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55 ans après l’assassinat de Krim Belkacem : Daho Ould Kablia éclaire les coulisses de la Révolution à Évian

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Khider, Krim et Boudiaf
Mohamed Khider, Krim Belkacem et Mohamed Boudiaf, à l'occasion de l'une de leur réunion à l'étranger après l'indépendance. Tous trois morts assassinés.

Le  témoignage exceptionnel de Daho Ould Kablia met en lumière l’apport décisif du « Lion des Djebels », figure emblématique de la lutte armée, dans les tractations secrètes qui ont précédé la fin du conflit.

Ce récit rare éclaire les coulisses d’un moment charnière de l’histoire algérienne, où courage militaire et stratégie politique se sont entremêlés pour ouvrir la voie aux négociations avec la France. Pour autant, Daho Ould Kablia a gardé le silence sur l’assassinat et les assassins de Krim Belkacem.

À l’occasion de la commémoration du 55ᵉ anniversaire de l’assassinat de Krim Belkacem, un témoignage exceptionnel de Daho Ould Kablia a été diffusé par la chaîne Berbère Télévision. Ancien officier du Ministère de l’Armement et des Liaisons générales (MALG) et actuel président de l’Association nationale des anciens du MALG, il est revenu avec précision sur les coulisses des Accords d’Évian et sur le rôle prépondérant joué par Krim Belkacem, chef de la délégation algérienne.

La cérémonie de commémoration, organisée au cimetière d’El Alia, s’est déroulée en présence de nombreuses personnalités et citoyens, parmi lesquels la fille de Krim Belkacem. L’événement a donné lieu à un moment de mémoire vive, rappelant le parcours de l’un des principaux artisans de l’indépendance algérienne.

Une rencontre décisive à Tunis

Dans son témoignage, Daho Ould Kablia raconte sa rencontre avec Krim Belkacem à Tunis, alors qu’il occupait un poste de chef de service au sein du MALG — la structure chargée du renseignement, des liaisons et des transmissions pendant la Guerre d’indépendance algérienne.

« Je voyais souvent Krim Belkacem et Bentobal au bureau de Boussouf. Il y avait  avec moi  Kasdi Merbah. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à connaître de manière plus directe la vie de nos dirigeants », confie-t-il. À l’époque, le MALG jouait un rôle stratégique dans la collecte d’informations et la préparation des dossiers sensibles en vue des négociations avec la France.

Dans son témoignage, Daho Ould Kablia a mis en lumière l’importance du travail préparatoire réalisé par plusieurs élites algériennes, lors des négociations avec la France, notamment sur les dossiers stratégiques liés au pétrole. Parmi elles, Salah Bouakouir occupe une place centrale : son expertise technique et sa rigueur ont été déterminantes pour défendre les intérêts algériens. Ould Kablia rappelle également la contribution d’autres figures clés de l’époque, qui, par leurs analyses et leur engagement, ont permis de structurer les dossiers avec précision et d’assurer une représentation efficace de l’Algérie dans ces discussions cruciales. Ce travail collectif a été essentiel pour sécuriser les ressources du pays et poser les bases d’une souveraineté économique durable.

Grâce à son implication dans le comité de préparation, Daho Ould Kablia est désigné comme conseiller au sein de la délégation du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) pour les pourparlers d’Évian.

Évian, les nuits stratégiques

À Évian-les-Bains, Krim Belkacem dirige les séances avec une autorité politique incontestée. Chaque soir, après les longues journées de négociation, il réunit ses conseillers à l’hôtel. « Krim nous faisait le compte-rendu détaillé des discussions et nous sollicitait pour élaborer les réponses et affiner les positions de la délégation », se souvient Ould Kablia.

Aux côtés de techniciens et juristes chevronnés comme M’hamed Yazid, Mohamed Seddik Benyahia,  et Ahmed Boumendjel, Krim se distingue par sa stature politique. « C’est lui qui prenait la parole le plus souvent. Contrairement aux experts, il portait en lui une force idéologique : celle de la dignité, de la souveraineté et de la justice », affirme l’ancien officier du MALG.

Un héritage vivant

Ce témoignage éclaire avec force la dimension politique et symbolique de Krim Belkacem lors de ces négociations historiques. Plus qu’un négociateur, il était la voix d’un peuple en lutte pour son indépendance. Son influence sur la dynamique des discussions a été déterminante dans l’issue des Accords d’Évian, qui ouvriront la voie à l’indépendance de l’Algérie en 1962.

En rappelant ces moments décisifs devant la tombe du leader assassiné en 1970, en présence de sa famille, Daho Ould Kablia ravive une mémoire longtemps restée dans les coulisses de l’histoire officielle.

« Ce qui m’a marqué chez Krim, c’était cette conviction inébranlable, cette manière d’incarner la Révolution au-delà des chiffres et des arguments techniques », conclut-il avec émotion.

Bio Express

Krim Belkacem, figure majeure de la lutte de libération, fut l’un des principaux négociateurs des Accords d’Évian.

Chef historique de la Wilaya III historique, il devint membre influent du GPRA et principal interlocuteur de la partie française.

