Ce matin a eu lieu l’inauguration du square Idir au coeur du quarier de Ménilmontant, à Paris. Beaucoup de monde est venu assister à ce moment solennel.
Sa fille Tanina, le maire de Ménilmontant, le president d’association d’At Yenni ont rendu un vibrant hommage à l’artiste et au citoyen Hamid Cheriet ou Idir.
Nous publions le discours de l’association At Yanni prononcé à l’occasion de l’inauguration du square Idir à Ménilmontant dans le XXe arrondissement de Paris ce 20 avril.
Bonjour à tous, Azul fellawen. Il n’est un secret pour personne que Idir est, et restera, un des meilleurs ambassadeurs de la chanson kabyle et plus largement de la culture Amazigh (Berbère). En effet, c’est lui qui, au bénéfice de mélodies dont lui seul avait le secret, a su accrocher l’oreille des publics à travers le monde.
Grace à un premier titre puisé dans les contes que nos grand-mères nous racontaient autour du feu « A Vava Inouva », il a, en deux temps trois mouvements, conquis le monde des mélomanes et mis sur orbite notre culture ancestrale jusque-là confidentielle.
En effet, notre culture ancestrale était « confidentielle par contrainte», car elle n’avait comme vecteur de diffusion que la tradition orale sortant des voix limpides de nos aïeuls et, comme uniques réceptacles, les oreilles attentives des enfants que nous étions…et ce processus s’est réitéré de génération en génération, depuis la nuit des temps.
Culture ancestrale confidentielle par contrainte, donc !
Mais, au début des années 1970, Avec quatre accords délicatement plaqués sur le manche d’une guitare sèche et une voix chaleureuse, Idir a pu faire céder les digues pour exposer au grand jour toute la richesse de notre culture millénaire.
Habillées de merveilleuses mélodies aux sonorités nouvelles, déclamées par une voix envoutante, nos comptines allaient parcourir le monde… et nous étions fiers de les partager avec la terre entière.
Par la suite, il est allé parcourir les scènes au-delà des frontières, tissant des liens avec les autres cultures, en France d’abord, notamment en Bretagne, avant de se lancer à l’assaut de la Belgique, de la Suisse, de l’Angleterre, de l’Allemagne, du Maroc, de la Tunisie, du Canada et de bien d’autres pays. Partout, l’accueil qui lui a été réservé a été grandiose.
Ses débuts se firent par les comptines et les chants rythmés de nos fêtes mais, très vite, il a chanté les Peuples opprimés, les minorités écrasées (comme la sienne), la Liberté, la Femme et ses droits, les Cultures réduites au silence et bien d’autres causes justes. C’était là son vrai crédo.
Idir était accompagné dans son parcours par un groupe de musiciens kabyles comme lui, qui étaient eux aussi animés par le même sentiment d’appartenance. Je citerai Hachemi, le bassiste (Paix à son âme), Arezki, le batteur, Brahim, le guitariste et bien sûr Tarik, guitariste lui aussi mais surtout son ami fidèle de tous les instants.
À eux cinq, ils ont su offrir à ce répertoire sorti de nulle part, un auditoire sans frontières au grand bonheur de la communauté kabyle.
Très tôt, s’est joint à ce ‘’quintette’’ un kabyle d’adoption, le flutiste breton ‘’Gérard Goeffroy’’ (Paix à son âme).
Dès lors, Idir, le chantre de l’identité Amazigh, que d’aucuns croyaient disparue à jamais, rentrait de plain-pied dans le monde des chanteurs engagés pour ne plus jamais en ressortir. Et, ce faisant, il était devenu un membre de toutes les familles kabyles et plus largement amazigh.
À la fin de sa carrière, dans un souci d’ouverture, il a réalisé des duos avec de grands noms de la chanson française : Maxime Le Forestier, Charles Aznavour, Bernard Lavilliers, Patrick Bruel, Francis Cabrel, Gérard Lenorman, Dan Arbaz, Grand Corps Malade et bien d’autres. Certains d’entre eux ont même accepté de jouer le jeu en entonnant quelques couplets en Kabyle.
Idir était soucieux d’amarrer durablement l’identité kabyle à l’universalité… et, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il y est parvenu admirablement.
Aujourd’hui nous avons l’honneur d’inaugurer le « Square Idir » dans le 20ème arrondissement de Paris, quartier qui l’a accueilli à ses débuts et, qu’en retour, l’artiste n’a jamais quitté puisqu’il venait s’y ressourcer régulièrement. On pouvait d’ailleurs l’y croiser au détour d’une rue, dans les locaux de l’ACB (Association Culturelle Berbère) ou bien au « Petit Balcon », un petit bistrot communautaire qu’il affectionnait particulièrement.
Nos remerciements vont donc naturellement à la Mairie de Paris et à celle du 20ème arrondissement qui ont accepté de nommer ce square du nom de notre artiste et qui ont porté l’organisation de cette manifestation.
Nos remerciements vont aussi à ses pairs et compagnons de route qui ont bien voulu être présents.
Nos remerciements vont enfin à tous ceux qui ont œuvré pour la réussite de ce projet et, bien sûr, toutes les personnes présentes, ici, dans le 20ème arrondissement de Paris, ce 20 avril 2024 à 11 heures, pour honorer le parcours de ce Grand Monsieur.
Merci à tous, Tanmirt s tusda
L’Association « Ath Yani »