27 novembre 2024
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France – Algérie : compter les sous ou contrer les dessous

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Drapeau Algérie France

Économie, diplomatie, histoire commune et conflits de mémoire, les relations entre la France et l’Algérie sont un enchevêtrement complexe, où chaque geste semble dicté par des intérêts mêlés de ressentiments et de dépendances.

Les deux nations oscillent entre coopération économique et tensions politiques, se rétrouvant tantôt autour de contrats énergétiques, tantôt autour de discussions épineuses sur leur passé colonial. Dans cette relation quasi-familiale – jamais simple, souvent houleuse – la question se pose : s’agit-il de compter les sous ou de conter les dessous ?

Depuis des décennies, la France et l’Algérie entretiennent une relation financière essentielle, marquée par des échanges commerciaux et des accords énergétiques stratégiques. Le gaz algérien, par exemple, alimente une part importante des besoins énergétiques français, et en retour, la France reste l’un des principaux investisseurs étrangers en Algérie. Les secteurs pétroliers, pharmaceutiques, agroalimentaires et bien d’autres représentent des milliards d’euros échangés chaque année. D’un point de vue économique, cette relation semble bien comptée, et parfois presque « comptée », chaque euro pesant dans la balance.

Pourtant, ces transactions financières sont loin d’être aussi simples qu’elles en ont l’air. À chaque contrat signé, à chaque nouvel accord, se cache une toile de fond complexe : l’héritage colonial, les différences de gouvernance, et les aspirations des nouvelles générations des deux côtés de la Méditerranée. En Algérie, la jeunesse est de plus en plus critique face aux accords économiques qu’elle perçoit souvent comme des partenariats déséquilibrés. Quant à la France, elle doit concilier ses propres besoins énergétiques et commerciaux avec des attentes de transparence et de respect mutuel.

Sur le plan politique, les dessous de cette relation s’avèrent bien plus épineux. Des deux côtés, la question de la mémoire coloniale pèse lourdement sur les rapports officiels. Les blessures du passé ne se sont jamais vraiment référées, et chaque initiative diplomatique se heurte à ce mur invisible mais omniprésent : le besoin de reconnaissance, de justice et de réparation. Les débats se poursuivent autour de la reconnaissance des crimes coloniaux, de l’exigence d’excuses officielles, et du retour des archives et des objets du patrimoine historique.

Les déclarations diplomatiques oscillent souvent entre tentatives d’apaisement et maladresses, chaque mot pesé ou de travers ravivant les sensibilités des deux côtés. En Algérie, certaines voix estiment que la France continue de vouloir « contrôler » et influencer la politique interne par le biais de la diplomatie, tandis qu’en France, on entend aussi des qui s’interrogent : pourquoi rouvrir ces drames quand il s’ agit de construire un avenir partagé ?

Le président français, dans plusieurs discours, a tenté de faire des gestes symboliques, reconnaissant des épisodes douloureux de la guerre d’Algérie et proposant des initiatives pour le « travail de mémoire ». Mais la perception reste mitigée. Pour certains, ces gestes semblent insuffisants ; pour d’autres, ils sont politiquement calculés, dans un contexte où la question de l’immigration algérienne et des liens historiques influencent encore les élections en France.

Pour la France comme pour l’Algérie, compter les sous est vital – l’économie des deux pays dépend de ces échanges. Mais ce n’est qu’une partie de l’équation. Tant que les dessous historiques ne sont pas entièrement abordés, les non-dits continueront de colorer chaque accord et chaque contrat d’un fond de défiance. La difficulté est d’envisager une relation économique tout en étant capable d’aborder de façon franche et apaisée les questions de mémoire.

Les nouvelles générations franco-algériennes éprouvent un besoin de réconciliation authentique, dénuée des anciennes rancœurs. En France comme en Algérie, elles réclament un dialogue ouvert, respectueux, où les récits ne sont plus en concurrence mais complémentaires. Elles aspirent à une relation apaisée, où la coopération ne se résume pas à des transactions économiques, mais s’étend à un partenariat culturel et humain.

Pour que les choses changent véritablement, il faudra peut-être arrêter de « compter » et de « contrer » et repenser cette relation sous un angle neuf, sans marchandage ni non-dits. Il s’agit d’oser imaginer une France et une Algérie qui, fortes de leur passé commun, parviennent enfin à aller de l’avant, sans ce poids constant de la suspicion. Un avenir où l’on n’a plus besoin de décompter les euros ni de raviver les vieux dossiers, mais où l’on peut coopérer en égaux, avec transparence et respect.

Ainsi, la question reste ouverte : France-Algérie, combien de sous comptés, combien de dessous à raconter, avant de trouver enfin le ton juste ?

Dr A. Boumezrag

La résistante Madeleine Riffaud, journaliste et poétesse, est morte

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Madeline Riffaud
Madeleine Riffaud. Photo : https://ahavparis.com/

Madeleine Riffaud, sage-femme de profession, était entrée dans la Résistance en 1942 au sein des Francs-tireurs et partisans (FTP).

