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dimanche 6 juillet 2025
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Le Front al-Nosra pourrait avoir reçu de l' »aide » des USA et de Riyad

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Selon l’ancien premier ministre qatari :

Le Front al-Nosra pourrait avoir reçu de l' »aide » des USA et de Riyad

Dans un entretien sans langue de bois, l’ancien Premier ministre du Qatar a reconnu que l’aide militaire envoyée à l’opposition syrienne par le Qatar, la Turquie, l’Arabie saoudite et les Etats-Unis avait pu atterrir dans de mauvaises mains.

Dans un entretien accordé par à la chaîne arabophone Qatar TV en octobre 2017, Hamad ben Jassem al-Thani, ancien Premier ministre du Qatar, est revenu sur les débuts du conflit syrien, révélant quelques éléments du soutien étranger aux rebelles anti-Bachar el-Assad.

Alors que le Qatar est désormais accusé par l’Arabie saoudite de soutenir le terrorisme, l’ancien haut responsable affirme s’être rendu en Arabie saoudite «au début des événements en Syrie» en 2011, pour y rencontrer le roi Abdallah, père de l’actuel monarque Salmane et qui dirigea le royaume de 2005 à 2015. Il ajoute que son pays, les Etats-Unis et l’Arabie saoudite était tous d’accord pour soutenir les forces anti-Assad.

Le roi saoudien aurait assuré Hamad ben Jassem al-Thani du soutien de l’Arabie saoudite à la ligne suivie par le Qatar dans ce dossier : Doha, où la Coalition nationale des forces de l’opposition et de la révolution (CNFOR) syrienne a d’ailleurs été créée dès novembre 2012, s’est très tôt positionnée en faveur des rebelles. A l’époque, Bachar el-Assad avait d’ailleurs qualifié les mouvements de rébellion de «véritable guerre menée de l’étranger», en référence à ces appuis de l’extérieur.

Le roi Abdallah aurait en outre exprimé son accord pour que le Qatar assume la «pleine responsabilité» de la mise en œuvre du soutien aux rebelles, tout en vantant les mérites d’une coordination entre Riyad et Doha. Dans ce cadre, «tout ce qui était envoyé en Syrie [à destination des rebelles] transitait par la Turquie, par les forces américaines et par [le Qatar]», ajoute Hamad ben Jassem al-Thani, sans préciser le contenu des livraisons effectuées aux rebelles.

Au cours de ces opérations, «il se peut qu’il y ait eu des erreurs et qu’un soutien ait été apporté aux mauvaises factions», reconnaît Hamad ben Jassem al-Thani, tout en excluant que l’Etat islamique ait pu être concerné. «Peut-être y a-t-il eu des liens avec le Front al-Nosra [désormais Fatah al-Cham, groupe terroriste lié à al-Qaïda], c’est possible», a-t-il poursuivi, assurant toutefois ne pas en avoir été informé «à titre personnel».

Il a ensuite souligné que le Qatar avait «stoppé» tout lien avec le front al-Nosra après qu’il fut formellement désigné comme organisation terroriste dans plusieurs résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU. L’ancien Premier ministre n’a toutefois pas précisé la nature de ces liens.

«Nous nous battions pour une proie»

Evoquant l’objectif de «libération de la Syrie» qu’assurent poursuivre les différents membres de la coalition internationale menée par les Etats-Unis, parmi lesquels figurent le Qatar et l’Arabie saoudite, Hamad ben Jassem al-Thani explique : «Nous nous battions pour une proie, et maintenant que cette proie est partie, nous nous battons encore.» Toutefois, si la chute de Daesh à Raqqa est décrite comme un élément de «libération de la Syrie» par l’ancien Premier ministre, du point de vue du gouvernement syrien, on ne saurait parler de libération qu’une fois tout le territoire national sous contrôle de l’armée syrienne.

Sur la question du départ de Bachar el-Assad, longtemps considérée par la coalition comme prioritaire à toute issue du conflit, Hamad ben Jassem al-Thani se montre plus qu’amer, estimant que ses anciens alliés envisagent désormais le maintien du président syrien. «Si vous dites « Ok, Bachar peut rester », ce n’est pas grave : nous n’avons pas envie d’une vengeance contre lui», assure-t-il en s’adressant à ceux-ci, avant d’ajouter : «Mais vous étiez jadis dans la même tranchée que nous… […] Le problème, c’est la solution de continuité». «Je n’ai rien contre le fait que l’on change d’avis si l’on pense avoir eu tort, mais il faut au moins en informer ses partenaires», conclut-il.

 

 

Auteur
Avec RT

 




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La facture des produits alimentaires en hausse, celle des médicaments en baisse

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Importations:

La facture des produits alimentaires en hausse, celle des médicaments en baisse

 La facture d’importation du Groupe des produits alimentaires a augmenté à 6,5 milliards de dollars sur les neuf (9) premiers mois de l’année en cours (contre 6,11 milliards de dollars durant la même période de 2016), soit une hausse de 6,4%, tandis que celle des médicaments a connu une baisse de 5,01%, a appris l’APS auprès des Douanes. 

Cependant, sur l’ensemble du Groupe des produits alimentaires, seules les importations des céréales et des viandes ont enregistré une baisse quoique légère.

Ainsi, les céréales (blé dur, tendre…), semoule et farine ont été importés pour un montant de 2,11 milliards de dollars contre 2,13 milliards de dollars, en baisse de 0,72%.

Pour ce qui concerne les laits et produits laitiers, la facture a bondi à 1,15 milliard de dollars entre début janvier et fin septembre 2017, contre 727,5 millions de dollars durant la même période de l’année dernière, en hausse de 58,23%, détaille le Centre national de l’information et des statistiques des Douanes (CNIS).

Une même tendance haussière est constatée pour les sucres et sucreries dont les importations se sont chiffrées à 827,96 millions de dollars contre 678,34 millions de dollars, soit une augmentation de 22,06%.

Quant à la facture d’importation du café et thé, elle a atteint 323,54 millions de dollars contre 297,22 millions de dollars (+8,86%).

Pour les légumes secs et autres, ils ont été importés pour un montant de 264,34 millions de dollars contre 206,91 millions de dollars (+27,8%).

Par contre, les viandes ont été importées pour 168,23 millions de dollars contre 185,24 millions de dollars sur la même période de 2016, soit une diminution de 9,2%.

Concernant les huiles destinées à l’industrie alimentaire (classées dans le Groupe des biens destinés au fonctionnement de l’outil de production), leurs importations ont grimpé à 612,2 millions de dollars contre 540 millions de dollars, en hausse de 13,4%.

