26 avril 2025
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Protestation d’Alger auprès de Paris : vers une rechute des relations bilatérales ?

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Amir Dz

Alors que les relations entre l’Algérie et la France commençaient timidement à sortir de leur torpeur, un nouvel incident diplomatique risque de remettre les compteurs à zéro : compromettre les récents efforts de réchauffement amorcé suite à la visite du chef de la diplomatie française, à Alger, le 6 avril dernier.

Le ministère algérien des Affaires étrangères a convoqué, samedi 12 avril, l’ambassadeur de France en Algérie, M. Stéphane Romatet, pour lui faire part d’une vive protestation officielle. En cause : la mise en examen et la détention provisoire, en France, d’un agent consulaire algérien en poste à Créteil, soupçonné dans l’affaire de l’enlèvement de l’activiste Amir Boukhors, dit « Amir DZ ».

Dans un communiqué virulent, le ministère dénonce une atteinte grave aux immunités diplomatiques et dénonce une procédure « en flagrante contravention » avec les usages diplomatiques entre les deux pays. L’Algérie rejette catégoriquement les accusations portées par le parquet antiterroriste français, qu’elle qualifie de « farfelues » et basées sur des éléments jugés « fragiles », notamment le bornage du téléphone de son agent à proximité du domicile de la personne concernée. Les mots sont durs, comminatoire et l’activiste est traité par le ministère des Affaires étrangères de « voyou ». Ce communiqué ne prend nullement les formes puisqu’il remet en cause l’indépendance de l’institution judiciaire en France.

Cette réaction intervient quelques jours seulement après les signes de reprise du dialogue entre Alger et Paris, marqués notamment par la récente visite à Alger du ministre français  chargé de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Cette visite avait laissé espérer une relance constructive, après plusieurs mois de tensions diplomatiques sur fond de contentieux mémoriels et de différends sécuritaires.

Mais cette affaire judiciaire inattendue pourrait relancer l’instabilité dans les rapports entre les deux pays. L’Algérie y voit une tentative de « torpillage » du processus de normalisation convenu entre les présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron. Elle évoque aussi, sans détour, l’existence de « certaines parties françaises » peu enclines à faire avancer le dialogue, et dénonce une forme de « cynisme » dans le choix de l’activiste concerné et accusé par Alger d’activisme subversif.

Reste à savoir si cet épisode judiciaire aura des répercussions concrètes sur l’agenda bilatéral. Si Alger affirme qu’il n’entend pas laisser la situation « sans conséquences », aucune mesure de rétorsion immédiate n’a été annoncée à ce stade. Cependant, ce regain de tensions pourrait bien refroidir une dynamique à peine amorcée, dans une relation souvent marquée par l’ambivalence, la méfiance, et les malentendus historiques.

Samia Naït Iqbal

France : nouveau projet de loi pour mieux indemniser les harkis et leurs descendants

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harkis

Il y a trois ans une loi historique était adoptée par le Parlement français reconnaissant la responsabilité de la France dans le sort des harkis. Une commission a été créée, chargée notamment d’indemniser les survivants et leurs descendants, mais les critères retenus n’ont jamais satisfait la communauté harki, qui a gagné un recours devant la Cour européenne des droits de l’homme, et a obtenu de plusieurs députés une nouvelle proposition de loi.

Parmi les associations de harkis et de leurs descendants, le consensus règne : la loi adoptée en France 2022 présente de trop de failles pour être acceptable.

« La loi crée évidemment une discrimination, car elle exclut du système d’indemnisation un certain nombre de personnes qui ont eu à subir des préjudices et qui n’ont pas transité dans des camps », explique Ahmed Akaba, fils de harki et avocat.

Ces associations sont soutenues par l’Insoumise Zahia Hamdane, qui se présente comme la première députée issue de la communauté harkie. Parmi ses propositions : un élargissement des critères d’éligibilité et l’inclusion de représentants harkis dans une nouvelle commission d’indemnisation.

« Il y a des manques effectivement qu’on tente de résorber avec cette proposition de loi qui n’est qu’une étape dans le parcours de réparation depuis 2022 », souligne la députée.

Des dizaines de milliers de personnes restent à indemniser, selon les associations

Depuis 2022, 16 000 personnes ont été indemnisées, mais plusieurs dizaines de milliers seraient laissées de côté, selon les associations. Mais surtout, le temps presse selon Aurélien Saintoul, autre député Insoumis.

« Il y a quand même cette problématique qui se pose pour énormément de personnes : c’est le vieillissement des personnes qui sont les premières concernées ou les plus directement concernées et on ne veut pas que cela s’épuise », précise Aurélien Saintoul.

La proposition de loi devrait être soumise à l’Assemblée début juin, d’ici là, l’objectif est d’élargir le nombre de signataires, même si le texte est déjà transpartisan, soutenu par la droite républicaine, le mouvement démocrate, ainsi que les socialistes et les écologistes.

Rfi

France : derrière la loi de «simplification», des régressions sur la protection de l’environnement

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Assemblée

En France, l’examen du projet de loi dit de « simplification » se poursuit ce vendredi 11 avril, après des heures de débat houleux à l’Assemblée nationale. Présenté par le gouvernement comme un moyen de « libérer les entreprises de la paperasse », le projet de loi est fustigé à gauche car perçu comme anti-écologique.

Plus de 1000 amendements ont été déposés, notamment par la droite et l’extrême droite, qui le voient comme une aubaine pour supprimer des mesures de protection environnementale.