La résistante Madeleine Riffaud est morte, mercredi 6 novembre, à l’âge de 100 ans, a annoncé son éditeur Dupuis, confirmant une information du quotidien L’Humanité (Nouvelle fenêtre), pour lequel elle fut correspondante de guerre. « Une héroïne s’en est allée. Son legs : tout un siècle de combats », a salué le journal, dans lequel elle a couvert les guerres d’Algérie et du Vietnam. 

Le 23 août, jour de ses 100 ans, Madeleine Riffaud avait publié le troisième et dernier tome de Madeleine, résistante (éditions Dupuis), ses mémoires de guerre en bande dessinée, avec Dominique Bertail au dessin et Jean-David Morvan au scénario.

Ce dernier lui a rendu hommage sur Facebook(Nouvelle fenêtre) en publiant une photo d’elle, âgée, posant sur un canapé. « Elle était de plus en plus endormie ces derniers temps, c’était difficile. Elle a eu une vie de bataille et de souffrance, mais ce matin, elle a simplement arrêté de respirer », a déclaré le scénariste à Libération(Nouvelle fenêtre).

« Rainer » durant la Seconde Guerre mondiale

Née en 1924 dans la Somme, cette fille unique d’instituteurs rejoint la résistance à 16 ans. Elève sage-femme à Paris, elle devient agent de liaison avec ses compagnons communistes des Francs-tireurs et partisans (FTP) de la faculté de médecine. Elle devient « Rainer », en hommage au poète allemand Rainer Maria Rilke, pour signifier qu’elle « n’est pas en guerre contre le peuple allemand, mais contre les nazis ».

Le massacre d’Oradour-sur-Glane, un village de sa jeunesse décimé en juin 1944, provoque son passage aux armes. Le 23 juillet, elle assassine de deux balles dans la tête un gradé nazi sur le pont de Solférino, à Paris. « Je regrette, d’ailleurs, d’avoir tué cet homme. Tu es là. Tu regardais la Seine. Est-ce qu’on peut être méchant, quand on regarde la Seine ? C’était peut-être un type bien. Mais ça… Bon, c’est la guerre », disait-elle.

Correspondante de guerre au Vietnam

Après la Libération, elle veut intégrer l’armée, mais n’a pas 21 ans. Son engagement s’arrête là. Sans nouvelle de ses amis déportés, hantée par le souvenir des geôles, elle plonge dans la dépression comme elle le raconte dans On l’appelait Rainer. Touché par sa détresse, Paul Eluard la prend sous son aile, préface son recueil de poèmes Le Poing fermé, en 1945. Il l’emmène chez Picasso qui la peint – petit visage déterminé encadré par une chevelure brune et épaisse –, lui présente l’écrivain Vercors.

Elle débute ensuite à Ce soir, journal communiste dirigé par Aragon. Puis, pour L’Humanité, elle couvre la guerre en Indochine où Ho Chi Minh la reçoit comme « sa fille ». Elle part clandestinement en Algérie où elle échappe à un attentat de l’OAS (Organisation de l’armée secrète). Elle dénonce la torture pratiquée à Paris contre les militants du FLN (Front de libération nationale). Puis elle repart au Vietnam et couvre, pendant sept ans, la guerre. A son retour, elle travaille comme aide-soignante dans un hôpital parisien et dénonce, dans Les Linges de la nuit, vendu à un million d’exemplaires, la misère de l’Assistance publique.

Francetvinfos

« Houris » de Kamel Daoud : le courage de braver l’interdit

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Houris

Le but de cette chronique n’est pas de nous jeter dans l’arène du combat qui fait rage entre les partisans de Kamel Daoud et ses détracteurs, mais de donner un avis sur « Houris », le livre qui lui a valu le prix Goncourt.

Ce que d’aucuns semblent ignorer, c’est qu’en osant traiter d’un sujet lié à la décennie 1990, Kamel tombe sous le coup d’une loi qui le condamnerait à cinq ans de prison ferme si jamais l’idée folle de rentrer au pays le prenait. Par cette œuvre, Kamel sait qu’il se condamne à l’exil. Il devient ainsi le porte-voix lucide de nos coups de gueule contre le pouvoir et les islamistes.

Comme on s’en doutait, « Houris » est un rétroviseur ajusté sur « la guerre contre les civils » et non pas la guerre civile comme il est coutumier de la désigner. Le nombre de 200 000 morts ne donne pas la distribution entre les victimes. Combien de militaires sont tombés et combien de tangos ont été éliminés ? On ne le saura jamais ! car ces deux belligérants se sont adonnés à un jeu de massacre des civils, chacun essayant de les faire endosser à l’autre. Il est quasiment impossible que le nombre de militaires tués dépasse quelques milliers, comme il est tout aussi improbable que le décompte des victimes islamistes dépasse la dizaine de milliers. L’écrasante majorité des victimes sont des civils. Et là se pose l’éternel question « qui a tué qui ». Se réfugier dans la sempiternelle formule « ceux sont des Algériens qui ont tué d’autres Algériens » ne suffit pas, ne suffit plus !

