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COP30 : entre ombre et lumière

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COP 30

Que peut-on attendre de la COP30, alors que la propagande qui vise à protéger les intérêts liés aux énergies carbonées déforme actuellement la réalité avec l’aide de l’IA ?

La 30e Conférence des parties sur les changements climatiques (COP30) se tient jusqu’au 21 novembre à Belem, au Brésil. Alors que l’année 2025 sera l’une des trois plus chaudes jamais enregistrées, la campagne contre la science climatique bat son plein. Les faits sont pourtant clairs et incontestés parmi les autorités scientifiques. Les années allant de 2015 à 2025 ont été les plus chaudes depuis 176 ans et selon les données provisoires de l’ONU, la température mondiale a dépassé entre janvier et août de 1,42 degré Celsius la moyenne de l’époque préindustrielle.

Cette élévation de température, en créant de la pollution aérienne, des canicules et diverses quantités d’autres choses nuisibles à la santé, aurait des conséquences, qui ont été relevées le 28 octobre par la revue médicale The Lancet. Elle serait responsable de plus d’un demi-million de morts en moyenne par an. « Le changement climatique menace la santé à un niveau sans précédent », affirme le Lancet Countdown, qui est rédigé annuellement à partir de l’état général des connaissances scientifiques par une centaine de chercheurs internationaux coordonnés par l’University College London, en lien avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Nier ou biaiser les faits

Comme chaque année, la désinformation sur le climat augmenterait pendant les semaines qui précèdent la conférence des Nations unies sur les changements climatiques. Le rapport, Deny, Deceive, Delay : Demystified produit par Coalition Against Disinformation, un organisme qui regroupe plus de 80 organismes militants et un organisme brésilien, l’Observatoire pour l’intégrité en information. « Les dépenses de Big Carbon et les algorithmes de Big Tech nous empêchent de nous voir et de nous entendre les uns les autres, en ligne », affirment-ils.

Cette campagne aurait été particulièrement forte au Brésil qui a vu une hausse de plus de 14 000 de ces fausses informations entre juillet et septembre, soit 267 %, selon le rapport publié le 6 novembre. Elles seraient amplifiées par l’intelligence artificielle (IA) et encourageraient même l’hostilité envers la science et les chercheurs.

Chris Wright secrétaire à l’énergie, fondateur de l’une des plus grandes compagnies spécialisées dans la fracturation hydraulique, affirmait le 24 septembre : « Les Nations unies, ainsi que de nombreux pays dans le monde, se sont complètement égarées à propos du changement climatique, en exagérant jusqu’à en faire la plus grande menace pour la planète. »

Protéger la vie

Climatologue à l’École polytechnique fédérale de Zurich en Suisse et vice-présidente du groupe de travail 1 du GIEC, Sonia Seneviratne affirme « On arrive dans une zone dangereuse et inconnue, tant on s’éloigne de plus en plus des conditions que l’on connaissait au XXe siècle ». Selon elle, franchir 1,5 degré Celsius, pourrait entraîner des risques plus importants de franchir des points de bascule. Des éléments du système climatique pourraient alors entrer dans de nouveaux états irréversibles.

« Nous devons agir dès maintenant, rapidement et à grande échelle, afin de limiter autant que possible le dépassement de 1,5 degré Celsius », commente le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui considère que chaque dépassement annuel de 1,5 degré Celsius pourrait causer des dommages irréversibles et des répercussions désastreuses sur les économies de nombreux pays.

Ce dépassement serait presque inévitable selon la secrétaire générale de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), Celeste Saulo, « Cette série sans précédent de températures élevées, combinées à l’augmentation record des niveaux de gaz à effet de serre de l’année dernière, montre clairement qu’il sera pratiquement impossible de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 degré Celsius ces prochaines années », espérant que l’on revient aux objectifs plus ambitieux de l’accord de Paris.

La COP21 aurait d’ailleurs déjà donné des résultats selon plusieurs experts. Avant 2015, les prévisions des modèles climatiques donnaient un réchauffement de 4 degrés d’ici la fin du siècle. Dix ans après l’Accord de Paris, la planète se dirigerait plutôt vers un réchauffement de 2,3 à 2,5 degrés Celsius. Cela ne pourra cependant se produire que si les États respectent leurs engagements actuels. Depuis la signature de cet Accord, la croissance des émissions de GES aurait même ralenti et aurait augmenté d’environ 1 % depuis 2015, alors que c’était plutôt 18 % entre 2005 et 2014.

Rassembler tous les pays de la planète dans un accord sur un enjeu aussi complexe pourrait même être considéré une victoire pour le multilatéralisme. Le fait que les États soient obligés de mesurer leur performance les uns par rapport aux autres pourrait avoir créé une pression morale qui les aurait motivés à agir. Plus de 140 pays se seraient donc dotés en dix ans, d’un programme climatique pour atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 et 2070.

« Les COP ne servent pas à rien. Ça permet aussi de mettre dans le débat certains sujets », affirme le directeur général du groupe de réflexion Écologie responsable, Ferréol Delma, qui considère que ça permet aussi à tous les acteurs de prendre part au sujet.

