9 mars 2025
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Le rachat du groupe El Khabar par Ness Prod annulé par le tribunal

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El Khabar
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Le tribunal administratif de Bir Mourad Raïs a décidé mercredi d’annuler la transaction de cession d’actifs du groupe El Khabar au profit de Ness-Prod, une filiale du groupe Cevital.

C’est en l’absence du collectif d’avocats du groupe El Khabar/Ness Prod que l’annonce a été faite lors d’une séance, aujourd’hui mercredi présidée par le juge Mohamed Dahmane.

Outre le paiement des frais judiciaires par le groupe El-Khabar, le verdict prévoit également « le retour à l’état initial de la propriété » avant la transaction. Donc l’annulation pure et simple du rachat des actifs du groupe par Ness Prod, filiale de Cevital.

Rappelons qu’en vertu de cette transaction commerciale d’un coût de 4 milliards de DA, le groupe Cevital a acquis plus de 80% des actions du groupe El Khabar, une Société par actions (SPA) incluant le journal éponyme, la chaîne de télévision KBC, les imprimeries et une société de diffusion.

Après le référé introduit par Hamid Grine, ministre de la communication et plusieurs reports, le tribunal administratif avait une première fois prononcé le gel de l’acquisition des actions par Ness Prod. Le collectif d’avocats d’El Khabar/Ness Prod décide alors son retrait le 22 juin dans cette affaire estimant qu’il était « vain de continuer à travailler sur cette affaire ».

Pour rappel, le ministère de la Communication avait introduit une action en référé auprès de ce tribunal sur la conformité du rachat du groupe de presse El Khabar par le groupe agroalimentaire Cevital en se basant sur les dispositions de l’article 25 du Code de l’information qui stipule qu’une même personne morale de droit algérien ne peut posséder qu’une seule publication périodique d’information générale.

Avec APS

Des historiens français réclament la restitution des crânes d’Algériens à leur pays

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Colonisation

Des historiens français réclament la restitution des crânes d’Algériens à leur pays

L’opinion universitaire a pris conscience depuis quelques semaines de l’urgence de a restitution de ces crânes de héros algérien à leur pays. Seize historiens et intellectuels français et algériens ont demandé samedi à la France de restituer les crânes d es résistants algériens de 1849, détenus au Museum national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris, pour « rappeler l’histoire de la colonisation ». Dans une tribune publiée par le quotidien Le Monde, intitulée « Les têtes des résistants algériens n’ont rien à faire au Musée de l’homme », le collectif signataire de cette tribune, dont Mohammed Harbi, Benjamin Stora, Olivier Le Cour Grandmaison, Gilles Manceron et Alain Ruscio, a souligné qu’il veut « contribuer à sortir de l’oubli l’une des pages sombres de l’histoire de France, celles dont l’effacement participe aujourd’hui aux dérives xénophobes qui gangrènent la société française ».

Ils ont affirmé soutenir les appels de citoyens algériens à rapatrier ces dépouilles dans leur pays, pour « leur donner une sépulture digne, comme cela fut fait pour les rebelles maoris ou le résistant kanak Ataï et ses compagnons (en 2014) », rappelant les détails historiques de la révolte des Algériens de Zaâtcha contre l’occupation française.

« En 1847, les militaires français croient que c’en est fini des combats en Algérie, après plus de dix ans d’une guerre de conquête d’une sauvagerie inouïe. Mais, début 1849, dans le Sud constantinois, le cheikh Bouziane reprend le flambeau de la résistance. Après des affrontements, il se retranche dans l’oasis de Zaâtcha, véritable cité fortifiée où, outre des combattants retranchés, vivent des centaines d’habitants », ont relaté les historiens et intellectuels, dont parmi eux figurent Pascal Blachard, Raphaëlle Branche, Christiane Chaulet Achour, Didier Daeninckx (écrivain), René Gallissot, François Gèze (éditeur), Aïssa Kadri, Gilbert Meynier, François Nadiras (Ligue des droits de l’homme), Tramor Quemeneur et Malika Rahal.

Pour les signataires, il était « important » de relayer la pétition lancée en 2011 par l’historien algérien à l’origine de cette découverte, Ali Farid Belkadi, et celle lancée récemment par Brahim Senouci, « en rappelant la raison de la présence dans un musée parisien de ces restes mortuaires, à partir de l’histoire de l’un d’entre eux : le crâne du cheikh Bouziane, chef de la révolte de Zaâtcha en 1849, écrasée par une terrible répression, emblématique de la violence coloniale ».

« Après d’âpres combats, au cours desquels les Français subissent de lourdes pertes, l’oasis est conquise », ont-ils ajouté, citant le témoignage de Charles Bourseul, un « ancien officier de l’armée d’Afrique », dans lequel il écrivait : « Les maisons, les terrasses sont partout envahies. Des feux de peloton couchent sur le sol tous les groupes d’Arabes que l’on rencontre. Tout ce qui reste debout dans ces groupes tombe immédiatement sous la baïonnette.

Ce qui n’est pas atteint par le feu périt par le fer. Pas un seul des défenseurs de Zaâtcha ne cherche son salut dans la fuite, pas un seul n’implore la pitié du vainqueur, tous succombent les armes à la main, en vendant chèrement leur vie ».

Les signataires de la tribune se sont référés à l’ouvrage « La Guerre et le gouvernement de l’Algérie », du journaliste Louis de Baudicour qui raconta qu’ »il y eut ce jour-là huit cents Algériens massacrés.

A signaler que la pétition mis en ligne a enregistré jusqu’à ce samedi plus de 27.000 signatures.

Le Muséum s’est dit, rappelle-t-on, « prêt » à examiner « favorablement » la demande de restitution des 36 crânes de chouhada, résistants algériens morts au champ d’honneur au début de la colonisation française, conservés depuis plus d’un siècle.

« Nous sommes prêts à examiner favorablement la demande de restitution des crânes des Algériens, conservés dans notre musée », avait affirmé en juin dernier, dans un entretien à l’APS, le directeur des collections au Muséum, Michel Guiraud, qui a souligné qu’il n’y a « aucun obstacle » juridique pour leur restitution

Auteur
Avec APS

 




Quand donc la fin du « séquestre » des 36 crânes de résistants algériens en France ?

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Colonisation

Quand donc la fin du « séquestre » des 36 crânes de résistants algériens en France ?

Le quotidien français L’Humanité a appelé, dans son édition de mercredi, à la fin du « séquestre » par la France des 36 crânes de martyrs (chouhada), résistants algériens morts au champ d’honneur au début de la colonisation française. 

« Entre les deux rives de la Méditerranée, une authentique relation d’amitié implique la fin du séquestre de ces restes mortuaires. Le retour et l’inhumation en Algérie des crânes des insurgés de Zaâtcha seraient un acte précieux de mémoire, de réparation et d’humanité », a écrit le journal dans un article intitulé « Les crânes de l’amnésie ».

Pour le journal, « un siècle et demi plus tard, le statut de ces restes mortuaires est le cruel symbole de la barbarie de la conquête de l’Algérie », rappelant que les résistants ont été tués, puis décapités en 1849, lors de la célèbre bataille de Zaâtcha.

C’est également, ajoute le journal, le témoignage « des politiques d’oubli que partagent l’ex-métropole et l’ex-colonie », soulignant que pour l’Etat français, ces têtes « ne sont que de simples « objets scientifiques » ».

Dans un entretien à l’APS rappelle-t-on, le directeur des collections au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris, Michel Guiraud, a indiqué mardi que son institution muséale était « prête » à examiner « favorablement » la demande de restitution des crânes des Algériens, conservés au MNHN.

Ces restes sont « nommés » (identifiés), donc « nous les considérons forcément qu’ils peuvent sortir du patrimoine et nous attendons seulement des décisions politiques », a-t-il précisé, avertissant qu’il y a cependant « un chemin à prendre » sur le plan procédural pour que la demande soit prise en considération.

« Pour leur restitution, il y a un chemin à prendre. Nous reconnaissons le droit de la famille et celui des descendants relayés par leur Etat », a-t-il dit, soulignant que les demandes « doivent passer par le canal diplomatique et non pas par une association qui n’a pas un droit particulier par rapport aux restes humains ».

Une pétition a été lancée en ligne pour la restitution de ces restes, dont l’objectif est de les rapatrier en Algérie pour « y recevoir une digne sépulture ».

Les restes, des crânes secs pour la plupart, appartiennent à Mohamed Lamjad Ben Abdelmalek, dit Cherif « Boubaghla », Cheikh Bouziane, chef de la révolte des Zaâtchas (région de Biskra en 1849), Moussa El-Derkaoui et Si Mokhtar Ben Kouider Al-Titraoui.

