22 novembre 2024
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Présidentielle 2024 : quel rôle pour les démocrates ?

Des partis et personnalités politiques et la presse qui échappe au contrôle ou à la pression gouvernementale donnent l’impression de découvrir la nature autoritaire de l’État algérien.

Ils marquent leur étonnement devant le scénario qui se construit pour un deuxième mandat du Président Tebboune. D’autres, qui ont du patriotisme à revendre, affichent leur participation comme la nécessaire réponse à un appel de la patrie en danger. La politique ressemble dans ces circonstances à une mise en scène théâtrale.

En concentrant l’attention sur la procédure électorale, les acteurs de la présidentielle 2024 détournent l’attention des Algériens.

Très peu de gens croient en la possibilité de modifier le résultat final de la présidentielle. Dans ces conditions, participer à une élection dont le candidat soutenu par les appareils de l’État et les partis politiques apparentés sortira surement vainqueur relève ou d’une confiance en l’État ou de la croyance en un accomplissement d’un acte civique ou d’une tradition de soumission au pouvoir politique.

On peut comprendre les difficultés à aller voter qu’éprouvent les Algériens qui soutiennent des candidats marginaux ou qui ne se reconnaissent pas dans les candidats proposés. C’est souvent le cas pour tous ceux qui souhaitent pour l’Algérie un avenir démocratique et républicain.

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Cependant, prendre acte de la procédure de désignation du président de la République ne signifie pas abandonner toute revendication démocratique. Dans les circonstances de la présidentielle, la moindre des choses, c’est qu’un candidat et son courant politique veillent à ce que leur poids électoral apparaisse aussi proche que possible de la vérité. La conjonction des candidats « outsiders » peut permettre le respect du minimum des règles électorales.

La plupart des partis politiques reconnus affichent leur participation à la présidentielle 2024. Le boycott n’est pas de mise. Les autorités savent y faire face quand ce mot d’ordre influence l’électorat. Ce fut le cas en 2019. Mais la recherche de la crédibilisation de la présidentielle demeure.

C’est le sens qu’il faut donner à la rencontre des partis politiques avec le président Tebboune. Les garanties données pour une tenue « honnête » de l’élection se mesureront à l’issue de toute l’opération. Il apparait clairement que le pouvoir de négociation des oppositions est faible.

Les garanties exigées par certains partis pour participer à l’élection relèvent de la naïveté. Ce qui détermine fondamentalement le déroulement des élections, ce sont les restrictions apportées dans la durée aux libertés politiques, aux libertés individuelles et à la liberté de la presse.

Le respect de ces libertés conditionne le débat public contradictoire qui aide les citoyens dans leur choix politiques. Ce sont donc les revendication relatives à ces libertés qu’il faut faire avancer au cours de la campagne électorale.

Oublier ces revendications essentielles, c’est se résoudre à jouer les lièvres dans la compétition électorale. Or, il est possible de sortir de ce rôle de figurants, à la condition d’apporter aux débats électoraux ce contenu essentiel que sont les libertés politiques et individuelles. C’est le devoir premier des partis qui se réclament de la démocratie. Leur responsabilité est évidente. Elle est liée à leur supposée identification politique.

Mais il est à craindre que les hésitations du RCD (Rassemblement pour la Culture et la Démocratie) à se lancer dans la présidentielle s’inscrive dans l’éternelle querelle avec le FFS (Front des Forces Socialistes). Les Algériens connaissent les choix alternés de ces deux partis. Quand le FFS boycotte, le RCD participe. Quand le RCD boycotte, le FFS participe. Comme le FFS participe cette fois-ci, le RCD tarde à faire connaitre sa position.

Le RCD a-t-il intérêt à se laisser entrainer vers la sortie de la légalité ? Des velléités de dissolution avaient été affichées par les autorités. La répression policière et judiciaire qui affecte particulièrement la Kabylie avec l’usage de l’article 87 bis du code pénal constitue également une pression négative.

Dans ces deux partis, un renversement d’orientation s’est opéré au cours de ces dernières années. Le Hirak en a été le révélateur. Le FFS, particulièrement la tendance qui a pris le contrôle de l’appareil, toujours méfiant vis-à-vis des mouvements de masse qui lui échappent, n’a pas encensé le mouvement de la société civile.

A l’inverse, le RCD s’est fondu dans le Hirak au point de sombrer dans une opposition extrême au rôle de l’Armée dans la vie politique. Ce qui constitue dans les faits une rupture avec le soutien qu’il avait apporté à l’interruption du processus électoral en 1991. Le FFS qui avait condamné l’arrêt du processus électoral, se trouve aujourd’hui en quête d’une alliance avec les « forces patriotiques » du pouvoir.

Que ce soit au RCD ou au FFS, les revirements dans les orientations respectives ne sont pas assumés par une lecture autocritique de leurs positions passées. A l’image de la vie politique nationale, le débat contradictoire n’a pas cours au sein de ces deux partis. Les divisions en leur sein et entre ces deux partis causent un grand préjudice au mouvement démocratique.

Doit-on parler de partis démocrates si ces derniers ne considèrent plus que l’enjeu politique principal ne se rapporte plus aux libertés politiques et individuelles ? Dès lors, il parait logique que les motifs de division l’emportent sur les motifs de coopération.

Cette division au sein du camp qui se réclame de la démocratie ne favorise pas l’élargissement à d’autres forces démocrates présentes dans d’autres partis et dans le pays. Ce qui constitue un autre facteur d’affaiblissement de la démocratie.

Il n’est pas étonnant, alors, que le « candidat du consensus », qui bénéficie du soutien des appareils de l’État et des partis qui se coalisent autour de lui, emprunte la voie royale vers un deuxième mandat.