Il a été assassiné le 18 octobre 1970 dans un hôtel à Francfort, dans des circonstances qui demeurent entourées de zones d’ombre. Selon le livre écrit par Farid Alilat, Krim devait rencontrer trois Algériens Hamid Aït Mesbah, officier de la Sécurité militaire (SM). Mohamed Ouslimani, haut cadre de l’État algérien, qui a voyagé sous le pseudonyme de Mohamed Debaï ainsi qu’un certain Mohamed Salah. Un nom d’emprunt selon le journaliste. Ces trois individus se sont jamais formellement expliqués sur ce rendez-vous et l’assassinat de Krim. Et l’Etat algérien, avec ses différents présidents n’a jamais lancé ni d’enquête. Il n’a pas non plus essayé de comprendre l’assassinat du chef de la délégation du GPRA à Evian.

Retour en Algérie après les accords d’Évian et unité nationale: le rôle crucial de Krim Belkacem, selon sa fille

À l’occasion du 55ᵉ anniversaire de l’assassinat de Berbère télévision a recueilli ce samedi 18 octobre au cimetière d’El Alia (Alger) le témoignage émouvant de sa fille. Elle a rappelé la figure exceptionnelle de son père, soulignant non seulement son rôle dans le déclenchement de la Révolution et dans l’organisation militaire, mais aussi sa responsabilité continue après la signature des accords d’Évian.

Elle a particulièrement insisté sur le retour décisif de Krim Belkacem en Algérie le 10 juin 1962, pour mettre fin à l’effusion de sang provoquée par les attentats de l’OAS, une initiative précieuse peu connue du grand public. 

Bien avant que d’autres dirigeants tels que Boudiaf ne le rejoignent. Ce retour, plein de courage et de responsabilité, illustre l’engagement de Krim Belkacem pour la paix et la sécurité du peuple algérien, et souligne l’importance pour la nouvelle génération de connaître l’histoire de ceux qui ont façonné l’indépendance. « Il n’a jamais cessé de penser au peuple algérien », a-t-elle rappelé. 

Le témoignage a également mis en lumière l’importance de transmettre cette mémoire à la jeune génération. Selon elle, pour aimer et respecter son pays, il est indispensable de connaître l’histoire de Krim Belkacem et de tous ceux — femmes, hommes et enfants — qui ont consenti à d’énormes sacrifices pour l’indépendance. Krim Belkacem a assumé toutes les responsabilités, à chaque étape : du déclenchement de la Révolution à l’organisation militaire, en passant par l’unification des rangs, jusqu’aux moments critiques de la mise en œuvre des accords d’Évian.

Ce récit rare permet certes de comprendre la dimension humaine et politique de Krim Belkacem mais le mystère de son assassinat reste entier. On commémore sa mort le 18 octobre, mais on ne pipe mot sur ce qui s’est passé à cette date précisément. Ce crime

Samia Naït Iqbal

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25 milliards pour qui ? Pourquoi ?

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ANP

On nous annonce un budget historique pour la défense nationale algérienne de 25 milliards de dollars. 

C’est vrai que les dotations pour d’autres secteurs de besoins sont déjà pléthoriques et qu’il faut enfin penser aux militaires dans cette période faste. Les hôpitaux sont nombreux, ont tous accès aux dernières technologies et la sécurité sociale est écrasée par les excédents.

C’est vrai que les besoins de subsistance ont disparu dans ce grand pays et qu’il est inutile de rajouter aux stocks qui débordent. La demande alimentaire a atteint ses limites et les rebus sont scandaleux.

C’est vrai que les logements pour les nouveaux couples sont en crise d’excès de l’offre et qu’il faut éviter une bulle financière dans le secteur de l’habitat.

C’est vrai que tous les handicapés, les orphelins, les mères célibataires et les indigents sont maintenant dans la plus grande sécurité de protection que l’Etat providence leur garantit.

C’est vrai que l’inflation a chuté en même temps que les salaires ont explosé, ce qui entraîne une hausse vertigineuse du pouvoir d’achat des salariés.

C’est vrai que toutes les routes, les forêts et les champs n’ont rien à envier aux plus majestueux environnements de cette planète tant ils sont préservés. C’est vrai qu’il n’y a plus de chômage en Algérie, les jeunes universitaires algériens ont l’embarras du choix en matière d’emploi : start-ups, majors pétroliers, constructeurs de voitures…

Heureux qui comme les Algériens ont fait un beau voyage nous dit le poème de Joachim Du Bellay. L’Algérie est enfin arrivée dans le pays des rêves et du miel que nous raconte un poème pour enfants.

Il a fallu tellement d’efforts de ses dirigeants et d’abnégation de ses officiers militaires qui se sont sacrifiés pour qu’on en arrive au sommet de l’aisance et du bonheur.

Il est temps maintenant de les remercier et de les féliciter avec le don de la patrie de 25 milliards de dollars pour services rendus avec honneur.

C’est vrai aussi que les menaces extérieures font courir à l’Algérie un risque d’envahissement de son territoire.

Elle est enfin prête, notre glorieuse armée, qui n’a jamais eu l’opportunité de tirer une seule balle sur l’ennemi. Que leurs chars sortent enfin pour faire la guerre et arrêter de réprimer les traîtres à la patrie, ne plus parader dans les rues au prix d’un bitume massacré et de dépenser des tonnes de carburant nécessaires à la gloire rendue par la foule.

