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Le procès du détenu d’opinion Mohamed Tadjadit encore renvoyé

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Mohamed Tadjadit
Mohamed Tadjadit ou la fierté d'un poète embastillé.

Le procès du détenu d’opinion, Mohamed Tadjadit, est renvoyé par le tribunal crimnel d’appel au 14 janvier 2026.

Eh oui le poète Mohamed Tadjadit passe devant un tribunal criminel ! Rien que ça ! Son crime ? Réclamer la liberté d’expression, de pourfondre les fossoyeurs de l’Algérie, les corrompus et tous ceux qui poussent les Algériens au désespoir et à l’exil.

Le 11 novembre 1925 le tribunal criminel d’Alger condamnait Tadjadit Mohamed une peine de 5 ans de réclusion et 200 000 dinars d’amende ferme.

« Tadjadit Mohamed est en outre condamné, au civil à faire valoir à l’ Agent judiciaire du trésor (AJT) la somme de 500 000 DA à titre de réparation.

Mohamed Tadjadit est poursuivi de pas moins de six chefs d’accusation, à savoir :

  • Crime d’apologie des actes terroristes et destructeurs.
  • Crime d’ utilisation des technologies de la communication et de l’information pour soutenir les actes et activités d’ entités terroristes.
  • Crime de propagation, de manière directe ou indirecte des idées des entités terroristes.
  • Délit d’outrage à corps constitué.
  • Délit d’exposition au regard du public de publications de nature à porter atteinte à l’intérêt national.

-Délit d’ incitation à attroupement non armé, (articles 100 alinéa 01,146, 87 bis12, 87 bis 04,96 du code pénal)

Par acte de protestation, Mohamed Tadjadit avait décidé de se mettre en grève de la faim le 16 novembre 25, une grève de la faim qu’il a observé durant 10 longues journées mettant en péril sa santé.

Liberté pour Tadjadit Mohamed. Liberté pour tous les détenu-e-s d’opinion et politiques. » lit-on dans le communiqué publié par Me Fetta Sadat.

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Tunisie : qui a réellement poussé Ben Ali vers la sortie ?

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Zine El Abidine Ben Ali
Zine El Abidine Ben Ali

Quinze ans après la révolution tunisienne, la question demeure : qui a véritablement contraint Zine El Abidine Ben Ali à quitter le pouvoir ?

L’événement, qui a débuté avec l’immolation de Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid le 17 décembre 2010, a rapidement embrasé le pays et mis fin à un régime en place depuis plus de deux décennies. Si l’image de la « révolution de la rue » domine les récits officiels et médiatiques, la réalité est plus complexe et multicausale.

L’article de Kapitalis publié récemment s’attache à démontrer que la chute de Ben Ali ne peut être attribuée à un seul acteur ou facteur. La mobilisation populaire a été incontestablement le catalyseur du mouvement, mais elle a agi dans un contexte politique fragilisé. Au sein du Parti démocratique constitutionnel et des structures gouvernementales, des tensions et des rivalités internes affaiblissaient déjà le régime. Certains proches du président hésitaient sur la manière de gérer la contestation, tandis que d’autres cherchaient à se protéger en anticipant le dénouement inévitable. Ces divisions ont amplifié l’effet des manifestations et accéléré le départ de Ben Ali.

L’article souligne également le rôle de l’opinion internationale et des pressions diplomatiques. Plusieurs observateurs estiment que le contexte régional, marqué par l’exemple de révoltes dans d’autres pays arabes, a pesé sur la décision du régime. La peur d’un effondrement total et d’une crise politique durable a renforcé la nécessité d’un départ rapide. Mais les archives restent fragmentaires, et il est difficile d’identifier avec précision le poids exact de ces influences dans la décision finale du président.

Pour les historiens et analystes politiques, la révolution tunisienne représente un cas d’étude unique sur la conjonction de forces internes et externes. La rue, le pouvoir et les alliances politiques se sont entremêlés dans un scénario où aucun acteur n’a agi isolément. Comprendre cette dynamique est essentiel pour analyser non seulement la Tunisie post-Ben Ali, mais aussi les mécanismes par lesquels un régime autoritaire peut être contesté et contraint à céder.

Depuis la chute du président, les débats restent vifs. Pour certains, la révolution a ouvert la voie à des avancées démocratiques, à la liberté d’expression et à la participation citoyenne. Pour d’autres, elle a engendré une décennie de turbulences économiques et politiques, avec des institutions souvent incapables de répondre aux attentes populaires. Le départ de Ben Ali n’a donc pas été une fin en soi, mais le point de départ d’un long processus de transition, marqué par des réussites limitées et des frustrations persistantes.

