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Algérie : pluies et chutes de grêle sur plusieurs wilayas du centre et de l’est samedi soir

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Pluie en Algérie
Crédit photo : DR.

Des pluies parfois sous forme d’averses orageuses, accompagnées localement de chutes de grêle, avec rafales de vent sous orages, affecteront plusieurs wilayas du centre et de l’est du pays à partir de samedi, indique un Bulletin météorologique spécial (BMS), diffusé vendredi par l’Office national de météorologie.

De niveau de vigilance « Orange », le BMS concerne les wilayas de Tipaza, Alger, Blida, Boumerdes et le nord de Bouira, avec des quantités de pluie estimées entre 20 et 40 mm et ce, de samedi à 18h00 à dimanche 12h00, précise la même source.

Les pluies toucheront également les wilayas de Tizi Ouzou, le nord de Sétif, Bejaia, Jijel, Skikda, Annaba et El Tarf de samedi à 21h00 à dimanche à 21h00, avec des quantités estimées entre 30 et 50 mm, pouvant atteindre ou dépasser localement 70 mm.

APS

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APN : le débat du PLF 2026 débutera dimanche

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APN

Le Bureau de l’Assemblée populaire nationale (APN) a arrêté le programme des séances consacrées au débat du projet de loi de finances (PLF) 2026, lors d’une réunion présidée par le président de l’Assemblée, Brahim Boughali,  indique un communiqué de l’institution législative.

Le débat du PLF 2026 débutera dimanche, lors d’une séance plénière, au cours de laquelle le texte sera présenté par le représentant du gouvernement, suivie de la présentation du rapport préliminaire de la commission compétente, puis des interventions des députés, précise la même source.

Le débat général se poursuivra lundi et mardi, sachant que la séance de l’après-midi du deuxième jour sera consacrée aux interventions des présidents des groupes parlementaires, ainsi qu’à la réponse du représentant du gouvernement, selon la même source.

Il a également été décidé de soumettre le PLF 2026 au vote le mardi 18 novembre, tandis qu’une séance consacrée aux questions orales est prévue pour jeudi 20 novembre.

Lors de la même réunion, le Bureau de l’APN a examiné les questions orales et écrites qui lui ont été soumises, et a décidé de transmettre au gouvernement celles qui remplissent les conditions légales, conclut le communiqué.

APS

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Jean Amrouche et Albert Camus au « pays de France »

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Le 28e SILA a été fortement marqué par un hégémonisme rétrograde d’ »épiceries halal » destinées au seul public assoiffé pourtant d’acculturation livresque. Au passage de chacun des stands d’éditeurs et de libraires locaux, la mémoire littéraire de plus de 5000 ans est réduite à un liminaire 1954-62.

La mémoire de nos lettres crie au blasphème à chaque fois que les restes des tenants de l’Article 120 de la déchéance culturelle se prononcent au nom de la critique littéraire ou des neurosciences.

Faut-il brûler Albert Camus ou carboniser Jean Amrouche, afin de standardiser l’abjection ? Il est plus salvateur de s’éloigner de cette pseudo-sous-culture et de se ressourcer auprès de diligentes plumes. Il y a 79 ans, l’une de ses dernières osait de s’interroger pour savoir qu’est-ce qu’il y a de commun entre l’homme absurde de Camus et l’homme héroïque de Jules Roy, de l’ouvrier d’Emmanuel Roblès, du Bunoz jouisseur et âpre de Claude de Fréminville et la poésie hautaine de L’Etoile secrète de Jean Amrouche ?

 Forment-ils réellement une «Ecole nord-africaine» ? 

Passé sous silence par une certaine critique littéraire, le nom d’Henri Hell (1916-1991) est totalement méconnu en Algérie. Originaire du Venezuela, de son véritable nom José Enrique Lasry a observé de près l’évolution de cette littérature nord-africaine multiethnique. Elle fut une institution informelle qui prônait «l’amour de la même terre, du même ciel, une même passion de la violence et du détachement», autant de projets d’écritures qui gravitaient autour de la personne de Claude de Fréminville.

Pour Henri Hell, cet exilé hispanique des faubourgs parisiens et le court séjour oranais, apprit que le pessimisme et l’amour de la vie chez Jules Roy font partie du « caractère africain » et «forment toute la pensée méditerranéenne ». L’enfant de Caracas ne le saisit pas de la sorte. Dans le Littéraire, du 14/12/1946, il abordait la question de la littérature en Algérie. Pour le critique d’art qu’il fut, musicologue et critique littéraire, L’Etranger de Camus est « un pure récit français, tel que notre époque se devrait de le renouveler », que les livres de Roblès « ambitionnent la puissance d’un Hemingway », ceux de Jules Roy s’inscrivent dans « la lignée de Saint-Exupéry » et que la poésie de Jean Amrouche « semble issue directement de l’Ecole de Tasse ».