Les MiG du grand ami ne feront plus des ronds au-dessus des marres et n’effraieront plus les canards. Après la prospérité nous voilà dans l’assurance de notre protection militaire.

Le Maroc, le Zimbabwe et les îles Caïmans n’ont qu’à bien se tenir. Ah, non, mince, je viens de faire une bourde, les îles Caïmans sont l’un paradis fiscaux pour les gains chèrement acquis par nos vaillants militaires.

Nous avions été stupides de critiquer le soutien de nos dirigeants à la grande démocratie russe. Nous n’avions rien compris, l’invasion de l’Ukraine a fait exploser les exportations de gaz vers l’Europe et le monde. Nous ne devrions jamais douter de nos héros lucides et prévoyants.

Mais 25 milliards de dollars, nos généraux risquent maintenant l’obésité. On ne peut pas avoir la force et la sveltesse de Kratos dans une oisiveté de richesse. Quant à Hermès, Dieu du commerce, des marchands et des voleurs (cette étonnante référence est vraie), il les a gardées par la ruse et l’intelligence nous dit la mythologie.

Nos héros devraient faire gaffe car s’ils sont dotés de la première, pour la seconde, aïe ! 

Boumediene Sid Lakhdar

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Cinq cas de diphtérie signalés à Skikda : les autorités sanitaires rassurent

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Diphtérie

Le ministère de la Santé a annoncé, dans un communiqué publié vendredi, l’enregistrement de cinq cas confirmés de diphtérie (dite aussi « maladie du croup ») dans la wilaya de Skikda. Deux décès ont été déplorés : un homme de nationalité étrangère âgé de 25 ans et une fillette de 12 ans qui n’était pas vaccinée contre la maladie.

Face à cette situation, une cellule de crise a été immédiatement mise en place au niveau de la Direction de la santé et de la population de la wilaya. Cette structure est chargée d’assurer le suivi rapproché de l’évolution de la situation épidémiologique et de coordonner les mesures de prévention et de prise en charge en lien avec les autorités locales.

Des enquêtes épidémiologiques ciblées ont été ouvertes autour des cas enregistrés afin d’identifier les contacts proches et d’empêcher toute propagation de l’infection. Ces personnes ont bénéficié d’un traitement prophylactique et d’une vaccination de rappel contre la diphtérie. En parallèle, une campagne de vaccination d’urgence a été lancée : 514 personnes ont été vaccinées en 48 heures par les équipes médicales locales, sous la supervision de la cellule de crise.

Selon le ministère, la situation est « stable » et fait l’objet d’un suivi quotidien. La surveillance épidémiologique a été renforcée dans toutes les structures sanitaires de la wilaya, tandis que les cas confirmés sont pris en charge selon les protocoles thérapeutiques en vigueur.

Les autorités sanitaires appellent la population à respecter scrupuleusement le calendrier vaccinal, rappelant que la vaccination reste la protection la plus efficace contre la diphtérie et d’autres maladies infectieuses. Les vaccins sont disponibles dans les établissements de santé publics.

Le ministère de la Santé assure enfin qu’il « suit de près » l’évolution de la situation à Skikda et qu’il reste pleinement mobilisé pour protéger la santé publique. Une campagne de sensibilisation sur l’importance de la vaccination et de la prévention des maladies contagieuses sera également déployée dans les prochains jours.

Samia Naït Iqbal

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Italie : Sigfrido Ranucci et l’ombre persistante de la mafia

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Sigfrido Ranucci

L’Italie est une nouvelle fois confrontée à la vulnérabilité de ses journalistes d’investigation. Jeudi soir, une bombe a explosé devant le domicile de Sigfrido Ranucci, journaliste et figure emblématique de Report sur RAI3, endommageant gravement sa voiture et celle de sa famille.

Heureusement, aucun blessé n’est à déplorer, mais l’attaque, survenue à Pomezia, rappelle la menace constante qui pèse sur ceux qui enquêtent sur le crime organisé et la corruption politique.

Le choix de la date n’est pas anodin : l’attentat survient exactement huit ans après l’assassinat de Daphne Caruana Galizia, journaliste maltaise tuée par un véhicule piégé. Ce lien implicite entre les deux événements souligne l’ampleur et la persistance des risques auxquels sont exposés les journalistes d’investigation en Europe.

Ranucci vit sous protection policière depuis 2014, en raison de ses enquêtes sur la mafia calabraise et des réseaux de corruption qu’il a mis au jour. L’attaque contre lui ne touche pas seulement un individu : elle frappe un symbole de la liberté de la presse. Le parquet antimafia a ouvert une enquête, et la classe politique italienne, de Giorgia Meloni à Elly Schlein, a unanimement condamné l’acte, mais la riposte ne saurait se limiter à la dénonciation.

Ce nouvel attentat met en lumière plusieurs problématiques structurelles : la montée des menaces contre les journalistes, la capacité des organisations criminelles à frapper en toute impunité, et la dégradation continue de la liberté d’informer en Italie, désormais classée 49e au niveau mondial. Cette attaque rappelle que le combat pour un journalisme libre et sécurisé est loin d’être gagné, et que chaque enquête sur la corruption ou la mafia peut mettre en jeu des vies. Une donne que tout journaliste d’investigation doit prendre en considération.