La tête momifiée d’Aïssa El-Hamadi, qui fut le lieutenant du Cherif Boubaghla, figure parmi ces restes mortuaires, de même que le moulage intégral de la tête de Mohamed Ben-Allel Ben Embarek, lieutenant de l’Emir Abdelkader.

Auteur
APS

 




Khaled, l’ex-colonel du DRS, décédé

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Affaire autoroute Est-Ouest

Khaled, l’ex-colonel du DRS, décédé

L’ex-officier supérieur du Département du renseignement et sécurité DRS, le colonel Khaled est décédé à l’hôpital militaire de Ain Naadja mardi, a-t-on appris de sources proches de la famille.

L’ex-colonel Khaled, de son vrai nom Mohamed Ouazzine, a été admis à l’hôpital militaire de Aïn Naadja suite à un AVC qui a eu d’énormes séquelles sur lui. Cet ex-colonel du DRS dissous et conseiller au ministère de la Justice a été auditionné, le 27 avril 2015, par le tribunal criminel de la Cour d’Alger dans le cadre de l’affaire du scandale de l’autoroute Est-Ouest.

L’ex-colonel Khaled a été inculpé et placé sous contrôle judiciaire dès 2011 par le juge d’instruction du pôle spécialisé près la cour d’Alger. Tout officier qu’il était Mohamed Ouazzine a été énormément cité par les enquêtes menées par le DRS dès 2009. Il a été condamné à trois ans de prison. Mohamed Ouazzine avait joué, moyennant des rétributions sonnantes, le rôle de facilitateur avec son ami Medjdoub Chani pour permettre à l’entreprise chinoise Citic-CRCC de recouvrir ses factures.

Ancien étudiant de l’Ecole nationale d’Administration, Mohamed Ouazzine a rejoint l’armée où il a fait l’essentiel de sa carrière, en Algérie ou en poste à l’étranger, notamment son dernier poste comme conseiller au ministère de la Justice.

Auteur
La rédaction

 




El Khabar, Rebrab et la maladie de Bouteflika

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Bouteflika

Bouteflika

La combine du ministre de la communication Hamid Grine et l’état grave dans lequel se trouve Bouteflika ont partie lié manifestement

Tout observateur de la faune politique algérienne l’aura compris : l’affaire du référé décidé par le clan et exécuté par Hamid Grine pour faire capoter l’achat d’El Khabar par Ness Pro est cousue de fil blanc. Elle fait partie d’un ensemble d’intrigues dont lesquelles excelle le clan Bouteflika pour neutraliser l’opinion et la presse.

La coterie a compris depuis quelques mois qu’elle ne pourra continuer à exhiber aux caméras le chef de l’Etat. Le temps et la crise qui s’est invité jouent contre elle. L’homme est usé. Il ne tient plus et les invités, même triés sur le volet pour donner un semblant de change se font de plus en plus rares. Alors on a recours à Lakhdar Brahimi et quelques obscurs potentats africains sans aucune influence.

En effet, la fin de règne devenant imminente, la coterie de Zéralda est réduite à chercher les parades. A ruer dans les brancards, même au prix d’un délitement des institutions. Jamais d’ailleurs l’Etat ne s’est aussi gravement confondu avec les tenants du pouvoir. La concentration de la décision et le népotisme ont eu des conséquences catastrophiques sur le fonctionnement normal des institutions.

La grave maladie qui handicape de plus en plus le chef de l’Etat et de fil en aiguille la probable organisation d’une présidentielle anticipée obligent désormais la coterie à multiplier les raids de neutralisation et de détournement de l’opinion publique. Il faut bien meubler l’effarant vide laissé par la paralysie des institutions et surtout préparer le coup d’après. Autrement dit, celui qui va permettre à la coterie aux affaires depuis 1999 au mieux de se maintenir ou tout au moins de demeurer intouchable.

Le complot ourdi se veut comme un traitement de choc. L’enjeu est de taille. Et la vente du groupe El Khabar tombe très mal, elle ne l’arrange pas du tout. L’argument de l’article 25 est un bien piètre artifice pour faire capoter la vente. Voire même liquider ce grand journal qui est l’un des seuls de la presse arabophone à avoir gardé sa crédibilité et une distance raisonnable du pouvoir.

Il est manifeste que l’influence de ce groupe médiatique et sa profondeur sociale font craindre aux Bouteflika et leurs obligés le pire s’il tombe entre les mains d’un groupe privé, étranger à sa sphère, comme Cevital. Donc, pour la coterie tout est clair : il faut donc brouiller les pistes de compréhension, neutraliser les capacités de réaction de ce qui reste de l’opposition et de l’opinion publique en gardant le contrôle absolu sur tous les circuits d’information et de décision. Ceci pour paraphraser Ulmann et Wade dans Shocke & Awe

Alors ? Alors on se prépare au pire, voire à rendre inévitable ce qu’on croyait impossible à advenir.

Yacine K.

L’article du « Monde » n’est ni une maladresse ni une bourde

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Médias/Bouteflika

L’article du « Monde » n’est ni une maladresse ni une bourde

Quand bien même un observateur aguerri aurait remarqué aisément une certaine passion dans le refus de visa aux journalistes du quotidien français « Le monde », un calcul lobbyiste et une arrière-pensée de l’autre côté de la rive n’est pas à écarter. 

Ce journal a toujours eu une certaine promiscuité avec les cercles du pouvoir algérien et de tout temps s’est ingéré dans les grands dossiers même durant la période d’industrialisation. On se rappelle l’affinité qu’avait leur célèbre correspondant, Paul Balta avec feu Président Houari Boumediene. Ce n’est ni une maladresse, ni une forme de liberté de la presse que de diffuser la photo du Président Bouteflika dans un scandale médiatique dont il n’est pas personnellement et directement concerné. Par contre, cela pourrait être une manière indirecte de lui rappeler son devoir envers un de ses ministres, qui lui est directement impliqué dans des montages financiers discutables et donc devra démissionner.

Est-ce qu’il gêne la position de certains groupes français dans leur stratégie de s’implanter en Algérie ? C’est une possibilité d’autant plus que depuis son voyage aux Etats-Unis et son rapprochement des hommes d’affaires américains qu’on voit se dessiner des attaques personnelles envers ce ministre. D’abord la divulgation de sa double nationalité juste après l’adoption de la nouvelle constitution qui limite dans son article 51 les niveaux de responsabilité aux binationaux. Certes, c’est un député qui l’a mise sur le tas mais on peut se demander d’où détient-il les preuves d’une information si intime et qui pourrait créer un ras-de-marré car de nombreux responsables algériens pourraient être dans le même cas. Ils sont des millions à rechercher le moindre lien pour bénéficier de ce statut. Ceux qui sont nés en France, s’y sont mariés, y ont un parent de différent degré etc. Plus de 55 000 dossiers d’Algériens ont été déposés pour demander la carte harki avec preuve de leur collaboration à l’appui, à en croire leur représentant en France.

L’Etat algérien reste désormais face à un choix difficile parce que s’il applique la loi pour un, il devra le faire pour tout le monde et c’est la pagaille. C’est justement le but recherché par l’autre rive pour asseoir son influence politique, sociale et surtout économique en Algérie. Qui mieux peut le faire qu’une presse libre et démocratique mais en perte de vitesse sur le plan de gestion interne et donc en a fortement besoin de l’aide financière de ce lobby. D’abord le scandale en lui-même comme avant lui Wikileaks pourront-ils changer un nouvel ordre économique mondial qui s’incruste indépendamment de la volonté des uns et des autres ? Même si c’est sur l’opinion publique que cet assainissement compte, il ne touchera que les plus faibles.