Il n’y a rien, dans ces œuvres, de spécifiquement nord-africain, notera-t-il à cette époque. Remontant aux sources inspiratrices de cette École, il considérera qu’un Fromentin ne trouva sur la terre africaine qu’une source d’inspiration, qu’André Gide n’eut que les assises d’une éthique personnelle, qu’Henry de Montherlant ne développa qu’un style de vie et que pour Jean Grenier, la terre d’Afrique n’est autre qu’un support d’une métaphysique. Il conclura que ces écrits , s’inspirent tous dans le même climat. La seule école littéraire réelle digne de ce nom « devrait être constituée par des indigènes du pays », signale Henri Hell. Des écrivains de culture française a formé et qui fournissent de leur côté, l’apport de leur propre culture algérienne, tunisienne et marocaine. Ils seront des plumes qui s’exprimeraient dans la langue française « leur âme, leurs problèmes et leur conception de l’homme nord-africain ».

Le souhait du critique Hell, s’exhaussera dès la parution du Fils du pauvre et de La Colline oubliée, deux textes que nous désignerons aujourd’hui, comme deux versants d’une même montagne Kabyle. Mais durant les années 40 du siècle passé, il était plus question de cet ex-élève officier du 8e tirailleurs tunisiens (1929), devenu professeur de lettres au collège de Sousse (Tunisie).l’enfant de cette Kabylie errante de part le monde, donnera en février 1931, une conférence sur L’espace de France au sein du local de l’Association des anciens élèves de l’Ecole franco-arabe de la même ville. Deux ans après, il évoquera toujours à Sousse, les rapports entre Poésie et mystique au même moment, il publiait son poème «Prière» dans la revue tunisienne Marges.

L’homme n’était pas top accepter par une certaine France, collaborationniste et pétainiste. C’est ainsi que le plumitif de l’hebdomadaire France-Jeu paraissant à Lyon, écrivait dans son numéro du 5/12/1942 que Jean Amrouche, qu’étant Berbère et de vieille souche « arrive à se racheter d’une incompréhensible agrégation de Lettres par une intelligente critique des plus pénétrantes et la chaude sympathie qui inspire tout ce qu’il écrit (ceux-là seuls qui connaissent les Arabes ne s’étonnant pas de me voir effaré de ce que Jean Amrouche au carrefour de deux civilisations lumineuses et pourrissantes, réalise cet harmonieux équilibre qu’il se refuse à toute compromission».

Après les massacres de mai 1945 et en pleine phobie macartiste mondialisée, les furtifs débats sur un éphémère statut particulier de l’Algérie en l’admettant au sein d’une nouvelle union coloniale. Jean El Mouhouv Amrouche est avec Albert Camus à Paris au début 1947, sur invitation du proconsul Chataigneau afin d’inaugurer, et grandes pompes, une exposition sur «la vitalité littéraire de l’Algérie». L’objectif est d’édifier une voie conciliante de l’après génocide de mai 1945. Mais toujours cette France, issue de l’Action française et de ses appendices (PPF-PSF), qui ne se lasse pas de la cabale anti-Amrouche jusqu’à la veille des premiers contacts entre le FLN-GPRA et le gouvernements du MRP.

Pour se rendre compte de ce climat cryptofasciste de la république parisienne, nous citerons deux gratte-papiers et écrivailleurs de l’Empire coloniale: Pierre Boutang (1916-1988) qui notait dans La terreur en question. Lettre à Gabriel Marcel (Paris, 1958) qu’un Jean Amrouche est « un haineux berbère et ingrat», tout en qualifiant les tragiques événements de Sakiet-Sidi-Youssef d’une simple «embuscade de fellaga» au même moment où on a arrimé le bateau Slovenija, portant une cargaison d’armes lourdes « aux communistes pour la relance de la rébellion en Algérie ».

Le second écrivassier est encore plus virulent, Pierre Debray (1922-1999) et en bon maurrasien du nationalisme-royaliste, notait dans La troisième guerre mondiale est commencée (1958) que, J. Amrouche n’est qu’un « rallié de dernière heure, homme de lettres déçu dans ces ambitions » et que, « si méprisable qu’il soit, un Jean Amrouche a sur Martinet l’incommensurable supériorité de la logique ».

C’est ainsi que la France du populisme cagoulard voyait celui qui avait dit qu’on « voudrait enfermer l’homme dans ce dilemme: liberté ou justice. Nous ne renonçons ni à l’un ni à l’autre. Notre destin d’hommes est de souffrir la contradiction pour la dépasser. Pas de liberté sans justice, pas de justice sans liberté ». Jean Amrouche posait véritablement problème à cette France du pétainisme déchu, lorsque la revue de tourisme et des stations thermales et climatiques, Le Pays de France, paraissant à Paris, demanda pour son numéro 4 janvier 1947 à Amrouche et Albert Camus de présenter un récit de voyage sur leurs pays respectifs en vue d’inciter le public à la découverte des terres coloniales, le premier a préféré sa Tunisie qu’il connaît si bien, alors que pour le second il sera question de cette Algérie sans passé.

Jean Amrouche le paysagiste tunisien…

En 1947, le Kabyle de Sousse est une réelle force de  la nature qu’il est impossible de dissocier de l’histoire littéraire de la Tunisie. Son étude, intitulée Paysages tunisiens, et devançant celle de Camus, le plus «Africain» de toute l’équipe de la revue L’Arche évoque dans un ton de confidence « toute la gamme des blancs, car ce pays entre tous effacé n’admet pas le bariolage des tons heurtés ». Ici, il est question de cette Tunisie « petite sœur de l’Algérie, cousine pauvre du Maroc, elle est plus précieuse, comme un bijou ancien brille d’un éclat plus rare qu’un bijou neuf », celle d’un pays classique, de la discrète médiocrité et de la grâce, note-t-il.

