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Koukou éditions interdite du Sila : Riposte Internationale réagit

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Koukou éditions interdit de participation au Sila.
Koukou éditions interdit de participation au Sila.

Riposte Internationale exprime sa vive préoccupation à la suite du communiqué publié le 28 octobre 2025 par Koukou éditions, relatant une troisième exclusion consécutive du Salon international du livre d’Alger, ainsi qu’un enchaînement de décisions administratives et judiciaires qui, selon l’éditeur, s’appuieraient sur un rapport secret des services de sécurité.

La confirmation d’une ordonnance de non-lieu par la Chambre d’accusation aurait empêché la tenue d’un procès public où les pièces et témoignages auraient pu être débattus de manière contradictoire. De précédents incidents rapportés depuis 2016, allant de la mise à l’écart d’ouvrages à des retraits informels en librairie, dessinent un schéma de restrictions qui, s’il était avéré, excède largement la simple gestion du bon ordre d’un salon du livre et relève d’une censure de fait.

La Constitution algérienne consacre la liberté d’expression et d’édition. L’article 54 rappelle que l’activité des publications ne peut être interdite qu’en vertu d’une décision de justice.

Ce principe implique un contrôle juridictionnel effectif, l’accès au dossier, la publicité des débats et la possibilité pour les personnes concernées de faire valoir leurs moyens. La hiérarchie des normes impose que toute mesure limitative portée par une autorité administrative ou par un organe placé sous tutelle ministérielle soit prévue par la loi, poursuive un objectif légitime et respecte les exigences de nécessité et de proportionnalité. Les juridictions ont en outre la responsabilité d’assurer la primauté de la Constitution sur toute instruction interne ou document non publié, surtout lorsque celui-ci conditionne l’accès d’un acteur culturel à un espace public de débat.

L’Algérie est partie prenante du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Son article 19 protège la liberté d’expression, y compris la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées. Le Comité des droits de l’homme, dans son Observation générale n° 34, précise que toute restriction doit être prévue par la loi, poursuivre un but légitime et être strictement nécessaire, et souligne la méfiance à l’égard des limitations fondées sur des motifs vagues ou des pièces non accessibles au public. L’Algérie est également liée par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Son article 9 garantit le droit de recevoir et de diffuser des informations, ainsi que la libre expression des opinions.

La Déclaration de principes sur la liberté d’expression et l’accès à l’information en Afrique, adoptée par la Commission africaine en 2019, rappelle que la censure préalable est incompatible avec un régime démocratique et que les autorités doivent privilégier des procédures transparentes et des voies de recours rapides. Enfin, l’article 15 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels protège le droit de participer à la vie culturelle, ce qui inclut l’accès non discriminatoire aux espaces de diffusion du livre et des idées.

Lorsque des exclusions sont motivées par des documents non publics, non contradictoirement discutés et non soumis à un contrôle indépendant, la sécurité juridique est compromise. L’absence de motivation claire et accessible empêche toute compréhension des faits reprochés et prive les auteurs et éditeurs de la possibilité d’adapter leur conduite ou de contester utilement la mesure.

La répétition d’évictions ciblant un même éditeur actif depuis deux décennies engendre un effet dissuasif sur les professionnels du livre et restreint de manière tangible la pluralité des voix. L’ensemble crée un climat d’incertitude incompatible avec les garanties constitutionnelles, avec l’article 19 du Pacte et avec l’article 9 de la Charte africaine.

Riposte Internationale demande la publication intégrale et sans délai de toute pièce ayant fondé les mesures prises à l’encontre de Koukou Éditions, afin de permettre l’exercice effectif des droits de la défense et le contrôle du juge. À défaut d’une décision judiciaire motivée, fondée sur une base légale claire et répondant aux critères de nécessité et de proportionnalité, nous appelons à la levée des exclusions et à la réintégration de l’éditeur dans les salons du livre ainsi qu’au règlement des différends commerciaux ou contractuels selon des procédures régulières. Nous demandons la garantie d’une audience publique au fond, avec accès au dossier, audition des parties et possibilité de constitution de parties civiles pour les auteurs directement affectés.

Nous appelons les autorités compétentes, notamment le ministère de la Culture, les commissariats de salons et les entreprises publiques gestionnaires de librairies, à se doter et à publier des procédures claires d’admission, de refus et de retrait d’ouvrages.

Ces procédures doivent s’inscrire dans la loi, indiquer les critères précis, prévoir une notification motivée, offrir un recours rapide et suspensif et respecter les standards internationaux de liberté d’expression. Une formation régulière des responsables concernés au droit de la liberté d’expression et aux obligations internationales de l’Algérie contribuerait à éviter les dérives. Un mécanisme de dialogue permanent avec les éditeurs, auteurs, libraires, syndicats du livre et organisations de défense des droits humains permettrait d’anticiper les tensions et de favoriser la médiation plutôt que l’éviction.

Nous invitons la Présidence de la République, le Gouvernement et le Conseil supérieur de la magistrature à réaffirmer publiquement la primauté de la Constitution et l’interdiction de toute censure de fait, à garantir l’indépendance des juridictions dans l’examen de litiges touchant à la liberté d’expression et à ordonner que les administrations s’abstiennent de se fonder sur des rapports non publiés pour limiter l’accès aux espaces culturels.

La vitalité d’un salon du livre se mesure à la diversité des idées qui s’y confrontent pacifiquement et à la confiance que les citoyens accordent à la transparence des décisions publiques.

La liberté d’expression et les droits culturels ne sont pas des concessions accordées au gré des circonstances, ce sont des droits opposables qui protègent la société tout entière. La censure informelle n’apporte ni sérénité ni stabilité. Elle nourrit la défiance, tarit le débat public et affaiblit les institutions chargées de garantir l’État de droit. Riposte Internationale se tient aux côtés des auteurs, des éditeurs, des libraires et des lecteurs pour défendre un espace de discussion ouvert, fondé sur la loi, la raison et la dignité.

Fait à Montreuil, le 30 octobre 2025

Riposte Internationale

Pour le Bureau Fédéral

P/R Ali Ait Djoudi

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Europe : le système discriminatoire de délivrance de visas Schengen exclut les défenseur·e·s des droits humains, dénonce AI

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Défenseurs des droits humains
Crédit : Olivia Papagnies

Amnesty International a rendu public un communiqué dans lequel cette ONG dénonce le système d’attribution de visas par l’Europe.

