Le livre Académie berbère – genèse et question identitaire de Madjid Boumekla retrace l’histoire de l’Académie berbère, fondée en 1966 à Paris par un groupe d’intellectuels et de militants engagés pour la préservation et la promotion de la culture amazighe.
L’ouvrage analyse comment cette institution, par des initiatives comme la standardisation de l’alphabet berbère et la création du drapeau amazigh, a contribué à renforcer l’identité culturelle des Amazighs à un moment où cette identité était largement marginalisée dans les pays de l’Afrique du Nord.
L’auteur, écrivain, présente une perspective qui découle principalement des témoignages et de l’héritage des organisations culturelles amazighes elles-mêmes. Dans ce cadre, il s’intéresse aux tensions internes au sein de l’Académie, entre ceux qui prônaient une approche culturelle strictement symbolique et ceux qui cherchaient à lier cette lutte culturelle à une revendication politique pour les droits des Berbères dans la région.
Cependant, le récit de Madjid Boumekla, bien qu’instructif appelant d’autres recherches pour approfondir la problématique, est fondé sur les perceptions et les récits des militants berbères, ce qui impose une lecture attentive et nuancée de l’histoire de l’Académie et de son impact.
L’ouvrage met également en lumière l’évolution du mouvement culturel amazigh, particulièrement depuis les années 1960.
Contrairement à certaines interprétations, l’Académie berbère n’a pas été dissoute en 1978. En réalité, elle a été transférée en 1979 au domicile de son président Mohand Saïd Hanouz, situé au 124, boulevard Voltaire à Paris, sous la pression des autorités françaises et algériennes.
Malgré des contributions majeures, comme la création du drapeau amazigh et la standardisation de l’alphabet tifinagh, ses activités officielles ont ralenti à cette époque. Par la suite, plusieurs tentatives de relance ont été menées, notamment par d’anciens membres et militants, mais elles n’ont pas abouti.
Ces événements reflètent les défis persistants auxquels est confronté le mouvement culturel amazigh. Bien que des victoires significatives, comme l’officialisation de la langue tamazight en Algérie et au Maroc, aient été obtenues, des tensions subsistent entre les dimensions culturelle et politique de ce mouvement.
Ces tensions influencent les actions des organisations amazighes dans des contextes variés, qu’il s’agisse de manifestations publiques, d’événements médiatiques ou de publications intellectuelles.
En conclusion, Madjid Boumekla semble vouloir montrer, à travers ce livre, l’importance de l’Académie berbère dans la construction de l’identité amazighe moderne et la manière dont cette institution a contribué à poser les bases d’une prise de conscience collective parmi les Berbères.
Toutefois, il est essentiel de comprendre que les mouvements culturels amazighes ne sont pas homogènes. Si certains continuent de revendiquer des droits politiques et sociaux, d’autres restent centrés sur la préservation et la promotion de la culture amazighe dans un cadre non politique.
Cette dualité, entre la lutte pour la reconnaissance culturelle et la demande de droits politiques persiste aujourd’hui et reflète la complexité de la situation identitaire des Amazighs dans le monde contemporain.
Le travail de Madjid Boumekla, tout en mettant en avant la dimension historique et symbolique du mouvement, laisse entrevoir ces contradictions internes et souligne l’évolution d’une lutte culturelle devenue, au fil du temps, un véritable enjeu sociopolitique.
Ouanis M.