Aux côtés de deux pays, tellement riches « d’énigmes et de contrastes », la Tunisie de Jean El Mouhouv Amrouche a une subtile essence qui émane d’elle, l’enveloppant « d’une tranquille magie » à travers ses lieux déshérités.

Dès l’ouverture de ce récit sensé inciter aux voyages, Jean Amrouche insiste sur cet Orient qui se dégage du pays telle « cette immense oasis de silence où les couleurs s’éteignent, où les gestes ne sont que de furtifs glissements, où les paroles n’ont d’autre sens que celui qu’elles reçoivent d’un imperceptible mouvement de lèvres ».

Personne ne peut se vanter de connaître ce pays, notamment dans « sa réalité spirituelle ». Nous ne pouvons saisir que sa mince écorce, qui ne laisse rien transparaître de cette profonde âme tunisienne, note-t-il fortement. Il y a bien deux Tunisie qui se dégagent de cette poésie de Jean El Mouhouv Amrouche, celle d’abord où l’on songe à une terre nonchalante, « non point tant ensommeillée que nerveuse, où les soucis du présent s’estompent dans l’ombre solennelle des grands souvenirs de l’histoire, où la fièvre mécanicienne des temps modernes se tempère au contact de la résignation orientale ». Il y a cette autre Tunisie, qui souffre, qui a été bouleversée par la guerre et elle a payé « cher la gloire des armes ». Le pays des villes martyres : Bizerte, Tunis et Sousse. La Tunisie qui attend d’être reconstruite dans un effort « de création où la volonté et l’imagination, où l’esprit novateur devraient triompher de la routine »

Si la Tunisie fait figure de parente pauvre par rapport au Maroc et à l’Algérie, c’est surtout un pays qui vit moins par lui-même, puisque c’est un pays qui a tout « emprunté, et qui continue; une transition entre le Maghreb proprement dit où de puissances masses de Berbères ont conservé leur antique civilisation et le véritable Orient, foyer de rayonnement de l’Islam moderne ». La Tunisie de Jean Amrouche est une poésie de la terre, bien différente de cette oblitération camusienne d’une terre qui est, certes en lui, mais n’existe nulle part. 

Albert Camus et ses villes sans passé

À l’affût de toute représentation de cette « école littéraire nord-africaine », Le Littéraire du 10/8/1946 publia une interview d’Albert Camus que l’auteur de Caligula donna au journaliste Gaëtan Picon et le long de laquelle nous apprenons que c’est bien un homme lucide, patient, réfléchi et d’une « énergie retenue » qu’il enclenche sur la question de son roman L’Etranger en disant qu’il « n’est qu’une nouvelle. Les critiques en ont parlé comme si j’avais, dans ces quelques pages, livré mon œuvre entière. Les critiques parlent souvent trop tôt ». 

La rencontre s’est faite au moment où Albert Camus entamait La Peste. Un roman que « j’écris avec beaucoup de difficultés et de lenteur» dira-t-il. Une question d’apprentissage de techniques d’écriture, relève encore Camus. L’épidémie qui aurait touché la ville d’Oran est beaucoup plus une intention d’écrire une histoire liée « à cette terre dont je proviens », une « vraie patrie » où à n’importe quel lieu du monde où qu’il soit, il reconnait « ses fils et mes frères à ce rire d’amitié ».

Du pays en question, que faut-il visiter lorsque l’on est un « voyageur sensible » ? La recette est dans son article de la revue Le Pays de France, avec Alger que Camus voit comme une ville arabe, qu’Oran est un village nègre et quartier espagnol, alors que Constantine n’est qu’un simple quartier juif. Même si Alger a un « long collier de boulevards sur la mer qui lui fait dans la nuit la plus somptueuse des parures », Oran à quand même cette place d’Armes avec « ces deux lions de bronze qui sont bien laids », et que Constantine, n’a que ce pont suspendu « où l’on se fait photographier » et que « les jours de grand vent, on y a le sentiment du danger ». 

Entre la douceur italienne d’Alger, le cruel éclat bien espagnol d’Oran et cette Constantine qui fait penser à Tolède, Albert Camus est dans l’ironie – il le signal, lui-même – d’une tourisme de l’absurde. Si l’Espagne et l’Italie « regorgent de souvenirs, d’œuvres d’art et de vestiges exemplaires », les cités de sa terre natale « sont des villes sans passé. Ce sont donc des villes sans abandon, et sans attendrissement ». Elles n’offrent rien à la réflexion, ne sont pas faites même pour la sagesse, ni pour les nuances du goût, écrivait-il au début de son article. N’allez pas en Algérie, il n’y a rien à voir !!! C’est son attachement avec cette Algérie qu’il conçoit dans son ego, qui « l’empêche d’être tout à fait clairvoyant à son égard », il y a ces Arabes, naturellement et « puis les autres ». Les Français d’Algérie sont « une race bâtarde faite de mélanges imprévus », écrit Camus. 

Entre la poésie du très « hautain » Jean Amrouche – le jalouse-t-on –  et le déflagrateur des races urbaines, il y a toute une histoire littéraire  à épousseter.