1- Pour l’Algérie, il n’existe pas une affaire Bouchouareb mais celle de l’Etat

Il est de notoriété publique que ce ministre avant de fréquenter la sphère politique, était un industriel qui a fait fortune dans le créneau de la mousseline et des chips. Tout le monde reconnaît qu’il est né d’une famille aisée. Il n’est pas le seul, s’il en est un d’avoir un père Gaid et des frères dans l’armée populaire nationale. Ce statut lui a permis après son bac de suivre des études en sciences médicales et humaines. Il a même exercé à Paris en tant que prothésiste, chirurgien dentaire pendant plusieurs années. Il s’est même marié à une femme française et eu des enfants avec elle si l’on croit le câble de «Mon journal» signé par Hichem Aboud. Tout ce qui vient après relève du privé même s’il s’est marié plusieurs fois. Il dispose de tous les ingrédients pour être éligible à une nationalité française et une optimisation de ses capitaux dans des paradis fiscaux comme le font les hommes d’affaires aussi bien nationaux que d’autres à travers le monde. On aurait pu s’étonner de la résidence et des biens que possède le secrétaire général du FLN à Paris mais pas le cas de Chakib Khelil, Bouchouareb et peut être bien d’autres. Maintenant ce ministre a fait un choix de mêler sa fortune à la politique, il doit s’expliquer avec la justice sur sa déclaration du patrimoine au moment de son accession à des hautes fonctions de responsabilité. A-t-il signalé ces sociétés au Panama ? Cette déclaration a-t-elle été publiée au journal officiel comme stipule la loi ? Maintenant que l’opinion publique est mise au courant, la justice doit s’autosaisir et l’Etat est là pour l’aider à appliquer la loi dans toute sa rigueur. Dans pratiquement la plupart des pays, des actions judiciaires sont en cours sous la pression d’une opinion publique déchainée. Reste à savoir si en Algérie et dans les pays à niveau démocratique équivalent, il y aura des actions similaires. La justice va-t-elle s’autosaisir ou attendra t- elle un coup de fil d’en haut ? La société civile aura-t-elle une influence suffisante pour faire bouger les pouvoir publics ? Un tel événement ne va-t-il pas accélérer le remaniement du gouvernement ? Va-t-on tout faire pour sauver le soldat Bouchouareb ? Etc. Donc tous les regards s’orientent vers le clan au pouvoir ou dit d’une manière politiquement correcte le premier magistrat du pays. C’est pour cela que le quotidien Le Monde met dans sa manchette la photo de Bouteflika, seulement tout le monde sait que c’est ce genre d’artifice qu’utilisent les lobbies à travers la presse pour faire pression sur les politiques pour arriver à des desseins économiques.

2- Le cabinet Mossack Fonseca, influent au Panama mais pas le seul au monde

Ses propriétaires ont reconnu suite au scandale révélé par le panel de journalistes d’avoir vendu des couteaux mais ne se sentent nullement concernés par l’usage dont ont fait leurs clients ni de l’origine des fonds qui leur a permis de les acquérir. C’est un cabinet d’avocats comme il en existe des milliers de par le monde spécialisé dans le droit commercial, les services fiduciaires, les conseils en placement et la création de structures internationales. Il comprend également plusieurs sociétés au sein de ses bureaux en sus de proposer ses services dans le domaine de la propriété intellectuelle et le droit maritime. Possédant une quarantaine de filiales dans le monde, Mossack Fonseca est, en 2016, le quatrième cabinet de droit offshore au monde[]. Cette vaste entreprise est mise en cause dans le scandale Petrobras ainsi que dans l’affaire des «Panama Papers» pour son rôle joué dans le blanchiment d’argent et la fraude fiscale à l’échelle internationale. Le 3 avril 2016, la société est accusée d’aider de nombreux citoyens et sociétés étrangères à frauder leurs fiscs respectifs. S’y ajoutent diverses imputations connexes, notamment celles faisant état des implications suivantes :blanchiment d’argent, évasion fiscale avec, entre autres entités pointées, l’assistance qui aurait été diligemment prêtée en ce sens par la Commerzbank ; collaboration litigieuse avec plusieurs dictateurs du Moyen-Orient et d’Afrique à dessein de leur permettre de se soustraire aux sanctions internationales les visant. L’ensemble de ces Panama Papers se chiffre à 2,6 téraoctets de données en couvrant près de 40 ans d’enregistrements. Leur analyse, encore en cours, est conjointement confiée au Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ ou CPI en anglais). Nommément cité par l’enquête avec d’autres dirigeants politiques, comme notamment le Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson, le roi d’Arabie Saoudite Salmane al-Saoud, le président argentin Mauricio Macri ou le président ukrainien Petro Porochenko, Vladimir Poutine réplique en expliquant qu’il est la cible principale de l’enquête et ajoute, par l’intermédiaire de son porte-parole, qu’il connaît très bien cette soi-disant communauté journalistique. Il y a parmi eux de nombreux journalistes dont le journalisme n’est pas l’activité principale. Beaucoup sont d’anciens employés du Département d’État, de la CIA, d’autres services secrets. L’enquête montre aussi que le Premier ministre d’Islande aurait créé avec son épouse aux îles Vierges britanniques une société offshore dans laquelle il aurait dissimulé des millions de dollars. Il a été contraint à la démission.

Tout compte fait Les « Panama Papers » ont sans doute levé le voile sur une gigantesque nébuleuse totalement opaque. Si un tel scandale a pu éclater, c’est grâce à une fuite sans précédent qui se matérialise par 11,5 millions de fichiers. Autant de données qui ne proviennent que d’un seul et même endroit : Mossack Fonseca, le dénominateur commun qui relie toutes ces personnalités de premier plan mises en cause dans ces spectaculaires révélations. Depuis 1977, ce cabinet d’avocat panaméen œuvrait en toute discrétion dans le monde entier pour fournir le service dans lequel il était connu pour être l’un des meilleurs au monde : la création pour ses clients de sociétés offshore complètement anonymes dans des paradis fiscaux. En près de 40 ans d’existence, pas moins de 214.000 entités offshore ont été créées ou administrées par ce centre financier tentaculaire. Basé à Panama City ainsi que dans une quarantaine de bureaux dispatchés sur la planète, Mossack Fonseca a su devenir un acteur incontournable du secteur. Les révélations permettent d’établir que cette société a collaboré avec des personnalités et d’importantes compagnies venant de plus de 200 pays et territoires, en somme, le monde entier.

3- Le monde entier connaît cette pratique y compris les dirigeants qui créent au scandale

S’attaquer constamment aux paradis fiscaux est un leurre dont il faut se méfier. La définition même du paradis fiscale n’est pas forcément uniforme pour tous mais surtout elle permet aux gouvernements de l’utiliser comme un tremplin pour dévier le regard de l’opinion publique vers un bouc émissaire bienvenue .Il se trouve justement que pendant que la population crie au scandale en reprochant à ces pays de faire leur beurre plus ou moins à la limite de la légalité, et bien le projecteur n’éclaire pas sur la politique économique décidée par les tenants du pouvoir qui apparemment sont branchés ailleurs. Cela évitera de trop s’occuper de l’intérieur pour permettre aux gouvernements un peu de répit. Il faut dire que la société civile n’est pas dupe ? Si être un paradis fiscal garantissait la pérennité du pays qui la pratique, cela se saurait ! Regardons quel exemple donnent les pays qui sont sur la liste : USA avec son Etat du Delaware, le paradis fiscal américain qui irrite le Luxembourg, la pratiquant depuis des lustres ou le Liban voire même la France qui a ouvert les bras aux Qataris qui investissent sans payer un sou d’impôts.

R. R.

Auteur
Rabah Reghis

 




Pourquoi l’ingérence saoudienne en Algérie est devenue récurrente

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Lobbying

Pourquoi l’ingérence saoudienne en Algérie est devenue récurrente

Aujourd’hui, on manœuvre pour enlever un ministre de la République en la personne de celui chargé des affaires religieuses parce qu’il s’est attaqué à l’influence salafiste dans les mosquées algériennes.

Il a osé pour la première fois dans l’histoire des relations de l’Algérie avec ce royaume de refuser l’accès à un prédicateur de toute évidence gênant. Pour que la diplomatie se mêle d’une affaire banale de rentrée et de sortie d’un territoire, c’est la preuve par 9 de l’influence des Chouyoukhs dans la conduite de la stratégie politique de ce pays. La semaine dernière, n’arrivant pas à digérer le refus du gouvernement algérien de classer comme organisation terroriste le mouvement de résistance libanais contre le sionisme, le Hezbollah en l’occurrence, le royaume wahhabite lance son « offensive médiatique » contre l’Algérie. La chaine intégriste SAFA devait donner la parole à un prédicateur virulent qui a publiquement déverser son venin pour déclarer à qui veut l’entendre que l’Algérie est un pays « traitre » pour, bien entendu, n’avoir pas accepté de mettre en application la feuille de route sioniste dans la région et dans le reste du monde musulman. « Le gouvernement algérien a trahi la révolution syrienne et les musulmans ». Il est avec les autorités syriennes qu’il soutient et appuie. « Il est aussi avec les sionistes contre l’islam et les musulmans » selon ce prédicateur.