Marine Braud, experte des enjeux environnementaux commente à ce sujet que depuis la COP16, elles sont toutes celles de la dernière chance. « Chaque demi-degré de réchauffement qu’on n’aura pas, c’est des morts évités, c’est des débats qui sont évités, donc dans tous les cas, il ne faut jamais abandonner le combat. »

Michel Gourd

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Chagos : le gouvernement de transition conteste le traité UK-Maurice et réclame le retour des Chagossiens

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Me Larifou

Le 9 novembre 2025, Me Saïd Larifou, avocat conseil du Gouvernement de Transition de l’archipel des Chagos, a publié un communiqué visant à clarifier la situation politique et juridique autour du traité signé le 22 mai 2025 entre le Royaume-Uni et la République de Maurice.

Selon Me Larifou, ce traité, bien qu’il reconnaisse la responsabilité britannique dans la déportation forcée du peuple chagossien, ne prend pas en compte l’ampleur du traumatisme historique causé par ces crimes coloniaux et ne répond pas aux aspirations légitimes du peuple à retourner sur ses terres.

L’archipel des Chagos, situé stratégiquement dans l’océan Indien, a été le théâtre de déportations massives dans les années 1960 et 1970. Les Chagossiens ont été contraints de quitter leur territoire, laissant derrière eux leur histoire, leur identité et leur culture. Le communiqué souligne que l’accord UK-Maurice a été conclu sans le consentement des Chagossiens et constitue, selon le Gouvernement de Transition, un déni de leur existence et de leurs droits fondamentaux.

Me Larifou rappelle que, malgré la reconnaissance officielle de la responsabilité britannique, les conséquences du passé restent présentes. Les Chagossiens vivent encore les séquelles de l’exil forcé, et leur droit au retour sur leur archipel demeure non réalisé. Le Gouvernement de Transition met ainsi en avant la nécessité d’une démarche qui respecte pleinement la souveraineté et les droits du peuple chagossien.

Outre les actions diplomatiques engagées auprès des Nations Unies, des organisations internationales et panafricaines, le communiqué annonce le lancement d’un recours judiciaire visant à réexaminer la validité du traité UK-Maurice. Le Gouvernement de Transition affirme ne reconnaître aucun effet juridique à cet accord sur le destin de l’archipel et conteste la légalité internationale de l’occupation et des activités menées sur les Chagos sans le consentement de leur population.

Ce communiqué met également en lumière le rôle persistant du droit international dans la reconnaissance des droits des peuples dépossédés. Il s’inscrit dans un combat de longue haleine pour rappeler que le passé colonial continue d’affecter la vie de milliers de Chagossiens, et que leur retour sur l’archipel est non seulement un impératif moral, mais également un droit fondamental à faire valoir sur la scène internationale.

Le message de Me Larifou est clair : tant que le peuple chagossien n’aura pas été consulté et que ses droits ne seront pas pleinement reconnus, tout accord sur le territoire des Chagos reste contesté et juridiquement fragile.

Mourad Benyahia 

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Championnat de Tunisie : malgré un nul face à l’Africain, l’Espérance garde la tête du classement

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L'Espérance de Tunis

Le stade Hammadi Agrebi de Radès a accueilli, ce dimanche 9 novembre 2025, le grand derby de la capitale tunisienne entre l’Espérance sportive de Tunis et le Club Africain, à l’occasion de la 14e journée du championnat de Tunisie de football (Ligue 1 professionnelle).

Un choc très attendu qui s’est conclu sur un score vierge (0-0), sans vainqueur ni buteur, mais riche en intensité et en tension.

Un derby sans buts, mais pas sans enjeu

Devant des tribunes pleines et une ambiance électrique, les deux formations ont livré un match engagé, marqué par la prudence tactique. L’Espérance, solide leader du championnat, cherchait à conforter son avance, tandis que le Club Africain espérait réduire l’écart et s’emparer de la première place.
Malgré quelques opportunités de part et d’autre, aucune des deux équipes n’est parvenue à faire la différence. Les défenses ont pris le pas sur les attaques, et les gardiens ont assuré l’essentiel.

Ce nul permet toutefois à l’Espérance sportive de Tunis de conserver la tête du classement avec 31 points, trois longueurs devant le Club Africain, son éternel rival, qui reste deuxième avec 28 points. Le match, s’il n’a pas offert de but, confirme que la lutte pour le titre s’annonce plus que jamais serrée.

Résultats des autres rencontres de la 14e journée

Dans les autres stades du pays, les rencontres de cette 14e journée se sont également jouées dimanche après-midi. À Métlaoui, le duel entre l’Étoile de Métlaoui et l’Espérance de Zarzis s’est soldé par un score nul et vierge (0-0), un résultat qui n’arrange aucune des deux formations, toujours en quête de régularité.

Du côté de Ben Guerdane, l’Union sportive de Ben Guerdane a réussi l’unique victoire de cette série de matchs, en s’imposant 1-0 face au Stade Tunisien, grâce à un penalty transformé par Ayoub Ben Machareg à la 15e minute. Une victoire importante pour l’équipe du Sud-Est, qui s’éloigne un peu plus de la zone rouge.