Mohamed-Karim Assouane, universitaire.

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«Albert Camus. Enseignant empêché, pédagogue résistant » de Jean-Michel Wavelet 

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Jean-Michel Wavelet
Jean-Michel Wavelet

Au-delà de l’écrivain, le pédagogue. Le travail de Jean-Michel Wavelet dans son essai « Albert Camus : Enseignant empêché, pédagogue résistant » lève le voile sur une dimension longtemps ignorée de l’œuvre et de la vie du Prix Nobel : sa pensée éducative.

En dévoilant la « blessure secrète » de Camus, son exclusion de l’enseignement pour cause de maladie, l’ouvrage démontre de manière percutante comment cet empêchement a paradoxalement catalysé une réflexion humaniste et critique sur l’école, faisant de l’auteur de L’Étranger un « pédagogue résistant » dont le message sur les valeurs et la justice résonne puissamment dans la crise éducative contemporaine.

Le livre de Jean-Michel Wavelet, « Albert Camus : Enseignant empêché, pédagogue résistant », publié aux éditions L’Harmattan, s’impose comme une contribution essentielle et opportune aux études camusiennes en s’attaquant à un angle mort de la critique : le rapport intime et complexe de l’auteur de La Peste à l’éducation et à la pédagogie. Il est remarquable que les exégètes aient si longtemps négligé cette dimension, alors même que Camus a exercé, bien qu’intermittente, une activité professorale non négligeable. 

L’auteur, déjà reconnu pour avoir éclairé d’autres aspects de l’œuvre, notamment ses recherches sur Gaston Bachelard et sa lecture précise de la thématique de la pauvreté chez Camus, vise à dissoudre « l’énigme du silence » qui entoure cette période de sa vie. Ce silence est d’autant plus frappant que l’engagement de Camus dans l’enseignement, incluant des cours de philosophie et des sessions collectives, s’est étendu sur près de huit années. 

C’est d’ailleurs ce silence que Camus cultive lui-même avec force, répondant d’un « Jamais » catégorique à une journaliste qui l’interroge sur une activité professorale en 1945. Jean-Michel Wavelet initie son travail en pointant l’incohérence entre la durée de cette implication et son absence quasi-totale dans les analyses approfondies. En s’attaquant à cette lacune, l’essai ne cherche pas seulement à rétablir une vérité biographique, mais à prouver que cette expérience d’enseignant, et, crucialement, l’empêchement qui en a découlé, est constitutive de la pensée camusienne, de ses valeurs humanistes et de son engagement en faveur de la justice sociale. 

L’auteur révèle de surcroît l’énigme d’une exclusion non uniquement médicale pour l’agrégation en 1938, maintenue malgré les avis médicaux de guérison, questionnant ainsi l’influence du climat politique hostile de l’Algérie française. L’introduction prépare ainsi le terrain pour la révélation centrale de l’ouvrage : le rôle déterminant d’une « blessure secrète » dans la cristallisation de la vision pédagogique de l’écrivain.

L’apport fondamental de l’ouvrage de Jean-Michel Wavelet réside dans la révélation et l’élucidation du « mystère » qui entourait l’activité d’enseignement de Camus. Jean-Michel Wavelet ne se contente pas de signaler la lacune historiographique ; il en découvre l’origine traumatique : la « blessure secrète » d’Albert Camus. L’auteur met au jour le lien direct entre le silence de l’écrivain et son exclusion douloureuse du milieu enseignant, une double humiliation professionnelle, le refus d’un poste d’instituteur puis l’impossibilité de se présenter à l’agrégation, toutes deux causées par la tuberculose, une maladie que Camus lui-même stigmatisait comme la « maladie des pauvres ». C’est là que l’analyse atteint toute sa force paradoxale : cette mise à l’écart forcée, loin de l’éloigner du sujet, a servi de catalyseur à l’élaboration d’une pensée éducative d’une profondeur insoupçonnée. 

Son engagement en tant que « pédagogue résistant » est d’ailleurs illustré par son action concrète en Algérie de février 1941 à février 1942, où il a enseigné aux enfants et adolescents juifs exclus de l’enseignement public par les mesures antisémites du régime de Vichy. Jean-Michel Wavelet démontre que cette réflexion est omniprésente, non pas sous forme de traités théoriques, mais « à l’arrière-plan des textes, dans les interstices des récits », se manifestant comme une véritable éthique de l’éducation. Camus n’est pas présenté comme un théoricien systématique, mais comme un pédagogue réflexif s’inscrivant dans la lignée de la tradition libertaire, dont la figure de Ferrer est explicitement mentionnée. Sa pensée n’est pas axée sur des doctrines ou des méthodes, mais sur l’importance cruciale des valeurs, la justice, la vérité, la fraternité, comme fondement de toute transmission.

Cette perspective est indissociable du parcours personnel de Camus : l’enfant pauvre, issu d’une lignée d’analphabètes, dont l’ascension intellectuelle fut entièrement tributaire de l’école républicaine et de figures emblématiques comme son maître Louis Germain, à qui il rendit un hommage poignant lors de son discours de Stockholm. Jean-Michel Wavelet érige l’éducation chez Camus en une véritable quête de justice et de dignité, montrant comment l’écrivain, privé de la transmission directe, a reporté son idéal pédagogique dans l’acte d’écrire, faisant de son œuvre le prolongement de son ambition d’éducateur.

