La France a accordé plus de 8 000 visas d’études aux étudiants algériens pour la rentrée universitaire 2025-2026, marquant une hausse notable dans un contexte bilatéral pourtant traversé par des tensions persistantes sur les dossiers mémoriel, migratoire et diplomatique. Ce geste ciblé, perçu comme un signal d’apaisement, contraste avec la rigueur maintenue sur les autres catégories de visas.
Selon les chiffres communiqués par le ministère français des Affaires étrangères, 8 351 visas étudiants ont été délivrés cette année, soit une augmentation de 12,5 % par rapport à 2024. Le ministre Jean-Noël Barrot, auditionné fin octobre par le Sénat, a confirmé cette orientation : la France continue de privilégier la mobilité universitaire algérienne, tout en durcissant les conditions d’accès pour les autres demandeurs.
Cette hausse intervient alors que les relations franco-algériennes traversent une phase de refroidissement, notamment après la suspension de plusieurs accords bilatéraux et la montée des pressions politiques internes en France, où l’extrême droite réclame un contrôle accru des flux migratoires.
Les données officielles traduisent cette sélectivité : 31 % des demandes de visas algériennes ont été rejetées au cours des neuf premiers mois de 2025, soit près du double de la moyenne mondiale (16 %). Les visas touristiques ont reculé de 21 %, les visas économiques de 12,6 %, et les visas familiaux de 7,4 %. Globalement, le nombre total de visas délivrés a chuté de 14,5 % en un an.
Le maintien de ce canal étudiant constitue dès lors une exception dans une politique globale de restriction. En revanche, les hauts fonctionnaires et les titulaires de passeports diplomatiques restent exclus du dispositif, en raison du gel des accords de 2013 encadrant la circulation des personnels officiels.
Au-delà de sa portée administrative, la hausse des visas étudiants apparaît comme une manœuvre diplomatique subtile. En favorisant la mobilité académique, Paris cherche à préserver un des rares champs de coopération encore dynamiques avec Alger : l’enseignement supérieur et la culture.
Cette ouverture coïncide d’ailleurs avec plusieurs signes de détente : le message de félicitations adressé par Emmanuel Macron à Abdelmadjid Tebboune à l’occasion du 71ᵉ anniversaire du déclenchement de la Révolution algérienne, et des échanges exploratoires sur la reprise du dialogue sécuritaire suspendu depuis 2023.
Pour la France, miser sur la jeunesse algérienne revient à maintenir un lien d’influence et de confiance dans un contexte diplomatique tendu. Pour l’Algérie, cette ouverture partielle peut être interprétée comme une reconnaissance du rôle de sa diaspora étudiante et de sa place dans la coopération universitaire euro-méditerranéenne.
Reste que cette embellie demeure limitée. Le durcissement général du régime des visas, les désaccords mémoriels et la méfiance persistante sur les questions migratoires continuent d’entraver un véritable réchauffement entre Paris et Alger.
Ainsi, si les visas étudiants apparaissent comme un levier de diplomatie douce, ils ne sauraient à eux seuls effacer les divergences structurelles qui minent la relation bilatérale.
L’apaisement, encore timide, s’esquisse donc davantage dans le champ symbolique et culturel que dans le domaine politique — un équilibre fragile que les deux capitales semblent pour l’heure disposées à maintenir.
Samia Naït Iqbal
