En définitive, la leçon que l’on peut tirer de cet épisode est que les transformations politiques profondes résultent d’un équilibre fragile entre la pression populaire, la dynamique interne des régimes et les contextes régionaux et internationaux. La révolution tunisienne rappelle que même les dirigeants les plus puissants peuvent être confrontés à des forces qu’ils ne maîtrisent pas, et que l’histoire se construit souvent à l’intersection de plusieurs déterminants, et non d’un seul événement isolé.

Djamal Guettala 

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Gaza : une force internationale en préparation, mais …

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Gaza
Gaza rasée par l'armée israélienne.

La capitale qatarie a accueilli mardi une réunion préparatoire pour la création d’une force internationale de maintien de la paix à Gaza, destinée à sécuriser les zones sous contrôle israélien et à soutenir la stabilisation après les récentes hostilités.

Quinze pays ont été invités, mais beaucoup, dont l’Azerbaïdjan, la Belgique ou la Corée du Sud, n’ont pas envoyé de représentants.

Selon les médias israéliens, l’Indonésie et l’Italie se disent prêtes à participer, mais sous conditions strictes : leurs troupes ne doivent pas franchir la ligne de contrôle israélienne et rester en dehors des zones sous influence de Hamas. La Turquie, exclue du forum qatari en raison de l’opposition israélienne, maintient pour sa part son intérêt pour la participation future, en particulier lors de la phase de reconstruction.

L’Azerbaïdjan, souvent citée comme candidate pour rejoindre la force, a choisi de ne pas s’impliquer, invoquant des questions sur le mandat et les responsabilités des troupes, ainsi que la préservation de ses relations diplomatiques avec Israël et la Turquie.

La première implantation devrait se concentrer dans le sud du territoire, à Rafah, avec un déploiement progressif dans d’autres bases sous contrôle israélien. L’objectif affiché par les États-Unis est de lancer rapidement la force, afin de soutenir la mise en œuvre de la « phase Trump » et de donner un cadre légitime à la présence internationale.

Les observateurs notent que, malgré les réticences, l’initiative pourrait constituer un test crucial pour la coordination internationale à Gaza, notamment en ce qui concerne la distribution de l’aide humanitaire et la prévention des affrontements locaux. Israël, tout en coopérant à l’installation de la première base, reste prudent sur l’entrée de forces étrangères armées sur le terrain.

Mourad Benyahia 

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Mohamed Lamine Belghit, nous ne sommes pas de ton monde

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Mohamed Lamine Belghit
Mohamed Amine Belghit

Lamine Belghit, c’est dur d’être un démocrate qui te fait face. Car malgré l’horreur de tes positions, je me soumets à l’obligation que m’imposent mes convictions, c’est-à-dire d’admettre que tu as le droit de prononcer des propos choquants (c’est un euphémisme). Malgré tout cela, je veux mener un combat frontal contre toi mais ne pas t’emprisonner. Nous ne sommes pas du même monde.

Avant de revenir sur tes propos nauséabonds, je souhaiterais te dire mon accord le plus soutenu aux propos de Samia Naït Iqbal dans son article sur la grâce sélective dont tu as  bénéficié alors que des dizaines de prisonniers politiques croupissent dans les geôles d’un régime que tu approuves.

Tes propos sont insoutenables mais être démocrate, c’est dur, il faut parfois se boucher le nez pour accepter le principe fondamental de ce choix qui a fait avancer le monde. Hélas elle échoue pour beaucoup car, toi, tu as reculé vers le fond des âges sombres.

Je suis obligé de vaincre ma rage lorsque j’affirme que tes propos sont toujours libres. Ta haine envers des êtres humains n’est pas un délit, elle est une insulte à leur égard. Tes opinions ne pourront jamais tenir, car s’ils sont incrustés dans les cerveaux de beaucoup qui te ressemblent, l’histoire finit toujours par passer la voiture balai pour les nettoyer. 

Hélas, les salissures reviennent et la communauté des êtres humains est condamnée à les enlever inlassablement. C’est ainsi que la démocratie avance, elle n’a pas une route rectiligne et dégagée. 

Ce sont des choses que je ne peux ni t’expliquer ni t’en convaincre car tu as une couche d’antidote envers l’école et son instruction. L’humanité doit combattre tes propos, elle ne peut emprisonner tous les monstres de la terre, nous n’aurions pas assez de prisons et c’est le contraire de nos convictions, je te l’ai déjà dit.