Même si, on a un peu de mal (je parle pour moi, évidemment) à s’accrocher à l’histoire dès les premières pages, on est vite rattrapé par le style poétique de notre intellectuel. À tel point que le livre se dévore d’une traite.

À travers l’histoire d’Aube, le personnage principal, c’est le destin peu enviable de la femme musulmane, en général, et de l’Algérienne, en particulier, qui est superbement décrit.

Non seulement Kamel réussit à nous replonger dans toutes les horreurs de la décennie noire, mais il le fait en ciselant les mots avec une précision d’horloger. Même les scènes les plus cruelles sont mises en relief avec une phraséologie poétique. Seul le verbe égorger (par ce qu’il n’a pas de synonyme) domine tout au long du texte. Mais ne faut-il pas appeler un chat, un chat après tout ? Nous le savons tous, et qui peut décemment l’oublier, des rivières de sang ont coulé, des jeunes filles violées, des femmes éventrées, des vieux, des jeunes, des femmes, des enfants, des bébés ont été trucidé san états d’âme. Toutes les composantes de la société ont payé le prix fort dans cette guéguerre stupide.

Alors comment diable ose-t-on nous interdire de nous souvenir en faisant en sorte de faire semblant que la décennie 1990 n’a jamais existé dans l’histoire du pays ? À l’allure où vont les choses, on va bientôt la supprimer du calendrier en la faisant enjamber par les années 1980 ! Ils en sont capables !

Pour dire un mot sur les polémiques, certains de nos intellectuels les plus respectés se sont lancés dans des diatribes inimaginables contre l’auteur sans même, de leurs propres aveux, avoir lu ou feuilleté le livre, allant jusqu’à traiter l’auteur « d’indigéniste » ! ?

Ce n’est pas sérieux ! Et, à mon avis, le sens donné par notre intellectuel à ce qualificatif est diamétralement opposé à son sens absolu !

« Houris » est une symphonie mélancolique angoissante par sa justesse de ton sur fond de perfection syntaxique !

Bravo et Félicitations Kamel ! Merci de la fierté que tu distille en nous chaque fois que tu dénonces la bêtise des hommes !

D’aucuns te reprochent certains dérapages, mais après tout, qui peut prétendre à une dialectique linéaire en permanence ? Surtout dans ce monde virtuel où la moindre information est noyée dans un océan d’intox.

Kacem Madani

Quel scénario pour la «saison 2» de Donald Trump au Moyen-Orient ?

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Trump et Netanyahu

Le Premier ministre israélien Netanyahu a été l’un des premiers dirigeants à saluer la victoire de Donald Trump, le félicitant pour « le plus grand retour de l’Histoire ». Après plus d’un an de guerre à Gaza, alors que le conflit s’est étendu dans la région et que plane toujours la menace d’une confrontation avec l’Iran, quelles peuvent être les conséquences de la victoire de Donald Trump ?

L’administration démocrate Biden-Harris qui vient d’être congédiée par les électeurs américains, s’était enfermée dans une impasse au Proche-Orient. Avec un soutien continu à Israël dans sa guerre à Gaza sous la forme de milliards de dollars d’armes et de munitions, avec des critiques parfois sévères adressées à Benyamin Netanyahu et à son gouvernement, mais sans pression suffisante pour imposer un cessez-le-feu.

Ce mercredi 6 novembre, le Premier ministre israélien s’est précipité sur les réseaux sociaux pour féliciter Donald Trump. Dans un message dithyrambique, Benyamin Netanyahu a salué « le plus grand retour de l’Histoire » et « un puissant ré-engagement » dans l’alliance entre les deux pays.

Jérusalem

Avec le retour du républicain à la Maison Blanche, le gouvernement israélien peut espérer une politique américaine aussi favorable que lors du premier mandat-Trump (2016-2020). À l’époque, les États-Unis ont déchiré l’accord sur le nucléaire iranien et rétabli des sanctions visant Téhéran au nom d’une politique de la « pression maximale » sur la République islamique et ses alliés régionaux.

C’est aussi durant cette période que Washington a reconnu la souveraineté israélienne sur le Plateau du Golan (conquis sur la Syrie en 1967) et reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël, balayant d’un revers de main le droit international comme les revendications palestiniennes.

Malgré ce bilan, le président palestinien Mahmoud Abbas a réagi prudemment au résultat de la présidentielle américaine 2024 en se disant confiant de voir Trump soutenir « les aspirations légitimes » des Palestiniens.

De son côté, le Hamas palestinien – qui a conçu et lancé les attaques meurtrières du 7 octobre 2023 en Israël – affirme que sa position envers Trump « dépendra de sa politique à l’égard des Palestiniens » tout en déplorant que les administrations américaines successives ont toujours soutenu« l’occupation sioniste ».

RFI

Koukou éditions exclue du Sila 2024

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Arezki Aït Larbi
Le ministère de la Communication interdit à Koukou éditions de participer au Sila.