      Le système de délivrance de visas dans l’espace Schengen européen a tout d’une course d’obstacles pour les défenseur·e·s des droits humains de différentes régions du monde, empêchant bon nombre d’entre eux de participer à des forums majeurs de prise de décision. Ces obstacles sont contraires aux droits et aux valeurs que les États Schengen affirment défendre, écrit Amnesty International dans un nouveau rapport publié le 30 octobre 2025.

      Ce document, intitulé Closing the door? How visa policies in Europe’s Schengen area fail human rights defenders, expose les nombreuses difficultés auxquelles sont confrontés les militant·e·s de 104 pays soumis à des restrictions en matière de visas, principalement en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient, lorsqu’ils tentent d’obtenir des visas de court séjour pour se rendre dans l’espace Schengen afin de mener des actions de plaidoyer, de créer des réseaux ou de s’accorder un répit face aux risques encourus en raison de leur travail.

      Ces défenseur·e·s des droits humains sont pour la plupart racisés, en tant que personnes noires, asiatiques et/ou musulmanes, et les répercussions négatives sur leur mobilité équivaut à une discrimination indirecte, selon l’analyse d’Amnesty International.

      « Du fait des difficultés à obtenir des visas Schengen, les voix et les témoignages des défenseur·e·s des droits fondamentaux des pays du Sud sont exclus des forums où sont pourtant prises des décisions qui affectent profondément leurs vies, a déclaré Erika Guevara Rosas, directrice générale de la recherche, du plaidoyer, de la politique et des campagnes à Amnesty International.

      « Les États Schengen ont le droit de décider qui entre sur leur territoire, mais les répercussions de leur système de visa sur les défenseur·e·s des droits humains de 104 pays illustrent un décalage flagrant entre ce à quoi ils se sont engagés, à travers leurs lignes directrices et autres instruments visant à protéger les défenseur·e·s, et ce qu’ils font réellement.

      « Il est indispensable de garantir aux défenseur·e·s des droits humains l’accès à des visas Schengen de court séjour par le biais d’une procédure fiable, prévisible, transparente et rapide afin qu’ils puissent exercer leur droit de défendre les droits d’autrui sans discrimination. »

      Les obstacles à l’obtention de visas de court séjour

      Le Code des visas de l’Union européenne (UE), instrument législatif régissant les visas Schengen de court séjour, permet d’accepter au cas par cas les demandes de visa qui ne remplissent pas toutes les conditions requises. Cependant, les personnes chargées de recevoir et traiter les demandes, dont les prestataires de services externes, semblent souvent ignorer l’existence de cette souplesse, ce qui est source de nombreux blocages ; des demandes sont parfois rejetées avant même d’atteindre le stade de la prise de décision.

      L’un des premiers obstacles à l’obtention d’un visa Schengen concerne le fait de savoir où déposer la demande. De nombreux États Schengen n’ont pas de représentation diplomatique ni d’accord avec

      chacun des pays soumis à des restrictions en matière de visas. Aussi, les défenseur·e·s des droits humains peuvent-ils être amenés à se rendre dans un autre pays pour déposer leur demande : ce déplacement peut s’avérer prohibitif en termes de coût ou présenter un risque pour leur sécurité.

      Autres difficultés que les défenseur·e·s doivent surmonter pour se rendre dans les pays de l’espace Schengen : le délai pour obtenir un rendez-vous et attendre une décision, ainsi que la durée de validité des visas. Dans certains cas, ils sont délivrés trop tard ou pour une période si courte qu’ils ne tiennent pas compte du temps nécessaire pour se rendre sur place et en revenir, ni d’éventuels retards de vols.

      Par ailleurs, on demande bien souvent aux demandeurs·euses de fournir une longue liste de pièces justificatives et généralement des preuves de leurs moyens financiers – situation professionnelle, bulletins de salaire ou titres de propriété notamment. Critères difficiles à remplir pour les militant·e·s, en particulier les plus marginalisés et discriminés.

      Une défenseure des droits humains membre de la communauté dalit au Népal a déclaré à Amnesty International : « Ils demandent des relevés bancaires à ceux qui souhaitent se rendre dans un État de l’espace Schengen. Imaginez ce que cela signifie pour des gens qui vivent dans une situation où ils ne parviennent même pas à gagner leur vie au quotidien. Ceux qui souhaitent se mobiliser au niveau international ne disposent pas forcément de ces documents, car ce sont des défenseur·e·s des droits humains et la plupart de leurs actions sont menées à titre bénévole. »

      Ces obstacles entraînent une discrimination indirecte à l’égard des défenseur·e·s des droits humains, car la politique en matière de visas Schengen a un impact disproportionné sur les demandeurs et demandeuses racisés. Si les règles en matière de visas ne mentionnent pas explicitement l’appartenance raciale ou ethnique comme motif de traitement différencié et semblent donc neutres dans ce domaine, il existe toutefois une forte corrélation entre la liste des pays soumis à des restrictions en matière de visas et des populations racisées – noires, asiatiques et/ou musulmanes.

      Souplesse existante et avancées

      En juin 2024, la Commission européenne a publié une version révisée du manuel sur les visas de l’UE : cet ensemble de lignes directrices explique comment appliquer le Code des visas et donne des exemples pratiques en vue de simplifier les demandes des défenseur·e·s des droits humains.

      Saluant cette avancée, Amnesty International invite les pays de l’espace Schengen à veiller à ce que ce manuel révisé soit largement diffusé et pleinement mis en œuvre, en s’assurant que les agents chargés de délivrer des visas dans le monde entier, y compris les prestataires de services externes, soient parfaitement formés s’agissant de faciliter les déplacements des défenseur·e·s.

      En outre, Amnesty International demande aux pays de l’espace Schengen de recueillir des données ventilées sur l’origine raciale et ethnique afin de mettre un terme à la discrimination au sein du système de délivrance des visas, et d’élaborer et d’appliquer une procédure simplifiée pour les défenseur·e·s des droits humains, s’appuyant sur un traitement accéléré des demandes. Enfin, les pays Schengen devraient délivrer plus fréquemment des visas de longue durée et à entrées multiples, car ce sont des outils de protection essentiels qui garantissent la possibilité de voyager en cas de besoin, sans passer à chaque fois par le même parcours du combattant bureaucratique.