Hier, il s’est ingéré dans un conflit algéro-algérien pour appeler via sa chaine satellite IQRA carrément à l’extermination de la communauté Ibadites de Ghardaïa. Sa diplomatie tente de présenter l’Algérie comme bénéficiant des relations privilégiées avec le royaume alors qu’il a mis son économie à genoux et à deux reprises. Une fois en 1985, lorsque dans sa politique pétrolière dite du « Netback » il garantissait une marge aux raffineurs qui a fait descendre le prix du baril jusqu’à 10 dollars et la deuxième en 2014/2015 lorsqu’il s’est attaqué aux producteurs américains du gaz de schiste, période que nous vivons à ce jour avec d’autres pays dont le développement est fortement dépendant des recettes pétrolières. La passivité de la diplomatie Algérienne a laissé la porte ouverte à des interrogations de toutes sortes : Ce pays dispose t’il de dossiers sérieux sur des hommes politique qui investissent dans les pays du Conseil de Coopération du Golfe dont le royaume est le leader ? Cache-t-il des choses que le pouvoir ne veut pas qu’elles soient divulguées ? En tout cas, pourquoi ce silence face à cette ingérence par un jeu paradoxal des uns et des autres ? Il faut peut-être souligner que les wahhabites ne ratent pas l’occasion pour ramasser les bons points des principales puissances. Depuis l’amorce de la crise économique mondiale, le recyclage des pétrodollars de l’Arabie Saoudite vers le trésor américain, ajouté aux contrats juteux avec la France dans le domaine de l’armement et l’aviation civile l’ont emportés sur les droits de l’homme.

Aujourd’hui, les Etats-Unis et la France qui se vantent de promouvoir les droits de l’homme dans le monde et se montrent en donneurs de leçons, se sont vivement plantés en soutenant justement un pays qui les transgressent au vu et au su du monde entier. En effet, la polémique avait suscitée une rage qui a fait exploser les réseaux sociaux le 4 mars dernier lorsque François Hollande avait remis ce titre à celui qui figure comme étant l’un des plus grands bafouilleurs des droits de l’homme dans le monde, la légion d’honneur au prince héritier et ministre de l’intérieur de l’Arabie saoudite « au titre de personnalité étrangère », en l’occurrance Mohammed Ben Nayef. Tout de suite une célébrité française programmée de la recevoir devait refuser de se présenter pour exprimer sa colère. Cette actrice réputée franche n’a pas mâché ces mots en fustigeant cette décoration. Il se trouve désormais qu’elle n’était pas la seule une autre la carrément rendue comme le célèbre anthropologue Alain Nicolas. C’est presque la goute qui a fait déborder le vase après la nomination de c e pays le 21 septembre 2015 à la tête de la commission consultative des droits de l’homme onusienne, institution qui reste sous les feux de virulentes critiques.

Comme l’a confirmé l’ONG UN Watch, l’ambassadeur de Riyad auprès des Nations unies, Faiçal Trad, présidera ce groupe. Au sein du Conseil des droits de l’homme, le « groupe consultatif » est chargé de sélectionner les rapporteurs en charge de thématiques précises comme les camps de travail en Corée du Nord ou les violences faites aux femmes ainsi que d’autres sujets liés au droit de l’homme et que justement ce pays ne respecte pas en premier lieu. Ces travaux serviront ensuite de base au Conseil des droits de l’homme pour émettre des recommandations. La monarchie saoudienne est l’une des plus dures au monde. Le régime s’est ainsi montré intraitable avec le blogueur et militant Raif Badawi, en prison depuis 2012. Riyad a notamment décapité puis crucifié en place publique le jeune opposant chiite Ali Mohammed Al-Nimr, accusé d’avoir participé en 2012 à une manifestation contre le régime dans la région majoritairement chiite de Qatif, lorsqu’il était âgé à peine de 17 ans. L’ONG Reprieve, qui assure sa défense, affirme que les aveux signés par l’accusé ont été obtenus sous la torture.

A Genève, on dénonce tout bas une mascarade et un coup de plus porté à la crédibilité d’une institution qui représente l’autorité morale de l’ONU et dont l’Arabie saoudite n’est devenue membre qu’en 2013. A l’époque, ni les Etats-Unis, ni l’Union européenne, ni la France en particulier, ne s’étaient opposés à cette nomination. La plupart des décisions du Conseil des droits de l’homme se prennent sans qu’un vote formel n’ait vraiment lieu. Les tractations et négociations ont donc lieu en amont et en coulisses. La nomination de Riyad à la tête du « groupe consultatif » était restée secrète depuis le mois de juin 2015. Par un jeu pervers et politique, ces pays ont réussi à se dédouaner d’un soutien si indéfectiblement accordé à la nébuleuse du djihadisme erratique. Et cela depuis son apparition dans la décennie 1980 lors de la guerre antisoviétique d’Afghanistan. L’opacité de ce fonctionnement n’est pas non plus pour servir la réputation d’un organe de plus en plus décrié. Au printemps dernier, l’Arabie saoudite, déjà, s’était portée candidate à la présidence du Conseil des droits de l’homme. Une polémique avait éclaté et officiellement la candidature avait été retirée. Dans les couloirs du Palais des Nations, à Genève, il se murmure que Riyad aurait obtenu la tête du « groupe consultatif » en guise de consolation. Reste que l’institution doit bien renouveler sa présidence (qui était occupée par l’Allemand Joachim Rückert) jusqu’à la fin de l’année 2015. C’est au tour du groupe asiatique de proposer un pays – d’où la tentative de l’Arabie saoudite, qui en fait partie.

1- Le palmarès des exécutions dans ce pays est effarant

Il n’y a ni constitution ni code pénal dans ce pays mais uniquement l’application du Coran et de la jurisprudence islamique (interprétation, sunna, hadith et Essira etc.). Dans l’application de cet arsenal juridique, les avocats ne plaident pas mais s’attaquent les uns aux autres à coup de fatwas. Une police composée de chouyoukhs surveillent le comportement des citoyens dans leur vie quotidienne et dénonce leur moindre déviation de la ligne religieuse sunnite. Sur le plan de l’application de la Charia, de nombreux analystes et observateurs ont relevé une certaine dureté de son application par rapport à Daech car cette organisation terroriste permet au moins aux femmes de conduire des voitures, ce que les prédicateurs du royaume wahhabite refusent sous un prétexte fallacieux de perdre tout contrôle sur les femmes. En trois mois, de janvier à mars, le royaume wahhabite a exécuté 70 personnes, dont 47 en une seule journée, le 2 janvier dernier. Parmi ces condamnés à mort, le plus souvent décapités au sabre sans aucun respect de leur corps et à l’insu de leurs familles, des criminels de droit commun, mais aussi des opposants politiques, comme le chiite Nimr al-Nimr.

En 2015, l’Arabie saoudite a exécuté 153 personnes, contre 87 en 2014. Entre janvier 1985 et juin 2015, au moins 2 208 personnes ont été victimes de la peine de mort, parmi lesquelles plus d’un millier d’étrangers, des mineurs et des handicapés mentaux. En somme, même si on est attardé mental dans ce pays, on reste tout de même responsable de ses actes.

2- L’Arabie saoudite, n’est pas ce qu’on croit

L’Arabie saoudite offre l’image d’un pays musulman ultraconservateur mais les fêtes privées des puissants dans la ville portuaire de Djeddah peuvent s’accompagner de drogue, de sexe et d’alcool, selon les mémos Wikileaks, disponibles dans leur site web. Les fêtes se déroulent dans des maisons privées et les jeunes Saoudiens ne se privent de rien. La vie nocturne de la jeune élite de Djeddah est palpitante. La gamme entière des tentations et des vices est disponible -alcool, drogue et sexe- mais strictement derrière des portes closes. Cette liberté n’est rendue possible que parce que la police religieuse évite les fêtes qui se tiennent en présence ou sous le haut patronage des membres de la famille royale ou des cercles qui lui sont proches. Il existe 10.000 princes en Arabie saoudite et que les princes saoudiens ont pour habitude de recruter leurs gardes du corps au Nigeria ou dans d’autres pays africains. Il est très fréquent que ces gardes du corps, appelés « khawi », dérivé du mot « akh », grandissent avec les princes, ce qui renforce leur fidélité et loyauté. Un Saoudien a révélé à ce câble à scandale que les riches de la ville invitent des princes pour garder au loin la police religieuse qui veille au respect de la charia, la loi islamique. Le prix exorbitant de l’alcool de contrebande -une bouteille de vodka Smirnoff pouvant coûter l’équivalent de 400 dollars- fait que l’on remplit les bouteilles d’un alcool fabriqué localement, appelé Sadiqi. Le rédacteur du câble précise que s’il ne l’a pas constaté personnellement durant cette fête, le haschich et la cocaïne sont consommés dans ces milieux sociaux à diverses occasions. Le trafic de drogue est sanctionné par la peine de mort et la production ou la consommation d’alcool est sévèrement réprimée par la loi en Arabie saoudite, mais semble difficilement applicable à la famille royale.