D’après le gouvernement, il faudrait réduire la bureaucratie qui pèse sur leur compétitivité des entreprises françaises. C’est en ce sens qu’il a soumis au Parlement un projet de loi dit de « simplification », de nouveau discuté à l’Assemblée nationale ce vendredi.

Mais avant même son examen en séance, ce texte a été profondément remanié. Les députés de droite et d’extrême droite ont ainsi fait supprimer les Zones à Faibles Émissions (ZFE), qui visent à réduire la pollution de l’air en ville. Ils ont vidé de sa substance le Zéro Artificialisation Nette (ZAN), une politique pour freiner l’étalement urbain et préserver la nature. Deux acquis environnementaux à mettre au bilan des mandats d’Emmanuel Macron.

Des amendements veulent aussi supprimer plusieurs dizaines d’institutions intermédiaires qui garantissent le droit à l’environnement, à la santé et à la participation démocratique des Français. Il s’agit par exemple de la police de l’environnement, l’agence qui accompagne les entreprises dans leur décarbonation, ou encore le Haut Conseil du Climat, qui évalue l’action publique en matière de lutte contre le changement climatique. D’autres instances de consultation des citoyens lors de grands projets industriels sont également menacées.

Opposition à gauche

Pour les élus de gauche et les associations écologistes, ce texte est devenu un véritable cheval de Troie de la dérégulation environnementale. Au fil de débats agités, les élus du Nouveau Front populaire n’ont cessé de fustiger tantôt un « massacre à la tronçonneuse », tantôt une « vaste opération de liquidation ». « L’ambition première de ce texte est totalement dénaturée », et il est devenu « anti-démocratique, anti-écologique et anti-social », a asséné le député écologiste Charles Fournier. « Lors de son passage en commission, les climatosceptiques, d’Horizons au Rassemblement national, ont pris part à cette fête de la dérégulation en menant une véritable offensive trumpiste », a aussi accusé la députée LFI Sandrine Nosbé.

Le groupe Écologiste et Social a d’ailleurs défendu mercredi 9 avril une motion de rejet préalable du texte, soutenue par les députés La France insoumise (LFI), socialistes et communistes. Avec 111 votes favorables, mais 135 voix contre ; elle a  donc été repoussée.

Rfi

Ligue 1 Mobilis : le NCM se révolte, la JSK cale à domicile

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JSK USB

Le NC Magra, ex-lanterne rouge, a lancé sa mission de sauvetage en disposant de l’USM Khenchela (2-0), alors que la JS Kabylie a été accrochée par l’US Biskra (0-0), ce samedi, en matchs comptant pour la suite de la 22e journée du championnat national de Ligue 1 Mobilis.

Après dix matchs sans victoire, le NCM a réussi, enfin, à stopper l’hémorragie et renouer avec le succès. Un long passage à vide qui a pris fin avec la réception de l’USMK et grâce aux deux réalisations de cette partie, signées Djabout (40’ et 53’).

La réussite retrouvée, le Nedjm quitte la dernière place au classement et progresse d’un rang (15e – 21 pts). De son côté, l’USMK enchaine avec une deuxième défaite de suite et stage à la 12e position (24 pts).

La JSK piégée par l’USB

À Tizi-Ouzou, la logique des chiffres et des statistiques s’est heurtée à la réalité du terrain. Et pour cause, la JS Kabylie, 3e au classement et donnée largement favorite face à l’US Biskra, relégable, s’est vue contrainte au partage des points.

Produisant un football aux antipodes de celui produit à Khenchela, à l’occasion de la précédente journée, la JSK s’est fait piéger par la bête blessée dans une partie où la réussite n’a pas été au rendez-vous.

À la suite de ce faux pas à domicile, les Jaune et Vert (3e – 37 pts) ratent l’opportunité de rester dans les talents du CR Belouizdad (2e – 40 pts).

Pour sa part, l’USB gagne un bon point hors de ses bases, mais rétrograde à la dernière place (16e – 19 pts).

Le CRB rattrape le MCA, l’ESS gagne à Chlef, le PAC et l’ESM piétinent

Dans les autres rencontres de cette 22e manche, jouées jeudi et vendredi, le Chabab est parvenu à réduire l’écart qui le sépare du leader, le MC Alger, à un petit point, après avoir damé le pion à la JS Saoura (1-3).

De son côté, l’ES Sétif (5e – 31 pts) a réalisé l’autre bonne opération de cette journée en infligeant à l’ASO Chlef (8e – 28 pts) son premier revers à domicile (0-1).    

De leur côté, l’ES Mostaganem (14– 22 pts) et le Paradou AC (6e – 30 pts) ont connu le même sort que la JSK après avoir été tenus en échec, respectivement, par l’O. Akbou (1-1) et le MC El Bayadh (0-0)

MCA-USMA et CSC-MCO reportés

Concernant les matchs MC Alger – USM Alger et CS Constantine – MC Oran, ils ont été reportés en raison de la participation des deux formations de la capitale ainsi que du CSC aux différentes compétitions continentales.

Si le MCA et l’USMA sont éliminés, respectivement, de la Ligue des champions et de la Coupe de la Confédération africaine de football (CAF), le CSC est toujours en course en Coupe de la CAF. Les Sanafir seront en déplacement au Maroc, le dimanche 20 avril prochain, pour défier le RS Berkane finaliste de la dernière édition en match comptant pour la manche aller des demi-finales.

