25 avril 2024
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Liz Truss, une Première ministre élue par un parti ?

Liz Truss

Quelle que soit mon opinion hostile à cette nouvelle Margaret Thatcher, il faut dire que son investiture est un parfait exemple qui m’inspire une explication du parlementarisme auprès de certains lecteurs qui le méconnaissent.

Liz Truss, ultra-conservatrice, vient d’être élue par son parti pour le poste de Première ministre du Royaume-Uni. Une Première ministre élue ? Oui, par les membres du parti majoritaire. Cela nous semble étrange mais c’est tout à fait conforme au régime parlementaire. Celui qu’ont inventé les Britanniques et qui est la matrice originelle de la majorité des démocraties dans le monde. Les Etats-Unis et la France s’en sont éloignés par l’élection présidentielle. Les premiers, dès l’origine, les seconds, beaucoup plus tard.

Le parlementarisme est, comme son nom l’indique, un système qui met le parlement au-dessus de tous les pouvoirs. Et cela est tout à fait conforme à la démocratie car ce pouvoir est délégué par le pouvoir suprême, celui des citoyens qui élisent ses membres.

Les Etats-Unis et la France gardent ce principe fondamental mais mettent en concurrence avec le Parlement un autre pouvoir issu du suffrage populaire avec le Président. Le suffrage est indirect aux Etats-Unis, direct en France.

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Dans un régime parlementaire, c’est le chef du parti majoritaire qui a la charge du gouvernement. Au Royaume-Uni, il est beaucoup plus stable car c’est le régime du bipartisme. Lorsqu’un des deux accèdent au pouvoir, il est pratiquement impossible qu’une coalition avec un parti marginal puisse défaire une majorité établie. Et de toute façon, l’élection a désigné un vainqueur, la coalition n’y fait rien sauf à provoquer une nouvelle élection.

Que ce parti accède à la victoire aux élections ou que son chef soit déchu et un autre choisi (élu) à sa place par le parti en cours de législature, il possède la légitimité du suffrage populaire majoritaire.

Ainsi, dans un régime parlementaire, il est normal que celui ou celle qui aura le pouvoir le tienne du suffrage populaire. Ce suffrage majoritaire a été donné à un parti et non à une personne car ce sont ses idées qui ont triomphé.

Certes, les électeurs vont être influencés par un leader, son charisme et sa campagne électorale. Mais c’est le parti qui remporte la victoire, dans son entier. Que celui-ci garde ou change de leader, c’est son affaire.

Donc pas la peine de convoquer des élections, le parti de Liz Truss possède déjà la légitimité et ses militants ont voté à l’interne. Cela nous choque, avec notre vision, que quelques milliers de militants votent pour une Première ministre. Mais, répétons-le, les élections générales légitiment un parti majoritaire, pas son leader.

C’est tout à fait compréhensible. Le Parlement est composé de plusieurs représentants élus dans leur circonscription. Les électeurs ne votent pas pour un leader qui a, du point de vue représentatif, le même mandat que n’importe quel autre représentant.

Un principe que la constitution française avait intégré dans sa longue histoire institutionnelle. La France, depuis 1875 avait un régime parlementaire pur, identique à celui de la Grande Bretagne (avec quelques différences minimes). Cela a donc duré, de la troisième à la quatrième république.

Ce la cinquième république, sur fond de parlementarisme, qui a créé un régime de « monarchie constitutionnelle » voulu par le général de Gaulle à la suite de la réforme de 1962 (en 1958, à sa naissance, la 5ème république était purement parlementaire).

Quant au chef de l’Etat dans un régime parlementaire, il n’a pas de pouvoir mais représente la continuité de la nation. La Reine entérine le choix du parti et ne peut le contester. Son pouvoir est celui du témoin de la validité du fait majoritaire. Elle acte symboliquement le résultat et sa conformité avec les règles de la démocratie.

Il est à noter que la constance de ces institutions tient à l’histoire mais également à une souplesse, paradoxalement produite par l’inexistence d’une constitution écrite. Le Royaume Uni a une constitution coutumière.

On refait des élections générales seulement en cas de circonstances de blocage ou si le parti au pouvoir le décide.

Mais bonne chance à ce pays qui en avait assez à supporter, avec le Brexit et le désastre économique actuel, pour en rajouter avec le retour du spectre de Margaret Thatcher.

Boumédiene Sid Lakhdar, enseignant

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