Le classement à l’issue de la journée

À l’issue de cette deuxième salve de matchs de la 14e journée, le classement reste dominé par l’Espérance (31 points), suivie du Club Africain (28 points) et du Stade Tunisien (27 points).
Viennent ensuite le Club Sfaxien et l’Union de Monastir (23 points chacun), l’Espérance de Zarzis (21 points) et l’Étoile de Métlaoui (20 points).
En milieu de tableau, on retrouve l’Étoile du Sahel (19 points), l’Union de Ben Guerdane (18 points), puis le trio composé du CS Marsa, de la Jeunesse d’El Omrane et du CAB de Bizerte (16 points chacun).
La Jeunesse de Kairouan suit avec 13 points, tandis que le bas du classement est occupé par Moustakbel Soliman (11 points)Moustakbel Gabès (9 points) et l’Olympique de Béja (8 points), plus que jamais en difficulté.

Dernier match de la journée

La 14e journée se conclura lundi 10 novembre au stade Chedly Zouiten, avec la rencontre entre la Jeunesse d’El Omrane et l’Olympique de Béja. Le match sera dirigé par Mohamed Laâqel, assisté à la VAR par Madji Bellagha.

Si cette journée n’a pas livré de grand bouleversement en tête du classement, elle confirme néanmoins la solidité de l’Espérance, toujours invaincue, et la constance du Club Africain, qui reste son principal concurrent. Le championnat tunisien poursuit ainsi son chemin, rythmé par une rivalité historique qui continue de passionner tout un pays.

D.G

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Batna : Fadhila El Farouk, entre mémoire, écriture et résistance

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Les débats de la Librairie Guerfi à Batna
Les débats de la Librairie Guerfi à Batna. Crédit photo : DR

Samedi 8 novembre 2025, la librairie Guerfi de Batna a accueilli un public nombreux et éclectique pour une rencontre littéraire exceptionnelle avec la romancière, poétesse et journaliste Fadhila El Farouk, nom artistique de Fadhila Melkemi, née à Arris en 1967 et écrivant en langue arabe, aujourd’hui résidente à Beyrouth.

Écrivains, journalistes, médecins et universitaires se sont rassemblés dans cette librairie où la littérature s’est faite abri, souffle et rencontre.

Placée sous le thème « La littérature comme refuge et résistance », la rencontre a pris des allures d’après-midi de résistance littéraire, où chaque mot porté par l’auteure semblait protéger, éclairer et émouvoir. L’atmosphère était à la fois intime et vibrante, chaque intervention de Fadhila El Farouk résonnant profondément auprès d’un public attentif et passionné.

La rencontre a été animée avec brio par Mourad Boukerzaza, écrivain et journaliste, dont la sensibilité et la maîtrise du dialogue ont insufflé à la soirée une fluidité remarquable. Grâce à son animation, le public a pu suivre le fil des confidences de l’auteure, explorer la genèse de son écriture et percevoir l’équilibre subtil entre mémoire personnelle, expérience et réflexion sur la société.

De Arris, dans les montagnes des Aurès, à Beyrouth, capitale culturelle du monde arabe, le parcours de Fadhila El Farouk est celui d’une écrivaine façonnée par l’histoire, les paysages et la mémoire. Lorsqu’on lui a demandé comment elle pense lorsqu’elle écrit, elle a répondu avec fierté : « Je suis une Chaouia qui écrit en arabe ». Par ces mots simples, elle a rappelé que son imaginaire et sa sensibilité sont profondément ancrés dans ses origines chaouies, et que son écriture est le reflet de cette identité aurésienne, même lorsqu’elle s’exprime en arabe littéraire.

L’auteure a évoqué ses œuvres majeures, révélant la diversité de son univers littéraire : Voler un moment d’amour, Humeur d’une adolescente, La honte (au féminin), La découverte du désir, Les régions de la peur et Épuisée par ton amour, ô fils de mon sang. Elle a parlé de ses débuts dans la nouvelle et le roman, de la place de la « audace » dans son écriture, utilisée pour interroger les tabous et les conventions sociales.

Fadhila El Farouk a partagé des souvenirs d’enfance à Arris, son attachement à sa famille et aux paysages des Aurès, et l’exil à Beyrouth il y a trente ans, source d’ouverture et d’enrichissement de sa plume. Entre réflexions sur l’amour, la liberté, la mémoire et la quête de soi, elle a offert au public un moment de rare intensité poétique.

La rencontre a confirmé sa place parmi les voix les plus marquantes de la littérature algérienne et arabe contemporaine, tout en soulignant la puissance de la parole libre et résistante, capable de traverser le temps et les frontières. La soirée a été également l’occasion de saluer la qualité de l’animation de Mourad Boukerzaza, dont la culture, l’écoute et le talent pour guider le dialogue ont transformé l’événement en un moment vivant, lumineux et profondément humain.

Les organisateurs, en particulier M. Reda Guerfi et l’équipe de la librairie, ont été chaleureusement remerciés pour cette parenthèse littéraire exceptionnelle, dense et poétique.

Djamal Guettala

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Que reste-t-il du rêve d’indépendance ?