3- Comment la famille royale camoufle tout cela ?

La dynastie saoudienne compterait plusieurs milliers de membres, dont environ 4.000 princes, descendants directement du roi Abdel Aziz. Tellement nombreuse, la famille royale constitue quasiment une classe sociale en soi. Une classe de privilégiés, évidemment, dont la puissance financière est considérable et le train de vie en général ostentatoire, grâce au pétrole, forcément. Il s’agit de plusieurs demeures, voitures de luxe, voyage. Les princes et princesses touchent chaque mois des indemnités de plusieurs milliers de dollars minimum. Ceci leur permet de s’imposer dans tous les secteurs de la vie du pays, et notamment dans le commerce. Pour éviter une explosion sociale, le pays réserve des sommes importantes qu’il distribue aux peuples pour l’endormir. C’est simple : le nouveau roi a offert récemment plus de 32 milliards de dollars à son peuple. C’est tout dire……

R. R.

 

Auteur
Rabah Reghis, Consultant et économiste pétrolier

 




« Nous mettons petit à petit un État kabyle en place »

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Ferhat Mehenni (président du GPK)

« Nous mettons petit à petit un État kabyle en place »

Avec Ferhat Mehenni, il y a d’abord le verbe chanté. Guitare en bandoulière, il a très tôt défié le régime de Houari Boumediene, puis celui de Chadli Bendjedid. Il a été arrêté, puis jeté en prison une douzaine de fois, pour avoir revendiqué la reconnaissance de l’identité amazighe. Homme aux convictions politiques et identitaires bien chevillées au cœur, Ferhat Mehenni a, dès le début de son combat pour l’identité amazighe, été confronté à l’arbitraire du pouvoir, aux privations et à la répression. Après avoir chanté et lutté pour la reconnaissance de tamazight, l’Algérie, la démocratie, le pluralisme politique, les droits de l’homme, il consacre désormais son énergie à la Kabylie et son indépendance. Entretien.

Le Matin d’Algérie : Quel regard portez-vous sur le mouvement que vous dirigez depuis sa création ?

Ferhat Mehenni : Le MAK est né d’une succession de drames kabyles dont le plus impardonnable fut celui du Printemps Noir (2001) quand l’Etat algérien avait tiré sur nos enfants qui manifestaient pacifiquement. Il a pour mission de consommer la rupture avec la répression et l’oppression que subit la Kabylie depuis l’indépendance de l’Algérie. L’évidence de cette rupture s’est imposée à nous le jour où nous avons réalisé que l’Etat censé être notre protecteur nous a toujours traités en ennemi, et quand nous avons vu que la communauté « nationale » avec laquelle nous partageons, encore malgré nous, notre destin d’Algériens est non seulement indifférente à nos malheurs mais descend souvent dans la rue pour soutenir d’autres peuples que le nôtre, y compris au moment où nous pleurions 130 Kabyles abattus par les gendarmes, en principe eux aussi, chargés d’assurer notre sécurité. Le MAK est donc le produit légitime de notre histoire. Il est la réponse adéquate à l’exigence de vie de dignité et de liberté du peuple kabyle. Il est devenu la colonne vertébrale de la Kabylie.

Il s’est structuré en Kabylie, au niveau des villes et villages et au sein de la diaspora kabyle. En quelques années, une équipe dirigeante efficace s’est formée et nous sommes passés du concept de l’autonomie vers celui, plus juste, de l’autodétermination. Les rangs des militants et sympathisant grandissent de jour en jour, depuis 2001, dans une ambiance maîtrisée et responsable. En dehors de mon fils aîné que le DRS a fait assassiner en 2004, aucun incident n’est à déplorer malgré les nombreuses provocations dont nos cadres et nos militants ont été victimes. D’un point de vue politique, le MAK est devenu une force vigoureuse et efficiente au service des Kabyles qui se ré approprient leur destin.

Pour autant, je ne suis plus le président du MAK qui est Mas Bouaziz Ait Chebbib, un homme brillant et simple. Je suis le président de l’Anavad, (Gouvernement Provisoire Kabyle) réélu à l’unanimité des 850 délégués au troisième Congrès du MAK qui s’est tenu le 26 février 2016, à At Zellal.

Le MAK a organisé son congrès en Kabylie dans un climat de répression avec des arrestations massives. Que répondez-vous à ceux, notamment les politiques, qui avancent que c’est normal qu’un mouvement non reconnu soit interdit de rassemblement ?

Le grand écrivain Boualem Sansal qui a suivi avec attention ce congrès n’a pas manqué de le comparer à celui de la Soummam du 20 aout 1956. Il s’est tenu au grand jour, avec plus de 800 délégués, au nez et à la barbe de plus de 100.000 hommes déployés par l’État algérien en Kabylie pour l’en empêcher. Malgré quelque 250 congressistes interceptés par les services de répression, ils étaient quatre fois plus nombreux à déjouer les pièges des barrages policiers et à atteindre le village d’At Zellal. La volonté d’indépendance du peuple kabyle est irrésistible. Elle ne se laisse point intimider par la répression par laquelle les tenants de l’Etat algérien veulent la maintenir dans une soumission de type coloniale.

Quant à ceux qui estiment « normal » qu’un mouvement non reconnu soit interdit de rassemblement, ils expriment un point de vue fasciste, contraire à la démocratie au nom de laquelle ils s’autorisent une telle énormité. En démocratie, c’est la légalité qui est conforme au droit et non l’inverse. Le seul agrément qui existe pour un mouvement ou un parti politique est celui attesté par l’adhésion du peuple à son projet et non par un document politico-administratif délivré, de surcroît, par une dictature. Une loi non conforme au droit est une ignominie.

Pour revenir aux « politiques » qui valident la répression contre un mouvement démocratique, nous distinguons parmi eux deux ensembles : Les non kabyles qui, dans leur écrasante majorité, voient en la Kabylie un éternel danger pour l’unité nationale et le caractère islamique de l’état. Pour eux, normaliser par la dépersonnalisation les Kabyles, voir les réduire (y compris physiquement) est la seule solution. C’est cette classe politique qui non seulement s’était tue, à l’unanimité, lors des événements sanglants de 2001 mais avait eu l’outrecuidance de faire le procès de la Kabylie lors d’une séance scandaleuse du parlement algérien. Nous leur dénions le droit de décider à la place du peuple kabyle.

Quant aux hommes politiques kabyles, ceux qui sont au pouvoir ou dans ses coulisses, enserrés dans les mailles du reniement et de la corruption, ils portent en eux-mêmes la honte de leur kabylité comme souvent le Juif portait celle de ses origines avant l’État d’Israël (Voir La haine de soi de Theodore Lessing). Pour parvenir à un « destin national » ils doivent renier le Kabyle qu’ils portent en eux pour devenir cet « Algérien » qu’ils ne seront jamais. En général, au fond d’eux-mêmes, ils nous envient et nous donnent raison, mais publiquement ils nous condamnent, par calcul et par lâcheté. Ils vivent un paradoxe. Leur seule base arrière est la Kabylie au nom de laquelle ils proposent leurs services à un régime qui n’a de mission à leur confier que celle d’assassiner la Kabylie, et ce, depuis 1963. Ils se prévalent de leurs origines kabyles pour agir contre leurs frères kabyles, leurs ancêtres et leurs propres enfants. Intérieurement, ils doivent se maudire, se sentir traîtres quelque part à leur seule patrie : la Kabylie.

Enfin, il y a les partis kabyles que sont le FFS et le RCD. En étant contre le droit du peuple kabyle à son autodétermination, ils ne font que scier la branche sur laquelle ils sont assis. C’est la raison pour laquelle la Kabylie leur a définitivement tourné le dos. Aujourd’hui, la Kabylie est en phase avec le MAK. Quand on réprime ses militants, c’est la Kabylie que l’on violente et que, paradoxalement, l’on renforce dans son combat pour son indépendance.

Votre mouvement n’a pas reçu de soutien des partis dits démocrates et des organisations de défense des droits de l’homme en Algérie au fil des épreuves.