Ainsi, la facture globale du Groupe des produits alimentaires et des huiles destinées à l’industrie alimentaire a coûté 7,11 milliards de dollars sur les 9 premiers mois de 2017 (contre 6,64 milliards de dollars sur la même période de 2016).

Par ailleurs, la facture d’importation des médicaments a reculé en passant à 1,42 milliard de dollars contre 1,49 milliard de dollars, en baisse de 5,01%.

Pour rappel, le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi, a annoncé récemment que son département ministériel entend réduire les importations du pays à 41 milliards de dollars à la fin 2017 et à 30 milliards de dollars en 2018, et ce, pour préserver les réserves de change et protéger la production nationale.

Selon le ministre, l’importation de certains produits sera suspendue totalement et définitivement.

Le projet de Loi de finances 2018, en cours d’examen par l’APN, propose un support juridique pour l’application de droits douaniers sur 32 produits ainsi que la Taxe interne sur la consommation (TIC) sur d’autres produits.

Une vingtaine de produits représente à elle seule 51% de la facture globale des importations, a estimé M. Benmeradi qui a affirmé que certains produits non essentiels qui alourdissent cette facture seront interdits à l’instar des grains de tournesol dont les importations sont de 25 millions de dollars/an, la mayonnaise (20 millions de dollars) et le chewing-gum (25 millions de dollars).

 

Auteur
APS

 




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Les ravages de lieux communs et de l’inculture….

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Institutions

Les ravages de lieux communs et de l’inculture….

Ainsi des têtes ‘’pensantes’’ définissent l’État comme une addition d’administrations gérant la société, ignorant au passage le Politique. Ce dernier détient le vrai pouvoir et a à son service la loi et des bras armés (police et justice) pour faire appliquer les lois par lesdites administrations. Pauvres Machiavel, Marx, Montesquieu, Hobbes  et tant d’autres qui ont légué à l’humanité l’essence du Politique, le socle sur lequel repose le monstre de l’Etat moderne. Quant à la notion de peuple, d’aucuns donnent leur définition en se regardant dans un miroir. Eux aussi oublient de fouiller dans les archives d’un tribunal sans magistrats mais portant sur le fronton de son bâtiment Histoire. Celle-ci  ne fait pas de distinction entre ses enfants mais les désigne par un nom pour faciliter leur identification. A l’évidence cette ignorance ou cette impuissance devant la philosophie de l’Histoire désarme plus d’un. Par masquer leur ignorance, ils invoquent alors la multiplicité des avis et opinions sur les événements historiques.

Ne savent-ils pas que l’histoire n’échappe pas à l’idéologie de ceux qui l’écrivent. Ne savent-ils pas que l’Histoire comme toutes les sciences fait des progrès en fonction des découvertes de nouvelles archives ou bien quand les pouvoirs politiques lèvent le secret sur des événements gênants. Enfin l’histoire s’éclaire quand cette science élabore de nouveaux d’outils théoriques. Tous ces progrès, levée des secrets d’Etats et élaboration de nouveaux concepts théoriques suffisent pour cerner les notions d’Etat, de nation, de peuple, d’identité. En dépit de ces avancées, il est des gens qui persistent à servir au bon peuple des lieux communs.

Pourtant, ce n’est pas les exemples qui manquent pour se rendre compte de la complexité des choses qui relèvent de l’Histoire. La crise en Espagne actuellement est née à la suite de la déclaration de l’indépendance de la Catalogne. La difficulté à résoudre cette crise découle de deux légitimités produites par l’histoire. La Catalogne est une entité politique et culturelle qui n’a pas toujours été intégrée à l’Etat espagnol. Ce dernier avance des arguments à la fois historiques et constitutionnels pour refuser un divorce qui porterait atteinte à l’intégrité du pays. Réfléchir sur l’Etat, institution éminemment politique, est impossible sans tenir compte de l’histoire et des rapports de force qu’elle engendre. C’est pourquoi lesdits Etats sont ‘’affublés’’ de qualificatifs, démocratique, populaire, fédéral, confédéral etc. Derrière ces qualificatifs se nichent dans les entrailles du pays en question une histoire particulière, une ou des cultures, une ou des religions qui cohabitent. L’État américain ne ‘’pouvait’’ être que fédéral comme la république française ne ‘’pouvait’’ être que jacobine.

Un simple regard sur l’histoire de ces deux pays éclairera donc notre lanterne. La notion de peuple est elle-même tributaire de la nature de l’État. A l’intérieur de ce dernier, on peut aussi bien parler de peuple au singulier qu’au pluriel. On parle de peuples au pluriel dans des immensités territoriales où un État conquérant occupe un territoire en permettant à la communauté qui y habite de vivre selon ses traditions, croyances, sa ou ses langues, sauf que la souveraineté du territoire échappe aux autochtones.… On rencontre cette situation aux USA (1), au Canada et dans l’ex-union soviétique où existaient des républiques avec leurs langues et leurs particularismes.

Mais dans les pays dont l’histoire se perd dans la nuit des temps et à cause précisément de cette longue histoire, les déplacements et les mélanges des populations ont finit par créer un nouveau paysage politique et culturel qui irrigue le tissu social dans lequel baigne ces populations. Quand bien même, le citoyen garde sa religion ou des pratiques culturelles (artistiques et gastronomiques), il se définit et se sent comme faisant partie du peuple habitant un territoire délimité. Dans certains pays, apparaît aujourd’hui un critère uniquement idéologique qui peut influencer le citoyen dans ses choix politiques. C’est pourquoi en France a été ‘’inventée’’ la notion de peuple de gauche et de droite. Ce critère idéologique sert à évaluer le degré d’engagement pour la justice sociale, l’égalité homme/femme ou bien la fidélité à la patrie quand le pays est envahi (exemple de la collaboration avec l’ennemi en France durant la seconde guerre mondiale)

Ces notions (État, nation, peuple) non maîtrisées produisent des poncifs et les lieux communs dans la vie politique. Ainsi en France, depuis le roi soleil, Louis XIV qui aurait déclaré ‘’l’Etat c’est moi’’ est devenu de nos jours ‘’l’Etat c’est nous les citoyens’’. Quelle aubaine pour les politiques qui abusent de ce mensonge en faisant avaler la pilule pour faire passer une réforme. Chez nous la notion de Beylik sert encore à des petits malins pour s’accaparer des biens publics et justifient leur conduite crapuleuse sous prétexte qu’ils ne volent pas les gens.