Résultats particiels de la 22e journée :
JS Saoura – CR Belouizdad1 – 3
ES Mostaganem – O Akbou1 – 1
ASO Chlef – ES Sétif0 – 1
Paradou AC – MC El Bayadh0 – 0
NC Magra – USM Khenchela2 – 0
JS Kabylie – US Biskra0 – 0
Reportés :
MC Alger – USM Alger
CS Constantine – MC Oran
Classement de la Ligue 1
#EquipesPtsJ
1MC Alger     4120
2CR Belouizdad4022
3JS Kabylie3722
4USM Alger3320
5ES Sétif3121
6Paradou AC3022
7MC El Bayadh3022
8ASO Chlef2821
9JS Saoura2822
10CS Constantine2620
11MC Oran   2421
12USM Khenchela2422
13Olympique Akbou2221
14ES Mostaganem2222
15NC Magra 2122
16US Biskra   1922

Radio Algérie Multimédia  

Yahia Saad-Eddine Naili nouveau DG du groupe Saidal

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Yahia Saadedine Naïli
Yahia Saadedine Naïli

Yahia Saad-Eddine Naili a été nommé, samedi, nouveau directeur général du groupe Saidal, en remplacement de Abdelouahad Grimes, indique un communiqué du ministère de l’Industrie pharmaceutique.

La nomination de M. Naili à la tête du groupe Saidal fait suite à une réunion du Conseil d’administration du groupe pharmaceutique, précise le communiqué.

Le nouveau DG est titulaire d’un doctorat en médecine de l’Université d’Alger et d’un MBA (Master of Business Administration) en marketing et distribution de l’Université de la Sorbonne, note le ministère.

M. Naili a également occupé plusieurs postes de responsabilité dans les secteurs public et privé et possède plus de 25 ans d’expérience dans l’industrie pharmaceutique, conclut la même source.

APS

Tunisie : une justice d’exception au service de la répression politique

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Tribunal Tunisie

L’audience du 11 avril 2025 s’est déroulée dans un climat lourd, symptomatique d’un procès politique transformé en bras de fer entre le pouvoir exécutif et l’opposition démocratique tunisienne. Tandis qu’à l’intérieur du tribunal les débats judiciaires étaient censés avoir lieu, à l’extérieur, la rue vibrait de slogans dénonçant une mascarade judiciaire.

Dès l’aube, des familles de détenus politiques, figures de l’opposition, militants de la société civile et journalistes se sont rassemblés devant le palais de justice de Tunis pour dénoncer la nature politique du procès. L’accès à la salle d’audience leur a cependant été massivement refusé, à l’exception d’un membre par famille. Ce filtrage discriminatoire s’est doublé de manœuvres policières visant à intimider les manifestants pacifiques, notamment par un quadrillage renforcé des abords du tribunal et des dispositifs d’empêchement physique de l’entrée.

Des cris se sont élevés pour exiger la transparence du procès, l’annulation des comparutions à distance et la libération des détenus. Ce mouvement de protestation a été soutenu par plusieurs leaders politiques, dont Ahmed Néjib Chebbi, qui a dénoncé la volonté du régime de « terroriser l’opposition » et d’imposer une culture de la peur.

Les manifestants ont brandi des photos des détenus, scandé des slogans réclamant un procès équitable, tandis que les avocats ont confirmé leur refus de participer à une audience sans la présence physique des accusés. Les autorités judiciaires ont maintenu le dispositif de comparution à distance décidé dès la première audience du 4 mars.

Une audience entre huis-clos et entraves médiatiques

Les conditions réelles d’accès ont rendu cette audience de fait fermée. Plusieurs journalistes – dont Zied El Heni, Khawla Boukrim, Monia Arfaoui, Lotfi Hajji – ont été empêchés d’y assister.

Les représentants des organisations nationales ont également été tenus à l’écart, tandis que seuls les représentants de chancelleries occidentales ont été autorisés à y assister. Étaient notamment présents des délégués des ambassades de France, d’Allemagne, du Canada, de Belgique, des Pays-Bas et de l’Union européenne. Ce traitement différencié a été largement perçu comme une tentative de contrôle de l’image à l’international tout en muselant les relais locaux critiques.

Refus collectif de la visioconférence et paralysie procédurale

L’audience a été dominée par le refus des détenus politiques de comparaître à distance depuis leur lieu de détention. Les avocats ont unanimement soutenu que cette méthode viole l’article 141 bis du Code de procédure pénale tunisien, en particulier l’exigence d’un consentement préalable du prévenu, d’une motivation écrite et d’une décision judiciaire individualisée, toutes absentes dans ce dossier.

Cette comparution à distance a été qualifiée de « simulacre de procès » relevant plus d’une opération de communication politique que d’un véritable débat judiciaire.

Me Abdelaziz Essid a déclaré à l’AFP : « Nous refusons de plaider dans ces conditions et nous ne voulons pas être les témoins complices de cette parodie. »

Me Ayachi Hammami a ajouté : « Par solidarité avec les détenus, nous refusons également d’intervenir à distance. »

Des accusés à l’étranger réclament à être auditionnés

Deux des inculpés résidant à l’étranger, en l’occurrence Mohamed Kamel Jendoubi et Ridha Driss, traduits sans avoir été auditionnés lors des phases d’enquête et d’instruction, ont demandé à être entendus dans cette audience, en tant qu’accusés mais aussi comme témoins, par visioconférence. Ils ont invoqué l’application de l’article 73 de la loi organique antiterroriste qui permet ce type de procédure si l’intérêt de la justice le justifie.