C’est tout simplement scandaleux ! Les droits de l’homme qu’ils pratiquent de manière discriminatoire en fermant les yeux sur les exactions policières en Kabylie sont l’expression d’un racisme antikabyle. Pourtant, les droits de l’homme, selon Ali Yahia, ne sont liés ni à une identité ni à une idée. Ils sont dédiés au respect de l’intégrité physique et morale de la personne humaine. Je le répète, le silence autant des organisations de défense des droits de l’homme que des partis politiques sur la répression des militants du MAK est criminel. Il relève soit d’un réflexe purement raciste, soit d’une couardise, de la peur de déplaire à ceux qui tiennent le pouvoir que l’on assimile par terrorisme intellectuel à une sorte d’ordre militaire. Ce dernier leur fait élever le droit des peuples à leur autodétermination au rang de vertu à l’extérieur, de honte à l’intérieur. Apparemment, la contradiction ne les étouffe pas :

D’un côté, ils soutiennent le Polisario qui veut édifier un nouvel État arabe en terre amazighe, parce qu’il a été créé, organisé et à ce jour financé par le pouvoir algérien ; de l’autre, ils condamnent le MAK enfanté par les luttes démocratiques de la Kabylie, loin de toute influence étrangère, sans aucun autre moyen que la force de conviction de ses membres dans le droit du peuple kabyle à disposer de lui-même. Cherchez l’erreur !

Quelle relation entretenez-vous d’ailleurs avec les partis comme le RCD et le FFS réputés ancrés essentiellement en Kabylie ?

Pour le FFS et le RCD, le MAK est leur face cachée, leur côté ombragé qu’ils ont peur de révéler au grand jour. Ils auraient aimé avoir notre courage et notre aisance à nous assumer avec fierté en tant que Kabyles, appartenant au grand et valeureux peuple kabyle. Malheureusement, le poids de leur passé les plombe et les en empêche. Ce passé les a acculés dans un cul-de-sac politique d’où ils ne peuvent sortir sans mourir. Alors, il ne leur reste qu’à courtiser une Algérie arabo-islamiste qui les méprise et les rejette de toutes ses forces. D’ailleurs, les dernières révélations côtés RCD et FFS nous renseignent sur la réalité de leur incapacité à être des partis algériens d’envergure « nationale ». Ainsi, Karim Tabbou vient de nous apprendre qu’au moment où il était premier secrétaire du FFS, son parti avait accepté que le pouvoir lui accordât, sans les remporter par la voie des urnes, des municipalités et des postes de députés en dehors de la Kabylie, afin de lui donner une envergure algérienne qu’il n’aura jamais, malgré ces compromissions.

Pour ce qui est du RCD, maison que je connais de l’intérieur puisque j’y étais jusqu’en 1995 (officiellement jusqu’en mai 1997), Nordine Ait Hamouda vient de nous dévoiler ce que nous savions depuis longtemps : pour atteindre les 75.000 signatures obligatoires pour la candidature de Said Sadi aux présidentielles de 1995 et de 2004, ce n’était pas le parti qui s’en était occupé, il en aurait été incapable, mais des structures de l’État algérien dont des agents du DRS et des walis.

Pour enfin répondre à votre question, le RCD et le FFS ont peur de nous rencontrer à titre officiel. En dehors d’une invitation du RCD à sa convention en 2012, il n’y a pas de rapports de structures à structures, pas de dialogue entre nous. Nos incessants appels à de telles initiatives n’y ont jamais trouvé d’écho favorable. Même lorsque le RCD avait invité le MAK à sa « Convention nationale », c’était davantage pour servir de caution à l’invitation de l’islamoterroriste Ali Benhadj à la même rencontre où, le vrai rapprochement avec le courant intégriste fut amorcé, que pour entretenir des liens de bon voisinage avec nous.

Pour preuve, nous déplorons

1) l’absence de condamnation par lui de l’arrestation de nos militants par l’État algérien,

2) la dernière sortie de Mohsin Belabbas traitant le MAK de parti extrémiste, n’ayant pas sa place en Kabylie où, selon lui, il n’y a pas d’existence d’un problème d’autodétermination.

Apparemment, pour lui, les islamo-terroristes sont plus fréquentables que les démocrates pacifiques du MAK. La Kabylie apprécie.

Quels sont vos rapports avec le pouvoir ? Avez-vous été approché par ses émissaires ?

En dehors de ma convocation par le DRS en février 2003 pour me menacer, il n’y a aucun rapport entre nous et le pouvoir algérien.

Qu’est-ce qui vous guide sachant que rares étaient ceux qui croyaient à votre combat quand vous aviez lancé le MAK aux lendemains du printemps noir.

Vous posez là une question philosophique. Qu’est-ce qui fait qu’un homme, un jour, se dresse seul contre tous, pour imposer une idée, un idéal, un nouvel ordre, aller au bout de lui-même et conquérir le respect et l’adhésion des siens ? L’histoire des peuples et de l’humanité regorge de cas similaires. Il me semble qu’il existe une force intrinsèque à la marche de l’humanité et qui se manifeste sous forme d’une volonté personnelle insufflée par une impérieuse nécessité de l’Histoire à se réaliser dans un sens politique, plutôt que dans un autre. L’objectif, souvent inconscient de chaque acteur, est d’amener le genre humain à tendre vers son unité et son humanité. Abraham, Moïse, Jésus, Mohammed, Bouddha, Alexandre Le Grand, César, Jugurtha, la Kahina, Gengis Khan ou Catherine de Russie, Christophe Colomb, George Washington, Napoléon, Mao, Lénine, Churchill, de Gaulle, Gandhi ou Ho Chi Min… ne sont que les instruments de cette impérieuse nécessité poussant l’humanité à se connaître et à s’unir. Pour en arriver à la mondialisation, cette Histoire a poussé des hommes à établir des ordres, des religions, des royaumes, des empires et des civilisations, avant de recourir à la colonisation qui deviendra la pierre angulaire de la mondialisation que nous vivons de nos jours, avec ses institutions et ses technologies de plus en plus sophistiquées. Chacune de ces étapes a apporté, certes, son lot de malheurs, mais aussi, et surtout sa part de progrès. Celui qui a, en partie, percé le secret de cette marche du monde est Tocqueville. Selon lui, plus le monde se développe économiquement plus la démocratie égalise les conditions de vie des hommes ; plus la démocratie se renforce plus elle redresse les torts et les injustices, disqualifie l’iniquité et l’oppression des peuples.

La démocratie a, aujourd’hui à travers le monde, besoin de plus de liberté afin qu’elle profite à tous les peuples. Tout ordre, tout État qui se dresse contre elle finira par être balayé par ces instruments de réalisation de l’Histoire que sont les femmes et les hommes politiques chargés de guider chaque peuple vers son destin de liberté.

Ce qui m’anime se trouve donc est avant tout dans cet idéal de liberté et de dignité pour le peuple kabyle que j’avais longtemps confondu avec le peuple algérien. C’est cette nécessité vitale de réaliser une phase historique de la Kabylie, mais aussi de l’Afrique du Nord et de son environnement international, qui me donne le courage de dire et la force d’agir, formule que j’avais donnée au RCD dès les premiers mois de son existence.

Un gouvernement provisoire, des instances… quelle est la prochaine étape ?

La mission du MAK-Anavad est de doter la Kabylie de tous les attributs de souveraineté d’une nation dont le point d’orgue sera la proclamation de l’indépendance de la Kabylie. Nous mettons petit à petit un État kabyle en place. Nous avons déjà mis sur pied un gouvernement provisoire, un hymne national, un drapeau, un journal officiel, une agence d’information et une carte d’identité kabyle. Beaucoup reste à faire comme un Conseil consultatif, une sorte de parlement, de cadre de concertation et de délibération qui aura entre autres mission de 1) réaliser un consensus le plus large possible sur le droit à l’autodétermination de la Kabylie en aplanissant les divergences entre élites, 2) de proposer un projet de constitution. Il y aura bientôt, tel qu’annoncé par le président du MAK, une Ligue kabyle des Droits humains. L’Anavad travaille à la mise sur pied d’une académie de langue kabyle, d’une institution dédiée à la protection de l’environnement, d’un service d’ordre pour sécuriser le terrain en Kabylie où le pouvoir fonctionnarise les terroristes islamistes. Il faudrait que nous puissions avoir une télévision, une banque, un État-civil… en attendant d’avoir une justice qui nous soit propre ! La feuille de route reste encore étoffée. Nous sommes ouverts à son enrichissement par les citoyens kabyles.

Vos sorties sont systématiquement boudées par la presse nationale et dans certains cas, vous êtes la cible d’attaques haineuses… Votre combat semble incompris par les Algériens.