Voilà pourquoi, des définitions hasardeuses sur des notions politiques engendrent des poncifs qui formatent les esprits et facilitent le travail des petits marquis de la politique et de la culture. Ce formatage est organisé par les appareils idéologiques et les institutions politiques des États. Chez nous, on en voit les effets sur la société à qui on offre le choix entre la bigoterie et l’archaïsme des traditions et la ‘’modernité’’ mal digérée parce que produite ailleurs. Et on se demande pourquoi tant d’ennui dans notre morne quotidien. Et pourquoi les cerveaux tournent à vide alors qu’ils ont de l’intelligence à revendre..

Ce vide on le retrouve dans la notion de l’amour dont on n’ose même pas prononcer le mot. On a l’impression que l’Amour souffre non pas de la confusion des esprits mais plutôt de la confusion mentale. L’Amour que le bébé rencontre la première fois en suçant le sein de sa maman, le voilà chez nous, domicilié à un seul endroit, le lit et sa pratique se fait dans le noir et le silence. Ainsi l’amour vénéré par tous, sa beauté chantée par le poète, est surveillé au nom d’une morale puérile. Oubliées les tournées des troubadours qui colportaient les belles chansons à travers le royaume de l’Andalousie. Oublié cet héritage qui a profité à l’Europe médiévale. Cette Europe qui a découvert l’amour courtois des Andalous pour construire son discours amoureux  où se déploient l’intelligence et l’élégance dans le jeu de la séduction. Espérons renouer un jour avec cette vision des choses où le mot volupté retrouvera son délice et sa densité provoqué par la puissance du désir.

Il est évident que les poncifs et lieux communs sévissent ailleurs mais trouvent devant eux des résistances politiques par le biais des productions scientifiques et artistiques. Mais chez nous les lessiveuses pour nous débarrasser  des banalités qui plombent notre quotidien, souffrent des ratés de leurs moteurs. Dans cette bagarre contre cette fatalité devenue la norme indépassable de cette ‘’culture’’ archaïque, peu de places sont réservées aux langues et aux langages qui sont l’humus qui fertilise le champ des connaissances. Écoutons Aristote qui nous donne sa définition de lieux communs et de leurs rôles dans leurs oppositions à la science : « Les idées les plus générales, celles que l’on pouvait utiliser dans tous les discours, dans tous les écrits ».

On se demande pourquoi les lieux communs et les poncifs continuent à tenir leur place dans un monde ouvert à tous les vents, alors qu’Aristote (et beaucoup d’autres philosophes) les ont cloués au pilori il y a belle lurette. Parce qu’on préfère faire ‘’voyager’’ les gens dans le trou noir de l’univers, un voyage pathétique sans ticket de retour où l’on perd ses repères d’êtres vivants. Car un vivant ça réfléchit et donc dangereux. Le Ta ab taf hem (toi tu veux comprendre), de chez nous est un poncif qui dit tout sur la peur de la connaissance.

A. A.

Notes

(1) L’exemple des USA a séduit l’État d’Israël qui a proposé à Arafat lors des négociations de Camp David que les Palestiniens vivent sur la surface de la terre à Jérusalem avec leurs lois mais que le sol et le sous-sol de la ville sainte soit sous la souveraineté d’Israël.

Auteur
Ali Akika, cinéaste

 




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Benamar Mediene : « Comment Novembre a été perverti » (2)

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Entretien

Benamar Mediene : « Comment Novembre a été perverti » (2)

Le pouvoir depuis une vingtaine d’années a eu le génie de transformer le mouvement en inertie. Nous sommes l’un des rares pays à faire de l’inertie son programme politique. Faire de l’agitation pour l’agitation, mais qui revient au même. On s’agite et on n’avance pas. L’inertie c’est la garantie de la pérennité de ce type de pouvoir. Il y a très peu d’intelligences en Algérie. Ils partent. Il n’y a plus de création. On aurait dû produire au moins un Nobel, des physiciens de grandes qualité, des peintres. On ne produit plus d’intelligence, ni de symbolique. On vit sur un symbolique usé, rapiécé.

Pour revenir à Novembre, est-ce qu’il n’y a pas eu rupture, avec le mouvement national originel, celui de l’Etoile nord-africaine et de Messali, qui n’ont jamais cessé d’accompagner la revendication d’indépendance d’une revendication d’Etat démocratique désigné par une Assemblée constituante élue au suffrage universel ?

La rupture se fait en 56. Le congrès de la Soummam a été là aussi une scène fondatrice et en même temps, elle a produit sa propre négation. C’est-à-dire qu’on parle d’une République démocratique et sociale, sans discrimination. On incluait les juifs, les chrétiens, tout le monde. En même temps, 56-57, c’est la négation des principes contenus dans la charte de la Soummam. C’était un moment démocratique, il y avait des politiques et des militaires ; on organise l’ALN, les régions, les wilayas. Et tout cela devenait dangereux, dans la mesure où cette idée du primat de l’intérieur sur l’extérieur et du politique sur le militaire a constitué le point de fission, la cassure.

Quand on voit le nombre de militants étrangers, les amis de l’Algérie, qui se sont investis dans cette révolution, comme ceux du réseau Jeanson, n’y avait-il pas de signes qu’ils allaient contribuer à libérer un pays pour l’offrir à un pouvoir putschiste ? On les entend aujourd’hui traîner leur dépit…Y avait-il à ce point l’illusion de contribuer à créer un Etat démocratique ?

Jeanson n’était pas dupe, même pendant la guerre. Quand il y a eu l’interdiction de boire de l’alcool et de fumer, cela a été symboliquement très grave. En France, tu as une population d’ouvriers carencés affectivement, sexuellement, symboliquement, et tu leur interdit de fumer. Même pour l’alcool, c’était la bastonnade, la défiguration, l’amputation. J’étais responsable à Nanterre, et j’ai fait matraquer un cousin car il était arrivé soûl, et j’étais obligé de le faire car sinon c’était moi qui étais sanctionné.

Cela préfigurait de quoi ?

D’un début d’islamisation. C’est-à-dire que le prétexte d’interdire pour affaiblir l’économie française – ce n’est pas un verre de vin qui va mettre l’économie française à genoux- était fallacieux. C’est à ce moment-là que Kateb, Issiakhem, Zinet entre autres, créent le CCK, le Comité Central de la Kuite, mais avec un « K ». Des responsables leur ont conseillés de se mettre à l’abri car ils risquaient gros. A Paris, ils ne pouvaient rien pour eux. Ils ont été obligés de s’enfuir.

Pour en revenir aux amis de l’Algérie « déçus », que ressens-tu aujourd’hui, avec le recul de 60 ans ?