L’impact de l’étude de Jean-Michel Wavelet est profondément novateur et se déploie sur deux niveaux essentiels. D’une part, pour les études camusiennes, l’ouvrage comble une lacune historiographique persistante en offrant une grille de lecture absolument inédite. En réintégrant la dimension pédagogique au cœur de l’humanisme camusien, Jean-Michel Wavelet éclaire sous un jour nouveau des textes fondamentaux, notamment l’ultime roman inachevé, Le Premier Homme, dont le thème central est précisément l’éducation et la transmission. La souffrance de l’« enseignant empêché » devient ainsi la source d’une éthique littéraire : le rôle de l’écrivain est de faire ce que l’instituteur n’a pu faire. D’autre part, l’essai injecte une matière riche et essentielle dans la réflexion pédagogique contemporaine. 

L’œuvre de Camus, relue à travers le prisme de l’éducation, se révèle porteuse d’une critique radicale et étonnamment actuelle du système éducatif. L’auteur d’Alger dénonçait un modèle jugé inadapté au monde à venir, coupable de préparer les enfants à vivre dans un monde obsolète, et non à affronter les réalités complexes de leur temps. Pour Camus, la mission de l’enseignement devait être un « style de vie » et non plus des connaissances générales, cherchant avant tout « d’accroître la somme de liberté et de responsabilité qui est dans chaque homme ». En articulant sa critique virulente, nourrie par son expérience de la pauvreté et de l’exclusion, avec une éthique forte de l’engagement et de la résistance, Camus force le lecteur et le pédagogue à reconsidérer le rôle de l’école. Son œuvre devient une source de questionnement sur la finalité de l’enseignement : l’école doit-elle former des citoyens dociles ou des hommes capables de justice, de révolte contre l’injustice et d’autonomie morale face aux urgences du monde moderne ? L’étude de Jean-Michel Wavelet rend ainsi à la pensée de Camus une actualité brûlante dans le débat sur l’avenir de l’école.

Le travail d’exégèse mené par Jean-Michel Wavelet dans son essai est à la fois une réhabilitation et une démonstration de force. Il établit de manière définitive que l’empêchement professionnel subi par Albert Camus, cet interdit d’enseigner lié à la maladie, loin d’être un point d’arrêt, a paradoxalement fécondé et nourri une pensée éducative et humaniste qui infuse l’intégralité de son œuvre. 

Le livre prouve que la frustration du maître empêché a été sublimée en une mission d’écrivain : transmettre les valeurs et l’expérience. Cette pensée, intrinsèquement liée à la condition de l’enfant pauvre, témoigne avec une force renouvelée, face à l’injustice sociale et à la misère, des exigences impérieuses de justice et de fraternité. Elle se dresse en rempart contre les fatalités et les systèmes qui aliènent l’individu. Jean-Michel Wavelet parvient ainsi à confirmer l’écrivain comme un véritable « pédagogue résistant » qui, n’ayant pu enseigner sur l’estrade, a choisi la voie de l’écriture pour délivrer son message. L’éducation morale et existentielle de l’homme n’a jamais cessé d’être sa préoccupation majeure, comme en atteste de manière poignante son ultime roman inachevé, Le Premier Homme, qui demeure, dans cette perspective, son testament pédagogique le plus précieux et le plus éloquent.

Brahim Saci

Albert Camus : Enseignant empêché, pédagogue résistant, Éditions l’Harmattan

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FFS : Aouchiche appelle à un «sursaut national» face aux blocages politiques

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Youcef Aouchiche

​ Le Front des forces socialistes (FFS) a lancé, par la voix de Youcef Aouchiche, un appel au « sursaut » national à l’ouverture de la session ordinaire de son Conseil national, tenue ce jour.

Dans son allocution, le Premier secrétaire national, Youcef Aouchiche, a dressé un constat sévère de la situation algérienne, qu’il juge comme étant « l’une des étapes les plus sensibles et les plus charnières de son histoire », entre fragilités internes et pressions géostratégiques extérieures.

​Critique de la « gestion unilatérale et sécuritaire »

​Au cœur du discours de Youcef Aouchiche se trouve une critique acerbe du pouvoir, accusé de persister dans une approche de « fermeture, d’immobilisme et de déni des réalités ». Selon le dirigeant du FFS, cette attitude maintient une « gestion unilatérale et sécuritaire des affaires du pays », étouffant les « aspirations légitimes au changement ». Il a averti que la poursuite de cette voie expose le pays à « tous les dangers et à l’instabilité », ouvrant la voie à des « ingérences ».

​Le Premier secrétaire national a souligné que la véritable stabilité ne se construit pas sur le « contrôle », mais sur la « confiance et le consentement éclairé des citoyens ».

​Refonder et non détruire

​Face à ce qu’il perçoit comme des « échecs », Youcef Aouchiche a positionné le FFS non pas comme une force de destruction, mais comme un acteur de « construction » et de « rassemblement ». L’ambition du parti est de « refonder, ensemble, notre État national et notre socle commun ».