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Fête de l'indépendance
Qu'a-t-on fait de l'indépendance en Algérie ? Crédit photo : DR

Soixante-trois ans après l’indépendance, le rêve d’un peuple souverain, maître de son destin et libre de ses choix, semble s’être effrité sous le poids des désillusions. Le 1er Novembre, date fondatrice du combat pour la libération nationale, résonne aujourd’hui comme un rappel amer d’un idéal trahi.

L’aspiration à la liberté et à la démocratie, portée par la révolution, s’est heurtée au coup de force fomenté dès l’aube de l’indépendance, avant même que les armes ne se soient tues. Le pouvoir a été confisqué, au détriment des militants qui croyaient encore à la promesse d’un État libre et juste. 

Le constat politique est sans appel. L’idéal démocratique connaît un destin contrarié. Ignorée d’abord, combattue ensuite, proclamée puis plébiscitée, il fut réduit à une simple simulation, avant d’être pervertie par un système obsédé par sa survie, pour finir sacrifié sur l’autel de la normalisation autoritaire. La promesse du 1er Novembre, celle d’un peuple libre et souverain, reste ainsi inaboutie.

Toutes les révoltes qui ont tenté de raviver cet idéal ont toutes été écrasées, souvent dans la violence et le sang. Le régime s’est montré prêt à tout pour préserver ses privilèges et à empêcher toute remise en cause de son hégémonie.

Octobre 88 avait pourtant laissé entrevoir un espoir. La population était descendue dans la rue pour tourner la page du parti unique et réclamer la liberté, la démocratie pluraliste et l’alternance. Mais, en peu de temps après, cet espoir s’est mué en désillusion. 

Le parti unique a certes disparu, mais il n’a pas laissé place à un véritable pluralisme politique. A sa place s’est installé un unanimisme de façade, sans partis authentiques ni opposition réelle. Car si le parti unique s’est effacé, l’État profond, lui, s’est solidement enraciné à sa place.

Ces pouvoirs non élus ont absorbé les institutions, transformant la fonction publique en base militante. L’administration n’est plus un contrepoids, mais le prolongement direct du pouvoir. Les décisions ne naissent plus du débat politique, mais de la hiérarchie administrative. La quasi-totalité du personnel politique actuel en est issue, de ses rangs. 

Là où les démocraties voient émerger des responsables venus des partis politiques, de la société civile, du monde associatif ou intellectuel, notre pays recycle ses fonctionnaires en dirigeants politiques. Le pouvoir se reproduit ainsi par promotion interne, perpétuant les mêmes logiques, les mêmes réflexes de soumission et de contrôle.

En prétendant rompre avec le système du parti unique, finalement on n’a fait que changer de façade. L’administration a pris la place du parti, sans que la souveraineté populaire ne puisse s’exercer réellement.

Derrière les apparences, le formalisme démocratique dissimule mal une réalité autoritaire. Le pouvoir s’est doté des mécanismes sophistiqués pour assurer sa pérennité, en neutralisant toute véritable alternative démocratique. Ces mécanismes se distinguent autant par leur subtilité que par leur efficacité. Deux exemples permettent de l’illustrer. 

D’abord, le suffrage universel a perdu toute sa substance, réduit à une portée purement formelle. Il est désormais surclassé par le poids politique prépondérant des réseaux clientélistes, des clans d’influence, et d’une bourgeoisie affairiste prospérant dans l’économie informelle tentaculaire. A cela s’ajoutent des pratiques héritées du totalitarisme. Dès lors, il n’est guère étonnant de voir certains triompher dans les urnes de « l’Algérie nouvelle » sans véritable parcours militant, sans ancrage partisan ou social, et parfois même avec le passé compromettant d’un fidèle serviteur de l’ancien régime tant décrié.

Ensuite, la loi sur le régime électoral elle-même verrouille l’accès à une véritable représentation politique nationale. Loin d’être un outil de représentation, elle agit comme un instrument de contrôle. En dénaturant la compétition, elle empêche l’émergence de courants porteurs d’un projet démocratique et unificateur. Elle favorise au contraire la dispersion, la cooptation locale et la domestication des forces politiques. Ce dispositif, loin d’être neutre, constitue un rouage stratégique du verrouillage autoritaire.

Censée fonder une représentation nationale, cette loi fragmente l’espace politique en entités cloisonnées, incapables de refléter la diversité du pays. Elle réduit le jeu politique à l’échelle de la wilaya, neutralisant ainsi toute dynamique nationale au profit d’une logique strictement locale.

Au lieu de structurer le débat autour des stratégies et des projets de portée nationale, cette loi encourage un vote d’appartenance. Le choix de l’électeur repose moins sur l’adhésion à un programme que sur des réflexes identitaires, affectifs ou communautaires. La relation entre électeur et candidat s’établit désormais sur la proximité immédiate, court-circuitant toute médiation partisane. Les citoyens ne votent plus pour une vision, mais pour une loyauté ; non pour un projet collectif, mais pour la promesse d’un avantage individuel, matériel ou symbolique.

Aujourd’hui, le peuple vit sous cloche. Rabaissé à l’état de mineur à vie, il demeure sous tutelle, dessaisi de sa souveraineté et privé de liberté. La parole citoyenne ne compte plus, elle est remplacée par le silence et l’attente. 