Après une série d’interdictions arbitraires, Koukou Editions est, une nouvelle fois, exclu du Sila, sans motif légal. Notre plainte pour ‘’abus de fonction, attentat à la liberté, et empiètement sur les prérogatives du pouvoir judiciaire’’ contre le président de la Commission de censure du ministère de la Culture qui a ordonné cette forfaiture, et le commissaire du Sila qui l’a exécutée, vient d’être rejetée par le juge d’instruction du tribunal d’Hussein Dey.

Son ‘’refus d’ouvrir une information judiciaire’’ a été notifié à l’un de nos avocats par SMS ! En décidant de faire appel de cette décision devant la chambre d’accusation de la Cour d’Alger, Koukou Editions est déterminé à aller jusqu’au bout de la procédure, même si l’issue en est incertaine.

Malgré le secret qui entoure ces opérations, le groupuscule extrémiste qui a pris en otage le ministère de la Culture commence à tomber le masque et révéler les leviers idéologiques qui l’animent. Chef officiel de cette secte, M. Tidjani Tama, directeur du Livre et président de la Commission de censure, est un personnage bien singulier.

Militant communiste par accident à la fin des années 80, islamiste par opportunisme dans les années 1990, sa fascination pour les idéologies totalitaires est devenue une feuille de route qui va transformer une institution culturelle respectable, en Kommandantur chargée de contrôler les lectures des Algériens à l’aune de ses fantasmes.

Le palmarès du préposé à l’inquisition est déjà très lourd. Au Sila, la propagande wahhabite outrageusement subventionnées par les pays du Golfe occupe une grande partie des stands. ‘’Mein Kampf’’ d’Hitler et les ‘’Mémoires’’ de Mussolini traduits vers l’arabe par un éditeur égyptien y sont exposés depuis 2016, et leurs auteurs présentés comme des ‘’modèles de réussite sociale’’. Au moment où Eric Zemmour, leader d’extrême droite condamné par la justice française pour ‘’provocation à la haine raciale’,’ était à Tel Aviv pour encourager l’armée israélienne dans son génocide contre le peuple palestinien, son dernier livre était à l’honneur lors du Sila 2023.

Cette bienveillance de la Commission de censure pour des auteurs controversés, contraste avec le harcèlement qui cible Koukou Editions. Objectif : bâillonner les auteurs progressistes, notamment algériens – universitaires, écrivains, moudjahidine, avocats, médecins, journalistes … – qui n’ont pas renoncé à leur devoir de critique sociale et de réflexion autonome.

Depuis quelques mois, la répression contre les publications de Koukou Editions tend à se généraliser pour prendre une allure inquiétante. A Bougie, la police est intervenue, le 29 juin dernier dans la librairie Gouraya, pour interrompre brutalement la présentation d’un livre. Quelques jours plus tôt, c’est le directeur … du Commerce (!) qui avait saisi plusieurs exemplaires d’un autre livre jugé ‘’non conforme aux enseignements de notre religion’,’ car il propagerait ‘’des idées empoisonnées’’ ! A sa décharge, le taliban de poche a assumé l’ignominie en délivrant un procès-verbal qui atteste la forfaiture.

L’article 54 de la Constitution est pourtant clair : ‘’L’activité des publications (…) ne peut être interdite qu’en vertu d’une décision de justice’’. Face à ces violations récurrentes de la loi fondamentale, les autorités concernées, notamment les ministres de la Culture, de l’Intérieur et de la Justice, dont la responsabilité politique est engagée en première ligne, ne peuvent se complaire dans une indifférence complice. S’il s’agit d’actes isolés de nervis incontrôlés, il est grand temps d’y mettre un terme par un rappel à l’ordre républicain et au respect de la Constitution. S’il s’agit d’une nouvelle inflexion autoritaire et obscurantiste qui fait fi de la légalité pour piétiner les droits et les libertés des citoyens, il faut désormais l’assumer sans faux-fuyants.  

Dans ce clair-obscur propice à tous les dérapages, Koukou Editions ne se laissera pas intimider par les miliciens de la pensée, et continuera d’opposer la force du droit à l’arbitraire des sectes en cagoule. 

Alger, le 6 novembre 2024

Arezki Aït-Larbi

Directeur de Koukou Editions.  

L’échec du centrisme et la montée de la droite radicale

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Trump

Le paysage politique mondial traverse une crise sans précédent, marquée par une polarisation croissante et une remise en question du centrism, jadis considéré comme un modèle d’équilibre et de stabilité. L’échec des partis centristes à répondre aux réalités économiques et sociales actuelles a permis à la droite radicale d’occuper le terrain, se nourrissant du mécontentement populaire.

Ce phénomène, observable dans de nombreuses démocraties occidentales, révèle une dynamique politique complexe qui mérite une analyse approfondie pour comprendre l’effritement de l’ordre établi et la montée de forces politiques qui, tout en prétendant incarner un changement, n’en sont que des manifestations régressives.