J’ai été victime d’une imposture dont je n’ai pas pris conscience immédiatement. La preuve est que j’ai milité, j’étais au PAGS, je militais pour la Révolution agraire, j’enseignais dans les collèges syndicaux, et en même temps je sentais des lambeaux de ma vie partir. Je voyais mes enfants grandir, se marier, mes petits-enfants naître, et l’Algérie tomber en poussière. Elle nous décevait comme un amour brisé. Il y a quelque chose d’atroce de voir cette élite politique à la fois corrompue et arrogante. Qui t’insultent autant qu’ils insultent l’histoire, les martyrs qui sont morts pour cette idée de liberté. Il n’y avait pas seulement l’indépendance, mais les libertés qui en sont la substance. La substance de l’indépendance, c’est la liberté. Or, on a suturé la source de cette substance, la sève vivifiante. Et cette élite politique, aussi bien celle du pouvoir étatique que celle des partis est une insulte à l’histoire.

Si tu dois faire le parallèle avec la situation d’aujourd’hui. Nous sommes toujours dans la continuité de ce régime ?

Le pouvoir depuis une vingtaine d’années a eu le génie de transformer le mouvement en inertie. Nous sommes l’un des rares pays à faire de l’inertie son programme politique. Faire de l’agitation pour l’agitation, mais qui revient au même. On s’agite et on n’avance pas. L’inertie c’est la garantie de la pérennité de ce type de pouvoir. Il y a très peu d’intelligences en Algérie. Ils partent. Il n’y a plus de création. On aurait dû produire au moins un Nobel, des physiciens de grandes qualité, des peintres. On ne produit plus d’intelligence, ni de symbolique. On vit sur un symbolique usé, rapiécé. Ils parlent des martyrs pour s’en nourrir, ils se nourrissent de la banque du sang, pour justifier des vols, des détournements spectaculaires à ciel ouvert. Des ministres qui achètent des appartements en bord de Seine…Ils nous crachent dessus. Ce FLN qui a tellement symbolisé dans les années 50 une des choses les plus belles du milieu du XXe siècle, devenu un repaire de corrompus. Le pire, c’est qu’ils ont contaminé la société de leur inertie. La société est devenue docile. On la vole, et on la rend complice du vol. Car on est complice. On n’arrive pas à dénoncer, à les traduire devant la justice.

La chose la plus terrible est d’avoir créé cette attitude de servitude chez les algériens. On est devenus des servants. On sert à ce pouvoir de légitimité…On sait que les élections sont truquées, on sait que les gens ne votent pas. Et pourtant les élus s’arrogent des 90% de voix.

Est-ce qu’il faut un autre novembre ?

La société algérienne est dépassée de partout : sur les plans intellectuel, scientifique, de l’efficacité de l’Etat, du développement économique. L’absence d’industrialisation, la carence de l’agriculture sont compensés par la rente. Mais la rente n’est pas un don éternel de Dieu. Alors, pourquoi cette réactivation de l’islamisation de la société ? Cette liberté donnée à des muftis racoleurs de travailler encore et encore la société, de perpétuer l’inertie. La croyance aveugle, magique pratiquement, travaille l’inertie. Le pouvoir s’en sert comme garde du corps. Le garde du corps le plus efficace, n’est pas le DRS, n’est pas l’armée, c’est la religion. EXERGUE. Non pas que le DRS n’est pas important, mais quand un président dit « moi si j’avais leur âge, je serais dans les maquis », il faudrait lui rappeler qu’a leur âge il était déjà ministre, déjà capitaine d’état-major, il ne connaissait pas l’Algérie. Il arrivait dans les bagages de Boumediene. Il ne peut pas savoir ce que veulent ces gens.

Tu dis que tout est compensé par la rente. Il achète la paix sociale, l’anesthésiant. Maintenant avec la baisse substantielle de la rente, qu’est-ce qui pourrait se passer ?

C’est le point aveugle de l’avenir. Comment la société va réagir ? Les groupes clientéliste du pouvoir, ceux qui en fait récupèrent l’essentiel de la rente, comment vont-ils réagir ? Ça paraît terrifiant. On arrive à cette conclusion désastreuse : depuis 20 ans, il n’y a pas de projet politique. On continue de gérer le pays comme on gérait les états-majors. On parle de système – pour moi ce n’est pas un systèmes, mais une composition, recomposition à l’infini de groupes avec un noyau central.

Qu’est-ce qui fait que Bouteflika tienne le coup ? Comment cet homme diminué physiquement et intellectuellement n’arrive pas à comprendre qu’il n’est pas dans une situation physique et intellectuelle de conduire un pays ? Et que ça continue à fonctionner. Le système veut des filiations et des affiliations. Haddad, inconnu il y a 10 ans est un nouveau venu. Il est en train de conduire l’économie du pays. C’est lui qui fait la réunion des ministres. C’est une image surréaliste.

Ce système hérité de Novembre, qui a réussi à conserver l’inertie, peut-il se régénérer à travers… ?

Non, car son capital symbolique est épuisé. Ils continuent mais ça ne fonctionne plus. Tu as une organisation des moudjahidine qui n’a pas levé le petit doigt pendant la décennie noire. L’organisation des enfants de martyrs ne se sont pas constitués en groupes d’autodéfense pour défendre la patrie de leurs pères. Ça a été des citoyens, des individus, des anciens moudjahids, des jeunes gens, qui se sont armés et qui ont sauvé la république, avec l’armée qui a joué un rôle important. Mais cela reste pour moi une des grandes déceptions. Les anciens moudjahidine n’ont pas repris les armes, parce qu’il n’y a plus d’ancien moudjahidine. On est le plus grand pays producteur d’anciens combattants du monde. Car, on continue à en produire. C’est le 4e budget de l’Etat, 60 ans après l’indépendance. Plus que la santé ou l’agriculture.

Comment expliques-tu la position de l’armée ? Cette situation de connivence… Elle fait partie de ce système d’inertie ?

On est en train de casser le potentiel de défense de la société comme on casse la force immunitaire d’un individu, en préparant la succession de Bouteflika, il faut neutraliser, contrôler en tout cas, au maximum, les différents organes de l’armée. C’est une analyse strictement personnelle, personne n’a les éléments pour pouvoir apprécier de façon juste. Mais on le sent à travers la nomination, les départs forcés et impromptus. Des généraux qui partent, d’autres qui reviennent…

Des changements, des redistributions des postes. Tout cela augure de quelque chose d’inquiétant. Et en même temps, nous sommes un pays politiquement et militairement fragile. Quand on voit aux frontières le Maroc qui affute ses armes, les menaces aux frontières malienne et libyenne. C’est terrible. Ils prennent un risque en se détachant de la population. L’armée nous a sauvés en

92 et ils continuent de payer. Si on neutralise la puissance militaire de l’Algérie, on rentre aussi dans une vision géopolitique internationale et mondiale. Ce n’est pas une affaire stricto algéro-algérienne. Cela concerne vraiment tout le bassin méditerranéen, sans oublier les sphères africaine, et mondiale.