Cette confiscation de la souveraineté politique a naturellement trouvé son prolongement dans le domaine économique. Toute velléité d’autonomie est perçue comme une menace potentielle, un possible foyer d’émancipation et de dissidence. La crainte de voir émerger des acteurs économiques indépendants, susceptibles de remettre en cause l’autorité du pouvoir, constitue l’un des principaux freins à toute politique sérieuse de développement et de diversification économique. 

Le pouvoir se retrouve ainsi prisonnier d’un dilemme permanent, entre la nécessité économique de la libéralisation et la peur d’un affaiblissement de son emprise. Ces hésitations du régime, valsant entre discours réformateurs et volonté de préserver les leviers de domination qui garantissent sa survie, ont favorisé l’expansion d’une économie informelle tentaculaire. Ce laisser-faire a instauré ses propres règles, à l’origine de la prospérité actuelle de la finance islamique et de la bourse parallèle du square Port-Saïd.

Faire obstacle à la modernisation économique relève dès lors d’un choix stratégique, celui de maintenir l’ordre politique en place. Il s’agit, en définitif, de conserver le monopole du pouvoir économique entre les mains de l’État, ou plutôt entre celles de ceux qui l’incarnent.

Dans ce système, le dinar, symbole de souveraineté nationale et censée refléter la vitalité du pays, n’est plus qu’une monnaie d’ajustement. Il est côté de manière à veiller au train de vie fastueux de l’appareil d’État, qui baigne dans l’opulence, et la prospérité insolente de ses dirigeants. Ces derniers ne connaissent ni crise, ni rareté, ni restrictions ; tandis que le citoyen subit la dégradation continue de son pouvoir d’achat, ou s’enfonce dans le dénuement. Cette fracture économique est aussi une fracture morale.

L’indépendance ne se réduit pas à un drapeau ou à une frontière. C’est une conquête totale : politique, économique, culturelle et morale. Elle se mesure à la liberté des citoyens, à la dignité, et à la force du droit. Sans cela, elle perd tout son sens.                           

Le 1er Novembre, jadis symbole d’émancipation, devient aujourd’hui le reflet des luttes inabouties. Il nous revient désormais de redonner vie à ce rêve, de le soustraire à ceux qui l’ont confisqué, et de reconstruire une indépendance réelle : celle d’un peuple debout, conscient, et maître de son destin.

Hamid Ouazar, ancien député de l’opposition

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Monder Boudène du RND ou la métaphore de « la pomme pourrie» !

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Mounder Boudene
Mounder Boudene (RND). Crédit photo : DR

Quand la rhétorique politique abreuvée au populisme se perd dans les vergers des Aurès, la fierté nationale se mesure aux kg de pommes produits en Algérie.

À Batna, lors d’un meeting populaire marqué par des envolées lyriques et des métaphores champêtres, Monder Boudène, jeune chef du Rassemblement national démocratique (RND), a cru bon de bâtir son discours politique… autour d’une pomme. Pas n’importe laquelle : la pomme des Aurès, symbole, selon lui, de la souveraineté agricole retrouvée et de l’indépendance vis-à-vis des importations « étrangères ».

S’exprimant devant un public conquis, Boudene a vanté la réussite des agriculteurs locaux qui ont su, « par leur labeur et leur foi en la terre », transformer les vallées aurésiennes en vergers florissants. Jusque-là, rien d’extraordinaire : la fierté régionale et la promotion du produit local sont des thèmes récurrents dans le discours politique. Mais le chef du RND a franchi un pas de plus en conférant à la pomme aurésienne des attributs de souveraineté nationale. Il est même allé jusqu’à saluer la « libération du marché » de la dépendance à la… pomme française.

Une comparaison pour le moins audacieuse, voire cocasse, tant le fruit en question reste, dans les faits, un produit de luxe pour la majorité des Algériens. Sur les étals, la variété haut de gamme s’affiche à près de 800 dinars le kilo, et les gammes inférieures oscillent encore entre 300 et 500 dinars. Une souveraineté donc bien théorique, réservée à ceux qui peuvent encore se permettre de croquer dans la pomme nationale sans craindre de grever leur budget.

L’ironie du propos tient aussi à la charge symbolique qu’il porte : vouloir faire de la pomme un emblème d’indépendance économique dans un pays où l’autosuffisance alimentaire demeure un horizon lointain relève d’un certain décalage avec la réalité. En voulant illustrer la réussite du terroir, Monder Boudene a surtout révélé la facilité avec laquelle le discours politique algérien verse dans la fable, confondant communication et incantation.

À force de vouloir « nationaliser » la pomme, le RND en viendrait presque à oublier que les véritables racines du problème se trouvent moins dans les vergers que dans la gouvernance du secteur agricole lui-même. Et qu’à trop vouloir verdir son discours, on risque d’en oublier que, parfois, sous la belle peau rouge du fruit, se cache… une pomme un peu pourrie.

Samia Naït Iqbal

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Réforme du statut de la magistrature : renforcer l’indépendance de la justice… sous condition ? 

