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La religion d’État, une plaie inguérissable de l’humanité

Aider la jeunesse

Image par Shima Abedinzade de Pixabay

Une condamnation à mort sous le chef d’inculpation « corruption sur terre », vous connaissez un pays du monde civilisé l’introduire dans un article du code pénal et en prévoir la peine capitale ?

C’est ce qui vient pourtant d’arriver en Iran avec l’annonce de la condamnation à mort du chanteur de 33 ans, Toomaj Salehi. C’est le journal très conservateur, Hamshahri (l’expression est un euphémisme) qui l’a annoncé au monde, le 24 avril, avec un contenu stupéfiant que nous avions  rappelé “Le tribunal d’Ispahan a condamné [le rappeur] Toomaj Salehi à la peine de mort et à des peines supplémentaires pour corruption sur terre”, 

Mais avec un épouvantable cynisme, la cour rajoute « en raison de l’expression de remords […] par l’accusé, la justice a estimé que le chanteur avait droit à une remise de peine”. Il serait « éventuellement condamné à une longue peine de prison ».

Nous saluons la très grande mansuétude et l’humanisme du tribunal islamique d’Hispahan. Le guide suprême qui dicte le contenu des arrêts, comme Poutine sait le faire, a conscience qu’il faut donner un avertissement à une foule qui s’était récemment soulevée. Des avertissements sous menaces d’une peine de pendaison, il en avait pourtant donné autant qu’il faut pour remplir les cimetières

Il faut surtout comprendre que cet avertissement est autant à l’intention de la population qu’à la communauté internationale. Les événements à Gaza ont ces derniers temps ouvert la porte à des condamnations atroces, par charrettes entières.

Mais il sait également qu’il ne faut pas aller trop loin lorsque l’opinion internationale a le regard sur les affaires internes. C’est la raison pour laquelle la condamnation est lourde mais la « possibilité » de remise de peine justifiée par les rares limites que le régime des mollahs se fixe.

Il faut dire aussi que le rappeur est une énorme célébrité et que le régime a la crainte de réveiller une seconde fois les grandes manifestations populaires de l’année précédente qui avaient failli le faire vaciller.

Il est une icône de la jeunesse mais à cette popularité artistique se rajoute son militantisme décomplexé, dans les paroles de ses chansons comme dans ses actes de provocation.

L’humanité « normale » en a assez de la terreur des religions lorsqu’elles prennent le contrôle du pouvoir d’État. La barbarie est toujours au rendez-vous sous le couvert d’un code pénal sacré tombé du ciel et dont la sentence pour sa critique est la mort, l’incarcération ou la torture.

J’en ai assez de mes interlocuteurs qui me rétorquent systématiquement que ce n’est pas la religion qui est répressive mais les personnes qui en prennent excuse pour leur propre ambition de pouvoir.

Il faut lire le texte, pas une page sans d’épouvantables menaces et sanctions. Quant aux femmes, on y lit même que le fouet ou la mort est la sanction au moindre mouvement de sourcil. Dire que c’est une mauvaise interprétation me rend perplexe, ils ont parfaitement lu et compris un texte qui est aussi clair dans ses intentions qu’un sabre brandi sur la tête des humains.

Lorsque les étudiants ne comprennent rien et disent des inepties dans leurs copies, on est tenté de penser que, soit les élèves n’ont pas la capacité pour comprendre, soit le professeur a une insuffisance professionnelle.

Là, il s’agit des deux réunis, le texte professoral (le plus haut en grade) et les croyants. L’un a rédigé le polycopié, les autres le lisent. Alors, l’excuse du détournement du texte, ça suffit !

Jamais la religion, lorsqu’elle a le pouvoir sur une société, n’a fait autre chose que faire subir la terreur et le sang. Elle qui prône la tolérance, l’amour et la conciliation, a été responsable de dizaines de millions de morts à travers l’histoire. Et la violence est encore plus grande lorsqu’il s’agit d’une bataille entre deux religions. Il n’y a pas de place pour deux conquérants qui veulent prendre le pouvoir sur les Etats et sur les âmes des crédules. La terrible guerre des religions en Europe avait décimé des millions de personnes.

Aucun humaniste et démocrate n’ont remis en cause la liberté de conscience et de culte. Les gens ont le droit de croire à ce qu’ils veulent si la religion arrête de terroriser sous l’excuse d’un parjure dénoncé par une armée de surveillance des âmes.

Non seulement l’humaniste et le démocrate n’ont aucune intention de la combattre si elle est dans la légalité républicaine mais ils savent que l’humanité ne peut pas vivre uniquement par la seule raison. L’irrationnel est parfois nécessaire pour la rassurer et lui permettre d’enrichir sa vision des choses (pas pour tous, l’école m’a déjà tout donné).

La terreur de la religion d’État est consubstantielle à l’histoire de l’humanité, on ne pourra jamais l’éradiquer, elle revient toujours alors qu’on pensait l’avoir mise au pas pour qu’elle reste une affaire de conscience.

Mais nous pouvons la combattre pour qu’elle finisse aussi par partir comme un virus qui est vaincu même si on sait qu’il reviendra après une longue période de sommeil. C’est tout ce que l’humanité peut faire contre cette épidémie mortelle mais il faut qu’elle le fasse.

En attendant, les mollahs, comme Tebboune, tomberont inéluctablement un jour comme tous les despotismes finissent par mourir.

Ce jour-là, les mollahs se mordront les doigts de ne pas avoir eu la précaution de bannir la peine de mort. On n’est jamais suffisamment prévoyant lorsqu’on est dans l’euphorie du pouvoir sans partage.

Je n’ai aucune attirance envers le Rapp mais ce chanteur militant est pour moi la voix la plus belle du monde en ce moment.

Boumediene Sid Lakhdar

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