Pour disposer d’un média en Algérie, il vous faut un agrément que vous n’obtenez que si vous montrez patte blanche vis-à-vis du pouvoir en place. Ceux qui ne jouent pas le jeu auront le sort du « Matin » et de Mohamed Benchicou. C’est donc un système qui fait des médias des auxiliaires de propagande du régime en place. Globalement, en Algérie la presse est aux ordres des tenants du pouvoir. Ceci, étant, nous disposons de sympathies réelles au sein de nombreuses rédactions parmi les médias francophones, où depuis quelques mois, nous avons de temps en temps droit à des articles neutres, quand ils ne sont pas légèrement favorables. En revanche, dans la presse arabophone, la haine du Kabyle passe pour une vertu et une règle. C’est de l’infamie.

Je dois dire aussi que cette censure qui s’exerce, en Algérie comme en France d’ailleurs, contre nos activités et notre actualité prête à sourire. Quand la presse refuse de nous médiatiser, elle ne nous diminue en rien, elle se mutile et se ridiculise. Elle piétine son principe fondamental, le devoir d’informer, et donne l’image de la personne qui casse le thermomètre pour faire baisser la fièvre. Or, la censure aujourd’hui est impossible. Honte donc à tous ceux qui, délibérément, refusent de nous médiatiser.

Vous êtes un homme politique, un essayiste et maintenant un narrateur avec votre dernier livre sur le détournement d’avion d’Air France (Noël en Otage). Vous mettez aussi la chanson au service de votre combat. Comment trouvez-vous le temps pour composer ? Y aurait-il un album en préparation après celui sorti l’été dernier ?

Moi, j’ai plutôt l’impression d’être un peu distrait, voire paresseux. Le temps que je consacre à mon travail d’écriture, de composition et de réflexion est relativement court par rapport à celui de l’amitié et des relations publiques. Je suis un hyperactif nonchalant.

Je travaille depuis trois ans à la composition d’œuvres musicales de type classique et à leur orchestration par un ami breton, marqué par les 5 ans qu’il a passés en Kabylie au début des années 70. Monsieur Le Roux. Il y a près d’une trentaine de titres achevés et dont l’orchestration peut rappeler autant Tchaïkovski, Brahms ou Mozart… L’essai en valait la chandelle. Nous aurons le temps d’y revenir à sa publication. Je prépare également un livre sur l’indépendance de la Kabylie.

Que pensez-vous de la déclaration en tamazight de Ban Ki Moon qui a obligé Abdelmalek Sellal à répondre dans la même langue ?

Ban Ki Moon qui ne connaît pas le kabyle a fait l’effort d’apprendre une formule de politesse pour nous saluer dans notre langue. Bouteflika qui est soi-disant le président des Algériens refuse jusqu’à l’idée de reconnaître aux Kabyles qu’ils ont une langue à eux.

Ce geste est historique. Le Secrétaire général de l’ONU qui s’exprime en kabyle, est une victoire révolutionnaire pour les droits des peuples en général, et du peuple kabyle en particulier. Il valide de fait le droit de la Kabylie à son autodétermination.

Avec un acquis de cette taille, nous préparons le 20 avril 2016 avec plus de légitimité et de détermination pour dire comme un seul homme, à Vgayet, Tuvirett et Tizi-wezzu, qu’en tant que peuple kabyle et en tant que nation, nous avons le désir et la volonté de vivre libres, sur la terre de nos ancêtres. Je saisis cette occasion pour appeler toute la Kabylie à marcher tous ensemble pour un Etat kabyle indépendant.

Je mets en garde le pouvoir colonial algérien contre toute tentation de répression ou de perturbation de ces marches historiques. Nous savons qu’il souhaite récupérer l’événement afin de spolier la Kabylie de sa mémoire et de ses symboles. Le peuple kabyle ne l’admettra jamais.

En France, la commémoration aura lieu le 17 avril 2016, avec une grande marche qui ira de Bastille à République où un concert de clôture sera organisé. J’appelle toutes les associations kabyles de France à se joindre à cette manifestation en prenant d’ores et déjà leurs dispositions.

Auteur
Hamid Arab

 




L’ancêtre sans prophète

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Surprenant, déroutant, fascinant est ce roman fleuve de Mohamed Benchicou qui, après Les geôles d’Alger, témoignage de ses deux années d’incarcération, héritier de L’Arbitraire de Bachir Hadj Ali, semble vouloir prendre du recul par une savante intrusion dans le roman de genre épique sans se dessaisir toutefois de son regard vif et pénétrant de journaliste impénitent qui a exercé le droit de la liberté d’opinion sur l’actualité politique de l’Algérie de ce dernier quart de siècle marqué de profonds bouleversements.

Le Mensonge de Dieu met en contigüité deux récits évoluant, l’un dans l’Histoire des tragédies de la fin du 19ème siècle à la deuxième moitié du 20ème ; l’autre dans l’Algérie du 3ème millénaire. Partis de l’insurrection agraire de Aït Mokrane (Mokrani, El Mokrani) le chef confrérique de la zaouïa Rahmania que l’auteur écorche au passage, ces récits vont porter les personnages au cœur des batailles sanglantes de Verdun, des résistances vaines au franquisme, du soulèvement du Rif marocain dont désespérait son chef de file Abdelkrim, de l’horreur fasciste, dans les retournements surprenants de l’histoire, une famille d’origine kabyle, de père en fils et petits-fils, jusqu’à la tragédie du terrorisme islamiste au cœur d’Alger.

L’aïeul Bélaïd est un trublion de l’Histoire. Il conquiert aussi les cœurs de femmes rencontrées sur les routes de son errance guerroyant pour des causes qui n’étaient pas les siennes. Bravant la mort et l’amour, Belaïd se pose comme un ancêtre à la fois bouffon et truculent de vies et de bravades, comme soumis, malgré lui, aux turbulences de son siècle, parti d’une montagne chauve aux plaines embourbées de cadavres.

Le personnage de Bélaïd, l’ancêtre, acteur malgré lui d’un continuum de tragédies qui prennent source de son village kabyle haut perché, introduit, de manière inédite, sur le plan de l’esthétique romanesque, une rupture dans l’image littéraire de l’aïeul souvent décrit comme vecteur d’exotisme, porteur de nostalgies des temps révolus, symbolisant le sage, aguerri aux choses de la vie, moralisateur, référence idoine de la parole souveraine quand il n’est pas une sorte de totem tribal déifié. Or, à cette vision traditionnelle et mortifère de l’aïeul, telle qu’elle apparaît dans les œuvres fondatrices de la littérature maghrébine moderne, de Mouloud Feraoun, Mohammed Dib, Assia Djebbar, Malek Ouary, Mohamed Benchicou donne à lire son antithèse : un ancêtre « qui redouble » de vélocité pour vivre son temps, qui n’a pas peur de l’ailleurs, un ancêtre de guerres, de conquêtes féminines, épicurien, insaisissable, bravant le monde en un siècle de grandes turbulences. Cet aïeul littéraire est sans doute proche du personnage Si Mokhtar de Nedjma qui échappe, lui, aux pesanteurs historiques, et à Sidi Mohamed, l’ancêtre pèlerin, aux haras de juments croisés tel qu’il est construit dans les romans de Rachid Boudjedra, entre autres, Fascination.

Ce nouveau traitement romanesque de l’ancêtre rompt donc avec l’image éculée de la symbolique des racines sécurisantes. Bélaïd est la négation de toute identité sclérosée, de tout pieu solidement planté sur un bout de terre. Il a été aux confluents des races, des langues, des coutumes, des liqueurs, des hommes comme des femmes rencontrées, aimées sur les chemins incertains de l’indigénat. Son héritage est mouvant, volatile, insécurisant, angoissant.

Ses tragédies ininterrompues et ses instants de gloires intimes font de lui non pas seulement un acteur-témoin des guerres qui ont jalonné le 19ème siècle, mais surtout un être d’exception dont la trajectoire ne finit pas avec sa mort au combat. C’est toute l’Algérie qui, comme lui, n’a jamais connu de halte dans les tragédies de l’Histoire, qui se profile dans ce roman aux pages sombres et ensoleillées, sanguinolentes et revigorantes de sève, où les mots de batailles, de fusils, de mortiers, de cadavres côtoient ceux des conquêtes féminines, de l’amour, du goût insatiable aux mets les plus divers, aux origines culturelles défaites, comme le bon vieux couscous de Bélaïd dont les saveurs, à son grand étonnement, ont conquis bien des peuples avant de venir se faire rouler les grains dans son piton kabyle.

Derrière sa carapace de baroudeur, Bélaïd est, pourtant, d’une extrême fragilité. Il n’a pas l’étoffe d’un héros. Cet « indigène » apatride aguerri aux tranchées des obus et des escapades amoureuses, est fait, justement, de ce paradoxe. Ses descendants, éparpillés eux aussi, confrontés au même continuum de guerres, en sont les héritiers de tant de servitudes.