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      France : les députés adoptent un texte du RN contre l’accord franco-algérien de 1968

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      Résultat du vote à l'Assemblée française sur les accords franco-algériens de 1968:
      Résultat du vote à l'Assemblée française sur les accords franco-algériens de 1968:

      Coup de tonnerre à l’Assemblée : les députés ont adopté, jeudi 30 octobre, par 185 voix contre 184, une proposition de résolution du Rassemblement national visant à « dénoncer » l’accord franco-algérien de 1968, avec l’appui des groupes LR et Horizons.

      Coup d’Etat du RN à l’Assemblée ! Au prix de mille renoncements de la droite classique, il vient d’assouvir la soif de vengeance des nostalgiques de « l’Algérie française ».

      « C’est une journée que l’on peut qualifier d’historique pour le RN », s’est aussitôt félicitée la cheffe des députés d’extrême droite Marine Le Pen, soulignant qu’il s’agissait du premier texte de son parti approuvé par l’Assemblée, en dépit des oppositions de la gauche, des macronistes et du gouvernement.

      Pourtant, certains évoquent le retour de l’OAS à l’Assemblée. Cette organisation terroriste qui a assassiné des milliers d’Algériens, de pieds noirs et tenté de tuer Charles de Gaulle.

      Si la résolution n’a pas de valeur législative, Marine Le Pen a demandé au gouvernement de tenir « compte » du vote du Parlement sur son texte, qui appelle à dénoncer l’accord qui offre aux Algériens des clauses spécifiques en matière d’immigration et de séjour en France. « Nous considérons qu’il n’y a plus rien qui justifie le maintien de cette convention », a-t-elle insisté.

      « Honte au RN » qui « continue sans fin les guerres du passé », a grondé en retour le leader Insoumis Jean-Luc Mélenchon, sur X. Le texte a été soutenu par l’alliance RN-UDR, la moitié du groupe les Républicains et la moitié du groupe Horizons, parti d’Edouard Philippe.

      Le patron du PS Olivier Faure a lui fustigé le groupe macroniste. « Ils étaient où les macronistes ? Gabriel Attal absent », a-t-il écrit sur X, à propos de l’ancien Premier ministre, à la fois patron du parti macroniste et du groupe à l’Assemblée. « Il nous a manqué une voix. Cette voix qui nous a manqué pour faire face au RN, c’est celle de Gabriel Attal », a abondé devant les journalistes Cyrielle Chatelain, présidente du groupe écologiste.

      Des voix manquantes dans tous les groupes

      Gabriel Attal a toutefois lui-même appelé à dénoncer l’accord de 1968, en janvier, pour « poser les limites et assumer le rapport de force avec l’Algérie », notamment à l’aune de l’arrestation de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Mais son groupe était contre le texte du RN.

      Le macroniste Charles Rodwell, auteur d’un récent rapport accablant contre ce même accord de 1968, avait justifié par avance un refus, au prétexte d’un supposé vide juridique qui risquerait de « provoquer un déferlement migratoire » dans l’Hexagone, analyse dénoncée par le RN. Toutefois, seuls 30 députés du groupe macroniste sur 92 étaient présents pour voter contre et trois se sont abstenus. Gabriel Attal était présent jeudi matin à un forum sur la transformation durable du tourisme.

      Il a cependant manqué des voix dans tous les groupes, y compris à gauche (52 députés LFI sur 72 ont participé au vote, 53 socialistes sur 69, 32 écologistes sur 38, six députés du groupe communiste et ultramarin sur 17). Douze députés MoDem ont pris part au scrutin (10 contre, deux abstentions) et trois députés Liot sur 22 (deux pour, un contre).

      L’accord-cadre franco-algérien de 1968 et ses avenants

      Les relations entre la France et l’Algérie sont dans un moment de fort tension au point que le dossier migratoire, pourtant en veilleuse, est revenu sur le tapis ces derniers mois. Il a été remis sous le feu des projecteurs en 2023 à la faveur d’un rapport à charge pour l’Algérie de l’ancien ambassadeur et âme damnée de l’extrême droite française, Xavier Driencourt. Un rapport destiné au centre de réflexions Fondapol, très marqué à droite, et publié peu après la sortie en librairie de ses mémoires algériennes (L’Énigme algérienne. Chroniques d’une ambassade à Alger, aux Éditions de l’Observatoire, 2022) qu’il conclut en ces termes : « Nous avons trop souvent tendu l’autre joue après avoir reçu une gifle. » Un rapport venu nourrir la volonté exprimée depuis plusieurs mois par des responsables politiques de droite (l’ex-ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau mais aussi les ex-Premiers ministres Edouard Philippe et Gabriel Attal, ou encore Marine Le Pen) de dénoncer l’accord-cadre de 1968.

       L’accord-cadre de décembre 1968

      Signé par Jean Basdevant, haut représentant envoyé par de Gaulle en Algérie, et Abdelaziz Bouteflika, alors ministre des Affaires étrangères, cet accord à la négociation duquel a activement participé le diplomate et ancien résistant Stéphane Hessel, alors ministre-conseiller à Alger, restreint les dispositions des accords d’Évian de 1962 qui prévoyaient la libre circulation et installation des personnes d’Algérie vers la France, Algériens comme Français. La libre circulation entre les deux pays avait déjà été freinée avant cette date en raison de l’entrée importante d’Algériens sur le sol français en 1962 : la clause de libre circulation des Accords d’Évian est suspendue en 1964 (accords Nekkache-Grandval). Et dans l’accord-cadre de 1968 un certificat de résidence est imposé aux Algériens. Ce certificat est l’équivalent des cartes de séjour destinées aux étrangers du régime général. Ils peuvent l’obtenir après trois ans de résidence (et non cinq pour les autres ressortissants hors UE) et il est valable dix ans. En cas de regroupement familial, les membres de la famille reçoivent une carte de résident de la même durée que le titre de la personne qu’ils rejoignent. En outre, les Algériens peuvent s’installer à leur compte dans une activité libérale sans autre formalité.

      Mais les Algériens subissent des contraintes spécifiques. Ainsi, les étudiants peuvent moins travailler (à mi-temps, au lieu de 60 % du temps de travail pour les autres nationalités) et doivent obtenir une autorisation de travail.