Mohamed Lamine, tu n’as même pas eu le courage d’assumer tes positions. Tu t’es agenouillé devant tes suzerains pour demander pardon et les remercier pour la grâce qui t’a été accordée. C’est dire si ta haine est courageuse et va jusqu’au bout de ses convictions. 

Les prisonniers politiques les ont assumées et je ne les ai vus ni entendu renier leurs convictions. Tu n’es pas de leur monde comme tu n’es pas du mien.

Dans cette histoire il ne m’est pas nécessaire de te parler de mon affection et soutien aux droits de ceux que tu as insultés violemment. Je les ai affirmés depuis tant d’années qu’il n’est effectivement pas nécessaire de les rappeler.

Et puis, Mohamed Lamine Belghit, mon soutien à leur égard n’est pas exclusif. Ils sont mes compatriotes comme tous les autres et je ressens ton insulte comme s’adressant à tous. C’est l’humanité que tu insultes.

Je n’approuve pas ta condamnation pénale comme je la combats pour tous ceux qui ont été jetés dans les geôles pour leurs idées. Je la combats car je ne reconnais pas la justice d’un état autoritaire, dirigé par des personnages qui partagent ton idéologie.

Tu penses être dans la noblesse de la pureté civilisationnelle. La pureté n’existe pas pour une civilisation, c’est un concept racialiste, elle n’exige pas un adjectif. Elle n’a besoin ni d’être pure ni d’être malsaine. 

Oui, Lamine, c’est dur d’être un démocrate, très dur. Il faut avoir de la sérénité, de la conviction et du courage pour l’assumer. Dans une autre vie, peut-être, nous arriverons à faire de toi un être humain digne de respect.

Que nos compatriotes de Kabylie et d’ailleurs soient fiers de ce qu’ils sont, chacun dans sa singularité et sa richesse. Nous avons exprimé notre jugement sur ta personne, il faut maintenant tourner la page car nous avons une longue route d’espérance à faire ensemble, sans toi et tes camarades aux idées des ténèbres.

Boumediene Sid Lakhdar

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Meskiana : trafic de psychotropes et malaise social

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Meskiana psychotropes

Trois jeunes individus ont été arrêtés, le 15 décembre 2025, à Meskiana (wilaya d’Oum El Bouaghi) par les services de la police judiciaire mobile, dans le cadre d’une affaire de trafic de substances psychotropes, a indiqué la Sûreté de wilaya.

L’opération a permis la saisie de 726 capsules de prégabaline et de 11 comprimés d’ecstasy, ainsi que d’une somme d’argent provenant de cette activité illégale. Les trois suspects, âgés de 28 à 30 ans, ont été présentés devant la justice et poursuivis pour possession, stockage et commercialisation illégale de psychotropes, conformément à la législation en vigueur.

Selon le communiqué de la Sûreté, l’enquête a été déclenchée à la suite d’informations faisant état de la vente de médicaments détournés de leur usage thérapeutique dans un commerce de la commune. Une phase de surveillance a permis l’interpellation d’un premier suspect, en possession de 103 capsules de prégabaline dosée à 300 mg. Les investigations ont ensuite conduit à l’arrestation de deux autres complices et à la perquisition de leurs domiciles, où ont été découvertes 40 plaquettes supplémentaires de capsules de prégabaline, 11 comprimés d’ecstasy (MDMA) et plusieurs emballages vides servant au conditionnement et à la distribution. Une fouille du commerce concerné a également permis la saisie de 12 capsules supplémentaires de prégabaline.

Au-delà de l’aspect judiciaire, cette affaire révèle un phénomène social préoccupant. La consommation et le trafic de psychotropes, en particulier de prégabaline, se sont fortement développés dans plusieurs villes algériennes. Ces substances sont souvent détournées de leur usage médical pour devenir une alternative à d’autres drogues, accessibles même à des jeunes en situation de précarité. Derrière ces réseaux se dessinent les conséquences directes du chômage, de l’absence de perspectives pour la jeunesse et d’un encadrement social insuffisant.

Le phénomène met également en évidence les limites du contrôle sur la distribution des médicaments, l’insuffisance des campagnes de prévention et l’absence de programmes de réhabilitation adaptés aux jeunes consommateurs. Si les arrestations sont nécessaires pour interrompre ces trafics, elles ne suffisent pas à résoudre un problème enraciné dans les déséquilibres économiques et sociaux.

À Meskiana, comme dans d’autres wilayas, la vigilance des forces de sécurité est indispensable, mais la lutte contre les psychotropes exige aussi une réponse globale : répression ciblée, politiques publiques de santé, accompagnement social et éducation préventive. Cette affaire illustre que le trafic de psychotropes n’est pas seulement un délit, mais un symptôme d’un malaise social durable auquel il faut répondre de manière structurée et durable.