1. Le centrisme : une voie médiane qui a perdu son utilité

Traditionnellement, le centriste se positionne comme un conciliateur des divergences politiques, un pragmatique capable de maintenir l’équilibre entre les forces opposées. Il incarne une forme de raison modérée, capable de concilier le capitalisme néolibéral et une vision sociale modérée. Les figures emblématiques de ce modèle incluent Bill Clinton et Tony Blair, qui dans les années 1990 semblaient avoir trouvé la recette du succès en associant politique économique libérale et justice sociale.

Cependant, cette approche a largement perdu de sa crédibilité et de son efficacité. Le centriste se trouve désormais déconnecté des préoccupations quotidiennes des citoyens. En raison de son incapacité à résoudre les crises sociales et économiques — comme l’augmentation des inégalités, la précarisation du travail, et le déclin des services publics — il est perçu comme défaillant.

Les partis centristes, plutôt que d’adopter des réformes profondes, ont privilégié des compromis qui n’ont servi qu’à maintenir un statu quo inégalitaire.

La promesse d'une démocratie équilibrée a été éclipsée par un échec flagrant à adapter le système face aux enjeux contemporains de la mondialisation. 

2. La droite radicale : une réaction populaire au centrisme échoué

L’échec des partis centristes a ouvert un espace politique où la droite radicale a prospéré, alimentée par la colère et le désenchantement des électeurs. Ce phénomène a été particulièrement visible avec l’ascension de leaders populistes tels que Donald Trump, Marine Le Pen, Viktor Orbán et Jair Bolsonaro.

Ces figures ont su capter l’angoisse des classes populaires en dénonçant l’establishment mondialiste et en prônant un retour aux valeurs nationales. Les partis d’extrême droite se sont nourris des fractures sociales et économiques.

En stigmatisant des boucs émissaires tels que les migrants, les minorités ou les institutions supranationales comme l’Union européenne, la droite radicale a donné une voix aux déshérités de la mondialisation. Leur discours populiste, centré sur l’isolement et la peur de l’autre, a permis de créer une opposition simpliste entre « les vrais citoyens » et « les élites corrompues », tout en proposant des solutions souvent régressives et simplistes à des problèmes structurels complexes.

3. La droite radicalisée : une régression dangeureuse

Bien que la droite radicale se présente comme une réponse aux défaillances du système politique traditionnel, elle ne fait que proposer une solution régressive. Plutôt que d’affronter les causes profondes de la crise — la concentration des richesses, l’effritement de la cohésion sociale et la précarisation des populations — elle préfère stigmatiser des groupes vulnérables et exacerber les divisions internes.

Les discours nationalistes, les appels à la fermeture des frontières et la méfiance vis-à-vis des institutions démocratiques ont créé un climat propice à l’ethnocentrisme et au rejet de l’autre, sans jamais s’attaquer aux racines des inégalités. Le danger est que ces partis, tout en proposant un nationalisme de plus en plus marqué, déstabilisent les fondements démocratiques, mettant en péril la tolérance et l’inclusion. Leur stratégie, fondée sur la division et la peur, n’apporte aucune solution à la dégradation du système capitaliste mondial, et contribue même à amplifier les fractures sociales et économiques.

4. L’échec de Kamala Harris : une illustration de l’impuissance du centrisme

La défaite de Kamala Harris lors des élections de 2024 incarne l’échec de l’idéologie centriste dans son incarnation contemporaine. En cherchant à satisfaire à la fois les conservateurs et les progressistes, Harris a échoué à proposer une vision cohérente et radicale face aux défis sociaux et environnementaux.

Ses tentatives de conciliation, comme ses compromis sur l’assurance santé ou le Green New Deal, ont non seulement aliené la gauche progressiste mais renforcé l’image d’un pouvoir prêt à céder aux pressions des puissances conservatrices et des intérêts financiers.

Dans ce contexte, la véritable opposition démocratique, bien qu’oubliée par le système médiatique et électoral, est représentée par des figures comme Jill Stein ou Cornel West, qui incarnent une voie alternative plus fidèle aux idéaux progressistes. Ce constat démontre que le centriste, tout comme le néolibéralisme qu’il défend, est désormais dépassé et incapable de répondre aux aspirations populaires.

5. Le système électoral et la faillite des alternatives : une fausse opposition

Ce qui est particulièrement tragique dans cette dynamique, c’est l’impossibilité pour des alternatives réelles d’émerger dans le cadre du système électoral actuel. Les candidats tiers comme Jill Stein ou Cornel West, qui offrent des perspectives radicales mais inclusives, sont systématiquement marginalisés, leurs voix étouffées par un système médiatique qui favorise une fausse opposition entre deux variantes du même modèle néolibéral.

Ce système électoral verrouillé empêche de véritables transformations, en réduisant le choix politique à une alternative entre le néolibéralisme « progressiste » et un néolibéralisme « totalitaire », incarné par des figures comme Donald Trump.

6. Appel à une réinvention politique radicalement nouvelle

L’échec du centriste et la montée de la droite radicale ne sont que des symptômes d’une crise bien plus profonde du système politique et économique mondial. Le temps des compromis et des demi-mesures est révolu. Il est impératif de penser à des solutions radicales et progressistes qui adressent les causes structurelles des inégalités sociales et économiques. Cela implique de repenser la démocratie en termes de justice sociale, de redistribution des richesses et de rétablissement des principes fondamentaux de l’État de droit.