​Ce changement, selon le FFS, passe par une refonte institutionnelle et une révision des modes de gouvernance et des politiques publiques. Le parti, se réclamant des idéaux de Novembre et de la Soummam, propose une alternative crédible visant à :

​préserver et renforcer l’État national, consacrer la démocratie politique et l’État de droit et ​asseoir le développement économique et la prospérité sociale.

​Appel à la mobilisation citoyenne électorale 

​Rompre avec la « fatalité » et la « résignation » est possible, a insisté Youcef Aouchiche. La voie vers le changement passe par la « conquête pacifique et démocratique du pouvoir ».

​Le dirigeant a exhorté les Algériens à une « mobilisation citoyenne consciente, lucide et organisée » lors des prochaines élections législatives et locales. L’objectif est de mettre fin à la « politique de la chaise vide » et d’élire des « assemblées populaires » qui ne soient plus de simples « chambres d’enregistrement ». Le FFS souhaite incarner le rôle de « locomotive de l’opposition patriotique, démocratique et progressiste » pour réconcilier la politique avec l’éthique et redonner un sens à la représentation.

​Le changement, a-t-il conclu, est une question de choix : « voulons-nous nous mettre à l’écart et subir, ou nous impliquer et construire ? »

La rédaction

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Exclusions au SILA 2025 : la dénonciation minimaliste et timorée du FFS

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Aouchiche

Il aura fallu près d’une semaine de polémiques pour que le Front des Forces Socialistes (FFS) rompe enfin le silence autour des exclusions contestées de plusieurs maisons d’édition au 28ᵉ Salon international du livre d’Alger (SILA). Une réaction tardive, et surtout formulée dans un langage si prudent qu’elle peine à saisir l’ampleur du malaise exprimé par les professionnels du livre.

En visite au Salon, le Premier secrétaire national du parti, Youcef Aouchiche, a évoqué des « cas d’exclusion sans justification claire ». Une dénonciation en apparence ferme, mais qui, à y regarder de près, évite soigneusement de qualifier les faits, d’identifier les éditeurs concernés ou d’employer le mot que beaucoup, dans le milieu, n’hésitent plus à utiliser : censure. En effet, le candidat malheureux à la mascarade présidentielle ne va tout même pas facher le maitre d’El Mouradia !

Alors que plusieurs éditeurs écartés parlent de décisions arbitraires et de pratiques opaques, le FFS se contente de rappeler que « seul un climat de liberté peut encourager la création ». Une formule convenue, presque intemporelle, qui permet d’acter un principe sans désigner de responsables. Une manière de dire sans vraiment dire, révélatrice du malaise des formations politiques à s’emparer clairement des enjeux culturels dès lors qu’ils touchent à la régulation de l’espace public.

Le contraste est frappant entre l’intensité des critiques exprimées par les professionnels — certains dénonçant un précédent dangereux pour le pluralisme éditorial — et la modération du discours partisan. Le FFS, pourtant prompt par le passé à défendre les libertés publiques, semble avoir préféré l’abstraction à la confrontation, en s’en tenant à des généralités sur la « nécessité de mobiliser tous les moyens pour promouvoir le livre ».

Cette prise de position, loin de clarifier la situation, en dit surtout long sur la faible mobilisation des acteurs politiques et culturels face à un épisode qui interroge la gouvernance du secteur du livre. Le SILA, devenu ces dernières années un thermomètre sensible de l’état des libertés, met une nouvelle fois en lumière l’écart entre les enjeux réels du milieu éditorial et la frilosité du discours officiel.

En choisissant la prudence au moment où le secteur réclame clarté et solidarité, le FFS signe un communiqué qui, au final, ressemble davantage à un commentaire distant qu’à une défense assumée de la liberté d’édition.

Extrait du communiqué du FFS 

« il s’est dégagé de  nos échanges un consensus sur le fait que seul un climat de liberté peut encourager la création et valoriser la production intellectuelle dans notre pays. À ce sujet, le camarade Youcef Aouchiche a dénoncé les cas d’exclusion dont ont été victimes certaines maisons d’édition sans justification claire, soulignant la nécessité de mobiliser tous les moyens pour promouvoir le livre et la pensée en général, en tant que piliers essentiels du savoir, vecteurs de préservation de la personnalité algérienne et de la renaissance nationale dans tous les domaines. »

Samia Naït Iqbal

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Démission surprise du  président du Syndicat national des magistrats 

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Laidi Aoudeche, ancien president du syndicat des magistrats algeriens

Le président du Syndicat National des Magistrats (SNM) en Algérie, Laïdi Aoudeche, a annoncé ce vendredi son intention de se retirer de la présidence du syndicat.

Cette déclaration intervient dans un contexte de réformes majeures touchant le secteur de la justice.

​L’annonce de ce retrait innatendu a été faite via la page officielle du syndicat sur Facebook, invitant tous les membres à y participer afin de « prendre les mesures légales nécessaires », conformément aux statuts du SNM.

​Pour formaliser sa décision et organiser la suite, M. Aoudeche a appelé à la tenue d’une Assemblée Générale Extraordinaire (AGE) fixée au 29 novembre prochain. L’objectif principal de cette réunion sera double : statuer sur sa volonté de retrait et de démission et procéder à l’élection du représentant du syndicat au Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM).