Mourad Benyahia 

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« Marseille en grand ? N’importe quoi ! L’échec de Macron et des alliés ! » : LFI distribue son tract

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Des militants de LFI à Marseille.
Des militants de LFI à Marseille.

Le jour de la visite d’Emmanuel Macron à Marseille, les militants de La France insoumise (LFI) ont distribué dans toutes les stations du métro un tract intitulé « Bienvenue », dont le message principal est résumé dans ce titre sans détour : « Marseille en Grand ? N’importe quoi ! L’échec de Macron et des alliés ! ».

Le tract, clair et incisif, dénonce le plan présidentiel “Marseille en grand” comme un projet déconnecté des réalités locales. Il met en lumière les contradictions et les complicités politiques : le Parti socialiste qui vote le budget de la Sécurité sociale, l’abstention des écologistes, et l’accompagnement sans réserve des choix gouvernementaux par des alliés locaux.

Sur le terrain, les militants soulignent les impacts concrets dans les quartiers populaires. Précarité persistante, abandon du secteur culturel, et cas emblématique de la liquidation du Théâtre Toursky avec ses salariés licenciés illustrent le fossé entre annonces et réalité. Le tract invite les habitants à constater par eux-mêmes ces contradictions et à rester vigilants face aux politiques qui masquent les échecs sous des slogans et des inaugurations.

Distribué massivement dans le métro, le tract a suscité réactions et échanges. Certains passants, intrigués par le titre provocateur, se sont arrêtés pour lire et comprendre. Deux jeunes engagés dans la culture ont confié avoir cru aux promesses de Payan, avant de se rappeler de la situation dramatique du Toursky. Une dame, en lisant le tract et interpellée par le nom “Delogu” mentionné dans le document, a déclaré : « Je prends celui-là, les autres je ne les prends pas », illustrant l’impact immédiat du message sur le public.

À travers ce tract “Bienvenue”, LFI transforme les stations de métro en lieux de débat citoyen, confrontant les habitants à la réalité quotidienne des politiques municipales et nationales. Ce document rappelle que gouverner Marseille ne se limite pas à des annonces ou des projets pharaoniques, mais doit répondre aux besoins réels des habitants, à leur quotidien et à leurs luttes.

Mourad Benyahia 

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« Charles Péguy, le rempailleur de textes » de Jean-Michel Wavelet

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Jean-Michel Wavelet, Charles Péguy, le rempailleur de textes
Jean-Michel Wavelet, Charles Péguy, le rempailleur de textes

L’ouvrage de Jean-Michel Wavelet, Charles Péguy : Le rempailleur de textes, propose une exploration approfondie et rigoureuse de la vie et de l’œuvre de Charles Péguy, en restituant l’écrivain dans la totalité de sa trajectoire humaine, intellectuelle et morale.

Loin d’une approche purement littéraire, l’essai s’attache à faire émerger une figure profondément incarnée : celle d’un « fils de gueux », enfant d’une rempailleuse de chaises, marqué dès l’enfance par la pauvreté, la précarité et la proximité avec la vie ouvrière. Wavelet montre que cette « pauvreté de naissance » n’est ni un simple élément biographique ni un décor social, mais le creuset même d’une conscience politique et morale d’une extrême sensibilité.

L’engagement viscéral de Péguy en faveur de l’équité, de la fraternité et de la dignité du travail prend sa source dans cette expérience originelle. La pauvreté n’est jamais idéalisée, mais elle devient une mémoire vive, une référence constante à partir de laquelle l’écrivain pense le monde. Wavelet insiste sur cette « mémoire fidèle » des plus démunis, qui irrigue toute l’œuvre péguyienne et empêche toute complaisance à l’égard des abstractions idéologiques ou des compromissions sociales. Cette fidélité aux origines constitue l’un des fils directeurs majeurs de l’essai.

Le parcours de Péguy n’en est pas moins exceptionnel. Grâce à l’école républicaine et à l’action des « hussards noirs de la République », il bénéficie d’une véritable inversion du destin social. Wavelet souligne le rôle décisif de figures tutélaires, notamment celle de Théophile Naudy, présenté comme un authentique « tuteur de résilience ». Toutefois, cette ascension ne conduit jamais à une rupture avec le monde d’origine. Au contraire, elle renforce chez Péguy le sentiment d’une dette morale envers les humbles. L’auteur met ainsi en évidence l’indissociabilité de l’homme et de l’œuvre : la réussite intellectuelle n’efface pas la pauvreté initiale, elle la rend plus exigeante encore dans son inscription éthique.