      ► Plusieurs avenants

      Au cours des années suivantes, cet accord-cadre de 1968 a été amendé à trois reprises : en 1985, 1994 et 2001. Ces trois modifications ont rapproché la situation des ressortissants algériens des dispositions de droit commun. Après l’amendement de 1985, les Algériens sont soumis à l’obtention d’un visa pour entrer sur le territoire français. Après celui de 1994, le certificat de résidence d’un ressortissant algérien périme si ce dernier passe plus de trois ans consécutifs hors du territoire français, disposition qui s’applique aussi dans le droit commun. Enfin, en 2001, un dernier accord instaure des passe-droits — en particulier hospitaliers – destinés à l’élite algérienne.

      En 2007, un aménagement (de niche) signé par Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy, et par Mourad Medelci, son homologue algérien, et destiné à faciliter la circulation de détenteurs de passeports diplomatiques en les exemptant de visa, a été « suspendu » par le ministre de l’Intérieur le 17 mars dans le cadre de la « réponse graduée » aux autorités algériennes, répliquant à leur refus d’accueillir leurs ressortissants expulsés du sol français.

      Par ailleurs, comme l’accord-cadre de 1968 relève du droit international qui prime sur le droit français, les Algériens vivant en France ne sont pas soumis aux dernières lois (qu’elles soient favorables ou défavorables pour les migrants) votées sur l’immigration depuis 2001. Ils sont ainsi exclus de dispositifs tels que le « passeport talents », qui répond au concept vanté par Nicolas Sarkozy d’une « immigration choisie », ou encore à la régularisation par le travail qui doit passer par le seul exercice d’un métier dit « en tension » ou pour raison humanitaire. « Quand vous mettez tout dans la balance, les ressortissants algériens perdent plus qu’ils ne gagnent et ils auraient intérêt à renégocier ce traité », juge le professeur de droit public Serge Slama.

      Que se passerait-il en cas de dénonciation de l’accord-cadre ?

      En droit international, seul le président peut dénoncer ou ratifier des traités. « Quand on dénonce un accord international, on n’est pas tout seul à interpréter ses conséquences, explique le politologue Patrick Weil, pour qui une dénonciation serait une erreur. En France, le sénat affirme que les Algériens seraient soumis au droit commun, mais les Algériens, eux, estiment que l’on reviendrait aux accords d’Évian. Dans une situation de tension et de crise, l’Algérie pourrait décider de se replacer immédiatement dans l’esprit des accords d’Évian, et inciter ses ressortissants à se rendre massivement en France. Que ferait la France ? Elle n’a pas intérêt à se placer dans une situation d’incertitude dont la sortie dépendra moins d’elle encore qu’aujourd’hui. »

      Avec Rfi/AFP

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      «Les étés sans fin de ton sourire » de Youcef Zirem : l’art de résister par la beauté 

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      Les étés sans fin de ton sourire, de Youcef Zirem
      Les étés sans fin de ton sourire, de Youcef Zirem

      Dans ce recueil lumineux, Youcef Zirem transforme la douleur de l’exil et les blessures du monde contemporain en force de beauté et de tendresse. Entre lucidité et espérance, ses poèmes célèbrent la bonté, la nature et la fraternité, faisant de chaque mot un geste de résistance, où la poésie devient à la fois refuge et acte de foi en l’humanité.

      Les étés sans fin de ton sourire est un recueil de poésie publié en 2025 aux Éditions du Net. Ce livre, empreint de douceur, de mélancolie et d’humanisme, poursuit le long parcours poétique de son auteur, Youcef Zirem, déjà reconnu pour ses œuvres mêlant engagement, exil et quête de sens. À travers ce recueil, Youcef Zirem nous convie à une méditation lumineuse sur la paix, la bonté et la mémoire, tout en explorant les blessures du monde contemporain.

      Youcef Zirem, écrivain, poète et journaliste algérien, est une voix singulière de la littérature francophone. Né en Kabylie, il a grandi dans un contexte politique et social difficile, marqué par la censure, la violence et la quête d’identité. Très tôt, il s’impose comme un écrivain de la liberté, refusant la compromission et défendant la vérité de la parole poétique. Contraint par les circonstances, il s’exile en France, où il poursuit son œuvre avec la même ferveur, transformant la douleur du déracinement en source d’inspiration.

      Son œuvre est vaste et variée : romans, essais, récits et poésies s’y côtoient dans une cohérence remarquable. Parmi ses ouvrages les plus connus figurent La Cinquième mascarade, Le Sésame d’Alger, Libre, comme le vent et Eveiller les consciences. Tous témoignent de sa fidélité à des valeurs essentielles, la liberté, la dignité, la solidarité, et de sa volonté constante de faire de la littérature un instrument d’émancipation. Chez Youcef Zirem, l’écriture n’est jamais gratuite : elle est un acte de lucidité et de compassion, un moyen de redonner sens à l’existence humaine.

      Dans Les étés sans fin de ton sourire, cette exigence morale se double d’une sérénité nouvelle. Le poète, sans renoncer à son engagement, choisit une voie plus apaisée, tournée vers la sagesse et la beauté. Il évoque la guerre, la dictature, l’exil, mais aussi la nature, l’amour, la tendresse et la fraternité comme autant de forces de résistance face à la brutalité du monde. Chaque poème, souvent court et méditatif, semble un fragment de vérité, un éclat de conscience qui invite le lecteur à retrouver la simplicité des émotions essentielles.

      Le recueil se déploie comme un voyage intérieur. Youcef Zirem y exprime un profond désir de paix, non seulement entre les peuples, mais aussi au sein de l’individu. Sa poésie est une quête d’équilibre : entre l’ombre et la lumière, entre la colère et la compassion, entre la lucidité et l’espérance. À travers des images récurrentes, la lumière, le sourire, la mer, la montagne, le soleil, l’enfance, il tisse un fil symbolique entre l’intime et l’universel. Ces motifs incarnent la permanence du vivant face à la fragilité du monde.

      Le rapport à la nature y joue un rôle fondamental. La montagne, la mer ou la pluie deviennent des miroirs de l’âme, des refuges spirituels où l’homme retrouve son essence. Dans la beauté du monde, Youcef Zirem trouve la force de résister à la laideur de la société moderne. Il s’oppose au vacarme, à la superficialité et à l’indifférence contemporaine en célébrant la lenteur, la contemplation, le silence. Sa poésie, tout en douceur, devient une prière laïque, un espace de réconciliation entre l’homme et l’univers.