Situation critique des détenus : grèves de la faim et maltraitance

Un autre moment marquant de cette audience fut la déclaration de Me Dalila Msadek indiquant que cinq détenus à Mornaguia, à savoir Ghazi Chaouachi, Ridha Belhaj, Khayem Turki, Issam Chebbi et Abdelhamid Jelassi, ainsi que Jaouhar Ben Mbarek à Belli (Nabeul), sont en grève de la faim – ce dernier depuis plus de 13 jours – pour protester contre la comparution à distance et l’interdiction de s’exprimer devant leurs juges.

Cette grève de la faim est l’expression ultime de la volonté d’être entendus dans un procès où le pouvoir tente d’étouffer toute voix dissonante. Elle est aussi un cri d’alarme face à des conditions de détention inhumaines.

Un procès sans légitimité judiciaire ni morale

L’instruction du dossier repose sur des témoignages anonymes, des accusations sans preuves matérielles, des interpellations spectaculaires sans mandat et une absence totale de contre-interrogatoire des témoins-clés. L’ancien juge d’instruction, désormais en fuite, et le chef de la police judiciaire, aujourd’hui incarcéré, illustrent la fragilité institutionnelle de l’affaire.

La composition même du tribunal est jugée illégale et inconstitutionnelle. En effet, la chambre criminelle en charge du dossier a été constituée par simple note administrative émise par la ministre de la Justice, en contradiction manifeste avec les dispositions du décret-loi n° 11-2022 relatif au Conseil supérieur de la magistrature, qui stipule que les juges doivent être désignés selon des mécanismes indépendants garantissant l’impartialité de la justice.

La défense a ainsi mis en cause la légitimité de l’ensemble du bureau du tribunal, composé des magistrats suivants : Lassâd Chamakhi (président), Moez El Gharbi, Ahmed Barhoumi, Fatma Boukattaya, Afef Betaïeb.

La défense et les experts ont dénoncé publiquement cette composition, affirmant devant la cour que ses décisions seront sans valeur et que cette mascarade judiciaire sera inévitablement corrigée une fois la légalité restaurée.

Maitre Bassam Trifi a déclaré : « On ne peut pas qualifier ce procès de procès équitable. Il comporte de nombreuses irrégularités… Des citoyens, des représentants de la société civile, des journalistes et les familles des accusés ont été empêchés d’assister à l’audience. Or, la publicité des débats est un pilier fondamental et essentiel du procès équitable. Les personnes concernées par ce dossier, détenues et menacées de lourdes peines, sont les premières à avoir le droit d’être présentes à l’audience. Les avocats ont respecté le tribunal, mais le tribunal ne nous a pas respectés, car il nous est demandé de plaider alors que nos clients ne sont pas présents dans la salle.

Sous Ben Ali, nous avons assisté à de nombreuses affaires où tous les accusés étaient amenés, y compris certains transportés en raison de leur état de santé. Même dans l’affaire de Soliman, où les accusés avaient pris les armes contre l’État, ils ont été amenés en personne à l’audience. Idem pour d’autres affaires comme Bardo ou l’attentat de l’Imperial Sousse… Et aujourd’hui, dans l’affaire du « complot », on refuse de faire comparaître les accusés dans la salle d’audience.

C’est pourquoi nous avons décidé de ne pas entrer dans le fond de l’affaire tant que les accusés ne seront pas physiquement présents à l’audience. »

Une justice instrumentalisée à des fins de répression

Comme l’ont souligné plusieurs avocats et observateurs, l’objectif de ce procès n’est pas de juger des crimes réels, mais de criminaliser l’opposition politique. Les accusations de « complot », « terrorisme », ou « atteinte à la sécurité de l’État » visent des figures démocratiques connues pour leur attachement à l’action politique pacifique : avocats, syndicalistes, universitaires, anciens ministres, journalistes.

Kaïs Saïed, en qualifiant publiquement les accusés de « terroristes » et en affirmant que « quiconque les acquitte est leur complice », a miné d’avance toute présomption d’innocence et toute possibilité d’un procès équitable.

Le président accuse également certains d’entre eux de « collusion avec des diplomates étrangers », des contacts que la défense qualifie de parfaitement normaux dans le cadre du travail politique et associatif.

Une crise judiciaire révélatrice de la dérive autoritaire

Au-delà de ses irrégularités, ce procès révèle une crise plus large du système judiciaire tunisien : perte d’indépendance, immixtion de l’exécutif, désignation arbitraire des juges, censure de la presse et criminalisation de l’opinion. Il illustre la descente aux enfers de l’État de droit depuis le coup d’État du 25 juillet 2021.

L’audience du 11 avril 2025 a confirmé que l’« affaire du complot » est une opération politique de répression de la dissidence menée à coups de lois d’exception et de procédures bâclées. Ce n’est pas seulement un procès contre quarante individus, mais un procès contre l’opposition et l’idée même de l’État de droit et de la démocratie

La communauté nationale et internationale doit se mobiliser pour exiger
• La fin des comparutions à distance
• La libération des prisonniers politiques
• Le respect des garanties d’un procès équitable
• L’arrêt de la répression des opposants

Il est à rappeler que la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples a ordonné à la Tunisie, dans l’affaire n° 04/2023, des mesures provisoires concernant le détenu politique Ghazi Chaouachi depuis le 28 octobre 2023, relatives aux droits les plus fondamentaux à la défense et aux soins médicaux. L’État tunisien ne s’est pas contenté d’ignorer cette décision : il a osé demander le retrait de ces mesures sous prétexte d’avoir retiré la déclaration déposée en 2017 au sens de l’article 34.6 du Protocole de la Cour africaine.