L’autre récit est celui de ses arrières-petits enfants, se retrouvant à Alger, en 2008, bloqués dans une Range Rover au cœur de Bab El-Oued, pris, eux aussi, dans la fournaise d’une autre guerre, des attentats terroristes. Mahla, la jeune Andalouse, d’origine juive, qui tient aux origines de son ancêtre impénitent, Bélaïd, le Kabyle de Souk El Djemaâ, à ses traditions culinaires des fêtes et rites hébraïques dont l’auteur ne tarit pas en détails gastronomiques, Kad, son ami, se cherche aussi dans ce fatras des origines brouillées, au confluent de rites, de réminiscences gustatives, de langues, de paysages, d’histoires d’amours et de guerres, de tragédies et de passions.

Au sein de l’équipée, un agent des services de renseignement, du DRS, est tourné en dérision par ses appareillages d’écoute téléphonique et autres moyens technologiques qu’il emploie pour débusquer un soi-disant complot du Mossad. Dans le même temps, une information le prend de court : un attentat kamikaze raté contre le Président lors de sa visite à Batna.

Alors que le premier récit, se déroulant dans une parfaite et inexorable tension chronologique des faits de guerre, est relayé par différents narrateurs dans leur succession générationnelle, le second qui se signale par un déroulé « Sur la route de Gao » est narré par une double voix : celle du carnet laissé par l’ancêtre Bélaïd que lisent tour à tour Mahla et Kad et sur lequel le DRS n’arrive pas à mettre la main et une autre voix qui s’insinue dans tout le corps du texte, plus « visible » dans ce second récit, celle du mendiant du cimetière, qui n’est autre que l’un des petits-fils de Bélaïd dont l’ombre plane sur le destin d’un pays est soumis aux vents mauvais du quatorzième siècle maudit de l’Hégire.

Ce deuxième récit qui catapulte le lecteur dans l’Algérie des années 2000 avec son lot d’attentats et de massacres du terrorisme islamiste, semble plus tiré vers le passé, la quête des origines d’un Bélaïd éparpillé puisque, Mahla, Kad reprenne le récit de l’aïeul, le saupoudre de détails et apparaissent moins enclin à vivre la situation du moment. Le personnage de Bélaid semble avoir échappé à l’auteur au point où il pèse de toute son ardeur historique sur ses petits-enfants qui oublient qu’ils sont coincés dans un embouteillage à Bab El Oued et abandonnent même cette nouvelle d’un attentat terroriste contre le Président à Batna.

En dépit d’une mise en haleine soutenue dans la partie de la chronologie historique, celle des batailles d’amour et de liberté de l’ancêtre, les personnages sont comme « mécanisés » dans leurs engagements dans les batailles au cours desquelles l’auteur ne les soumet pas à un temps de répit, de réflexion, à leur faiblesse humaine.

Automates, ils s’investissent, à corps perdu, portés, sans doute par un idéal de liberté, dans des guerres homériques et des aventures galantes. D’autres artifices viennent s’ajouter à cet « héroïsme » quelque peu apprêté : les nombreuses notes de bas de page qui alourdissent le récit et démotive le lecteur par des renvois explicatifs, commentatifs, anecdotiques dont le récit aurait gagné en fluidité si l’auteur s’était suffi d’un simple glossaire d’expressions, de mots jugés obstacles à la clarté du texte.

Sur le plan de sa construction formelle, l’auteur échappe avec bonheur et doigté à la construction chronologique spécifique au roman historique. Par la variété des genres (l’épistolaire, le récit pur, la voix-off théâtrale, le fait-divers, les fragments poétiques), le texte est polyphonique et s’offre au lecteur dans ses variations de registre de discours qui en dynamisent la lecture. L’auteur affirme lui-même s’être abreuvé des récits vrais et saignants du pays profond, racontés par ses enfants, et cite volontiers les écrits de Stora sur les juifs d’Algérie, de l’universitaire kateb sur la migration des républicains espagnols ou de Khemissi Nouari sur Colbert (actuelle Ain Oulmane), un émouvant manuscrit trouvé sur le site http://villagedecolbert.unblog.fr. Par une ingénieuse juxtaposition, le récit de Bélaïd et de ses enfants est interrompu par le déroulé « Sur la route de Gao », récit plus dense, plus introspectif, plus angoissant, des petits-enfants de l’inépuisable ancêtre qui, même mort, a le dernier. Le mensonge de Dieu, l’expression pourrait paraître blasphématoire, n’est, en définitive, qu’une vaine quête de la Vérité, aussi prophétique qu’elle soit, d’une ascendance brouillée, des racines défaites, des destins éparpillés, d’une Algérie « multi » aux ancêtres (pré) fabriqués, « mono« , imposés, bâtis sur une fausseté historique, identitaire et politique.

R.M.

Le mensonge de Dieu, de Mohamed Benchicou (Réed. Koukou, Inas, Alger, 2011)

Si Lhafidh, j’irai à Takhlijt

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Si Lhafidh

Si Lhafidh

J’irai là-haut à Takhlijt Ath Atsou, cette terre de rocs, de précipices, de braises et d’eau, me recueillir sur ta dernière demeure.

Je viendrai te rejoindre cher Si Lhafidh là où désormais tu observes notre petit monde. Je te vois, au loin, comme à tes habitudes, m’accueillir avec ce sourire et cette attention que seul toi savais cultiver. Comme nous le faisions depuis des années, tu me raconteras jadis, le temps de tes 20 ans que tu n’avais pas vu passer, trop pris que tu étais par cet idéal qu’était l’Algérie. Cette Algérie que tu n’auras pas vue libre et fière comme tu l’avais toujours rêvée.

Tu me raconteras les femmes et les hommes de ce pays partis trop tôt pour certains, oubliés pour d’autres. Hein Si Lhafidh, tu me parleras avec cette colère contenue des meurtrissures de cette terre. Toi qui avais foulé dans ta jeunesse chaque arpent de ces montagnes, qui ressent le moindre soubresaut de souffrance, qui connaissait villages et vallons, tu me reparleras avec toujours cette flamme inextinguible qui te consumait, de la faim, de la misère et de la soif de liberté qui brident les consciences des Algériens. Tu me donneras des nouvelles de ceux sont morts jeunes, trop jeunes pour l’Algérie.

Toi qui avais refusé de prendre tes enfants dans tes bras parce que, me disais-tu, la vue des milliers d’enfants orphelins à l’indépendance t’a marqué à jamais. «Qui les prendra dans ses bras tous ces enfants orphelins et dont les parents sont morts pour que nous vivions libres aujourd’hui ?», m’avais-tu répondu.

Qui d’autres que toi pour nous dire les sanglots étouffés des centaines de milliers de victimes de cette guerre d’indépendance et de cette autre que tu avais dû mener contre la dictature des usurpateurs de l’indépendance ? Tu ne pouvais supporter de voir le pays s’ordonner dans un autoritaire désordre. Non, il n’y avait que toi pour le faire.

Tu me parleras de ces blessures anciennes, de nos exils sans âge, des faux prophètes qui professaient une autre Algérie que l’Algérienne. Tu me diras avec pudeur le feu qui te consume depuis ta tendre enfance.

Toi, qui as tutoyé la mort plus d’une fois, qui a souverainement nargué le danger et refusé de céder devant le pouvoir de l’argent, tu me diras combien cette vie que nous perdons dans nos vanités ne vaut que si nous sommes maîtres de notre destin.

Avec cet éclair dans les yeux, tu me diras aussi l’un de tes seuls bonheurs : celui d’être resté un homme debout, malgré les assauts du temps et des hommes. Lénine avait dit que seule la vérité est révolutionnaire, en ce sens, je reste convaincu que tu étais la vérité.

Si Lhafidh, tu m’as fait partager au plus près le désespoir de vies brisées mais aussi l’espoir de lendemains meilleurs. J’en suis fier. Tes mémoires, tu les voulais comme un dernier baroud contre le mensonge, les outrances du temps et l’oubli calculateur. Aujourd’hui, c’est chose faite, tu as rendu la vie à tout un pan de notre histoire, tu as redessiné des visages oubliés et rendu impérissables ton parcours et celui de tes compagnons. Merci.

Il n’est point de bonheur sans liberté et point de liberté sans courage, c’était le très athénien Périclès qui l’avait écrit. Je puis te confier, aujourd’hui, ma conviction que tu étais le courage et la liberté. La droiture et la noblesse même.

Bientôt c’est le printemps Si Lhafidh, la nature et le pays tout entier se réveilleront de cet hiver qui nous glace. Adieu Si Lhafidh, adieu mon aîné.

Hamid Arab

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