      L’exil, thème récurrent dans son œuvre, traverse également ce recueil. Mais il n’est plus ici une blessure ouverte : il devient une expérience initiatique. Loin de sa terre natale, le poète apprend à habiter le monde autrement, à transformer la nostalgie en lucidité. L’exil devient le lieu d’une double appartenance, à la fois douloureuse et féconde : l’enracinement dans la mémoire et l’ouverture à l’universel. Ce mouvement entre le souvenir et l’espoir confère à la poésie de Youcef Zirem une dimension profondément humaine et intemporelle.

      L’apport majeur de Les étés sans fin de ton sourire réside dans sa capacité à réconcilier la lucidité et l’espérance. Youcef Zirem écrit sans illusions sur l’état du monde. Il dénonce la violence, la corruption, le racisme, la perte de repères et l’égoïsme triomphant. Pourtant, il choisit de croire encore en la bonté et en la beauté. Son regard est clair, mais son cœur reste ouvert. Le titre du recueil illustre parfaitement cette philosophie : malgré la noirceur des temps, il reste des saisons de lumière dans les visages et les gestes humains. Les “étés sans fin” représentent cette chaleur inaltérable de l’amour et de l’espoir que rien ne peut éteindre.

      Sa poésie, dépouillée et sincère, rappelle que la résistance ne passe pas toujours par le cri, mais aussi par la douceur. Elle réaffirme que la vraie révolte peut être spirituelle et esthétique : celle qui consiste à préserver sa capacité d’émerveillement malgré la dureté du monde. Chez Youcef Zirem, le poète devient un veilleur, un témoin de la douleur mais aussi un semeur de lumière. Sa parole, claire et musicale, agit comme une flamme fragile mais tenace dans la nuit du désenchantement.

      L’impact de cette œuvre s’inscrit dans la continuité d’une poésie engagée mais apaisée, qui s’adresse à la fois aux exilés, aux rêveurs et à tous ceux qui refusent le cynisme contemporain. Youcef Zirem prolonge la tradition des poètes humanistes pour qui l’écriture n’est pas un ornement, mais un devoir moral. Il s’inscrit dans la lignée d’auteurs tels que René Char, Nazim Hikmet ou encore Tahar Djaout, qui voyaient dans la poésie un moyen d’éveiller les consciences et de sauvegarder la dignité de l’homme.

      Sa poésie n’a rien d’élitiste. Par son style limpide et sa musique intérieure, elle s’adresse à tous. La clarté devient ici une forme de résistance à la complexité factice du monde moderne. Dans une époque saturée d’images et de mots vides, Youcef Zirem redonne au verbe sa valeur de vérité. Sa langue est simple, mais elle vibre d’une profonde intensité spirituelle. Elle révèle que la beauté n’a pas besoin d’emphase : elle réside dans la sincérité du regard et la justesse du mot.

      Ce qui rend son œuvre particulièrement touchante, c’est sa capacité à unir la pensée et la tendresse. Youcef Zirem ne sépare jamais l’intellect du cœur. Ses poèmes témoignent d’une rigueur de réflexion, il médite sur le temps, la mémoire, la condition humaine, mais aussi d’une grande douceur. L’amour, l’amitié, la compassion et le pardon y occupent une place centrale. Le poète y apparaît comme un être vulnérable mais courageux, conscient de la finitude de l’existence, et décidé à en faire malgré tout un chant d’amour.

      Son engagement n’est pas politique au sens étroit du terme : il est moral et poétique. En refusant la haine, il défend une autre forme de lutte, celle de la bienveillance. Il oppose au désespoir du monde la clarté de la poésie. Sa voix s’adresse à tous ceux qui cherchent un sens dans un univers troublé. Ainsi, Les étés sans fin de ton sourire devient un espace de respiration, un lieu où l’on peut encore croire à la beauté des mots, à la fraternité, à la puissance du rêve.

      Le rôle du poète, tel que Youcef Zirem le conçoit, est celui du gardien de l’humanité. Il veille sur les valeurs menacées, la liberté, la justice, la bonté, et préserve, par la parole poétique, ce qui reste d’humain dans un monde déshumanisé. Il ne se contente pas de dénoncer la laideur : il travaille à la transfigurer. Il fait de la poésie un art de la réparation, un moyen de redonner au monde un visage plus doux. En ce sens, il est à la fois témoin et guérisseur.

      Les étés sans fin de ton sourire est un recueil d’espérance lucide. Youcef Zirem y conjugue la tendresse du cœur et la rigueur de la pensée pour rappeler que, même dans un monde blessé, la poésie demeure un acte de résistance et de foi. Il ne s’agit pas d’un espoir naïf, mais d’une confiance exigeante, conquise au prix de la lucidité. Loin de toute idéalisation, Youcef Zirem choisit de croire en la vie, en la beauté et en la bonté des êtres.

      Ce livre prolonge son engagement humaniste et poétique : il invite à ne jamais renoncer à la lumière, à préserver le sourire face aux tempêtes, à voir dans chaque geste de générosité la promesse d’un monde meilleur. Le sourire évoqué dans le titre devient le symbole même de cette philosophie : un sourire qui traverse les épreuves, qui défie la tristesse, qui incarne la persistance du bien.

      Les étés sans fin de ton sourire n’est pas seulement un recueil de poèmes, c’est une leçon de vie. Par la clarté de son verbe et la pureté de son regard, Youcef Zirem nous rappelle que la poésie a encore un rôle à jouer dans notre époque : celui de guérir, de relier et d’éclairer. Son livre est une invitation à la tendresse, une célébration du courage tranquille de l’amour, et une foi inébranlable dans la beauté du monde.

      Ainsi, à travers ce recueil, Youcef Zirem nous laisse un message d’une actualité brûlante : même dans les heures sombres, il existe toujours un été intérieur, une lumière que rien ne peut éteindre, celle des sourires, des gestes de paix et de la poésie, qui demeure l’ultime refuge de l’humanité.

      Brahim Saci

      Les étés sans fin de ton sourire, Éditions du Net, 2025

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      Mali : l’armée accusée d’avoir tué des éleveurs dans la région de Ségou

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      Militaires maliens
      Assimi Goita et son armée accusé encore une fois d'avoir tué des civils.

      De nouvelles accusations d’exactions commises par l’armée malienne. Les faits se seraient déroulés le 23 octobre dernier, dans la région de Ségou. Des militaires, appuyés par des chasseurs traditionnels dozos, sont soupçonnés d’avoir tué une trentaine de civils près de Markala, dans le centre du pays.