​M. Aoudeche n'a pas révélé les raisons qui l'ont poussé à prendre cette décision soudaine.

​Ce retrait intervient à un moment particulièrement sensible pour le secteur de la justice, qui connaît une série de réformes structurelles. Il y a quelques semaines seulement, le Conseil des ministres avait notamment approuvé le projet de loi organique relatif à la Magistrature.

​Cette démission soulève des questions quant à l’impact qu’elle pourrait avoir sur la stabilité interne du syndicat et sur sa capacité à interagir avec les autorités durant cette phase cruciale de réformes.

​L’Assemblée Générale du 29 novembre aura à statuer sur le départ ou le maintien de  Laïdi Aoudeche à son poste. Il a été élu par le Conseil National du SNM, le 27 avril 2023,  lors d’un scrutin tenu à l’École Supérieure de la Magistrature de Koléa (Tipaza). Il était auparavant l’intérimaire de son prédécesseur, Issaad Mabrouk, qui avait démissionné en septembre 2022. L’AGE du 29 novembre prochain sera donc une étape déterminante pour l’avenir du SNM, surtout dans un climat de vifs débats concernant la place du juge et le renforcement de l’indépendance de l’autorité judiciaire en Algérie. Les membres devront choisir une nouvelle direction pour représenter au mieux leurs intérêts face aux changements en cours.

La rédaction

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Criminalité : vers la réactivation de la peine de mort, selon Lotfi Boudjemaa 

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Lotfi Boudjema
Le ministre de la justice algérienne

Devant les députés de l’Assemblée populaire nationale (APN), le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaa, a confirmé jeudi un tournant majeur de la politique pénale algérienne : la réactivation annoncée de la peine capitale, gelée de facto depuis 1993.

Cette grave décision de réactivation de la peine de mort est présentée comme une réponse à la montée des crimes violents qui suscitent une vive émotion au sein de l’opinion publique.

Ce  durcissement est justifié par « une demande sociale forte », selon le ministre, évoquant les récents enlèvements et assassinats d’enfants à Constantine et Chlef. Il a affirmé que « l’État ne peut demeurer spectateur » face à la multiplication des crimes qualifiés de « particulièrement odieux ». 

Dans cette perspective, la peine de mort serait réintroduite pour les infractions les plus graves, notamment les meurtres avec circonstances aggravantes, les enlèvements d’enfants ou encore les crimes perpétrés dans des établissements de santé et des écoles.

Selon Boudjemaa, cette orientation s’inscrit dans les directives du président Abdelmadjid Tebboune, qui appelle à un renforcement des sanctions et à une application plus rigoureuse des dispositions pénales existantes.

Outre les crimes violents ciblant les citoyens dans des espaces sensibles, le ministre de la justice garde de Sceaux  a insisté sur la lutte contre le narcotrafic, présenté comme « un danger majeur pour la société ». Les sanctions prévues par la loi – allant jusqu’à trente ans de prison, la réclusion à perpétuité ou la peine capitale pour les grands trafiquants – devront être appliquées sans compromis.

Ce tour de vive judiciaire intervient alors que les autorités affirment vouloir faire face à l’infiltration des réseaux criminels dans certains milieux éducatifs et urbains, où les trafiquants ciblent particulièrement les jeunes.

En parallèle de cette ligne pénale plus sévère, le gouvernement veut renforcer la protection des lanceurs d’alerte dans les affaires de corruption. Le ministère de la Justice prévoit de garantir la confidentialité et la sécurité physique des dénonciateurs afin d’encourager la participation citoyenne dans la lutte contre les pratiques frauduleuses.

Ce volet, présenté comme un complément indispensable au durcissement pénal, vise à consolider la crédibilité des institutions judiciaires et à répondre aux critiques récurrentes concernant l’efficacité du contrôle anticorruption.

Un tournant qui relance le débat national

L’éventuelle réactivation de la peine de mort, permise par les lois adoptées en juillet dernier, ravive un débat longtemps suspendu dans la société algérienne. Si une partie de l’opinion réclame plus de fermeté, notamment face aux crimes contre les enfants, des voix s’élèvent pour rappeler les engagements internationaux de l’Algérie et les risques d’erreurs judiciaires dans un système critiqué pour ses insuffisances structurelles et sa soumission aux injonctions verticales de l’exécutif ou venant de parties influantes tapies dans les rouages du pouvoir et de l’État.

Pour l’heure, le gouvernement assume un discours résolument sécuritaire, considérant que la situation exige une réponse « proportionnée à la gravité des menaces ».

Samia Naït Iqbal

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Algérie : un cadre d’homologation strict pour encadrer l’usage des drones

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Drones en Algérie

Un arrêté interministériel, cosigné par les ministres de la Défense nationale, de la Poste et des télécommunications et des Transports, est paru au Journal Officiel N°72 du 30 octobre 2025. Ce texte instaure un cadre strict pour l’homologation des systèmes d’aéronefs sans pilote à bord, communément appelés drones, sur le territoire algérien.

Visant à réglementer la prolifération et l’utilisation de ces technologies de drones, l’arrêté définit précisément les conditions et modalités d’obtention de la certification indispensable pour leur usage.