Cette attaque est aussi un signal d’alarme pour l’ensemble de l’Europe : la sécurité des journalistes et la protection de la liberté d’expression restent des enjeux cruciaux. Derrière les déflagrations matérielles se cache un message clair : enquêter sur le pouvoir, qu’il soit politique ou criminel, demeure dangereux. Et pourtant, des journalistes comme Ranucci continuent de tenir la ligne, à l’image des résistants d’aujourd’hui, décidés à faire éclater la vérité malgré les risques.

Djamal Guettala 

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« Ce que disent les morts » de Jugurtha Abbou, ou la recherche de l’énigme de l’existence…

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Que disent les morts ma foi ? C’est la première question « philosophique » que l’on se pose, par curiosité, en ouvrant le nouveau roman de Jugurtha Abbou.

Ce jeune quadragénaire, psychologue de formation et cadre dans une entreprise privée de son état, ne cesse de créer et surtout d’émerveiller ses lecteurs par ses nombreuses œuvres. Jonglant entre poésie, essai et roman, Abbou s’avère être un talentueux auteur, doublé d’une avidité sans pareille pour la lecture en tous genres.

Ce dont témoignent, d’ailleurs, ses multiples publications sur les réseaux sociaux. Dans Ce que disent les morts, son nouveau roman publié aux éditions Dalimen, il est surtout question de la pandémie du Covid-19 sur fond d’angoisse existentielle traduite, ou sinon je préfère « verbalisée » en mots. Et quelle horrible parenthèse dans l’histoire humaine de ces dernières décennies que cette période-là, où, dans sa contagion, la pandémie fauche par centaines des vies humaines par jour ?

La thématique est donc, jusque-là, nouvelle, voire originale dans le récit romanesque. Reste à savoir, c’est le pari de la narration est bien réussi. Là, j’avoue, c’est autre chose. Le focus d’Abbou paraît bien choisi, quoique le texte soit, quelquefois, malaisé à lire, au vu de nombreuses coquilles et de la mise en page un peu « macaronique » (pour ne pas dire autre chose) qui l’altèrent.

Ici, l’urgence de publier a pris, me semble-t-il, le pas sur la rigueur éditoriale ! Peu importe, car quiconque suit, dès le début et sur le fond, le récit sent entre ses lignes comme une empreinte du roman Pedro Páramo du mexicain Juan Rulfo. Un aspect très positif à ne pas perdre de vue. Jugurtha Abbou donne la parole aux morts, à ceux de l’au-delà, glacés dans les limbes sépulcraux de l’oubli et le noir des tombes pour revenir ici-bas et raconter leur vécu.

Il y a, à proprement parler, comme une « mémoire collective » qui narre, d’une voix polyphonique, partant du fait que les sept personnages décédés, en tout quatre femmes et trois hommes, sont tous enterrés dans une seule fosse commune, à défaut d’un espace disponible dans le cimetière. Plus qui est, ils n’ont fait connaissance, à ce qu’il paraît, qu’une fois sous terre.

Appartenant à des générations quasiment espacées et à des milieux socio-culturels différents, ils débattant à cœur ouvert et « sans censure » sur des sujets d’actualité. Un débat dans un cimetière ! Tout un symbole « métaphorique », à bien des égards, qui touche à l’intouchable ; qui égratigne les évidences ; qui brise la chape du silence pour dire, peut-être que la vie d’ici-bas cache jusqu’à l’ultime seconde ses propres secrets.

Appelons-les avec Abbou : les secrets du cimetière ! Ce que disent les morts est une sorte de recueil d’autobiographies dont les récits dans leur friction intime, se croisent, s’entrecroisent, et se superposent, pour former, au final, une toile historique de l’Algérie en pleine métamorphose. Les profils présentés par l’auteur sont, en effet, variés et en total contraste les uns des autres. D’abord, Smail, un ancien maquisard de l’ALN, condamné à mort par l’armée coloniale qui pestait contre « le système » et se plaignait, désenchanté, de la gangrène de la corruption. Hayat, (le choix du prénom « la vivante » n’est pas sans doute pour rien), la fille d’un maquisard en sempiternelle révolte contre les ravages de l’école fondamentale. Écorchée vive, cette artiste dans l’âme n’a pour unique passion que la lecture et l’écriture.

Totalement dans l’autre spectre, Zouina, la fille d’un père corrompu, sans scrupules, lâche, vénal, intolérant et hypocrite qui ne lui avait jamais pardonné le fait d’être prise en photo (elle a été giflée par son père parce qu’elle ne portait pas le haïk), dans le brouhaha de la fête de l’indépendance. Et puis, il y aussi Kamel, le propre modèle de « Omar Gatlatou » du film légendaire des années 1980 de Merzak Allouache qui, bien qu’immergé dans une vie d’insouciance, avait pris la décision, sur un coup de tête, de rejoindre le maquis islamiste pendant le décennie noire. A côté, Samia, n’en est que l’image contradictoire.