Par ailleurs, le Groupe de travail du Conseil des droits de l’homme des Nations unies a qualifié la détention de Khayem Turki, Ghazi Chaouachi, Ridha Belhadj, Noureddine Bhiri, Jaouhar Ben Mbarek, Chaïma Issa et Lazhar Akremi d’arbitraire et a invité les autorités tunisiennes à les libérer et à les indemniser.

Audience écourtée, vérité censurée, défense debout

Le ministère public s’en est remis à la chambre pour statuer sur la possibilité de faire comparaître les accusés lors de la prochaine audience, tout en s’opposant à toutes les demandes de libération.

L’audience s’est achevée de manière abrupte, alors même que les avocats plaidaient encore pour la présence des détenus dans la salle. Ce fut un jour emblématique de la négation du droit à un procès équitable, public et contradictoire. Un jour où s’est dévoilée la peur d’un régime face à la vérité. Un jour, aussi, où l’on a tenté d’abuser de la conscience collective des Tunisiennes et des Tunisiens.

Le procès a été reporté au 18 avril 2025

Mais ce fut surtout un jour de dignité, porté par la ténacité et l’engagement exemplaire d’une défense qui ne recule pas lorsqu’elle défend des causes justes.

CRLDHT

Gabon : vers une présidentielle sans surprise ?

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Présidentielle au Gabon.
Présidentielle au Gabon.

Les électeurs gabonais sont appelés aux urnes samedi 12 avril pour une élection présidentielle qui marque le début de la sortie de la transition entamée par le coup d’État du 30 août 2023.

Journée férié me ce samedi pour faire voter le maximum de Gabonais. Ce sont 920 000 électeurs gabonais qui sont appelés aux urnes pour élire leur président après 20 mois de transition. Candidat à ces élections, le général Oligui Nguema, tombeur d’Ali Bongo fait face à sept candidats dont l’ancien premier ministre Alain Claude Bilie By Nze. Le général semble parti pour s’imposer.

Un scrutin à la portée historique puisque, pour la première fois depuis 1967, aucun bulletin ne portera le nom « Bongo ». Huit candidats sont en lice, dont le chef de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, rallié par la quasi-totalité des forces politiques et de la société civile. Cette échéance se présente dans un calme qui tranche avec l’effervescence des précédents scrutins.

Devant une supérette proche du CHU, trois amies partagent un jus sous un parasol. En cette saison pluvieuse, l’après-midi étouffante annonce un orage qui viendra rompre la quiétude de la capitale gabonaise. En attendant, elles ne cachent pas qu’elles apprécient un calme rarement connu en période électorale. « On est là, tranquille, on ressent à peine les élections. Pas de casse, on mange, on boit, on dort, c’est très bien », sourit Annie. « On sent l’harmonie des Gabonais en ce moment », appuie Syntiche, qui dit avoir « le cœur tranquille », comme Murielle, « rassurée » par l’ambiance, et bien contente de « sortir de la répétition » des crises.

En 2009, en 2016 et encore en 2023, le Gabon vivait au rythme des meetings, avec d’un côté le PDG (Parti démocratique gabonais), ex-parti au pouvoir soucieux de le conserver par tous les moyens avec Ali Bongo, après l’avoir agrippé avec son fondateur Omar Bongo ; et de l’autre, les mobilisations de l’opposition pour faire tomber la dynastie, souvent derrière des transfuges du pouvoir. Cette année, rien de tout cela, le coup de tonnerre politique ayant déjà eu lieu le 30 août 2023, lorsque les militaires ont annulé une élection que la présidence n’avait cette fois pas les moyens de renverser.

Vingt mois plus tard, c’est le visage du chef des putschistes – eux emploient le terme de « libérateurs » – qui occupe l’espace public : panneaux d’affichage, affiches, abribus, Brice Clotaire Oligui Nguema est partout, avec sa campagne « C’BON », qui joue sur ses initiales. Le slogan du CTRI (Comité pour la transition et la restauration des institutions), « c’est enfin notre essor vers la félicité », imprimé sur fond des couleurs nationales, habille les grilles du gigantesque chantier qu’est le bord de mer de Libreville. 

Campagne plébiscitaire et soutien quasi unanime des forces politiques

Visuellement, cette campagne a des allures de plébiscite, le chef de la transition disposant de moyens sans commune mesure avec ses opposants. Pourtant, la plupart des Librevillois ne semblent pas s’en émouvoir. « La répartition des temps de parole et de présence médiatique n’est pas équitable », reconnaît Philippe, assis derrière le présentoir de son amie, vendeuse ambulante d’arachides, « on a l’impression que tout le monde vote le CTRI, même si on sait déjà qu’ils vont gagner ». Pourtant, ce jeune homme ne blâme pas les militaires : « Si les opposants ont pu déposer 30 millions de francs CFA de caution, ils doivent pouvoir se payer des affiches. »

« Les sept autres candidats n’ont pas d’affiches, ils donnent des causeries, misent sur les réseaux sociaux », observe le juriste Augustin Emane, qui nous reçoit dans son cabinet du centre-ville. Pour lui, il ne faut pas se le cacher : « Nous sommes dans une campagne plébiscitaire, la question est de savoir si ceux qui ont fait tomber Ali Bongo ont le droit de poursuivre. C’est difficile de proposer autre chose et de remettre en cause celui qui a posé cet acte que peu de gens imaginaient et qui a été largement applaudi. Il faut rappeler que beaucoup disaient qu’ils voteraient pour un chien s’il était face à Ali Bongo. »

Pour cette campagne, Brice Clotaire Oligui Nguema jouit du soutien de la quasi-totalité des forces politiques, qu’elles soient issues de l’ancien système PDG, de l’ex-opposition qui a participé à la transition, comme les ténors Alexandre Barro Chambrier ou Paulette Missambo, ou de voix jadis très critiques de la société civile comme le défenseur de l’environnement Marc Ona Essangui ou l’avocat Anges-Kevin Nzigou.