C’est dans cette tension que se joue la première grande « rupture » analysée par Wavelet. Entre la vocation à enseigner et la nécessité de convaincre, entre une carrière institutionnelle sécurisée et l’engagement intellectuel, Péguy choisit résolument le combat d’idées. L’essai montre, à travers de nombreuses citations, que ce choix n’est ni accidentel ni romantique, mais profondément réfléchi. Le combat d’idées prime sur les ambitions de carrière ; la fidélité à l’idéal l’emporte sur le confort bourgeois. Péguy incarne ainsi une figure exigeante de l’intellectuel engagé, prêt à renoncer aux garanties sociales pour défendre une conception rigoureuse de la justice et de la fraternité.

Le titre de l’ouvrage, Le rempailleur de textes, condense avec force cette posture intellectuelle. En écho direct au métier maternel, il désigne la tâche que Péguy s’assigne : réparer, restaurer, redonner solidité et dignité aux mots et aux idées usés par les discours convenus, les slogans partisans et les conformismes intellectuels. Wavelet montre que cette entreprise se matérialise de manière exemplaire dans les Cahiers du hussard noir. Ces Cahiers ne sont pas seulement un support de publication ; ils constituent un véritable espace de liberté critique, conçu pour échapper aux dogmes, aux orthodoxies et aux enfermements idéologiques.

À travers les Cahiers, Péguy cherche à « connaître et mutualiser » les savoirs et les sensibilités, dans un esprit de dialogue exigeant. Wavelet insiste sur le fait que cette démarche vise explicitement à lutter contre le déséquilibre social et intellectuel de son époque. La pensée n’y est jamais séparée de l’expérience vécue, ni de la responsabilité morale. Ce refus de la spécialisation étroite et du cloisonnement idéologique confère aux Cahiers une portée qui dépasse largement leur contexte historique.

L’un des mérites les plus significatifs de l’essai de Jean-Michel Wavelet réside dans sa capacité à actualiser la pensée de Charles Péguy sans la trahir. L’auteur ne se contente pas de restituer une œuvre dans son temps ; il s’emploie à en montrer la résonance contemporaine. Les interrogations péguyiennes sur l’équité, l’engagement, la dignité et la morale publique trouvent un écho saisissant face aux crises de notre époque. En ce sens, Péguy apparaît comme un « héros moderne », non par héroïsation naïve, mais par la force de sa résistance éthique et de sa fidélité aux origines.

Wavelet développe cette actualisation en reliant explicitement la pensée péguyienne aux enjeux sociétaux et climatiques contemporains. Le refus du déséquilibre social, l’attention portée à la valeur du travail et la mémoire fidèle de la pauvreté deviennent des outils critiques face à l’individualisme dominant et à la logique de la consommation effrénée. L’éthique péguyienne, telle que la lit Wavelet, invite à une sobriété assumée, à une responsabilité collective et à une vigilance constante face aux formes modernes d’aliénation sociale et environnementale.

Cette actualisation passe également par une réflexion approfondie sur le rôle de l’école et de la transmission. Wavelet rappelle que, pour Péguy, l’école républicaine ne saurait être réduite à un instrument de promotion sociale ou d’adaptation économique. Elle constitue un lieu de formation morale, où s’apprennent la rigueur, la patience, le sens du temps long et la fidélité aux héritages. La figure des « hussards noirs » incarne cette exigence : transmettre, ce n’est pas produire de l’efficacité immédiate, mais former des consciences capables de durer, de résister et de discerner. En ce sens, la pensée péguyienne s’oppose frontalement aux logiques contemporaines de rentabilité, d’urgence et d’évaluation permanente, et propose une conception exigeante de l’émancipation intellectuelle.

C’est toutefois dans la distinction centrale entre la « mystique » et la « politique » que l’essai atteint son point d’aboutissement théorique. Reprise et approfondie par Wavelet, cette distinction constitue le cœur de la pensée de Péguy. La mystique désigne l’élan initial, la pureté de l’intention, l’idéal désintéressé qui fonde toute action authentique, qu’elle soit sociale, républicaine ou spirituelle. La politique, à l’inverse, correspond au processus par lequel cet idéal se dégrade progressivement en technique de pouvoir, en calcul stratégique ou en opportunisme partisan.

Wavelet montre que cette dégradation n’est pas accidentelle, mais presque inévitable si la vigilance se relâche. L’œuvre de Péguy agit alors comme un garde-fou permanent, rappelant sans cesse la nécessité de « prévenir la dégradation de la mystique en simple manœuvre politique ». Cette injonction morale traverse les époques et s’impose avec une force renouvelée dans un contexte contemporain marqué par le cynisme, la défiance et la crise de la parole publique.