Seule une réinvention profonde et inclusive de la politique pourra répondre aux défis contemporains sans céder aux sirènes du populisme réactionnaire. Le monde est aujourd’hui confronté à une lutte entre la continuité d’un système néolibéral qui a échoué et une droite radicale qui exacerbe les divisions. L’enjeu est de réinventer une voie démocratique qui puisse restaurer l’unité sociale et garantir un avenir plus juste pour tous, loin des logiques de division et de repli.

Bouzid Amirouche

Et sinon à Gaza ?

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Gaza
Le peuple palestinien de Gaza bombardé et affamé sous le regard des 22 pays arabes

Le chiffre de 43 000 morts palestiniens sous les bombes israéliennes ne choque plus personne. Et ne fait plus l’actualité. Gaza où la vie est une mort lente n’intéresse plus les médias du monde ni les lecteurs.

The Lancet a publié un article dans lequel il estimait qu’environ 186 000 décès au total étaient dû à la guerre dans la bande  de Gaza. Le chiffre est particulièrement effrayant, insoutenable pour seulement une année de guerre. Et ce n’est pas fini !

La mort ordinaire d’un peuple exterminé par une armée suréquipée par la première puissance mondiale laisse indifférente l’humanité.

Incapable d’enrayer la machine de la mort lancée par Benyamin Netayahu, chaque pays est désormais rendu à s’occuper de ses petites affaires et combines internes.

Les pays arabes, notamment les richissimes monarchies ne font même plus l’effort de faire semblant de condamner. Ou de s’énerver. La fantomatique Ligue arabe, placée sous la botte de dictateurs en couronnes ou en casquette, a montré sa couardise. Israël a interdit l’Unrwa qui apporte le peu d’aide aux réfugiés ! Qui s’en soucie ? Même l’Onu est incapable d’influer en quoi que ce soit dans cette guerre.

Près de 2 millions de Gazaouis dorment sous des taudis dans une bande de Gaza dévastée.

Des enfants sont brûlés vifs par les bombardements israéliens ? L’apocalypse s’invite chaque heure devant ce peuple déhumanisé par l’ennemi. Qui s’en émeut ? Silence on tue à Gaza par les bombes. Par la faim et les maladies. On tue aussi au Liban. Comme au Soudan et dans l’Azawad ou en Ukraine. Pendant ce temps, le monde regarde le sacre de Donald Trump.

L’arrivée de ce nervi de la politique à la Maison Blanche est sans doute un moment de bascule du monde dans l’inconnu. Tout le premier ban et l’arrière-ban des dictateurs et présidents de dictatures les plus abouties ont salué le 47e président des Etats-Unis.  

Pendant ce temps donc, des dizaines de milliers d’enfants et de femmes palestiniens sont affamés, sans le toit et à la merci des bombes et des humiliations des soldats israéliens. Tous les cris d’alarme de l’ONU et des organisations des droits humains se sont brisés devant le cynisme froid du premier ministre israélien et de ses soutiens d’extrême droite.

Après avoir rendu Gaza à l’état du Moyen âge, l’armée israélienne s’emploie à faire de même pour le Liban. Au moment où les républicains, les évangéliques et autres millénaristes américains célèbrent l’arrivée de leur champion à la Maison Blanche, l’armée israélienne a lancé mercredi 6 novembre un nouvel appel aux habitants de la banlieue sud de Beyrouth pour qu’ils évacuent deux secteurs où elle va mener des frappes aériennes.

Ce jour, cette nuit donc un peuple fermera les yeux sous les bombes israéliennes. Ailleurs, dans le monde, l’horloge de l’humanité continue, dans l’indifférence générale, de tourner dans le sens inverse du temps.

Hamid Arab

États-Unis : Donald Trump annonce sa victoire à la présidentielle

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Trump

Donald Trump est donné en tête dans la course à la Maison Blanche face à Kamala Harris. Deux présidents, Emmanuel Macron et Benyamin Netanyahu, l’ont déjà félicité pour sa victoire.

« Aujourd’hui, nous écrivons l’Histoire. » Donald Trump a revendiqué sa victoire à l’élection présidentielle américaine depuis la Floride, mercredi 6 novembre. « Je remercie les électeurs de m’avoir élu 47e président », a-t-il déclaré alors que les résultats définitifs sont toujours attendus.

Si le candidat républicain a tenu ce discours, il lui manque trois grands électeurs pour avoir la majorité (fixée à 270). Donald Trump dispose de 267 des 270 voix électorales nécessaires pour remporter la Maison Blanche. Et il est en tête dans les élections clés qui restent à déterminer, notamment dans le Etats du Michigan et du Wisconsin.

Sans même attendre lannonce des résultats officiels, deux présidents ont déjà félicité le nouveau président américain.

