vie comme votre fin prochaine ne sont pas de l’ordre du beau projet humain.