Cette perspective confère également à l’œuvre de Péguy une dimension profondément pédagogique. Penser, chez lui, n’implique jamais un retrait du monde, mais une exigence de formation des consciences. Wavelet souligne ainsi que la rigueur intellectuelle constitue une condition première de l’émancipation collective, du discernement critique et de la responsabilité civique.

En reliant cette exigence de vigilance aux défis critiques du XXIᵉ siècle, Wavelet confère à Péguy une portée résolument intemporelle. L’éthique péguyienne, centrée sur la dignité humaine, la mémoire des plus démunis et la fidélité à l’idéal, devient une boussole pour penser une action politique et citoyenne qui ne renonce pas à l’intégrité. Péguy apparaît ainsi comme un tuteur moral et intellectuel, dont les écrits ne sont pas seulement à interpréter, mais à mobiliser.

En définitive, Charles Péguy : Le rempailleur de textes s’affranchit du statut de simple analyse érudite pour s’imposer comme une réflexion sociétale et philosophique de grande ampleur. Jean-Michel Wavelet y propose une lecture engagée et exigeante d’un auteur fondamental, en montrant comment la fidélité aux origines, la résistance éthique et la vigilance face aux dérives du politique peuvent nourrir une pensée vivante et opérante. Péguy n’y est pas figé dans le passé, mais offert comme une figure essentielle pour réinterroger le présent et réenchanter le politique à partir d’une exigence morale intacte.

Brahim Saci

Jean-Michel Wavelet, Charles Péguy, le rempailleur de textes, Paris, Éditions L’Harmattan, 2024.

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Johnny Hallyday : l’héritage secret des « chasseurs de tristesse »

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Makeda Ketcham
Makeda Ketcham. Crédit photo : DR

Johnny Hallyday n’est pas seulement né d’un prénom de scène et d’une histoire personnelle cabossée. Il est l’aboutissement d’une lignée à la fois improbable et flamboyante, où se croisent des cheminots belges, des danseuses étoile, un comédien dadaïste, un romancier-éthiopien, un musicien de dixieland, et une noblesse africaine oubliée par les récits officiels.

À travers « Il vient de là – La Saga des Hallidays » édité chez David Gaussen, Carol-Makéda Ketcham – fille de Desta et de Lee Halliday, celui qui donna son nom d’artiste à Johnny – recompose une saga familiale méconnue, presque romanesque, où l’enfance du petit Jean-Philippe Smet s’enracine dans un monde plus vaste que celui qu’on lui prêtait.

Beaucoup ont écrit sur Johnny ; très peu sur les siens. Autour de sa naissance, de son enfance et même de ses origines, les rumeurs ont longtemps prospéré. Par fidélité à son cousin, par besoin de vérité et par devoir envers ses ancêtres, Carol-Makéda Ketcham fouille les archives, exhume lettres, photos, certificats et documents inédits. Elle remonte les pistes familiales dispersées entre la Belgique, l’Allemagne, l’Éthiopie et le sud des États-Unis, révélant une constellation d’êtres passionnés, souvent blessés, toujours debout.

Dans ce livre, l’histoire commence bien avant Johnny. Elle reprend la trace de Clément Smet, cheminot belge mort en 1908 après un accident de locomotive, modèle silencieux de courage et de sacrifice. De ses fils, deux mourront durant la Première Guerre mondiale ; le troisième, Léon, marqué par ces drames, deviendra comédien dadaïste puis anarchiste. L’étrange ironie des destins fait qu’à travers Léon, l’esprit du spectacle, du contre-pied et de la rébellion artistique entrera dans la famille, comme une graine déposée pour un futur enfant à venir.

Le récit se déploie ensuite comme un faisceau de trajectoires. On y rencontre une actrice du cinéma muet, des danseuses étoiles formées dans l’univers exigeant des Ballets russes, un danseur de claquettes américain né d’un père journaliste et musicien de dixieland, mais aussi un écrivain et homme d’affaires, consul d’Éthiopie, issu d’une union improbable entre un missionnaire allemand et une noble africaine. Cette géographie humaine, étendue et mouvante, tisse les fondations de ce que sera plus tard l’identité de Johnny : un mélange de rigueur, de spectacle, de nomadisme et de mélancolie.