« Félicitations pour le plus grand retour de l’histoire ! », a écrit le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu sur X. « Votre retour historique à la Maison Blanche offre un nouveau départ pour l’Amérique et un puissant réengagement envers la grande alliance entre Israël et l’Amérique. »

Le président français Emmanuel Macron a posté sur X : « Prêts à travailler ensemble comme nous avons su le faire pendant quatre ans. Avec vos convictions et les miennes. Dans le respect et l’ambition. Pour plus de paix et de prospérité. »

Si l’on sait les raisons piur lesquelles le premier ministre israélien est l’un des premiers à se réjouir de la victoire de Donald Trump, on ignore pourquoi le président français s’est-il empressé de féliciter Trump ? A croire qu’il a des choses à se reprocher !

Trump, dont la carrière politique a été définie par la division et l’acrimonie, selon Associated Press, a déclaré au public lors de sa soirée électorale mercredi matin qu’il était « temps de s’unir » en tant que pays.

« Il est temps de mettre derrière nous les divisions des quatre dernières années », a déclaré M. Trump. « Il est temps de s’unir. »

« Nous devons donner la priorité à notre pays pendant au moins un certain temps », a-t-il ajouté.

Avec agences

Donald Trump en passe de devenir le prochain président des Etats-Unis

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Trump
Trump président des USA.

Le républicain Donald Trump creuse l’écart devant la démocrate Kamala Harris. Le fantasque candidat de toutes les droites réactionnaires est pour l’instant en tête dans la course aux grands électeurs face à Kamala Harris.

Les résultats finaux vont tomber dans quelques minutes mais déjà Donald Trump a remporté deux Etats décisifs pour son duel face à Kamala Harris et les républicains ont pris le contrôle du Sénat, renforçant encore davantage la confiance qui règne mercredi dans son camp.

Ce matin de nombreux médias américains annoncent déjà la victoire de Donald Trump.

Les bureaux de vote ont fermé dans tous les États-Unis avec la fermeture des derniers bureaux de vote en Alaska à 6h TU. Des millions de personnes ajoutent leurs voix aux plus de 80 millions de bulletins déjà déposés de manière anticipée ou envoyés par voie postale, pour cette élection présidentielle.

Selon les projections de médias américains, le républicain Donald Trump est donné vainqueur de nombreux États dont la Floride et l’État clé du Caroline du Nord et remporte près de 247 grands électeurs, tandis que la démocrate Kamala Harris est créditée de 214 grands électeurs avec notamment l’État de New York et la Californie.

Pour la première fois en quatre, les républicains sont majoritaires au Sénat. Grâce à leur victoire en Virginie-Occidentale et dans l’Ohio, le parti de Donald Trump est garanti de contrôler au moins l’une des deux chambres du Congrès l’an prochain.

En Europe, la panique commence à gagner de larges pans de la classe politique. L’extrême droite, elle, est aux anges. Le Premier ministre hongrois nationaliste Viktor Orban, inconditionnel de Donald Trump, se réjouit sur Facebook des premiers résultats : « en route vers une belle victoire », lance-t-il, apparaissant devant un écran de télévision affichant le comptage des voix aux États-Unis.

Beaucoup d’interrogations sont posées sur la manière dont le prochain président américain gérera les conflits qui rongent le monde : la question palestinienne, la guerre en Ukraine viennent en premiers, il y a ensuite la Chine qui prend de l’influence en Asie… Une chose est sûre : Donald Trump regarde avant tout les intérêts de son pays avant ceux du monde. Comme l’ont fait au demeurant tous les présidents américains avant lui.

Les États-Unis ont décidé mardi 5 novembre 2024 qui de Kamala Harris ou de Donald Trump entrera à la Maison Blanche, au terme d’une campagne d’une tension inouïe, indécise jusqu’à la dernière minute.

Membre du Parti républicain, Trump a été le 45ᵉ président des États-Unis, du 20 janvier 2017 au 20 janvier 2021.

Avec agences

ONU : mener l’Humanité au paradis ou sauver le monde de l’enfer ?

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Gaza
L'ONU incapable de toute pression sur l'armée israélienne à Gaza.

Dans l’histoire tourmentée du conflit israélo-palestinien, le rôle des Nations unies apparaît comme une scène d’interminables promesses de paix et d’efforts avortés.

Alors que la Palestine tente depuis des décennies d’obtenir une reconnaissance pleine et entière, la question de l’inclusion et de l’exclusion des acteurs en jeu ne fait que souligner les contradictions internes de cette organisation censée protéger la paix mondiale. 

Les mots de l’ancien secrétaire général de l’ONU, Dag Hammarskjöld, résonnent ici avec force : « Les Nations Unies n’ont pas été créées pour mener l’humanité au paradis, mais pour la sauver de l’enfer. »

Pourtant, à voir le blocage perpétuel de l’ONU sur cette question, on pourrait se demander si elle n’a pas simplement échoué à nous éloigner du chaos.