Femme à la fleur de l’âge, celle-ci voit dans l’idéologie islamiste un véritable danger et pour les jeunes et pour la société toute entière. En revanche, pour Nassim, modèle de fils à papa bichonné et pomponné, le système n’est qu’une vache à lait et c’est à ce titre qu’il en profite pour tirer du bénéfice de la corruption en menant une vie grand train, dans l’opulence, grâce à ses parents proches des cercles du pouvoir. Mais qui, couic, tombe K.O dans la nasse quand les vents ont tourné en défaveur de ses maîtres (peut-être un clin d’œil aux purges su Hirak) !

Enfin, Sihem, le digne prototype de cette « génération Z » : des jeunes pleins d’attentes et d’espoirs, dans un pays qui semble, en rade, immobile, et sans perspective d’avenir. Et c’est là qu’intervient la voix-arbitre de Rezki, le commerçant amateur de l’alcool (peut-être le seul vivant du récit) qui, entre deux bières sifflées en clandestinité, écoute, dans le calme olympien du cimetière et avec l’aval de son gardien dépravé, tout le tumulte des discussions enflammées des victimes de la grande pandémie du XXI e siècle.

Le récit offre, à vrai dire, une version mi-fictive, mi-réelle, dans le sillage de ce que l’on appelle « le réalisme magique », avec des incursions fort intéressantes dans l’histoire contemporaine de l’Algérie. L’auteur y donne libre cours, via ses personnages, à ses propres opinions. Une gageure plus ou moins réussie, mais cela promet pour l’avenir…

Kamal Guerroua

Jugurtha Abbou, Ce que disent les morts, Dalimen, Alger, 2025, 229 pages.

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Mali : le Jnim veut imposer ses règles à tous les voyageurs sur les routes

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Porte parole du Jnim
Abu Hudheifah al-Bambari, porte-parole du JNIM.

Au Mali, les jihadistes du Jnim, liés à al-Qaïda, ont détruit vendredi 17 octobre plusieurs dizaines de camions citernes dans la région de Sikasso. Le Jnim a également diffusé des vidéos de deux militaires et d’un administrateur de l’État récemment pris en otage.

Les jihadistes ont édicté de nouvelles exigences qu’ils entendent imposer aux voyageurs circulant sur les routes maliennes, notamment le port du voile pour les femmes. 

Le convoi de camions citernes venait de Côte d’Ivoire. Il a été attaqué vendredi 17 octobre dans la matinée entre Kolondieba et Kadiana, près de la frontière, par les jihadistes du Jnim circulant à moto. Malgré l’escorte militaire, une cinquantaine de citernes ont été incendiées, dont le Jnim a diffusé les images dans des vidéos de propagande. Aucun bilan n’a été transmis sur le nombre de militaires maliens et de transporteurs tués dans cette énième attaque, au sujet de laquelle ni l’armée malienne, ni les autorités de transition, n’ont communiqué. 

Lundi 13, un précédent convoi avait déjà été ciblé sur le même tronçon routier. Le Jnim poursuit donc son embargo sur les importations de carburant, qui provoque une grave pénurie d’essence dans de nombreuses régions du Mali et jusque dans la capitale Bamako. 

Vidéos de trois otages

Les jihadistes ont également diffusé des preuves de vie de trois otages récemment capturés : le président du conseil régional de Ségou, Siaka Dembélé, enlevé le 3 octobre sur la route reliant Ségou et Bamako, et deux soldats maliens enlevés le 9 octobre dans la région de Tombouctou alors qu’ils revenaient de permission. Dans des vidéos datées du mercredi 15 octobre et diffusées le vendredi 17, les trois hommes affirment être bien traités et demandent aux autorités d’œuvrer pour leur libération. Des paroles enregistrées sous la contrainte, puisque les trois hommes sont en captivité.

Dans un communiqué distinct, le Jnim a annoncé vendredi lever l’interdiction formulée le 3 septembre dernier contre la société Diarra Transport, que les jihadistes avaient nommément ciblée pour sa proximité supposée avec les autorités de Transition et avec l’armée. Il y a deux semaines, la présidente de Diarra Transport avait formulé des excuses publiques. Vendredi soir, la compagnie a annoncé la réouverture de ses gares dès lundi prochain. 

Selon plusieurs sources impliquées dans les discussions initiées avec le Jnim ces dernières semaines, cette mesure n’a fait l’objet d’aucun versement d’argent. Ce que confirme une source sécuritaire malienne, qui précise : « Les autorités ont donné leur accord tacite aux conditions posées ». 

Car cette levée ne va pas sans contrepartie : les jihadistes du Jnim ont édicté de nouvelles règles qu’ils entendent imposer, non seulement à Diarra Transport, mais à tous les voyageurs sur toutes les routes maliennes, qu’ils circulent avec d’autres compagnies, dans leur véhicule personnel ou même à vélo ou en charrette. 

Première règle : les femmes devront être voilées dans les transports publics. Le Jnim demande spécifiquement aux compagnies d’autocars de bien faire respecter cette règle. Deuxième exigence : toute collaboration avec les forces maliennes est proscrite, l’objectif étant de mettre fin aux dénonciations et aux contrôles dans les gares notamment. Troisième règle, qui s’inscrit toujours dans la volonté des jihadistes d’imposer leur interprétation de la charia : en cas d’accident, celui qui aura endommagé un véhicule ou écrasé un animal devra dédommager la victime. 

Y a-t-il encore le choix ?

