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L’Algérie et la problématique des subventions

Eclairage

L’Algérie et la problématique des subventions

L’essence, un des nombreux produits subventionnés par l’Etat mais qui profite aux riches aussi. 

Selon le gouverneur de la Banque d’Algérie dans sa note de conjoncture en date du 12 février 2018, sur les indicateurs économiques et financiers, le taux de croissance a été seulement 2,2% en 2017 (contre 3,3% en 2016) couvrant à peine le taux de croissance démographique. Ce qui explique l’accroissement du taux de chômage officiel que gonflent d’ailleurs les emplois de la rente. Sur un total des exportations de 32,9 milliards USD en 2017 contre 29,3 milliards USD en 2016, les exportations hors hydrocarbures se sont établies seulement à 1,3 milliard USD (70% de dérivées d’hydrocarbures) contre 1,4 milliard en 2016. Les exportations des hydrocarbures ont reculé en volume après une hausse de 10,8% en 2016 alors que leur valeur a progressé à 31,6 milliards USD à la fin 2017 contre 27,9 milliards USD en 2016. Quant aux importations non compris les transferts légaux de capitaux et les sorties de devises des services (entre 10/11 milliards de dollars entre 2010/2017 selon le FMI). Malgré toutes les restrictions elles se sont établies à 48,7 milliards USD en 2017 contre 49,7 milliards en 2016, soit une baisse d’un milliard de dollars seulement. Comme conséquence, le déficit global de la balance des paiements a clôturé à 23,3 milliards de dollars en 2017 contre 26,3 milliards USD en 2016 et les réserves de change qui étaient d’environ 195 milliards de dollars fin 2014, de 114,4 milliards USD fin 2016, à 97,3 milliards à la fin 2017. Quant à la cotation officielle du dinar elle s’établit, le 12 février, à 139,18 dinars un euro, 114,05 un dollar fluctuant entre 206 et 208 dinars un euro sur le marché parallèle et avec un taux d’inflation officiel approchante les 6%. Enfin selon le gouverneur à fin septembre 2017, les recettes budgétaires effectives ont été de 4740 milliards de dinars contre 3606 mds de dinars en septembre 2016et les dépenses budgétaires sont restées quasi-stables à 5535 milliards de dinars.

Quant à la problématique des subventions, elle renvoie à l’épineux problème de la valeur, fondement de la science économique, donc de la politique des prix d’une manière générale. Or les propositions récentes du ministre des Finances, du Commerce ou de certains experts, sont baisées, manquent de rigueur scientifique, ne devant jamais se référer, pour ce problème complexe, à des économies développées structurées où la structure des prix et des salaires (le Smig algérien, un cinquième du Smig français) diffèrent fondamentalement de celle de l’Algérie. L’impact positif des subventions ciblées dépend, au préalable, par la mise en œuvre d’une politique cohérente liant efficacité économique et justice sociale, de profondes réformes structurelles et un large consensus social et politique ,si l’on veut éviter des incidences négatives sur le plan politique, sociale pour notre pays surtout avec les tensions géostratégiques qui se dessinent dans notre région. Les personnes qui parlent de subventions ne sont peut-être pas conscients de la complexité de l’opération renvoyant à toute la politique des prix qui depuis des siècles ne fait pas l’unanimité des économistes y compris les prix Nobel divisant les libéraux, les néo-keynésiens et les néo-marxistes. Toutes ces théories et politiques divergentes ont été élaborées sur la base d’une économie de marché productive concurrentielle structurée : marché du travail, marché des biens/services et marché financier. Cela a des incidences stratégiques y compris politique, sur toute la politique socio-économique d’un pays.

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Le dossier des subventions traine depuis au moins 2008 où bon nombre d’étude sont été réalisées à ce sujet entre 2008/2016. Pour des subventions ciblées, on peut lister les subventions accordés par l’Etat, sans être exhaustif : les subventions du prix du pain, de la semoule et du lait ; les subventions des carburants, de l’électricité et de l’eau ; les subventions à la santé (hôpitaux et médicaments), au transport et au logement social ; les subventions pour le soutien à l’emploi ; les subventions aux écoles primaires, CEM, lycées, universités ; les assainissements des entreprises publiques et les avantages financiers et fiscaux aux entreprises et les surcoûts de gestion des projets et les surfacturations illicites qui sont des subventions indirectes.

Dans la loi de finances 2018, le niveau des transferts sociaux est en hausse de 8% par rapport à l’année budgétaire 2017. A contrario, récemment en ce mois de février 2018, le Ministre des finances annonce une suppression progressive des subventions et le Ministre du commerce a affirmé la distribution des chèques aux plus nécessiteux qui est une impossibilité technique sans une véritable stratégie et sans système d’information fiable. Cela implique forcément une libéralisation de tous les prix qui s’alignent sur ceux du marché libre y compris les salaires pondérés par le taux d’inflation. Or dans les pays développés existe un lien dialectique entre le niveau des revenus et des prix, étant dans une économie de marché concurrentielle structurée. La libéralisation des prix suppose au moins le doublement des salaires et pour éviter une hyperinflation, les salaires doivent correspondre à un niveau de production et de productivité proportionnel. Cette opération est-elle possible sans véritable stratégie, dans une économie dualiste dominée par la sphère informelle, la faiblesse des sections hors hydrocarbures et sans un système d’information fiable au temps réel ? Si ces mesures sont appliquées, cela aura forcément des incidences hautement politiques et sécuritaires et pas seulement économiques. Donc, attention, cela pose un problème de sécurité nationale n’étant pas une opération technique. C’est une opération complexe qui a des incidences économiques sociales et politiques, non maîtrisée et faute d’intermédiations politiques et sociales, sera source de vives tensions sociales incontrôlables, laissant les forces de sécurité confrontées aux citoyens.

Auteur
Dr Abderrahmane Mebtoul

 




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