L’enfance de Johnny s’inscrit pleinement dans cette constellation. Élevé par sa grand-mère Hélène et ses cousines Desta et Menen, il découvre très tôt la discipline, l’art, et cette manière singulière d’avancer coûte que coûte. Leur appartement parisien n’est pas seulement un foyer : c’est un atelier de survie affective où les photos découpées, les trieurs d’archives et les lettres patiemment conservées racontent une lutte silencieuse pour maintenir vivante la mémoire familiale. On y transmet des valeurs : l’effort, la fidélité, l’amour de la scène, mais aussi cette pudeur face au malheur. Les femmes de cette maison ont cette expression : « chasseurs de tristesse ». Elles ne fuient pas la douleur ; elles la transforment en acte, en danse, en lumière.

Lee Halliday, danseur américain et père de Carol-Makéda, deviendra une figure déterminante pour le jeune Jean-Philippe. Sa rigueur physique, son sens du rythme, son approche quasi militaire de la scène influenceront profondément Johnny. Avant d’être l’idole d’un pays, il est un gamin de douze ans qui observe Lee répéter, travailler, se tenir droit. Lorsque lui-même monte pour la première fois sur scène, c’est vers ce modèle qu’il se tourne : il choisit de s’appeler Johnny Halliday, empruntant ce nom comme un talisman, un passeport vers sa propre métamorphose.

Le livre montre alors combien Johnny est le fruit d’un héritage plus vaste qu’on ne l’imaginait. Ses gestes, ses colères, sa tendresse maladroite, sa dévotion au public trouvent racine dans cette dynastie d’artistes, de voyageurs, de croyants obstinés en la vie malgré ses fractures. Rien de linéaire : des joies brèves, des morts injustes, des parcours interrompus, mais toujours, au milieu de ces éclats, une présence : la famille.

En donnant chair à ces vies oubliées, Carol-Makéda Ketcham éclaire l’homme derrière la légende. Elle montre que Johnny n’est pas seulement un chanteur devenu mythe ; il est l’enfant d’une longue chaîne de survivances. Ses ancêtres, dispersés sur plusieurs continents, ont légué un sens profond de la scène, un rapport charnel au courage, et cette manière de se relever chaque fois que l’existence se fait rude.

À la fin du parcours, l’image qui demeure est celle d’un arbre aux racines multiples, d’une famille qui traverse les guerres, les frontières, les époques, pour ne jamais perdre la lumière. Johnny Hallyday apparaît alors comme la dernière incarnation d’un peuple intime : celui des « chasseurs de tristesse », qui transforment la douleur en art, et l’art en vie.

Djamal Guettala 

Référence bibliographique :

Il vient de là – La Saga des Hallidays

Autrice : Makeda Ketcham

Éditions Gaussen, 15 octobre 2024

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PADA appelle à une amnistie générale des détenus politiques et d’opinion en Algérie

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Pour une Alternative Démocratique en Algérie (PADA) appelle, dans son communiqué, à la libération de tous les détenus d’opinion et à une amnistie générale.

PADA appelle à une amnistie générale, claire et sans ambiguïté, comme acte de rupture avec la spirale répressive qui mine la société et fracture la nation. Nul État ne peut durablement se maintenir en piétinant la conscience de ses citoyens, en criminalisant la parole, en poursuivant l’engagement pacifique, en faisant de l’expression une faute et de la divergence un délit.

Les grâces au compte-gouttes ne peuvent occulter la répression persistante et les informations inquiétantes provenant du pays. L’Algérie ne peut avancer sans un véritable apaisement qui exige la libération des détenus politiques et d’opinion, la cessation immédiate des arrestations arbitraires, des poursuites judiciaires, des atteintes répétées aux libertés fondamentales, ainsi que le respect plein et entier de la liberté de circulation, droit pour chaque citoyenne et citoyen d’entrer et de sortir librement du territoire national. La liberté d’opinion, d’expression, d’organisation et de manifestation ne sont pas des concessions gracieuses du pouvoir : elles constituent le socle même de toute légitimité politique et de toute vie nationale digne de ce nom.

Sur le plan juridique, cette amnistie doit couvrir l’ensemble des détenus d’opinion et s’accompagner de leur réhabilitation pleine et entière, incluant la levée de toute discrimination et leur réintégration effective dans leurs postes de travail, avec restitution de l’ensemble de leurs droits professionnels, sociaux et civiques. Elle doit aussi concerner les personnalités civiles et militaires déchues dont les condamnations relèvent davantage du règlement de comptes que d’une justice sereine. Elle doit également permettre, dans un cadre strictement encadré par le droit et l’intérêt général, des mesures de clémence pour des personnes liées aux violences de la décennie noire, notamment celles dont la libération relèverait de considérations humanitaires.