« Le porte-parole du Jnim parle comme s’il dirigeait le pays », ironise un observateur. « Ils prennent le contrôle des routes », analyse un autre. Quant à savoir si les voyageurs maliens, à commencer par les femmes, accepteront ces règles, tous se posent la même question : compte tenu des risques, y a-t-il encore le choix ? 

Les autorités maliennes de transition n’ont pas réagi à ce stade. Depuis un mois et demi, les autorités politiques et militaires de la Transition ne cessent d’appeler les Maliens à la « résilience » face à ce qu’elles qualifient de « derniers soubresauts d’un ennemi aux abois ». 

Avec Rfi

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Le général d’Armée Saïd Chanegriha à l’ADEX-2025 pour la modernisation et la coopération

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Saïd Chanegriha

​Le général d’Armée Saïd Chanegriha, vice-ministre de la Défense nationale et chef d’état-Major de l’Armée nationale populaire (ANP), a entamé une visite officielle en République de Corée (Corée du Sud) à partir de ce samedi 18 octobre 2025.

Invité par son homologue sud-coréen, le déplacement de Saïd Chanegriha a pour principal objectif la participation aux activités de l’Exposition Internationale de l’Aérospatiale et de la Défense « ADEX-2025 » à Séoul.

L’ADEX-2025 : une plateforme militaire et commerciale majeure en Asie

​L’Exposition internationale de l’aérospatiale et de la défense de Séoul (ADEX 2025) est reconnu comme le salon de la défense le plus important et le plus complet du nord-est asiatique. Il s’impose comme une vitrine stratégique pour l’industrie de la défense sud-coréenne, un acteur mondial de plus en plus influent sur le marché des exportations d’armement.

​Une plateforme pour la technologie de pointe

Ce salon international met l’accent sur les dernières innovations en matière de systèmes de combat, incluant l’aéronautique, les drones et les solutions anti-drones, les capacités spatiales intégrées et les systèmes de commandement et de contrôle (C4I). Il permet d’évaluer l’évolution des doctrines militaires face aux menaces contemporaines.

L’ADEX est un lieu d’échanges essentiel pour la signature de contrats commerciaux (B2B), les partenariats industriels et les transferts potentiels de technologie entre les grands groupes de défense internationaux et les délégations étatiques.

Enjeux de la participation algérienne

​La présence du général d’Armée Chanegriha et de la délégation de l’ANP s’inscrit dans une logique de diversification des partenariats stratégiques de l’Algérie et de modernisation de ses capacités de défense. Cliente historique de la Russie, cette visite se veut aussi entre autres une volonté de s’affranchir de la dépendance à Moscou dont les positions internationales et régionales ne cadrent plus ces dernières années avec la doxa algérienne.

​Les objectifs principaux de cette visite sont :

​Exploration technologique et acquisition : sur place, les militaires algériens auront à observer directement les systèmes d’armes de dernière génération, notamment ceux développés par l’industrie sud-coréenne. L’enjeu est d’identifier les équipements et technologies susceptibles de répondre aux besoins opérationnels de l’ANP pour l’amélioration de sa capacité de défense et de dissuasion.

​Renforcement du partenariat bilatéral

Au-delà des transactions commerciales, la visite vise à approfondir la coopération militaire par des échanges d’expertise, des formations ou des dialogues stratégiques sur les questions de sécurité d’intérêt commun.

​En se positionnant sur cette plateforme asiatique majeure, l’Algérie affirme sa volonté d’évaluer les solutions de défense les plus avancées à l’échelle mondiale, consolidant ainsi sa politique d’équipement militaire et son rôle dans la stabilité régionale. Il faut rappeler ici que le budget de l’armée nationale est de loin le plus important, selon la loi de finances 2026. Il pèse la coquette enveloppe de 25 milliards de dollars. Durant le premier mandat de Tebboune, le budget de l’ANP a déjà été multiplié par deux, passant de 11 à 22 milliards avant de prendre 3 autres milliards cette année.

La rédaction

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Ligue 1 Mobilis : l’O. Akbou rejoint la JS Saoura en tête, l’ES Mostaganem piégée à domicile

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O. Akbou -MCB

L’Olympique Akbou, vainqueur à domicile face au MC El-Bayadh (1-0), a rejoint provisoirement la JS Saoura, en tête du championnat de Ligue 1 Mobilis de football, en ouverture de la 8e journée, disputée vendredi, devant se poursuivra samedi, mardi, et mercredi.

Auteurs d’un parcours exemplaire depuis le début de la saison, les Akbouciens continuent d’impressionner, en s’offrant cette fois-ci le MCEB, qui peine à quitter les profondeurs du classement.

L’OA s’en est remis, encore une fois, à son nouveau buteur attitré, Addadi, auteur de l’unique but de la partie, inscrit sur un joli coup franc direct dans le dernier quart d’heure (77e).

La formation d’Akbou se rachète après la défaite concédée à Béchar face à la JSS (3-2), alors que le MCEB continue de manger son pain noir, en dépit de l’arrivée du nouvel entraîneur, Mohamed Lacet, en remplacement de Chérif Hadjar. En compagnie de la lanterne rouge, le Paradou AC, le MCEB n’a remporté jusque-là aucun succès.