      La majorité des victimes sont des éleveurs venus pour la traversée de leur bétail au niveau du fleuve Niger, dans la région de Ségou au centre du Mali. Un événement qui rassemble annuellement les riverains venus exprimer leur joie et manifester leur solidarité envers ces bergers de retour de la transhumance et qui s’est donc terminé dans un bain de sang.

      Les témoins de la scène joints par RFI sont formels. Alors que la traversée du fleuve était en cours ce jeudi 23 octobre dans la matinée, un groupe de militaires maliens, assisté de chasseurs dozos, a fait irruption sur la berge.

      Des tirs sans sommation

      Le groupe a immédiatement ouvert le feu sans sommation. « En tirant sur les hommes comme sur le bétail » explique un berger qui souhaite garder l’anonymat et qui poursuit : « j’ai survécu parce que j’étais presque arrivé de l’autre côté de la rive ».

      Choqué, un autre homme raconte avoir vu son frère tomber sous les balles des soldats. Au sein de la communauté des éleveurs, la colère est grande, car les autorités avaient été informées de cette transhumance et de la traversée du fleuve.

      Selon un bilan établi par des sources locales, 32 civils ont été tués. Des riverains du fleuve ont expliqué que dans l’après-midi, les militaires maliens sont revenus et ont enterré les victimes dans deux fosses communes. À ce stade, ni l’armée, ni le gouvernement malien n’ont réagi.

      RFI

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      Bien plus qu’une résolution Sahara 2025

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      Conseil de sécurité.

      Le projet de résolution américaine sur le Sahara occidental marque une rupture diplomatique majeure. Pour la première fois, un texte soumis au Conseil de sécurité revendique explicitement « le leadership du président Trump » dans le règlement de ce conflit, transformant un dossier multilatéral en instrument d’affirmation hégémonique.

      Cette personnalisation du texte consacre une tentative d’américanisation du processus onusien et vise aussi à complexifier le vote, en le faisant porter moins sur la question de la décolonisation que sur la figure du président américain et sa prétendue action pacificatrice, la « Pax trumpana ».

      La démarche tend à écarter le multilatéralisme comme cadre de règlement des différends pour le transformer en arène où se rejoue la hiérarchie des puissances. L’inclusion du plan d’autonomie marocain comme « base la plus crédible » opère un renversement de la logique historique des résolutions précédentes, qui, jusqu’ici, maintenaient la référence au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.

      Derrière les mots policés de la diplomatie se dessine un basculement stratégique : celui de l’institution onusienne elle-même, happée par la tentation unipolaire ressuscitée.

      La complexité du vote prévu pour demain (jeudi 30 octobre, Ndlr) sera accentuée par plusieurs facteurs. La position chinoise, longtemps prudente, laisse filtrer les signes d’un réalignement partiel. Le commerce bilatéral sino marocain a bondi de 16,6 % sur les cinq premiers mois de 2025, preuve que l’économie prépare souvent le terrain idéologique. La visite du ministre Bourita à Pékin, en septembre, a débouché sur la création d’un dialogue stratégique permanent : une formule en apparence technique, mais qui institue une continuité d’échanges où le Maroc devient un partenaire de confiance dans l’espace africain. L’exclusion du Polisario des récents forums sino-africains n’est pas anodine ; elle constitue un signal implicite de préférence diplomatique.

      Pourtant, Pékin ménage toujours ses principes : l’entretien du 29 octobre entre Wang Yi et Ahmed Attaf réaffirme « la constance » de la position chinoise, appuyée sur la « justice et l’équité ». En langage diplomatique, cette constance équivaut à une latitude : la Chine se prépare à s’abstenir, ce qui, dans le calcul des équilibres, revient à ne pas contrarier Washington sans humilier Alger, qui se contente d’une rhétorique de façade.

      Du côté russe, la logique transactionnelle prévaut. L’accord de pêche signé avec le Maroc, incluant les eaux sahraouies, vaut reconnaissance implicite de la souveraineté marocaine — un geste hautement symbolique pour un pays qui, jusqu’ici, avait maintenu une neutralité prudente. Serguei Lavrov parle désormais d’une solution « équilibrée », terme qui, dans le langage moscovite, remplace la référence à « l’autodétermination ».

      Mais la Russie n’agit jamais sans calcul global. Les diplomates marocains eux-mêmes admettent que Moscou pourrait user d’un « vote sanction » contre Washington, non pour défendre le Polisario, mais pour négocier ailleurs : en Ukraine, en Syrie ou dans le Sahel.

      Dans cette optique, le vote russe au Conseil de sécurité devient un levier de troc, un instrument d’échange dans la diplomatie du donnant donnant entre grandes puissances. L’entretien du 21 octobre entre Attaf et Lavrov relève davantage d’une logique de manœuvre que de partenariat : le Sahara y apparaît comme une monnaie d’ajustement dans un rapport de forces mondialisé, où chaque geste diplomatique s’inscrit dans une stratégie de compensation et de calcul plutôt que dans une réelle coopération. Il reste à s’interroger sur la possibilité que Moscou aille jusqu’à bloquer la résolution, même si, au regard des signaux actuels, l’option la plus probable demeure celle d’une abstention, évitant la confrontation directe avec Washington.

      L’enjeu du vote dépasse donc largement la question sahraouie. Il s’agit de savoir si le Conseil de sécurité demeure un organe d’équilibre ou s’il entérine la transformation de l’ONU en prolongement de la diplomatie américaine. La règle est claire : neuf voix favorables suffisent, à condition qu’aucun des cinq permanents ne s’y oppose par un veto. Les États-Unis, confiants, comptent sur l’abstention chinoise et l’absence d’obstruction russe.

      Si ce scénario se confirme, la résolution consacrera le plan d’autonomie marocain non plus comme hypothèse, mais comme cadre de référence officiel du règlement. 

      En un sens, cela reviendrait à enterrer définitivement la perspective du référendum d’autodétermination. Cette évolution placerait l’ONU dans une contradiction institutionnelle : le Conseil de sécurité, dont la responsabilité première est l’établissement et le maintien de la paix, empiéterait sur les prérogatives de l’Assemblée générale. En passant outre l’inscription de la question sahraouie à l’agenda de la Quatrième Commission, en référence aux résolutions 1514 et 1541, il consacrerait un détournement du cadre de décolonisation initialement prévu par la Charte des Nations unies.

      Ce basculement signerait la fin d’une époque : celle où l’ONU, malgré ses faiblesses, représentait encore une scène où la légalité internationale pouvait tempérer la puissance. Le texte américain transforme cette scène en tribune ; il ne cherche plus le compromis (diplomatique), mais plutôt, par la logique transactionnelle, un compromis cynique qui consacre les hégémonies régionales, un genre d’établissement d’un féodalisme planétaire.