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MInistère de la justice

Présenté, ce dimanche 9 novembre, à l’APN par Lotfi Boudjema, le ministre de la Justice, le projet de réforme du statut de la magistrature se veut une avancée vers une justice plus indépendante et transparente.

Mais derrière ce discours de modernisation, l’opposition non parlementaire dénonce une indépendance « sous condition », estimant que les nouvelles dispositions renforcent davantage le pouvoir de l’exécutif que celui des juges.

Le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Lotfi Boudjama, a présenté devant l’Assemblée populaire nationale (APN) le projet de loi organique portant Statut de la Magistrature. Ce texte de 110 articles, appelé à remplacer la loi organique n°04-11 de 2004, s’inscrit dans le prolongement des réformes institutionnelles engagées depuis la Constitution de 2020.

L’objectif affiché est de consolider l’indépendance du pouvoir judiciaire et de moderniser le cadre juridique régissant la carrière des magistrats. Le projet s’articule autour de trois axes majeurs : le transfert des compétences vers le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), la revalorisation du statut professionnel du magistrat et le renforcement de la déontologie et de la responsabilité judiciaire.

Un CSM doté de nouvelles prérogatives

Le texte confère au Conseil supérieur de la magistrature un rôle central dans la gestion de la carrière des magistrats, incluant les nominations, mutations, promotions et mesures disciplinaires. Cette évolution met fin à la tutelle administrative exercée par le ministère de la Justice depuis 2004.

Le CSM devient ainsi le garant de l’autonomie du corps judiciaire et de la transparence des décisions le concernant. Cette orientation s’inscrit dans l’esprit de la Constitution de 2020, qui érige le principe d’indépendance de la justice en pilier de la réforme institutionnelle.

Statut et conditions de carrière revalorisés

Le projet introduit également des dispositions destinées à améliorer les conditions de travail et de carrière des magistrats. Il met l’accent sur la formation continue, la mobilité professionnelle et la reconnaissance du mérite dans les promotions.

Un volet particulier est consacré à la protection du magistrat contre toute pression ou ingérence dans l’exercice de ses fonctions. Le texte prévoit par ailleurs une révision du régime disciplinaire afin de garantir un équilibre entre droits et devoirs, tout en renforçant la transparence des procédures internes.

Déontologie et responsabilité judiciaire renforcées

Le troisième axe de la réforme porte sur l’éthique et la responsabilité des magistrats. Le projet de loi précise les obligations déontologiques, notamment en matière d’impartialité, de réserve et de probité.

Il introduit également de nouveaux mécanismes de contrôle et d’évaluation visant à renforcer la confiance du citoyen dans l’institution judiciaire. Ces mesures s’inscrivent dans une logique d’exemplarité et de modernisation de la justice, dans un contexte marqué par une forte attente sociale en matière d’équité et de transparence.

Des réserves nourries par l’opposition et la société civile

Si le gouvernement présente ce texte comme une avancée décisive vers une justice indépendante, des activistes politiques, ainsi que plusieurs acteurs de la société civile, y voient déjà la continuité d’un processus de réforme piloté d’en haut, davantage soucieux de réaménager le cadre institutionnel que d’en changer la logique.

Selon ces voix critiques, le projet ne risque pas de  modifier  en profondeur les rapports entre l’exécutif et le judiciaire : le Conseil supérieur de la magistrature, bien que renforcé sur le papier, demeure soumis à une influence politique latente à travers la composition de ses membres et les mécanismes de nomination. En d’autres termes, l’indépendance proclamée risquerait de rester largement formelle.

Plusieurs amendements introduits dans la dernière version du texte sont également perçus comme des signes d’un durcissement du contrôle étatique sur la société. Ils s’inscrivent, selon les détracteurs, dans une tendance plus large à la restriction des libertés publiques, au renforcement du pouvoir de l’administration et à la limitation des espaces de contestation.

Pour l’opposition, cette réforme illustre la contradiction d’une politique qui revendique l’État de droit tout en consolidant le contrôle institutionnel du pouvoir. Elle dénonce un processus de modernisation « à sens unique », où la réforme judiciaire, loin d’émanciper la magistrature, risque de servir à légitimer la centralisation du pouvoir sous couvert d’indépendance.

Samia Naït Iqbal

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Mineurs algériens aux Baléares : les ONG espagnoles s’opposent à une expulsion « illégale »

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Les adolescents algériens arrivés clandestinement à Ibiza
Les adolescents algériens arrivés clandestinement à Ibiza

En cherchant à contourner les mécanismes légaux de protection de l’enfance, l’exécutif baléare s’expose aux critiques d’une partie de la société civile *, qui y voit une atteinte au principe fondamental de l’intérêt supérieur de l’enfant.

Les Îles Baléares font face à une polémique grandissante sur la gestion des mineurs algériens non accompagnés (MENA). Le gouvernement régional, dirigé par le Parti populaire (PP), réclame le rapatriement collectif de près de 300 enfants, une mesure jugée illégale par les organisations humanitaires et contraire à la jurisprudence de la Cour suprême espagnole.