Une victoire précieuse qui permet à l’OA de rejoindre la JSS en tête avec 14 points chacun, alors que le MCEB, avec 3 unités seulement, reste scotché à l’avant-dernière place au tableau.

L’autre match disputé vendredi, entre l’ES Mostaganem et l’ASO Chlef, est revenu aux visiteurs. Après une première période équilibrée, les Chélifiens ont trouvé la faille par Bekkouche (64e).

Il s’agit de la deuxième victoire de la saison pour l’ASO, qui enchaîne un cinquième match sans défaite, le propulsant à la 5e place, en compagnie du MC Alger et du MC Oran, avec 10 points chacun.

En revanche, l’ESM de l’ancien international, Benlamri, concède son deuxième revers de rang, et le premier à la maison, confirmant, à ses dépens, son irrégularité persistante depuis le début de l’exercice.

Les péripéties de cette 8e journée se poursuivront samedi avec deux matchs au menu : ES Ben Aknoun-CS Constantine (15h00) et MC Oran-JS Saoura (18h00).

Cette 8e journée se poursuivra mardi et mercredi avec deux belles affiches: JS Kabylie-USM Khenchela et MC Alger-Paradou AC, alors que les matchs CR Belouizdad-ES Sétif et USM Alger-MB Rouissat, ont été reportés à une date ultérieure.

APS

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« Soroptimist International agit pour l’émancipation des femmes et des filles dans le monde »

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Lors de l’événement Vivacité au Vieux-Port de Marseille, nous avons rencontré l’équipe locale du réseau Soroptimist International. Depuis sa création en 1921, cette ONG internationale rassemble des femmes engagées dans plus de 120 pays pour défendre les droits et améliorer la vie des femmes et des filles. Présente dans 99 clubs en France, l’organisation agit dans des domaines variés : éducation, santé, leadership, lutte contre les violences et développement durable.

Dans cet entretien, Elisabeth Herraiz, présidente du Soroptimist International France, nous explique les actions concrètes menées en France et dans le monde, les défis rencontrés et les objectifs pour les années à venir.

Le Matin d’Algérie : Quelle est la mission principale de votre réseau et comment est-il né ?

Elisabeth Herraiz : Nous sommes une ONG internationale qui a vu le jour en 1921 aux USA : le Soroptimist International ; nous avons une voix consultative auprès de l’ONU.

Nous sommes exclusivement des femmes qui œuvrons pour une vie meilleure des femmes et des filles ; nous sommes présentes dans 121 pays du monde entier avec 65 000 membres. Concernant la France, nous sommes présentes dans 99 clubs (hexagone et territoires d’Outre-Mer) avec 2040 membres.

Le Matin d’Algérie : Comment sélectionnez-vous les projets ou initiatives que vous soutenez dans chacun des cinq domaines ?

Elisabeth Herraiz : Nos cinq domaines d’action sont : la santé, l’éducation, le leadership et l’autonomisation, la lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles, l’environnement et le développement durable. Chaque club a le choix des actions qu’il mène dans sa ville, en fonction de la particularité locale. Le projet national cette année porte sur la soumission chimique, avec la distribution de capotes de verre.

Le Matin d’Algérie : Quels sont les principaux défis que vous rencontrez dans la promotion de l’éducation des filles à travers le monde ?

Elisabeth Herraiz : Le principal défi est le refus de certains gouvernements d’autoriser l’accès à l’éducation pour les filles, ainsi que la pauvreté qui les oblige souvent à travailler au lieu d’aller à l’école.

Le Matin d’Algérie : Pouvez-vous partager un exemple concret de réussite dans l’autonomisation et le leadership des femmes ?

Elisabeth Herraiz : Beaucoup d’exemples existent au sein de nos clubs : attribution de bourses d’études, contribution au paiement de permis de conduire… Ces actions permettent à des femmes de gagner en indépendance et en confiance.

Le Matin d’Algérie : Quelles actions menez-vous pour améliorer la santé des femmes et des filles dans les communautés les plus vulnérables ?

Elisabeth Herraiz : Nous avons installé des distributeurs de serviettes hygiéniques dans les locaux d’une école d’aide-soignantes, distribué des kits d’hygiène, et soutenons de nombreuses femmes atteintes de maladies spécifiques (endométriose, cancer du sein, maladies cardiovasculaires, cancer de l’utérus…).

Le Matin d’Algérie : Comment votre réseau agit-il pour prévenir et lutter contre les violences faites aux femmes et aux filles ?

Elisabeth Herraiz : Chaque année, du 20 novembre (journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes) au 10 décembre (journée internationale des droits humains), nous menons une période d’activisme intense :

Opération de cinéma nationale avec diffusion d’un film sur les violences et débat avec des femmes engagées, soutien à de nombreuses maisons d’accueil pour femmes battues, financement de salles de paroles dans les gendarmeries pour recueillir la parole des femmes et des enfants victimes de violence.

Le Matin d’Algérie : Quel rôle joue l’environnement et le développement durable dans votre approche de l’émancipation des femmes ?

Elisabeth Herraiz : Chaque action doit être menée dans l’esprit du développement durable : éviter les transports coûteux en empreinte carbone, soutenir l’autonomisation des femmes qui souhaitent entreprendre dans ce domaine et encourager des initiatives respectueuses de l’environnement.

