24 avril 2024
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La gestion ne se décrète pas !

Palais de gouvernement

Les décisions des sociétés contemporaines se prennent au sein de trois institutions : l’Etat, l’Armée et les grandes entreprises. Il y a un lien profond entre la manière de concevoir et d’exercer le pouvoir et les diverses formes prises par la propriété.

C’est dire qu’il est impossible de parler d’un Etat sans dire aussitôt sur quel régime de propriété il repose, comme il est tout à fait impossible de parler de régime de propriété sans indiquer par la même occasion, quel est l’Etat qui se profile derrière lui. La question est de savoir que signifie le droit de propriété quand il emprunte la voie de l’étatisation ? 

En Algérie, l’Etat a pris corps à partir de l’Armée et de l’administration et non d’une bourgeoisie et de la classe ouvrière, il s’impose à la société. Nous sommes en présence d’un Etat qui tire sa légitimité de l’armée et sa substance d’une rente énergétique. Vivant exclusivement de la rente, l’Etat peut se permettre de ne pas développer une production propre en dehors des hydrocarbures et rien ne l’empêche d’établir des relations clientélistes avec les acteurs économiques et sociaux.

Partant du principe sacro-saint que tout problème politique, économique ou social a une solution budgétaire. Comme le budget est constitué essentiellement de recettes fiscales pétrolières, l’Etat jouit d’une grande autonomie par rapport à la population puisqu’il est capable de fonctionner et de renforcer ses services sans recourir à l’impôt ordinaire.

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L’essentiel du jeu économique et sociopolitique consiste donc à capturer une part toujours plus importante de cette rente et à déterminer les groupes qui vont en bénéficier. 

Les revenus pétroliers et gaziers génèrent un « faux sentiment de sécurité » qui poussent les autorités à considérer le protectionnisme comme un luxe que le pays peut se permettre de ne pas investir dans le capital humain. La rente pétrolière et gazière agit comme « un chèque à blanc » donné à l’irresponsabilité, au clientélisme et au report des réformes structurelles. 

Les dirigeants d’entreprise ont une forte ambition personnelle mais n’en ont aucune pour leur entreprise. Et pourtant, l’avenir du pays est dans la création des richesses et la production des biens et services, c’est l’affaire de l’entreprise ; c’est l’utilisation des vices de chacun pour le bien de tous. Quant à la vertu c’est l’affaire de l’Etat. 

Malheureusement le pouvoir en Algérie entretient la confusion entre archaïsme et modernité. Il a les pieds au XXIème siècle (costume cravate) grâce à la rente pétrolière et gazière et la tête (un turban trente-trois tours) au moyen âge alimentée par des luttes claniques, le charlatanisme ambiant. Il joue des deux pieds tout en gardant le ballon. Il joue avec lui-même. Il est à la fois chef d’orchestre, instrumentiste, acteur et spectateur.

Les enjeux sont aujourd’hui si essentiels qu’ils occupent une place prépondérante dans le débat politique. Il n’y a pas d’équilibre de l’économie sans un minimum de paix sociale, pas de croissance possible sans adhésion de la population. Un lien étroit est à rechercher entre salaire et production, profit et investissement. Les gens sont partout les mêmes : sécurisés, motivés, laissés libres de percevoir le fruit de leurs efforts, ils travaillent et investissent. 

Par conséquent, il nous semble que seul le développement des activités réellement productives, les possibilités d’accroissement de la production, les améliorations de la productivité déterminent les progrès de la rémunération, les conditions de travail et l’augmentation du niveau de vie. 

Car on ne peut distribuer de que ce que l’on produit et le versement de revenus sans contrepartie n’a jamais permis d’améliorer le pouvoir d’achat. La réhabilitation de l’entreprise passe par la réhabilitation de la dignité de l’individu et cette dignité ne peut être restaurée que par la dépersonnalisation des rapports dans le travail c’est-à-dire le primat du professionnalisme sur le tribalisme. 

A tous les niveaux, les entreprises publiques et les règles qu’elles édictaient furent incapables de s’imposer aux réseaux de solidarités fondés sur des liens de parenté ou de compagnonnage. Profondément ancrés dans les esprits, ces réseaux se reconstituèrent très vite derrière le paravent des organigrammes qui demeurèrent de véritables canaux d’accession au pouvoir sur les ressources et sur les hommes, c’est-à-dire au pouvoir de signature quand il s’agit de recruter, d’acheter, de dépenser ou de licencier. Les structures ne sont en réalité que des façades dissimulant des réseaux occultes et mouvants, des relations lucratives entre cousins. La persistance des solidarités communautaires fondées sur des liens de parenté semble être l’obstacle décisif à la construction d’une économie productive, féconde et durable. 

Il semble certain que le changement dans le sens de la construction de l’entreprise moderne et performante ne peut se faire que si la société bouge. Ce changement doit se traduire par une consommation de la rupture entre le politique et l’économique.

Cependant, vouloir changer le comportement de l’homme sans comprendre les motivations revient à vouloir mettre en route une voiture qui a calé en lui donnant des coups de pieds car sans critique et sans pression, il est rare que les entreprises changent de procédures et de politique. Les méthodes en usage paraissent constituer les meilleurs sinon les meilleures sinon les seules approches possibles. Mais comme la classe sociale qui est au pouvoir est celle qui détient le pouvoir économique, la politique tend en partie à perpétuer ses avantages et à consolider sa position. 

Tout se passe comme si les discours de cette classe dominante n’étaient rien d’autre qu’une vaste opération de mystification tendant à faire croire que les structures sur lesquelles elle est assise sont les plus aptes à promouvoir le développement alors que cinq décennies de « développement » prouvent le contraire. 

Lorsqu’il s’agit de prendre des décisions, les hommes au pouvoir raisonnent à court terme, ils sous-estiment les conséquences à plus long terme, négligent d’appliquer les remèdes que dicte la raison, laissant en suspens les questions d’importance cruciale. La confiance ne se décrète pas, elle se gagne par des actes et non par des paroles. Beaucoup l’affirment haut et fort, la confiance c’est important.

Certains disent que l’on ne peut plus faire confiance à qui que ce soit, d’autres affirment que cela se décrète, se décide et vont jusqu’à l’afficher sur les murs. La question de la confiance est véritablement centrale. On ne peut rien construire de sérieux si la confiance n’est pas au rendez-vous. 

Albert Einstein nous a dit : « On ne peut pas résoudre un problème avec le même mode de pensée que celui qui a généré le problème ». Nous sommes de mauvais élèves. Nous n’apprenons pas nos leçons. Nous refaisons les mêmes erreurs. Nous sommes au fond du puits et nous continuons à creuser plus profondément comme si nous n’avons pas atteint le fond.. Pourtant, la solution n’est pas au fond d’un trou mais sur la terre ferme  « On a fait du social là où il fallait offrir du travail. On a distribué des subventions là où il fallait donner une formation », avait dit Nicolas Sarkozy alors président de la République Français en 2005. Nous suivons les pas de « nos ancêtres les gaulois ». 

Dr A. Boumezrag 

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