Alors le Gabon est-il phagocyté par « C’BON », et n’est-ce pas un péril pour le pays ? « La campagne est ouverte et se déroule bien, chacun emploie sa stratégie », affirme la ministre de la Communication, Laurence Ndong. « Le candidat Oligui Nguema fait l’unanimité. Le peuple voit en lui un bienfaiteur après les kleptocrates de l’ancien système. Mais il a aussi un bilan qui fait progresser le pays. Les Gabonais sont rassurés par la réalité », assure l’une des vingt-sept porte-paroles du candidat.

Bilie-By-Nze, « serpent », alternative ou sparring-partner ?

Pour chapeauter tous ses soutiens, Brice Clotaire Oligui Nguema a créé le « Rassemblement des bâtisseurs », un nom en écho à son axe politique principal : la reconstruction des infrastructures du pays. « Cette transition est un paradoxe », estime le juriste Augustin Emane, « on ne peut pas dire que ça va mieux, mais le CTRI donne le sentiment que le pays est en chantier, en mouvement. Le Gabon était en léthargie profonde. Ça, les gens le voient ». Un avis que partage Philippe, dans l’ombre de sa ruelle : « Les Gabonais sont dans l’optique que tant que le semblant du quotidien est là, ils poursuivront. On est dans le sens du vent. Malheureusement, les autres ne sont pas crédibles. Alain Claude Bilie-By-Nze a, selon moi, un projet cohérent, mais il est « invotable », radioactif. »

Parmi les sept candidats à défier le chef de la transition, Alain-Claude Bilie-By-Nze, le dernier Premier ministre d’Ali Bongo est en effet la seule personnalité politique de poids. Et il se lâche contre une transition, selon lui, dispendieuse et bâtie sur une illusion : « Le général Oligui est dans le système depuis Omar Bongo. Il n’est pas un homme neuf et tous ceux qui l’entourent aujourd’hui, ce sont des hommes anciens du système ancien. Ils essaient de montrer aux Gabonais un visage différent. Mais les Gabonais sauront faire la part des choses et, aujourd’hui, il est temps de mettre un terme à ce système », juge celui qui se définit comme « la seule alternative aux militaires », et va aux élections « pour gagner ».

Un ton qui lui vaut de prendre des coups en retour : « La mue du serpent ne change ni sa nature ni la toxicité de son venin », assène Laurence Ndong, véhémente contre « les discours fallacieux, les postures méprisantes et arrogantes » d’un adversaire qui, selon elle, « ne vit que par la division des Gabonais ».

Avec RFI

Le comte Bertrand de Rougé : une personnalité attachée à l’histoire et à ses racines bretonnes

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Le comte Bertrand de Rougé. Photo : DR

Le comte Bertrand de Rougé était une figure incontournable, une personnalité marquante qui incarnait avec passion l’héritage et les traditions de la Bretagne. Né dans une famille ancrée dans l’histoire de cette région, il nourrissait une relation quasi fusionnelle avec ses racines bretonnes, qu’il considérait comme un patrimoine précieux et vivant. 

Son amour pour cette terre se manifestait non seulement dans ses actions, mais aussi dans ses discours, où il évoquait régulièrement les grandes pages de l’histoire bretonne. Il était un défenseur acharné de la culture locale, une voix forte pour la préservation des coutumes et des valeurs bretonnes, tout en étant un acteur clé dans les cercles sociaux et politiques de la région. Son engagement envers la Bretagne allait bien au-delà de la simple appartenance à une lignée historique, c’est une véritable mission de transmission et de célébration des traditions qui faisaient la singularité de cette terre. 

Il est décédé le 20 février 2025 à l’âge de 92 ans. Chevalier de la Légion d’honneur, de l’Ordre national du Mérite et du Mérite agricole, il a également été honoré de plusieurs distinctions en reconnaissance de ses contributions dans divers domaines. Une grande partie de sa vie a été consacrée à la préservation du château de Tonquédec, une forteresse historique située en Bretagne. Entre les années 1970 et 2000, il a supervisé d’importants travaux de rénovation pour restaurer le château et l’ouvrir au public.

Le comte Bertrand de Rougé a passé son enfance au château de Baronville, situé dans le département d’Eure-et-Loir, en France. Ce château, construit au XIXe siècle sous Napoléon III, est un exemple remarquable d’architecture de style Louis XIII. Il se trouve au cœur d’un vaste domaine agricole et forestier, et a été inscrit au patrimoine historique en 1985. 

Bertrand de Rougé a joué un rôle essentiel dans la préservation de ce château familial. Avec son épouse, il a entrepris d’importantes restaurations afin de sauvegarder ce patrimoine historique et familial. Ces efforts ont permis de maintenir l’édifice en bon état et de préserver son éclat pour les générations futures. Aujourd’hui, le château appartient au comte Aymeric de Rougé, qui poursuit les travaux de restauration et d’embellissement de ce domaine avec passion.