Le Matin d’Algérie : Comment les femmes locales peuvent-elles rejoindre ou collaborer avec votre réseau ?

Elisabeth Herraiz : En contactant le club local. Pour connaître la localisation d’un club, il suffit d’écrire à : contact@soroptimist.fr.

Le Matin d’Algérie : Quelles collaborations internationales ou partenariats stratégiques sont essentiels à votre impact ?

Elisabeth Herraiz : Notre présence sur tous les continents dans 121 pays et nos voix consultatives auprès de l’ONU, avec des membres siégeant dans ses principales agences, nous permettent de porter nos actions à l’échelle mondiale. Nous avons de nombreux échanges entre clubs : soutien d’écoles au Liban, à Madagascar…

Le Matin d’Algérie : Quels sont vos objectifs pour les cinq prochaines années et comment mesurez-vous votre succès ?

Elisabeth Herraiz : L’objectif principal a toujours été et restera d’améliorer les conditions de vie des femmes et des filles. Le succès se mesure notamment au nombre d’adhérentes et à l’impact concret de nos actions sur le terrain.

Entretien réalisé par Djamal Guettala 

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«Brodeurs d’espoir » : la beauté comme résistance

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En 2013, à Douarnenez, sur la côte bretonne, des brodeuses palestiniennes venues du camp de réfugiés de Rashidiyé, au sud du Liban, rencontrent des femmes bretonnes. De cet échange, tissé dans la simplicité et la curiosité mutuelle, naît un projet culturel et solidaire : Brodeurs d’espoir.

Publié par le comité de jumelage Douarnenez-Rashidiyé, l’ouvrage de Jean-Pierre Gonidec dépasse le cadre du documentaire pour devenir une méditation sur la beauté, la mémoire et la dignité.

Jean-Pierre Gonidec, historien et passionné d’ethnologie vestimentaire, s’intéresse depuis longtemps à la manière dont les vêtements racontent les sociétés. Ici, il met en regard deux mondes que tout semble opposer : la Bretagne et la Palestine. Pourtant, à travers le fil et la couleur, des correspondances apparaissent. Les costumes, les motifs, les coiffes, les broderies deviennent des miroirs d’identités, d’histoires partagées, de résistances silencieuses.

Le livre ne cherche pas la comparaison gratuite, mais la résonance. Les broderies palestiniennes, nées d’un art populaire transmis de mère en fille, portent la mémoire d’un peuple déraciné. Chaque motif évoque un village, un paysage, une appartenance. Les vêtements bretons, eux aussi, racontent une géographie intime : la mer, la foi, les saisons, la hiérarchie sociale. En les confrontant, Gonidec fait émerger un dialogue des cultures, un pont tissé par les femmes, par le geste et la patience.

Son regard n’est pas celui d’un technicien du textile. Ce qu’il cherche, c’est « l’usage du costume, son rôle social, la population qui le porte ». Le costume comme langage, comme repère dans le tumulte du monde. À travers ces habits, l’auteur montre que les peuples se disent d’abord par la main avant de se dire par la bouche.

Une phrase du livre résume toute sa portée : « Le croissant et la croix ont pu se retrouver côte à côte sur les plastrons des femmes de Quimper puisque les bijoux, les épingles de pardons, de grandes perles fabriquées en Bohème reprenaient des motifs du Proche-Orient et de Palestine. Au hasard de ces pérégrinations, deux religions se retrouvent sur le même buste. Quand la beauté entre en jeu, elle explose les frontières. »

Cette rencontre inattendue entre deux symboles religieux traduit ce que Gonidec appelle la “diplomatie du beau”. Là où les politiques échouent, l’art rapproche. Là où les frontières séparent, la création unit. Ce fil commun qui relie la Palestine à la Bretagne devient le fil de la mémoire et de l’espérance.

Mais Brodeurs d’espoir n’est pas qu’un livre sur la beauté du geste. Il est aussi un acte concret de solidarité : tous les bénéfices sont reversés à l’Union générale des femmes palestiniennes du camp de Rashidiyé. C’est un ouvrage qui agit, fidèle à l’esprit du comité de jumelage fondé sous la mandature de Monique Prévost, et engagé depuis plus de vingt ans dans la coopération culturelle et humaine.

Ce que retient le lecteur, au-delà de la richesse des descriptions, c’est la justesse du ton. Pas de pathos, pas d’exotisme, mais une volonté claire : montrer comment la broderie, art souvent cantonné à la sphère domestique, devient un outil de transmission, de résistance et de reconnaissance.

Dans un monde saturé d’images rapides, Brodeurs d’Espoir prend le temps. Il redonne valeur à la lenteur, au geste répété, au savoir-faire. Il rappelle que la beauté n’est pas un luxe, mais une manière de tenir debout.

C’est peut-être là sa plus belle leçon : quand les peuples se parlent par le travail des mains, les murs tombent.

Djamal Guettala

Brodeurs d’Espoir, de Jean-Pierre Gonidec, coédité par le Comité de jumelage Douarnenez-Rashidiyé, 142 pages, 20 €.

En vente en librairie à Douarnenez.

Contact commande : dz.rashidyie.com

Jacques Bœuf : 06 85 83 00 23 / Monique Prévost : 06 82 58 97 37.

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