À l’origine de cette controverse figure un cas isolé : la procédure de retour de sept adolescents algériens arrivés à Ibiza en septembre, demandée par leurs parents via les autorités algériennes. Ce dossier exceptionnel, encadré par le parquet espagnol, est désormais utilisé par l’exécutif baléare pour justifier une expulsion massive. Une assimilation dénoncée par le ministère espagnol de la Jeunesse et de l’Enfance, qui y voit une tentative de « semer la confusion » entre des situations distinctes : l’exercice de l’autorité parentale pour les sept mineurs concernés et la tutelle publique pour les 298 autres enfants en situation d’abandon.

Les associations de défense des droits des enfants (CEAR, Plateforme de l’Enfance, APDHA) rappellent que tout rapatriement doit respecter l’intérêt supérieur du mineur et faire l’objet d’une évaluation individuelle. Une expulsion collective serait non seulement contraire au droit espagnol, mais aussi aux engagements internationaux du pays.

Les autorités baléares invoquent la saturation de leurs centres d’accueil, dont le taux d’occupation dépasse 230 %. Mais les experts rappellent qu’un mécanisme de solidarité interrégionale existe déjà. Le décret-loi 2/2025 prévoit la répartition automatique des mineurs entre les différentes communautés autonomes lorsque la capacité d’accueil est dépassée. Le gouvernement des îles Baléares, au lieu de l’appliquer, a choisi de le contester devant la justice, sans succès.

La rédaction

*https://www.eldiario.es/illes-balears/politica/organizaciones-humanitarias-advierten-deportacion-menores-argelinos-plantea-pp-balears-ilegal

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Alger-Paris : quand l’ignorance des traités devient un argument de campagne…

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France Algérie

Il y a des discours qui se veulent patriotiques mais qui finissent, faute de connaissance historique, par devenir de véritables contresens politiques.

Depuis quelque temps, on entend ici ou là certains responsables ou commentateurs suggérer que l’Algérie devrait “annuler les accords bilatéraux de 1968” avec la France. Une idée lancée comme un slogan, sans mesurer ni les conséquences ni les paradoxes qu’elle porte.

Évian : la liberté avant la frontière

Les Accords d’Évian (1962) ne furent pas qu’un cessez-le-feu. Ils représentaient une reconnaissance mutuelle et un pont humain entre deux peuples liés par plus d’un siècle d’histoire.

À travers ces accords, les Algériens pouvaient circuler, travailler et s’établir librement en France, sans visa, sans quotas ni obstacles administratifs. C’était un geste fort, une manière de dire : la séparation politique ne doit pas signifier la rupture humaine.

1968 : quand la bureaucratie remplace la fraternité

Six ans plus tard, les accords bilatéraux de 1968 viennent mettre de l’ordre — du moins en apparence. Sous prétexte d’“organiser les flux migratoires”, ils restreignent en réalité les droits obtenus à Évian.

L’Algérien devient désormais un étranger comme un autre, soumis aux autorisations de travail, aux titres de séjour et aux politiques de visa.

Autrement dit, on ferme ce qu’Évian avait ouvert.

Et si l’Algérie les annulait ?

Ironie de l’histoire : si l’Algérie décidait aujourd’hui d’abroger les accords de 1968, le cadre juridique applicable serait celui des Accords d’Évian, jamais officiellement dénoncés.

Cela reviendrait, en droit international, à rétablir la libre circulation et l’installation sans visa des Algériens en France. Autrement dit, supprimer l’accord restrictif ferait renaître un texte bien plus libéral.

Le cauchemar de l’extrême droite

Voilà qui ferait sans doute tourner la tête à certains politiciens français qui, par ignorance ou opportunisme, agitent la menace d’une rupture des accords.

En voulant “punir” l’Algérie, ils offriraient en réalité une victoire symbolique et juridique aux Algériens eux-mêmes.

C’est le comble du populisme : brandir le drapeau sans connaître les lois.

L’histoire n’est pas un outil de chantage

Les relations franco-algériennes sont trop profondes pour être réduites à des calculs électoraux.

Les traités ne sont pas des jouets entre les mains d’apprentis du politique : ils sont la mémoire vivante d’un lien humain et historique.

Annuler, menacer, rompre — autant de mots vides si l’on ne comprend pas ce qu’ils impliquent.

Et parfois, l’histoire se venge : à force de vouloir effacer le passé, on finit par en réveiller les droits.

 Aziz Slimani

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Le FFS ou la fin d’un mythe

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FFS

Tribune. Il fut un temps où le nom du FFS suffisait à faire frémir le pouvoir.

C’était le parti des martyrs, celui des premières révoltes contre la confiscation de l’indépendance, le cri de ceux qui refusaient de troquer la colonisation française contre la domination d’une junte militaire.

Mais ce temps est loin. Aujourd’hui, le FFS n’est plus qu’un sigle fatigué, une bannière qu’on ressort quand il faut donner au régime une façade démocratique, une illusion de débat.

Et chaque fois que le pouvoir vacille, le FFS réapparaît comme une béquille, prêt à amortir la chute du système.

Je le dis sans détour : j’ai de sérieux doutes sur la sincérité de l’opposition de Hocine Aït Ahmed lui-même.

Je respecte l’homme, son intelligence et son charisme, mais son itinéraire politique laisse des zones d’ombre que l’histoire n’a jamais éclaircies.