      Si la résolution passe, l’histoire retiendra moins la question sahraouie que le précédent institutionnel : la reconnaissance d’une solution imposée par la diplomatie d’un seul État, au nom d’un réalisme supposé. Ce réalisme là, fondé sur la transaction et la hiérarchie des forces, éloigne un peu plus le droit international de sa raison d’être : servir de rempart contre l’arbitraire des puissants.

      Mohand Bakir

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      PriMed 2025 : la Méditerranée des voix et des combats

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      Lors de la conférence de presse tenue à l’Hôtel de la Région à Marseille le 28 octobre, le PriMed 2025 a dévoilé sa sélection officielle. Du 29 novembre au 6 décembre, Marseille sera le théâtre de 25 films venus de 15 pays méditerranéens, parmi lesquels 7 inédits en France et 16 réalisés ou co-réalisés par des femmes.

      Plus de 30 heures de projections gratuites, avec 20 séances en présence des réalisateurs et 8 séances destinées aux jeunes spectateurs, offriront un regard vibrant et pluriel sur la Méditerranée d’aujourd’hui.

      Au cœur de cette édition, La Promesse d’Imane, de Nadia Zouaoui (Canada/Algérie, 52 min, 2024), illumine la programmation. Imane, jeune féministe algérienne de 26 ans, est retrouvée morte dans son appartement. Son blog, intime et politique, racontait la lutte contre les violences faites aux femmes dans un pays où elles sont souvent considérées comme mineures à vie. Avec ce film, Nadia Zouaoui restitue cette voix disparue et l’héritage de son combat, transmis à d’autres voix, d’autres flambeaux. Née en Algérie et installée au Québec, Zouaoui mêle mémoire et engagement, intimité et universel, chaque plan devenant souffle, chaque regard cri.

      Le PriMed 2025 fait également résonner les luttes citoyennes et environnementales. La photographe sicilienne Letizia Battaglia, qui a défié la mafia et l’omerta, inspire des combats semblables dans tout le bassin méditerranéen. Que ce soit la dénonciation de la pollution d’une cokerie en Bosnie-Herzégovine (Le Ciel au-dessus de Zenica), ou la mobilisation contre la ligne Lyon-Turin (Transalpin), artistes et militants mettent en images leurs engagements, éveillant les consciences et dessinant des chemins pour un futur commun.

      La guerre et la mémoire traversent également la sélection. Dans I Believe the Portrait Saved Me, un simple dessin sauve la vie du peintre Skender Muja au Kosovo. Dans Green Line, Fida, enfant pendant la guerre civile libanaise, part à la recherche d’un milicien qui l’a un jour menacée. Dans Algérie, sections armes spéciales, appelés français et descendants de victimes croisent leurs histoires, tissant une trame où souvenirs et questions s’entrelacent.

      Le festival ne néglige pas les espoirs et récits de jeunesse. Echoes from Borderland, A Vol d’Oiseau et Born to Fight racontent les périples, les migrations et les rêves de jeunes femmes et hommes prêts à tout pour un avenir meilleur. D’autres films explorent la solitude et les fractures sociales, comme Je suis la nuit en plein midi, Bosco Grande ou Alice par ci, par là, offrant un regard sur les invisibles et les oubliés.

      Le PriMed 2025 remettra 12 prix, décernés par un jury international présidé par Daphné Rozat, par les chaînes de télévision et par plus de 3 000 lycéens du bassin méditerranéen. La cérémonie aura lieu le vendredi 5 décembre à 16h30 au cinéma Artplexe Canebière, ouverte au public et en présence des réalisateurs.

      Au PriMed, la Méditerranée devient un miroir poétique et engagé. Chaque film, de La Promesse d’Imane à Transalpin, de Le Ciel au-dessus de Zenica à I Believe the Portrait Saved Me, transforme les vagues en voix, les rivages en combats, et rappelle que mémoire, engagement et espoir continuent de traverser nos générations.

      Djamal Guettala 

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      Tanzanie : une élection verrouillée autour de Samia Suluhu Hassan

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      Samia Suluhu Hassan
      Samia Suluhu Hassan

      La présidente tanzanienne Samia Suluhu Hassan se présente à une élection présidentielle sans opposition, dans un climat politique étouffé où les principales voix dissidentes ont été écartées, emprisonnées ou réduites au silence.

      La Commission électorale nationale a validé la candidature de la cheffe de l’État, investie par le Chama Cha Mapinduzi (CCM), au pouvoir sans discontinuer depuis l’indépendance. En revanche, elle a banni de la compétition le principal parti d’opposition, le CHADEMA, au motif qu’il aurait refusé de signer le code de conduite électoral. Son leader emblématique, Tundu Lissu, est détenu depuis avril, poursuivi pour “trahison” — une accusation jugée politique par ses partisans et plusieurs ONG internationales.

      L’autre grande formation d’opposition, ACT-Wazalendo, a elle aussi été neutralisée. Son candidat, Luhaga Mpina, ancien député du CCM ayant fait défection, a été disqualifié pour “irrégularités dans les primaires”. Son secrétaire général, Ado Shaibu, a dénoncé une décision “honteuse” et une “preuve du manque d’indépendance” de la Commission électorale.

      Dans ce contexte, Samia Suluhu Hassan affronte uniquement des candidats issus de petits partis sans audience nationale, transformant le scrutin en plébiscite sans suspense. Les rassemblements de l’opposition ont été interdits, les manifestations réprimées et les réseaux sociaux restreints, notamment Twitter (X), bloqué partiellement à la veille du vote.

      Arrivée au pouvoir en 2021 après le décès de John Magufuli, figure autoritaire mais populaire, Samia Suluhu Hassan brigue un premier mandat électif complet. Première femme présidente du pays, elle avait dans un premier temps tenté d’assouplir la ligne politique de son prédécesseur, en relançant le dialogue avec la communauté internationale et en promettant une ouverture démocratique. Mais à l’approche du scrutin, ces promesses se sont évanouies.

      Selon Al Jazeera et Reuters, plusieurs disparitions forcées de militants ont été signalées ces derniers mois. Les organisations de défense des droits humains évoquent une dérive autoritaire, où les institutions sont instrumentalisées pour préserver le pouvoir du CCM. Les observateurs indépendants font état d’un taux de participation faible et d’un climat de peur dans certaines régions, notamment à Dar es Salaam et Zanzibar.