Quelle serait la stratégie ?

Les E.-U., la Chine, l’Europe, l’Afrique, redevenue le continent qu’il était au 19e siècle. Il était le continent de l’expansion du capitalisme occidental, européen en particulier. Aujourd’hui, avec ses 800 M d’habitants, c’est le continent d’avenir de ces pays, auquel s’ajoute notamment le Brésil. Alors que l’Algérie avait la capacité de devenir un pôle de rayonnement intellectuel, artistique, politique de l’Afrique, sorte d’alter ego avec l’Afrique du Sud, on est devenu un chien sans dents. On est devenu vulnérables.

Tu le lies au fait qu’on a enlevé la substance de l’indépendance ?

Toutes les libertés données à ce peuple, dont il a été privé un siècle et demi, qu’il a payé pendant les 8 années de guerres. On l’a contaminé par l’inertie et la servitude. On a perdu deux choses qui pour moi ont de grandes qualités : On a perdu la fierté, qui se nourrit de l’expérience. Souviens-toi de la réputation de l’Algérien des années 70 dans le monde. J’ai voyagé au Zimbabwe, au Mozambique dans les années 80. Me présentant comme Algérien, on embrassait presque mon passeport. Aujourd’hui, en se disant algérien, il vaut mieux être discret. On a aussi perdu la compassion, sœur de la solidarité. La solidarité chez nous était initialement le partage de la souffrance, parce que nous avions souffert, et nous avons partagé. Quand on voit que des milliers d’Algériens se noient en Méditerranée, que des centaines d’algériens s’immolent par le feu, et on ne dit rien. Pas un discours. Le départ, ce n’est pas seulement représentatif de la mal-vie, mais de l’échec du pouvoir. « Je ne reste pas dans ce pays, je ne le reconnais pas, il ne me reconnaît pas ». On revient au sentiment de fierté, « je pars d’ici en tant que citoyen » à quelque chose qui nous dépasse. On est toujours dans l’horizon bouché, c’est ce qui est effrayant.

Le régime algérien est épuisé, il ne peut plus user des vieux prétextes. Mais continue à rester au pouvoir. Ne vois-tu pas une mutation vers un régime qui continue, sans chercher l’aval de la population ?

Il ne peut pas continuer à être séparé. Il y a une rupture avec la société, mais ça ne peut pas fonctionner indéfiniment. Si on ne veut pas revivre Novembre, il faut reprendre le capital symbolique qui est à nous. Il faut reprendre le capital symbolique car c’est le seul moyen de cohésion de la société, et que les citoyens se reconnaissent à la fois dans le capital symbolique, et dans son ouverture sur la modernité, sur le développement de nos capacité intellectuelles, affectives. On a besoin de bonheur. C’est la chose la plus rare en Algérie. EXERGUE. Beaucoup d’anciens moudjahid, beaucoup de pétrole, mais très peu de bonheur. Car il y a un viol de l’histoire qui se répercute nécessairement sur le viol du présent. On viole le présent. C’est aux Algériens de reprendre Novembre. Nous, on est un peu fatigués aujourd’hui. On le voit aujourd’hui, ça bouge.

Mais on a affaire à une élite politique tellement inculte, c’est quelque chose d’incroyable. Voir des ministres, même ingénieur ou médecin de formation, incultes mais arrogants… Le pouvoir qu’ils exercent fait qu’ils n’habitent plus en Algérie. Ils sont sur le territoire, mais la tête est ailleurs. J’ai remarqué cela aux élections des maires. Un maire, dès qu’il est élu il ne regarde plus la ville. Dès le moment où il est élu, qu’il a un garde du corps, la voiture de fonction et le cabinet. A l’instant T+1 seconde, il « déménage ». C’est le syndrome. Ils cherchent le poste d’ambassadeur à Madrid, Berlin, Paris, Rome. Il n’y a pas d’Algérien dans l’état, ce sont des conquérants.

Il y a encore des ressorts dans la société ?

Oui, c’est dans la culture humaine. Je le vois à travers mes petits-enfants, ceux des amis. Ils ne se laissent pas faire. Il y a un vrai potentiel.

Ces gens qui gouvernent ne sont pas éternel. Même si les moudjahid se reproduisent…

 

 

Auteur
Mohamed Benchicou

 




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Colloque Femmes en exil*

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Association culturelle berbère (ACB)

Colloque Femmes en exil*

Il aura lieu samedi 4 novembre 2017 à 14h au Pavillon Carré de Baudouin
121 Rue de Ménilmontant, 75020 Paris. Accès : Métro Gambetta (L3)
Bus lignes 96 et 26 arrêt Pyrénées-Ménilmontant

Intervenantes :

CHAHLA CHAFIQ : écrivaine et sociologue iranienne,
vivant en France, membre du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes.
MIMOUNA HADJAM : militante associative, politique et féministe,
elle dirige l’association Africa, située au cœur de la Cité des 4000 à la Courneuve.

Un colloque animé par SOAD BABA-AISSA
Note d’intention :

Ce colloque part d’un constat : la question des femmes en exil, réfugiées est très peu abordée voire inexistante. Il devient donc nécessaire de rendre les femmes migrantes visibles et de mettre en lumière les problématiques que les réfugiées rencontrent, sous l’angle sociologique et juridique. Il est une nécessité de parler de ce sujet et des violences que les femmes vivent en tant que migrantes et du fait qu’elles sont invisibles, on ne parle pas d’elles et il est urgent de les faire entendre, de leur donner de la visibilité.

Le colloque est le début d’une mobilisation pour cette cause et a pour objectif de déclencher des actions militantes dont, en premier lieu, la lutte pour la reconnaissance d’un statut des femmes migrantes (combat mené par les associations Africa 93 et Femmes solidaires).

*exil : subst. masc.
a) Tout changement de résidence, volontaire ou non,
qui provoque un sentiment ou une impression de dépaysement.
b) Éloignement affectif ou moral; séparation qui fait qu’un être
est privé de ce à quoi ou de ce à qui il est attaché.

Renseignements et réservations obligatoires
auprès de
l’Association de Culture Berbère
Tél : 01 43 58 23 25
Email : contact@acbparis.org

 

 




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L’ex-directeur de campagne de Trump inculpé de complot contre les Etats-Unis

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Espionnage

L’ex-directeur de campagne de Trump inculpé de complot contre les Etats-Unis

L’ancien directeur de campagne de Donald Trump, Paul Manafort, est visé par 12 chefs d’inculpation, dont complot contre les Etats-Unis, blanchiment, fausses déclarations et non déclarations de comptes détenus à l’étranger, a annoncé le porte-parole du procureur spécial de l’enquête russe.