Après son arrestation en 1964 et son évasion en 1966, Hocine Aït Ahmed s’est exilé à l’étranger, principalement en Suisse. Et, en réalité, depuis son installation en Europe, rien ne prouve qu’il ait gardé l’attachement profond d’un vrai nationaliste.

S’il aimait tant son pays, pourquoi n’a-t-il jamais choisi d’y finir ses jours ?

Pourquoi ses enfants ont-ils tous pris des nationalités étrangères ?

On ne peut pas parler au nom d’un peuple qu’on a quitté, ni se présenter en symbole de fidélité quand toute sa vie personnelle dit le contraire.

Son retour en Algérie en 1989 a toujours laissé perplexe.

Comment un opposant aussi emblématique, qui avait défié le régime pendant plus de vingt ans, a-t-il pu rentrer sans être inquiété ?

Comment expliquer qu’il ait pu reprendre une activité politique légale, alors que d’autres ont été réduits au silence pour bien moins ?

Tout cela ressemble moins à une réconciliation qu’à un pacte tacite, un serment passé avec le pouvoir :

“Tu gardes ton rôle d’opposant moral, on te garde en vitrine.”

Car si la junte au pouvoir l’avait considéré comme un danger réel, elle ne lui aurait pas laissé le moindre espace.

Aït Ahmed est devenu, malgré lui peut-être, l’opposant idéal du régime : intouchable, respecté, mais sans impact concret.

Et aujourd’hui, le FFS continue sur cette même trajectoire. Le parti vient d’annoncer sa participation aux prochaines élections.

Rien d’étonnant : c’est la suite logique d’un comportement vieux de plusieurs décennies.

À chaque échéance, il joue le rôle du lièvre électoral, celui qui court devant pour donner une allure démocratique à une course déjà truquée.

Il l’a fait en 2012, en 2017, en 2021… et le scénario se répète, sans honte ni remise en question.

Mais comment oublier les élections de la honte de 2002 ?

L’année 2001 avait été celle du Printemps noir, du sang, des martyrs et de la colère. Toute la Kabylie s’était levée pour dire non à la répression et à la mascarade politique.

Et en 2002, cette même Kabylie avait décidé, d’une seule voix, de rejeter les urnes, de boycotter les élections.

Les villages étaient en deuil, les routes bloquées, les jeunes en grève, les familles encore endeuillées.

Et le FFS, lui, qu’a-t-il fait ?

Il a brisé cette unité historique, cassé cette dynamique populaire en se présentant malgré tout, contre la volonté de tout un peuple.

Résultat : des élus obtenus avec sept ou huit voix dans certaines communes. Une humiliation politique gravée dans la mémoire collective.

Et depuis, la liste des trahisons s’allonge : participation sélective, discours creux, alliances douteuses, et aujourd’hui encore, la même posture molle face à la dictature.

Et qu’ont fait ces soi-disant élus des APC et des APW de Tizi-Ouzou ou de Béjaïa pour leur région ?

Ont-ils un jour présenté leur bilan ?

Ont-ils appliqué cette fameuse “gestion participative” qu’ils promettaient à chaque campagne ?

Rien. Silence et opportunisme.

Les communes sont à l’abandon, les jeunes sans perspectives, les projets enterrés dans la poussière des bureaux.

À part leur présence remarquée aux fêtes de villages, aux cérémonies ou aux festivals folkloriques — où ils viennent manger du couscous aux frais de la collectivité —, que font-ils d’autre ?

Pire encore, on les voit parfois sur les pistes de danse, exhibés ensuite sur les pages Facebook comme si c’était là l’accomplissement de leur mandat.

C’est dire à quel point la fonction politique s’est vidée de tout sens.

Des élus devenus figurants, des représentants transformés en animateurs de kermesse, pendant que les vrais problèmes — routes, emploi, jeunesse, eau, ordures, dignité — restent sans réponse.

Et quand il s’agit des élections nationales, malgré la mobilisation de toute leur secte politique et le coup de pouce bienveillant du pouvoir, ils se contentent toujours de leur mainmise sur la Kabylie — comme si leur horizon politique s’arrêtait aux limites de la région.

Ils n’ont jamais su parler au reste de l’Algérie, encore moins la convaincre.

Leur influence se réduit à un réflexe identitaire entretenu par la nostalgie, pas à un projet politique.

Autrement dit, le FFS ne vit plus que sur les ruines de son passé.

Alors oui, leur participation annoncée aux prochaines élections ne surprend plus personne.

C’est dans leur ADN politique : jouer la comédie de l’opposition pour mieux prolonger la survie du régime.

Le FFS n’est plus ce parti d’opposition né du courage et de la révolte ; il est devenu le parti du confort, celui qui parle au nom du peuple sans jamais marcher à ses côtés.

Le FFS ne fédère plus, il divise. Il ne libère plus, il justifie.

Et la mémoire d’Aït Ahmed, si elle n’est pas relue avec lucidité, risque de devenir ce que le pouvoir voulait qu’elle soit : un mythe utile pour endormir les consciences et neutraliser la colère.

 Aziz Slimani

Citoyen libre, témoin de son temps.

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