L’exécutif entend ainsi renforcer son contrôle sur une technologie en pleine expansion, tout en préparant un cadre propice à l’émergence d’activités économiques liées à la production et à l’exploitation de drones civils.

L’Arrêté désigne le Centre national des systèmes d’aéronefs sans pilote comme autorité unique chargée de délivrer les certificats d’homologation pour tout drone « prêt à l’utilisation ». Trois types de certificats sont prévus : un homologation de type pour les systèmes produits en série, un certificat restreint pour les appareils construits à titre privé et un certificat spécial pour les usages soumis à conditions particulières.

Le texte introduit également une classification des usages – Classes I, II et III – couvrant autant les drones de loisir que les appareils destinés aux services de sécurité, aux interventions de secours ou aux opérations de lutte contre les feux de forêts.

Pour le gouvernement, ce cadre resserré répond à un double enjeu : garantir la sécurité aérienne et consolider la souveraineté technologique de l’État, tout en offrant aux acteurs économiques – importateurs, fabricants et opérateurs professionnels – une visibilité réglementaire longtemps réclamée par le secteur.

Les autorités misent sur cette nouvelle architecture légale pour encadrer un marché national encore embryonnaire mais appelé à croître rapidement, à mesure que les usages professionnels et institutionnels des drones se multiplient.

La rédaction

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Soudan : à El-Fasher, des massacres à l’abri des regards postés sur les réseaux sociaux

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Mohamed Hamdan Dagalo (Hemedti)
Mohamed Hamdan Dagalo (Hemedti) soutenu par les Emirats reprend du terrain avec les FSR

L’inquiétude ne cesse de grandir sur l’ampleur des exactions commises par les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) dans la ville d’El-Fasher, aujourd’hui complètement coupée du monde.

Alors que des images satellites témoignent des massacres qui s’y sont produits, les hommes du général Hemedti, postent eux-mêmes des vidéos sur les réseaux sociaux dans lesquelles on les voit se mettre en scène et commettre de nombreux crimes.

L’inquiétude grandit au Soudan sur ce qu’il est en train de se passer à El-Fasher. Un peu plus de dix jours après la prise de la ville par les Forces de soutien rapide (FSR), le groupe paramilitaire du général Hemedti, la ville est totalement coupée du monde : alors que les communications avec elle sont interrompues, des images satellites montrent des corps nombreux et des fosses communes.

« Nous sommes extrêmement préoccupés », réagit ainsi Altahir Hashir, un Soudanais de la diaspora membre d’un réseau d’entraide avec El-Fasher. « Nous n’avons aucune idée de ce qu’il s’y passe : il y a un black-out total, rien ne sort de la ville. Les Nations unies disent qu’elle abritait 250 000 habitants. Si 70 000 ont pu fuir, qu’est-il arrivé à tous les autres ?, poursuit celui-ci. Nous étions en contact avec des habitants, des membres de la société civile, des médecins, des volontaires, des gens qui travaillaient dans les cuisines communautaires et nous n’avons aucune nouvelle d’eux : ils ont totalement disparu. C’est notamment le cas des médecins qui travaillaient à l’hôpital saoudien : nous ne savons pas s’ils sont encore vivants ou non. Comme nous avons vu sur les réseaux sociaux des vidéos montrant l’intérieur de l’hôpital où des paramilitaires tuaient tout le monde, je crains malheureusement que certains d’entre eux n’aient été tués », s’inquiète encore Altahir Hashir.

Le paradoxe d’El-Fasher, c’est que, parallèlement à ce black-out sur l’information, des dizaines de vidéos dans lesquelles les paramilitaires se mettent en scène en train de commettre les pires exactions circulent sur les réseaux sociaux. Parmi elles, l’une revient régulièrement : celle d’un commandant FSR qui se trouve face à des civils à genoux, visiblement terrorisés. S’adressant à eux, il rit, se moque, puis les abat à bout portant. Postées sur son compte TikTok qui compte 20 000 abonnés, ces images ont évidemment provoqué l’indignation.

Le commandant en question a, lui, pu être identifié : surnommé « le boucher du siècle », il s’appelle Abu Lulu – al-Fateh Abdullah Idriss de son vrai nom. Brigadier général au sein des FSR, il est jeune, porte des dreadlocks, et affiche un sourire aux lèvres. Temporairement arrêté par son propre camp qui a admis des débordements lors de la prise d’El-Fasher et promis d’ouvrir une enquête, Abu Lulu a toutefois été relâché quelques jours après son interpellation pour réapparaître sur des vidéos prises cette fois sur un autre front, au Kordofan.

Ce dernier est aujourd’hui devenu, en quelque sorte, le visage des combattants FSR : des jeunes qui se filment en train de commettre les pires exactions sur des civils en souriant, comme s’il s’agissait d’un jeu, allant même jusqu’à se vanter du nombre de personnes qu’ils ont tuées. Dans une autre vidéo, des FSR se filment par exemple en train de marcher au milieu des cadavres dans l’hôpital saoudien d’El-Fasher avant de tuer un rescapé allongé par terre.   

Très importantes parce qu’elles documentent ce qu’il se passe en ce moment sur place, ces images le sont d’autant plus qu’elles sont les seules disponibles à ce jour et constitueront peut-être plus tard des preuves contre les auteurs de ces crimes.

Rfi

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