M. Manafort, qui s’est rendu lundi au bureau du FBI du Washington, pourrait être présenté à la justice dans la foulée, a précisé Peter Carr, le porte-parole de Robert Mueller.

Auteur
AFP

 




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Ali Yahia Abdenour, Benyelles et Taleb Ibrahimi répondent à leurs détracteurs

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Polémique

Ali Yahia Abdenour, Benyelles et Taleb Ibrahimi répondent à leurs détracteurs

 Ali Yahia Abdenour, Taleb Ibrahimi et Benyelles ont rendu public le 7 octobre un appel pour faire barrage à un 5e mandat de Bouteflika. Leur appel a déclenché une véritable levée de boucliers des tenants du pouvoir mais aussi de Noureddine Boukrouh qui leur a reproché de l’avoir plagié. Dans le communiqué aujourd’hui lundi, ils se défendent de toute ambition politique, notamment eu égard à leur grand âge et répondent à leurs détracteurs. Lecture :

« Au crépuscule de leur vie, les signataires de la déclaration du 7 octobre dernier tiennent à préciser qu’en lançant leur appel, ils n’avaient aucune ambition politique ou un quelconque désir d’occuper l’espace médiatique pour faire parler d’eux.

Loin des polémiques stériles, et contrairement à ce que déclarent l’un des principaux tenants du pouvoir et certains de leurs suppôts, leur seul objectif était d’attirer l’attention de l’opinion publique sur la situation extrêmement préoccupante que traverse le pays, et de contribuer modestement au rassemblement des forces patriotiques afin d’imposer pacifiquement l’instauration d’un régime démocratique, et permettre l’avènement d’une nouvelle génération de dirigeants des femmes et des hommes, en phase avec leur siècle et en pleine possession de leurs capacités physiques et intellectuelles.

A la veille de la célébration du 1er Novembre 1954, anniversaire du déclenchement de la lutte armée contre les forces d’occupation coloniales, les signataires du présent communiqué ont une pensée émue pour les martyrs de la Révolution. Ils espèrent que les sacrifices qu’ils ont consentis pour la libération du pays n’auront pas été vains. »

Auteur
Yacine. K

 




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Le 1er Novembre 1954 du point de vue du peuple

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Révolution

Le 1er Novembre 1954 du point de vue du peuple

On a dit et on continue à dire beaucoup sur cette date. Mais, il me semble que quelque chose n’a pas été exprimé, du moins pas suffisamment et clairement. J’essaierai donc d’apporter ma modeste contribution. Elle n’est pas d’un historien, ni d’un expert, mais de simple citoyen qui, dans son enfance et sa jeunesse, a vécu ce que furent les conséquences de cette date fondamentale. Tout ce que je dirai est sous réserve que mes connaissances historiques soient pertinentes et suffisantes, et ne constitue que des pistes de réflexion pour susciter des éclaircissements approfondis.

Sur le plan social, en remontant dans le passé lointain, où l’agriculture était dominante, il semble que l’Algérie, contrairement à d’autres pays (Europe et Asie), n’a pas vécu de révoltes paysannes autonomes, c’est-à-dire déclenchées spontanément par les exploités, et menées par eux de manière autogérée, soit contre l’occupant étranger, soit contre les féodaux autochtones, soit contre les deux à la fois.

Les révoltes dont nous parlent les historiens, depuis l’antiquité, auraient été toujours décidées, organisées et dirigées par des représentants de l’élite dominante. Son but était principalement celui de sauvegarder ses intérêts, contre soit un envahisseur étranger, soit un rival autochtone.

De Massinissa à l’émir Abdelkader, les résistances à l’envahisseur furent décidées, organisées et dirigées par des élites. Elles formaient, d’une manière ou d’une autre, une caste oligarchique, en ce sens qu’elle défendaient d’abord leurs intérêts de caste, qui, alors, coïncidaient plus ou moins avec celles du peuple dirigé.

Sur le plan culturel, non plus, l’Algérie (ni le Tamazgha) n’a pas eu d’intellectuels opposés clairement à une caste dominante. Augustin servit l’Église dominante, en massacrant les « hérétiques » qui la contestaient, notamment parce qu’ils en dénonçaient, déjà, la domination oligarchique et l’enrichissement qui en découlait. Ibn Khaldoun a produit une œuvre, certes, fondamentale, où se trouve, plus ou moins en filigrane, une critique des castes dominantes. Mais point de critique frontale et radicales contre elles.

L’Algérie et Tamazgha n’ont pas eu leur Diogène de Sinope (ancêtre occidentale de la conception libertaire), leur Épicure, leur Socrate, leur Mozi, leur Zhuang zi (ancêtre asiatique de la conception libertaire), leur Alhallaj (mettant en question la vision religieuse de la caste dominante musulmane), leur Giordano Bruno (mettant en question la vision religieuse de la caste dominante chrétienne), etc. Tous ces intellectuels ont, en substance, d’une manière ou d’une autre, critiqué en paroles et en actes, les castes dominantes de leur époque, en partant d’un point de vue favorable au peuple exploité, et, certains, en évoquant son action autogérée.

Cependant, historiens, romanciers, poètes et artistes algériens et de Tamazgha mettent, généralement, l’accent sur les élites résistantes (et leurs vertus), sans jamais évoquer les peuples résistants. On a l’impression qu’en Algérie et en Tamazgha, caste dominante et peuple dominé constituaient une unité solidaire, sans contradictions internes. Autrement dit que là où la caste dominante a agi, elle l’aurait fait : 1) uniquement contre un envahisseur étranger, mais jamais dans un contexte de conflits entre castes dirigeantes (ex : entre Massinissa et Jugurtha, entre l’émir Abdelkader et d’autres chefs de tribus ou régions) ; 2) uniquement en faveur du peuple, et non pas, d’abord, pour défendre ses intérêts en tant que caste dominatrice.

Ce tableau rétrospectif me semble éclairer l’histoire récente, de l’Algérie comme de Tamazgha. Limitons-nous à l’Algérie.

1926 : l’Étoile Nord-Africaine. Certes, c’est un ouvrier qui en deviendra le chef incontesté, Messali Hadj. Et ce militant avait des sympathies certaines avec le parti communiste français, d’obédience marxiste. Qu’est-ce que cela signifie ?… Que cette idéologie est, à sa manière, comme les castes précédemment mentionnées auparavant, celle d’une caste élitaire. Elle prétend savoir mieux que le peuple comment l’affranchir de sa servitude.