Le débat autour de la Palestine et d’Israël au sein de l’ONU semble figé dans un dilemme kafkaïen : faut-il inclure la Palestine en tant qu’État membre, tout en excluant Israël, ou maintenir les deux dans un équilibre instable ? En 2012, la Palestine obtenait le statut d’État observateur non-membre, une avancée symbolique mais bien insuffisante aux yeux de ses défenseurs. Israël, de son côté, reste un membre à part entière, mais son statut se voit sans cesse remis en cause par des appels à des sanctions et résolutions qui finissent systématiquement au point mort. Cette inclusion « asymétrique » brouille les pistes : l’ONU peut-elle réellement agir en arbitre neutre, ou se contente-t-elle de distribuer des rôles dans une impasse politique ?

Dans ce contexte, la mainmise des grandes puissances occidentales, États-Unis en tête, pèse lourdement. Le soutien américain à Israël, matérialisé par le droit de veto au Conseil de Sécurité, rend toute tentative de sanction pratiquement impossible. Cette alliance stratégique n’est pas nouvelle, mais elle souligne un double standard criant : d’un côté, l’ONU prône la paix et la justice internationale, de l’autre, elle est l’otage de ses membres influents.

La montée de puissances émergentes, notamment la Chine et la Russie, met en lumière une contestation du modèle multilatéral actuel, souvent perçu comme un outil au service de l’Occident. Ces acteurs tentent d’offrir des alternatives, ou tout au moins de nuancer l’influence dominante des États-Unis. Mais ce glissement progressif de l’équilibre mondial est-il réellement au service de la paix, ou bien aggrave-t-il une polarisation des intérêts, avec pour conséquence une ONU plus divisée que jamais ?

Un nouvel ordre en gestation… ou le symptôme d’une organisation en déclin ?

À l’heure où l’ordre occidental perd de sa prééminence, une nouvelle vision du monde est en gestation. Des coalitions comme les BRICS, qui regroupent le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, revendiquent une place plus équitable sur la scène internationale et poussent pour des réformes de gouvernance mondiale. Ces nouvelles voix représentent-elles un espoir de transformation pour l’ONU ? Ou ne sont-elles que des intérêts divergents ajoutant à la cacophonie générale ?

La question israélo-palestinienne cristallise ces contradictions. Face à un conflit emblématique d’une justice internationale toujours en suspens, l’ONU incarne une organisation coincée entre l’idéal et la réalité, entre les aspirations d’un nouvel ordre mondial et la persistance d’un ancien ordre en déclin. La reconnaissance de la Palestine ou l’exclusion d’Israël ne sont pas des décisions anodines : elles engagent l’ONU dans une redéfinition de sa mission, loin du rêve de paix universelle, et peut-être plus proche de la gestion pragmatique d’un monde divisé.

Ainsi, l’ONU se trouve à un carrefour. Devrait-elle chercher à « mener l’humanité au paradis » en imposant des idéaux de paix, d’équité et de reconnaissance pour tous ? Ou doit-elle se résigner à son rôle de « sauveuse de l’enfer », acceptant les compromis et les failles d’un ordre multilatéral qui peine à se réinventer ?

Face aux enjeux brûlants et aux attentes déçues, le rôle de l’ONU semble se diluer dans des incantations de paix qui masquent mal les fractures profondes de la géopolitique mondiale. Peut-être est-il temps pour elle de se demander si elle peut encore remplir son mandat sans être instrumentalisée. La question israélo-palestinienne, loin d’être un simple conflit régional, apparaît alors comme un révélateur d’un monde à la recherche de nouvelles règles, entre un ordre ancien en déclin et un nouvel ordre encore à définir.

Dans cette quête, l’ONU devra peut-être admettre que son mandat n’est pas de nous mener au paradis – une vision idéale mais irréaliste – mais bien d’empêcher un enfer global. Un défi qui pourrait définir la survie de cette institution, ou sceller son échec historique.

En conclusion, l’ONU se trouve face à une épreuve de vérité : la question israélo-palestinienne est moins un problème isolé qu’un miroir des dilemmes profonds qui traversent l’organisation et le monde. Le choix d’inclure ou d’exclure, de reconnaître ou de refuser, est plus qu’un simple geste politique ; il remet en question les valeurs fondatrices d’une institution censée représenter une communauté internationale unie.

Pour rester pertinente, l’ONU devra trouver un équilibre entre les idéaux de justice qui lui ont donné naissance et les intérêts contradictoires qui la freinent. Sauver l’humanité de l’enfer n’est peut-être pas suffisant, mais c’est un point de départ. Car si elle ne parvient pas à surmonter ce dilemme, elle risque d’être vue non pas comme la gardienne de la paix mondiale, mais comme une spectatrice impuissante de son propre déclin, abandonnant l’humanité aux incertitudes d’un ordre mondial en transition.

« La paix n’est pas l’absence de conflits, mais la capacité à les résoudre par le dialogue. » – Nelson Mandela. Cette phrase rappelle que la paix ne réside pas dans l’évitement des conflits, mais dans l’engagement actif et sincère pour les résoudre – un message particulièrement pertinent pour l’ONU face au dilemme israélo-palestinien.

Dr  A Boumezrag

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