En vérité, la scène politique algérienne s’est appauvrie au point où les citoyens qui souhaitent un changement ne voient aucune perspective. Seul le pouvoir en place peut présenter des candidats qui, sans être charismatiques, possèdent la propriété d’être soutenus par la puissance de l’État.

La société civile, l’autre potentielle puissance, n’a pas atteint un niveau suffisant d’influence sur la scène politique. Elle ne s’est pas dotée d’organisations suffisamment représentatives reflétant son pluralisme. Elle ne manifeste pas de tendances prononcées en faveur d’une convergence démocratique.

Elle subit encore la survivance des traditions du parti unique et de l’omnipotence d’une administration centralisée. Enfin, la société civile n’est pas sortie du traumatisme de l’expérience du Hirak. Cette situation générale de reflux constitue le plus grand handicap pour une évolution démocratique du pays.

C’est pourquoi, la participation à la présidentielle 2024 de partis se réclamant de la démocratie ne peut trouver de légitimation, à l’occasion de la campagne électorale, que dans la promotion de la société civile, dans l’élargissement des libertés politiques et individuelles.

A moins de n’attendre que des changements au sommet de l’État, les partis et personnalités qui se réclament de la démocratie doivent se tourner résolument vers la réflexion et l’action pour une évolution de la société civile garantissant un avenir démocratique de l’Algérie dans le cadre républicain.

Le caractère autoritaire de l’État provoque dans les oppositions la formulation de revendications démocratiques. Les partis et personnalités qui sont hors du pouvoir veulent desserrer l’étreinte des interdits et limitations qui entravent leurs activités. Cela devrait contribuer à rendre plus large l’action démocratique.

Cependant, il serait naïf d’ignorer que pour certains partis de l’opposition, la démocratie n’est qu’un moyen pour arriver à un but, l’accession au pouvoir. Aucune garantie n’est donnée par ces partis pour respecter durablement les libertés individuelles et politiques et le caractère républicain de l’État algérien.

Or, pour les démocrates conséquents, les libertés ne sont pas de simples moyens. Elles constituent l’essence de la société civile ayant accédé à l’autonomie et à la responsabilité. C’est pourquoi, ces démocrates se distinguent par le fait que la démocratie reposant sur les libertés individuelles constitue une fin. Cette fin est le mode d’existence durable de la société civile.

Il est à craindre malheureusement que des partisans sincères de l’idéal démocratique trainent encore des influences idéologiques hostiles à la démocratie. Cela se manifeste notamment sur le plan économique et social.

Dans ce domaine, malgré son caractère autoritaire, le pouvoir en place qui a la responsabilité de la gestion, devance les forces démocratiques. Sans adhérer à une école particulière d’économie, il est contraint de répondre à des exigences de suppression ou de réduction des obstacles à l’investissement et à la production.

Cette tendance positive mais encore timide ne rencontre pas toujours l’assentiment des démocrates. Bien au contraire, il est à craindre que des voix s’élèvent parmi les démocrates pour dénoncer le « néolibéralisme » du gouvernement.

Les idées de nationalisation, de planification centralisée et de restriction des échanges internationaux dont l’Algérie a subi les conséquences désastreuses au cours de son expérience socialiste continuent de nourrir certains discours. En réalité, ce sont les conceptions archaïques du socialisme et de l’étatisme qui ont toujours cours.

Au total, l’avenir démocratique et républicain de l’Algérie repose sur l’élargissement et le renforcement des forces démocratiques. Il est attendu que de nouvelles forces émergent de la société civile.

Il est attendu également que certaines forces potentiellement démocratiques fassent leur aggiornamento, qu’elles se débarrassent des résidus du dirigisme étatiste pour intégrer pleinement la liberté économique et le droit de propriété parmi les bases de la démocratie réelle.

S’il est acquis que la présidentielle 2024 est un évènement dont les résultats sont prévisibles, la campagne électorale qui s’ouvre pourrait être bénéfique à la société civile si le débat contradictoire clarifie les conceptions et idées relatives à la démocratie et aux libertés. Une avancée vers le rassemblement démocratique le plus large constituerait un investissement capital.

Saïd Aït Ali Slimane

Cette tribune est publiée par l’auteur sur son réseau social.

4 Commentaires

  1. Première nouvelle, il reste des démocrates en liberté ?
    Car les vrais sont soit en prison soit en exil.
    Quant à ceux qui se revendiquent démocrates, ils ont quand même une bonne appétence pour la chkara.

  2. Si les algeriens ne caillassent tous les bureaux de votes alors ils meritent ce qu’ils et rien d’autre. Sinon, ces toztoz que vous appelez partis politiques plutot que association Chakara, se seraient mis d’accord sur un candidat et se preparent a ne pas accepter autre resultat que la victoire de ce candidat-la. Mais comme vous l’avez dit, ils ne peuvent peut-etre meme pas se reuinir pour en discuter . . . la question est ont-ils au moins essaye’? Biensur que non !!! On dirait que tout le monde, c.a.d. les algeriens ont bel et bien compris la politique reelle, celle des faits. Et dans les faits, il n’y a que la Ruine qui qui fera partir les rapaces.

  3. On abuse des mots: les partis démocrates, les républicains… Ce leurre a fonctionné en 90 mais jamais aujourd’hui. Si vous en Saadi ou en Aouchiche des républicains et des démocrates ..

    • Des democrates dans Auto-Theo-Cratie. Car derriere les rideaux c’est le clerge’ des boureaux du Peuple qui decide. Tabtab n’est que leur guardien de CONSTANTES NATIONALES, c.a.d. L’Arabo_islamisme nourrit aux au Petrole et Gaz. Enfin, la culture(omis la Kabylie) est a des anne’es lumiere de la democratie, car la democratie c’est plus une culture populaire a laquelle se soumettent les politiques que l’inverse…

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