Notons que l’épouse de Messali, française, était la fille d’un militant anarcho-syndicaliste, autrement dit libertaire, c’est-à-dire concevant l’affranchissement du peuple exploité non par l’intermédiaire d’une « élite savante » et dirigeante, mais par ses propres forces, aidé en ce sens par des intellectuels qui se mettent à son service, et non pas mettent le peuple à leur service.

Cependant, dans le couple, l’esprit élitaire de type marxiste l’emporta sur celui libertaire. Au point tel que Messali devint le «zaïm » que l’on sait, entouré de ses « cadres bureaucratiques » : comité central, bureau politique, etc. Schéma marxiste, donc hétéro-gestionnaire. Cependant, au service d’une nation colonisée, d’un peuple colonisé. En leur sein, la distinction entre « riches » et « pauvres », patrons et salariés, demeurait secondaire. Il fallait faire « front » uni contre l’ennemi colonial. Et, logiquement, sous la direction de l’ « élite éclairée » qui était la seule à prendre les décisions.

Et, vu que le peuple algérien était, dans sa majorité de confession musulmane, l’élément religieux fut introduit comme facteur de mobilisation idéologique.

Après l’Étoile Nord-Africaine, vint le MTLD jusqu’à aboutir au F.L.N. et au 1er novembre 1954, date du déclenchement de la guerre de libération nationale.

L’esprit d’élite hétéro-gestionnaire, donc autoritaire, demeura et se renforça.

Il se manifesta d’une manière tragique, déjà, en 1949, avec ce qui fut appelé la « crise berbériste ». Des dirigeants, au nom d’une vision « arabo-islamique », ont assassiné des militants amazighes et laïcs. Certains ont et considèrent ce conflit en terme « ethnique » entre Arabophones et Amazighopones. Personnellement, si je ne suis pas dans l’erreur, j’y vois d’abord, masqué par le motif « ethnique », une cause plus importante : l’affrontement entre une conception laïque et une autre ethnico-religieuse. La première défendait des intérêts plus favorables au peuple exploité algérien, dans son ensemble, sans distinction d’expression linguistique. Au contraire, la seconde vision était plus favorable à la caste élitaire algérienne, là, aussi, sans distinction d’expression linguistique. Preuve en est que les assassinats de dirigeants amazighes n’a pas entraîné la désaffection de la majorité des militants amazighes envers la « cause nationale », celle de se libérer d’abord du colonialisme.

Ainsi, la déclaration du 1er Novembre 1954 est l’initiative d’un groupe de militants, d’abord. Mais, plus important, son action s’est opposé à la caste bureaucratique dominante dans le mouvement nationaliste, en pariant sur la mobilisation du peuple, pour la lutte armée.

Cette mobilisation n’a pas été facile. Elle fut la conséquence de deux actions complémentaires. D’une part, un travail idéologique au sein du peuple, pour obtenir son consensus. D’autre part, une certaine forme de contrainte contre non seulement les adversaires pro-colonialistes, mais également contre les récalcitrants au sein même du peuple exploité.

Ce n’est donc pas ce dernier, des villes et/ou des campagnes, qui a pris l’initiative du soulèvement contre le système colonial, mais un groupe résolu de militants nationalistes.

Approfondissons. Afin d’obtenir le consensus le plus large nécessaire, toutes les forces sociales disponibles dans la nation furent réunies en une force commune : d’où le nom de « Front ».

Alors, la partie élitaire du peuple algérien, arabophone et amazighe, augmenta son importance sociale dans le processus. Et le peuple resta et devint davantage un simple instrument d’action, le bras armé, dirigé par une élite.

C’est alors que les contradictions au sein même du mouvement de libération nationale se sont accentués. Au point d’aboutir à la tentative de solution : le congrès de la Soummam et la Charte de 1956. Les représentants authentiques du peuple exploité firent entendre leur voix. Et cela, notons-le, de manière unitaire : Arabophones et Amazighopones, avec les figures solidaires de Larbi Ben Mhidi et Abane Ramdane.

Les questions évoquées « Militaire / civil », « Intérieur / extérieur », religion / laïcité, démocratie, etc., reflétaient les contradictions, au sein du mouvement de libération anti-colonialiste, entre la dimension populaire (le peuple algérien du « bas » de l’échelle sociale, celui des travailleurs, qu’ils soient arabophones ou amazighophones) et celle de la bourgeoisie et petite-bourgeoisie.

Le résultat est connu : par la violence, notamment l’assassinat, les représentants de ces deux classes sociales ont vaincu et conquis l’hégémonie sur le mouvement de libération nationale.

Le coup de force militaire de l’été 1962, pour s’emparer du pouvoir d’État, n’en fut que la conséquence et la manifestation logique.

La question fondamentale

J’en viens à la question fondamentale que tous posent : Mais comment se fait-il que le 1er novembre 1954 a accouché d’une société si contraire à ses aspirations ?

La réponse semble facile, claire et logique : parce que le peuple n’a été qu’un instrument, dirigé par les plus sincères amis, au début, puis, par la suite, manipulé par ses faux amis.

Pourquoi ces derniers ont récupéré le mouvement en leur faveur et au détriment du peuple ?… Parce que ce dernier ne fut jamais le maître autonome de son action politique et armée 

Comment expliquer cette carence ?… Par le fait que les amis sincères du peuple, les Larbi Ben Mhidi et les Abane Ramdane, n’ont pas, malgré toute leur bonne volonté et leur amour sincère de leur peuple, n’ont donc pas trouvé la solution afin de rendre le peuple maître de son action. Certes, Ben Mhidi aurait dit : « Jetez la révolution dans la rue, le peuple s’en emparera. » Mais quand la révolution fut jetée effectivement dans la rue, notamment par les manifestations populaires spontanées et autonomes, soulignons-le, de 1960, très rapidement l’appareil bureaucratique du F.L.N. maîtrisa et contrôla le mouvement, en le mettant à son profit.

De tout ce qui vient d’être dit, on doit conclure que le peuple algérien n’a jamais, dans toute son histoire, eut l’opportunité d’agir de manière autonome, en étant dirigé par des leaders qui ont su lui assurer cette autonomie d’action. Certes, Ben Mhidi et Ramdane sont d’authentiques enfants du peuple, mais ils n’ont pas su, malgré tous leurs efforts (qui leur ont coûté la vie) lui mettre son destin dans ses mains. Évidemment, ces deux dirigeants ont été, malgré eux et malgré leur volonté, les produits de circonstances historiques précises. Celles-ci ont toujours été dominées par une élite hétéro-gestionnaire, au détriment de l’autogestion sociale par le peuple lui-même.