      Pour la présidente sortante, ce vote doit “confirmer l’unité et la stabilité de la nation”. Dans un message publié sur X avant les coupures, elle a appelé ses partisans à “maintenir l’unité pour assurer la victoire du CCM”.

      Au-delà de la victoire attendue de Samia Suluhu Hassan, cette élection interroge sur l’avenir politique d’un pays longtemps cité comme modèle de stabilité en Afrique de l’Est. La Tanzanie donne aujourd’hui l’image d’un régime verrouillé, où la stabilité semble se payer au prix de la démocratie 

      Mourad Benyahia 

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      Échec des négociations d’Istanbul : la paix entre le Pakistan et l’Afghanistan menacée

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      Les pourparlers visant un cessez-le-feu durable entre Islamabad et Kaboul se sont soldés par un échec, relançant le spectre d’une guerre ouverte le long de leur frontière.

      Les négociations tenues à Istanbul entre le Pakistan et l’Afghanistan ont échoué, fragilisant davantage les efforts de paix dans une région déjà marquée par des tensions récurrentes. Ces discussions visaient à établir un accord durable pour un cessez-le-feu, après les affrontements meurtriers survenus ce mois-ci le long de la frontière commune.

      Le récent regain de violence est considéré comme le plus grave depuis le retour au pouvoir des talibans en Afghanistan en 2021. Les combats ont entraîné la mort de centaines de personnes des deux côtés, accentuant le risque d’une confrontation ouverte entre les deux pays.

      Le ministre pakistanais de l’Information, Attaullah Tarar, a déclaré que les discussions à Istanbul n’avaient permis aucun « résultat concret ». Selon lui, la délégation afghane « s’est écartée du cœur du problème » et les Talibans afghans ont préféré rejeter la responsabilité plutôt que de proposer des solutions pratiques.

      Le principal point de discorde reste la Taliban du Pakistan, basée en Afghanistan et accusée de mener des attaques régulières contre l’armée pakistanaise. Islamabad accuse Kaboul de fournir un refuge sûr à ce groupe et de bénéficier d’un soutien indirect de l’Inde pour déstabiliser le Pakistan. Kaboul, de son côté, affirme ne pas avoir le contrôle total sur cette faction et dénonce les incursions pakistanaises sur son territoire, qui ont provoqué des victimes civiles et une colère populaire.

      La frontière, longue de plus de 2 600 kilomètres, a été le théâtre d’attaques répétées. L’armée pakistanaise a mené des frappes aériennes contre des positions afghanes prétendument occupées par la « Taliban du Pakistan », tandis que Kaboul a riposté en bombardant des sites militaires frontaliers pakistanais. Des sources pakistanaises ont fait état de cinq soldats tués et de vingt-cinq insurgés éliminés lors de ces affrontements, révélant la fragilité du cessez-le-feu précédemment négocié à Doha.

      Le ministre pakistanais de la Défense, Khawaja Muhammad Asif, a averti que l’échec des pourparlers pourrait déboucher sur une guerre ouverte. Il estime que, bien que l’Afghanistan souhaite la paix, l’absence de consensus risque de précipiter une confrontation indésirable.

      Pour les observateurs, le risque de conflit majeur est accentué par la tension régionale entre le Pakistan et l’Inde, la compétition sino-indienne et la fragilité du régime taliban après quatre années de pouvoir en Afghanistan.

      La rédaction

      Sources : Ultra صوت, Reuters, communiqués officiels pakistanais et afghans, octobre 2025.

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      Irak : à Bagdad, l’absence du courant sadriste redessine le jeu électoral

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      Le courant sadriste

      À Bagdad, la campagne électorale bat son plein à l’approche des législatives du 11 novembre 2025. Mais cette fois, un acteur majeur manque à l’appel : le courant sadriste.

      Ce retrait, inédit dans la vie politique irakienne récente, bouleverse les équilibres internes du camp chiite et rebat les cartes à l’échelle nationale.

      Moqtada al-Sadr, chef religieux et figure populaire, avait bâti un mouvement structuré autour d’un discours nationaliste et anti-corruption. En se retirant du jeu, il prive la scène politique de l’une de ses voix les plus influentes et laisse un vide difficile à combler. Selon plusieurs estimations, cette absence pourrait coûter jusqu’à cinq sièges aux forces chiites dans la capitale, profitant ainsi aux listes sunnites et aux candidats indépendants.

      Face à cette nouvelle donne, cinq grandes coalitions s’affrontent à Bagdad. L’alliance de Nouri al-Maliki (Dawlat al-Qanun), celle du Premier ministre Mohammed al-Sudani (Al-Imar wa al-Tanmiyah) et le parti du président du Parlement Mohammed al-Halbousi (Taqaddum) dominent le paysage. Abdel Rahman al-Jazaeri, du bloc de Maliki, estime que la présence de leaders expérimentés est essentielle pour « combler le vide laissé par les Sadrists et préserver la cohésion du bloc chiite ».

      Mohammed al-Sudani, en campagne active, tente quant à lui de transformer cette absence en opportunité. Il appelle à un scrutin « équitable et transparent » et multiplie les déplacements pour convaincre un électorat fatigué par les crises politiques, la corruption et le chômage.

      Mais pour d’autres observateurs, comme Ali al-Freiji, du bloc de Mohsen al-Mandlawy, le retrait sadrist pourrait ouvrir la voie à une nouvelle génération de candidats indépendants, porteurs de projets concrets et plus proches des attentes de la jeunesse. Une recomposition politique semble s’esquisser, portée par la lassitude des électeurs envers les partis traditionnels.

      Reste que l’incertitude domine toujours. Ali Fadhlallah, analyste politique, rappelle que le vote à Bagdad demeure imprévisible, fortement influencé par les dynamiques locales et tribales. Selon Munaf al-Mousawi, du Centre de recherches stratégiques de Bagdad, les pertes chiites dans la capitale pourraient être compensées ailleurs, limitant ainsi l’impact global du boycott sadrist.

      À l’échelle du pays, ce scrutin s’annonce donc comme un test crucial pour la stabilité politique et la crédibilité du système électoral irakien. Et si Moqtada al-Sadr a choisi le silence, son ombre continue de planer sur une Bagdad en quête de nouveaux repères.

      Djamal Guettala 

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