Le château de Baronville représente non seulement le lieu de naissance de Bertrand de Rougé, mais aussi un symbole de son engagement envers la préservation du patrimoine familial. Sa passion pour l’histoire et son implication dans la sauvegarde du patrimoine ont laissé une empreinte indélébile. Sa famille, notamment ses enfants et petits-enfants, continue de perpétuer son héritage. Il a également été impliqué dans des activités communautaires, en tant que maire-adjoint de Béville-le-Comte et vice-président de la Fondation d’Aligre. Une vie riche et pleinement dédiée à la préservation de l’histoire et du patrimoine.

Le comte Bertrand de Rougé a marqué l’histoire non seulement par son engagement envers le patrimoine breton, mais également par son rôle déterminant dans la restauration et la préservation du château de Tonquédec, une forteresse médiévale emblématique située dans les Côtes-d’Armor. Construit au XIIe siècle, le château a traversé de nombreux siècles de conflits et de transformations. Sous la direction de Bertrand de Rougé, entre les années 1970 et 2000, il a connu une transformation majeure. Il a supervisé des travaux de restauration visant à préserver des éléments architecturaux fondamentaux, tels que les chemins de ronde, les ponts-levis et les donjons. Ces efforts ont permis de protéger le château des intempéries et de le rendre accessible au public, transformant ainsi ce monument en un lieu de mémoire et de découverte pour des générations de visiteurs.

Bertrand de Rougé était également profondément attaché à ses racines familiales. Ses ancêtres avaient acquis le château en 1880, et il a poursuivi cette tradition en transmettant son amour pour l’histoire et le patrimoine à ses descendants. 

Sa fille, Victoire de Rougé, a pris la relève en 2022, perpétuant ainsi l’héritage familial. En plus de son engagement sur le château, il a joué un rôle actif dans sa communauté, notamment en tant que vice-président de la Fondation d’Aligre et maire-adjoint de Béville-le-Comte. Son engagement discret mais déterminé a laissé une marque durable, non seulement sur le patrimoine architectural, mais également dans les cœurs de ceux qui ont eu la chance de le connaître. Une vie dédiée à la préservation de l’histoire et à la transmission de valeurs culturelles.

Les efforts du comte Bertrand de Rougé ont eu un impact majeur sur la perception du patrimoine breton, en particulier à travers la restauration du château de Tonquédec. En redonnant vie à cette forteresse médiévale, il a non seulement préservé un monument historique, mais il a également renforcé l’identité culturelle bretonne. Son travail a permis de transformer le château en un lieu de mémoire et d’éducation, attirant des visiteurs de toute la France et au-delà. Grâce à ses initiatives, le château est devenu un symbole de la résilience et de l’importance de préserver le patrimoine local. Les générations d’écoliers qui ont visité le site, ainsi que les familles qui ont participé aux événements organisés au château, ont pu développer un lien profond avec l’histoire bretonne. 

Son engagement a inspiré d’autres propriétaires de monuments historiques à investir dans la restauration et la valorisation de leur patrimoine, contribuant ainsi à une prise de conscience accrue de l’importance de préserver ces trésors culturels pour les générations futures.

Brahim Saci

Situation en Algérie : des ONG interpellent le conseil des droits de l’homme de l’Onu

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Prison
Quelque 200 détenus d'opinion croupissent dans les prisons

C’est une information passée inaperçue. Des organisations de droits humains, dont la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains, ont appellé en mars les États membres et observateurs du Conseil des droits de l’homme des Nations unies à dénoncer la répression persistante de l’espace civique en Algérie lors de la 58e session du Conseil.

« Cher∙es représentant∙es permanent∙es des États membres et observateurs du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies,

La situation des droits humains en Algérie reste sombre. Les autorités algériennes ont maintenu leur répression de l’espace civique en réprimant brutalement les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique, entrainant une érosion constante des droits humains. Elles ont continué de réprimer la dissidence pacifique en procédant à des arrestations et détentions arbitraires, en poursuivant injustement des militant∙es pacifiques, des défenseur∙es des droits humains et des journalistes, et en restreignant arbitrairement leur droit à la liberté de circulation. Ces mesures ont contribué à créer un climat de peur et de censure dans le pays.

Dans ce contexte préoccupant, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies examinera le 6 mars prochain le rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseur∙es des droits de l’homme, Mme Mary Lawlor, sur sa visite en Algérie du 25 novembre au 5 décembre 2023. Ce rapport constitue une occasion cruciale pour les États de rappeler aux autorités algériennes leurs obligations en matière de droits humains. Le 30 janvier 2025, la Rapporteuse spéciale a exprimé sa consternation face à la « poursuite de la criminalisation des défenseur∙es des droits humains  », plus d’un an après sa visite.

À cet égard, les autorités algériennes examinent actuellement un projet de loi sur les associations. Si l’initiative est la bienvenue dans la mesure où la loi actuelle étouffe le droit à la liberté d’association, le projet n’est pas conforme aux obligations internationales de l’Algérie en matière de droits humains ni aux dispositions constitutionnelles algériennes relatives à la liberté d’association.

Le texte maintient un système d’autorisation préalable fastidieux pour l’enregistrement des organisations non-gouvernementales (ONG) et de nombreuses restrictions injustifiées, notamment en matière d’accès au financement et de coopération étrangère. Le projet confère également aux autorités exécutives des pouvoirs trop étendus en matière d’enregistrement, de suspension et de dissolution d’associations pour des motifs vagues.