Et pourtant !… À l’indépendance, eut lieu le miracle !… Suite à l’abandon des entreprises et des fermes par les propriétaires colonialistes et leurs complices autochtones, et en absence d’un État nouveau (avec sa bureaucratie et ses « élites » dirigeantes), des travailleurs des viles et des campagnes ont pris leur destin en main : ils ont réussi à continuer à faire fonctionner leurs unités de production, et, deuxième miracle, de manière positive !

Les causes de ce double miracle reste, à ma connaissance, encore à expliquer suffisamment.

Le 1er Novembre 1954 c’est donc tout cela : une action généralement hétéro-gérée où le peuple fut un simple instrument de manœuvre, et une surprenante action autogérée.

Ce qui est à déplorer, c’est que les intellectuels algériens mettent, généralement, l’accent sur le premier aspect, en l’embellissant, et, par conséquent, occultent totalement le second aspect. Et, pourtant, ces intellectuels prétendent parler au bénéfice du peuple exploité. N’est-ce pas parce que ces intellectuels, malgré eux, restent prisonniers d’une mentalité hétéro-gestionnaire d’élite autoritaire ? (1)

Une objection pourrait être présentée : d’autres peuples ont vécu une guerre de libération nationale, sous une direction hétéro-gérée, mais ne se sont pas trouvés dans la situation du peuple algérien. Prenons le cas le plus exemplaire : le peuple vietnamien. Son héroïque lutte anti-colonialiste puis anti-impérialiste a été hétéro-dirigée par une élite marxiste. Et, logiquement, le résultat de la victoire fut l’instauration d’une caste élitaire dominante. À tel point que même le général Giap, ayant quitté le pouvoir, a vainement critiqué cette issue anti-populaire.

Dès lors, que dire ?… Qu’en Algérie, la caste qui a profité de la guerre de libération nationale s’est révélée encore nettement plus parasitaire que celle vietnamienne. Une des explications est que le Viet Nam connut, dans son passé, des révoltes paysannes puis ouvrières, agissant de manière libertaire. Pas l’Algérie. D’où l’arrogance de la caste dominante algérienne.

Posons ces ultimes questions à la réflexion, en étant conscient de leur aspect provocateur, mais salutaire, vue la situation de l’Algérie : le meilleur résultat du 1er Novembre 1954 est-il la libération nationale ou le surgissement de l’autogestion sociale ? Et la manière la plus fidèle de commémorer cette date est-elle de mettre l’accent sur la libération du colonialisme étranger, ou sur ce qui reste à faire : la libération du colonialisme indigène ?

K. N.

kad-n@email.com

Note

(1) Il est possible que ce constat soit modifié dans une prochaine contribution. Elle rendra compte d’un livre de David Porter qui me reste à lire : « Eyes to the South : French Anarchists and Algeria ».

 

Auteur
Kadour Naïmi

 




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L’émir du Qatar accuse l’Arabie saoudite de vouloir un changement de régime à Doha

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Moyen-Orient

L’émir du Qatar accuse l’Arabie saoudite de vouloir un changement de régime à Doha

Le torchon n’a pas fini de brûler entre les pétromonarchies du Golfe. A l’occasion d’une interview télévisée accordée à la chaîne américaine CBS, l’émir du Qatar accuse l’Arabie Saoudite et ses alliés de vouloir provoquer un «changement de régime» via le blocus politique et économique de son émirat.

L’émir du Qatar, Cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, accuse. «Ils veulent un changement de régime», a-t-il tempêté lors d’une interview accordée à l’émission 60 Minutes sur la chaîne américaine CBS, le 29 octobre. L’émir faisait ainsi référence à l’Arabie saoudite et à ses alliés arabes qui font pression sur le Qatar via un blocus politique et économique instauré depuis plusieurs mois. 

«L’histoire nous montre et nous apprend qu’ils ont essayé de faire cela auparavant, en 1996, quand mon père est devenu émir», a affirmé le souverain.

La crise et les sanctions perdurent pour le Qatar

La crise du Golfe dure depuis près de cinq mois. Elle a éclaté le 5 juin dernier, lorsque l’Arabie saoudite, le Bahreïn, les Emirats arabes unis et l’Egypte ont rompu leurs relations diplomatiques avec le Qatar et lui ont imposé des sanctions économiques, accusant le petit émirat de soutenir le terrorisme et d’être trop proche de l’Iran, puissance régionale chiite rivale de ces pays arabes sunnites.
Riyad et ses alliés ont fermé leurs frontières terrestres et maritimes avec le Qatar, ont suspendu les liaisons aériennes avec lui et ont expulsé les citoyens qataris se trouvant sur leurs territoires.
«Nous voulons la liberté […] cela ne leur plaît pas» «Ils n’aiment pas notre indépendance, notre manière de penser, notre vision pour la région», a déclaré l’émir du Qatar.

«Nous voulons la liberté de parole pour les habitants de la région. Et cela ne leur plaît pas. Ils pensent que c’est une menace pour eux», a ajouté le souverain.

 

Auteur
Avec AFP

 




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Le Musée central de l’armée baptisé du nom de Chadli Bendjedid

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Hommage

Le Musée central de l’armée baptisé du nom de Chadli Bendjedid

Le musée central de l’armée (Alger) a été baptisé dimanche du nom du défunt moudjahid et ancien président de la République, Chadli Bendjedid, dans le cadre de la commémoration du 63e anniversaire du déclenchement de la glorieuse révolution nationale.

Coïncidant avec le 33e anniversaire de l’inauguration de Musée, la cérémonie a été présidée par le commandant de la première région militaire, le général major Habib Chentouf, en présence des membres de la famille du défunt Chadli Bendjedid, décédé le 6 octobre 2012 à Alger.

Dans une allocution, le directeur du Musée central de l’Armée, le colonel Mourad Chouchane a indiqué que baptiser du nom de Chadli Bendjedid le musée « est un grand honneur pour l’ensemble du personnel et une grande responsabilité pour continuer à oeuvrer à la promotion et à la préservation de notre patrimoine, riche en hauts faits et gloires, et à sa consécration dans la mémoire collective ».

A cette occasion, le colonel Mourad Chouchane a repris un extrait de l’allocution du défunt Bendjedid, lors de l’inauguration de ce musée, le 1e novembre 1984, dans lequel il avait dit que « le Musée central de l’Armée est la mémoire de la lutte héroïque du peuple algérien tout au long de l’histoire et les générations présentes et futures se doivent d’y tirer les enseignements de l’histoire de l’Algérie, son épopée, ses sacrifices et ses valeurs nationales ».

 

Auteur
APS

 




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