Le pouvoir doit cesser d’instrumentaliser la justice, d’enrôler juges et magistrats au service d’agendas politiques, de violer les lois nationales et internationales et d’user des arrestations comme des libérations sélectives un instrument de chantage, de mise au pas et de communication.

À titre non exhaustif, il doit engager sans délai la révision du procès de Larbâa Nath Iraten, symbole de graves dérives judiciaires, de violation du droit à un procès équitable et de l’usage de la justice comme instrument de répression politique.

La pratique d’une politique de “repentance” imposée à des citoyens dont le seul tort est d’exprimer leurs opinions et d’exercer leurs droits civiques et politiques est une pratique scélérate. Elle ressuscite, sous des formes modernes, l’héritage du Code de l’indigénat : l’idée qu’il existerait des sujets à corriger, à humilier, à mettre à genoux, au lieu de citoyens à respecter. Une telle logique est indigne d’un État national censé exprimer la souveraineté de notre peuple. Cette politique est une impasse historique. Elle ne protège ni l’État ni la Nation ; elle prépare le pire, nourrit les ressentiments, radicalise les colères, et fait le lit de toutes les dérives possibles. Aucun ordre durable ne naît de la peur, aucun avenir commun ne se construit sur l’humiliation et le bâillonnement.

L’Algérie n’a pas besoin de murs de prisons et de silences forcés. Elle a besoin de confiance, de justice, de liberté et de responsabilité collective. Elle a besoin d’un horizon politique ouvert, où le débat remplace la contrainte, où le droit supplante l’arbitraire, où la citoyenneté l’emporte sur la soumission.

Sur le plan politique, cette amnistie doit s’inscrire dans une ouverture démocratique réelle, assumée, fondée sur le respect du pluralisme et le rétablissement de l’expression politique et médiatique pour permettre le nécessaire débat national de sortie de crise.

PADA affirme avec gravité et détermination : il est encore temps de choisir la voie de la raison, du dialogue et de la démocratie. Mais le temps presse. L’Histoire ne pardonne ni l’aveuglement ni l’entêtement. Elle juge sévèrement ceux qui, par calcul ou par peur, refusent d’entendre la voix de leur peuple.

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Marwan Barghouti : sept agressions en 2 ans dans les prisons israéliennes

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Marwan Barghouti
Marwan Barghouti, prisonnier d'Israël. Crédit photo : @Ahmed Ashour

L’Autorité palestinienne des prisonniers et le Club des prisonniers palestiniens ont confirmé, le 16 décembre 2025, que Marwan Barghouti, membre du comité central du Fatah, a été victime de sept agressions violentes dans les prisons israéliennes depuis le début de la guerre à Gaza, il y a près de deux ans.

L’agression la plus récente remonte au 15 septembre 2025, un mois après qu’Itamar Ben-Gvir, ministre israélien de la Sécurité nationale, est entré dans la cellule de Barghouti pour le menacer.

Malgré ces violences répétées, l’avocat de Barghouti a pu lui rendre visite le lundi 15 décembre 2025. Il a constaté que le prisonnier se trouvait en état stable, pleinement conscient et vigoureux, bien que les séquelles physiques des agressions précédentes et les conditions de détention extrêmes continuent de peser sur lui. Les pratiques dénoncées incluent isolement prolongé et privation de nourriture, affectant l’ensemble des détenus palestiniens.

Les agressions ciblent particulièrement les dirigeants palestiniens lors des transferts entre prisons, notamment entre les sections d’isolement de Janot, Nafha et Rimmon vers les cellules du prison de Majdud. Ces déplacements sont encadrés par les unités spéciales « Nahshon », responsables d’attaques systématiques visant à intimider et fragiliser les prisonniers. Depuis l’accord de cessez-le-feu d’octobre 2024, le refus de libération des dirigeants palestiniens s’accompagne d’une pression psychologique constante, renforcée par l’isolement et les violences physiques, qualifiées par les organisations palestiniennes de stratégie d’« exécution lente ».

Aujourd’hui, près de 9 300 Palestiniens sont détenus dans les prisons israéliennes. L’Autorité palestinienne des prisonniers et le Club des prisonniers appellent la communauté internationale à agir, afin de mettre fin à ces pratiques, dénoncées comme des crimes de guerre et crimes contre l’humanité, et de garantir le respect des droits fondamentaux des détenus.

Marwan Barghouti reste un symbole de résistance et de persévérance, malgré les violences répétées et les conditions extrêmes qu’il endure. Sa situation illustre l’urgence d’une surveillance internationale renforcée et la nécessité d’un strict respect du droit humanitaire pour l’ensemble des prisonniers palestiniens.

Djamal Guettala 

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