Les États au Conseil des droits de l’homme ont la responsabilité de prendre position contre ces violations des droits humains. Nous vous appelons donc à saisir l’occasion de l’examen du rapport de la Rapporteuse spéciale pour :

condamner la criminalisation des défenseur∙es des droits humains et la répression plus large de l’espace civique et exiger la fin des arrestations et détentions arbitraires, ainsi que des poursuites judiciaires injustes ;

demander la libération immédiate et inconditionnelle des défenseur∙es des droits humains, des militant∙es et des autres personnes détenues uniquement pour avoir exercé pacifiquement leurs droits humains ;

rappeler aux autorités algériennes leurs obligations internationales en matière de droits humains en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), les exhorter à adopter une nouvelle loi sur les associations pleinement conforme à ces obligations et assurer une véritable consultation avec la société civile.

L’engagement du Conseil en faveur des défenseur∙es des droits humains doit se traduire par des actions concrètes et une mobilisation continue afin d’inciter les autorités algériennes à respecter leurs obligations internationales.

En tant que membre du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, l’Algérie est tenue de respecter les normes les plus élevées en matière de promotion et de protection des droits humains et de coopérer pleinement avec le Conseil et ses mécanismes. Nous vous exhortons à utiliser votre position au sein du Conseil pour exiger des comptes et pour protéger celles et ceux qui risquent leur liberté pour défendre les droits humains. »

Conseil des droits de l’homme de l’ONU : la détention d’Ihsane El Kadi jugée arbitraire

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El Kadi Ihsane

Le Conseil des droits de l’homme de l’Organisation des Nations unies (ONU) a rendu un avis daté du 4 avril 2025 reconnaissant la détention du journaliste algérien Ihsane El Kadi comme arbitraire. C’est ce qu’a rapporté Reporters sans frontières (RSF), qui appelle les autorités algériennes à permettre la reprise des activités de Radio M et d’Interface Médias.

Selon l’ONG de défense des droits de l’homme, cet avis, adopté le 31 mars 2025 mais rendu public récemment après notification à Alger, conclut sans équivoque que l’incarcération d’Ihsane El Kadi viole de nombreuses dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Sont notamment mentionnés les articles 2, 3, 7, 9, 10 et 19 de la Déclaration, ainsi que les articles 2, 9, 14, 19 et 26 du Pacte.

Le Groupe de travail de l’ONU sur la détention arbitraire estime que la privation de liberté du journaliste, du 24 décembre 2022 au 1er novembre 2024, était dépourvue de fondement légal et contrevenait aux normes internationales. Sa détention est jugée arbitraire au titre de quatre catégories : absence de base légale, atteinte à la liberté d’expression, violation du droit à un procès équitable, et motifs discriminatoires liés à son activité journalistique.

Le Groupe insiste également sur « la nécessité de lui fournir réparation pour le préjudice subi » et appelle à « une enquête indépendante et approfondie » sur les conditions de sa détention.

Pour rappel, Ihsane El Kadi avait été condamné en appel le 18 juin 2023 à sept ans de prison, dont cinq ferme, pour « réception de fonds étrangers à des fins de propagande politique », ainsi que pour « atteinte à la sécurité de l’État et à l’ordre public ».

Amnesty International salue cette décision de l’ONU comme une étape cruciale :« La reconnaissance du caractère arbitraire de cette détention met en lumière une injustice flagrante. Nous exhortons les autorités algériennes à prendre des mesures immédiates pour corriger cette situation », a déclaré un porte-parole de l’organisation.

Au-delà de la reconnaissance de cette détention comme arbitraire, le Conseil des droits de l’homme recommande à l’Algérie de réviser sa législation afin de la rendre conforme au droit international, et de mener une enquête pour que les responsables rendent compte de leurs actes. Car en vrai, toutes les arrestations des milliers de personnes depuis le printemps 2019 sont arbitraires et ne répondent à aucune accusation sérieuses.

Malgré sa libération en octobre 2024, la situation d’Ihsane El Kadi reste préoccupante. Radio M demeure fermée depuis la dissolution judiciaire d’Interface Médias en juin 2024. Les actifs de l’entreprise sont toujours confisqués, et son passeport n’a pas été restitué, l’empêchant de quitter le territoire.

Dans une tribune publiée sur Maghreb Emergent, le journaliste a salué une « grande victoire morale » et une « première réparation symbolique ». Il a dédié cette décision « aux centaines de détenus victimes de l’arbitraire en Algérie », en particulier ceux persécutés pour leurs opinions pacifiques dans le cadre du Hirak du 22 février.

Ihsane El Kadi a exprimé sa profonde reconnaissance envers la solidarité internationale qui l’a soutenu, notamment des journalistes, militants, intellectuels et citoyens algériens. Il a également souligné le rôle essentiel de RSF dans la transmission de son dossier aux instances onusiennes, saluant leur travail rigoureux et constant.

Il rappelle enfin que son arrestation s’inscrit dans une « campagne de harcèlement continu » visant à faire taire Radio M, fondée en 2013. Avant cette détention, il avait déjà été condamné à six mois de prison pour un article, arrêté à deux reprises en 2020 et 2021, et poursuivi en 2022, notamment sous des accusations graves allant jusqu’au « terrorisme ».

Ce nouvel avis du Conseil des droits de l’homme constitue un signal fort adressé aux autorités algériennes. Il souligne l’urgence pour Alger de respecter ses engagements internationaux et de mettre fin à la répression des voix critiques et des acteurs de la société civile. Mais tempérons, les autorités ne font montre d’aucun signe de volonté de changement de logiciel. Le maintien de plus de 240 prisonniers d’opinion ainsi que tout l’arsenal législatif déployé depuis l’intronisation de Tebboune au pouvoir en sont les meilleures preuves.

Rabah Aït Abache

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