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mercredi 17 septembre 2025
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Les Émirats arabes unis poursuivent l’escalade diplomatique contre le Soudan

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Le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée
Le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée, en crise avec les Emirats qui soutiennent les FSR.

Les Émirats arabes unis ont pris jeudi 7 août une nouvelle mesure dans la crise diplomatique avec le Soudan. Désormais, tout camion est interdit de quitter le territoire émirien pour gagner le Soudan, une décision qui survient moins de 24 heures après l’interdiction aux avions soudanais d’atterrir dans les aéroports émiriens, ce qui a bloqué des milliers de voyageurs dans les aéroports.

Au cœur des tensions entre les deux pays, les autorités soudanaises accusent Abou Dhabi de s’impliquer aux côtés des paramilitaires soudanais.

Ces mesures inédites surviennent dans un contexte de crise diplomatique entre les deux pays, en raison de l’implication supposée d’Abou Dhabi aux côtés des paramilitaires soudanais. Elles ont paralysé les transports aériens et terrestres et n’ont pas été officiellement annoncées au préalable.

Ces développements succèdent aux frappes aériennes menées mercredi 6 août contre un avion émirati qui venait d’atterrir à l’aéroport de Nyala, au Darfour du sud et quartier général des paramilitaires FSR, violant ainsi la souveraineté soudanaise. À bord de l’avion, se trouvaient quarante mercenaires colombiens acheminés, depuis les Émirats, via l’aéroport de Bosaso, en Somalie.

En plus de s’impliquer aux côtés des Forces de soutien rapide (FSR), Abou Dhabi a été accusée par l’armée et le gouvernement soudanais, en mai dernier, d’avoir mené des frappes aériennes sur Port-Soudan. Ces dernières auraient détruit des installations vitales, notamment des dépôts de carburant ainsi que l’aéroport de la ville.

En conséquence, Khartoum a annoncé la rupture des relations diplomatiques avec Abou Dhabi et le retrait de sa mission, considérant les Émirats comme un « État agressif ».

Selon plusieurs observateurs, ces mesures des Émirats arabes unis visent à faire pression sur le gouvernement soudanais pour qu’il change ses positions en faveur des FSR. Car les pressions diplomatiques et militaires n’ont pas réussi à faire évoluer cette position, alors que la guerre se poursuit depuis 27 mois de guerre.

Le Soudan a officiellement rompu ses relations diplomatiques avec les Emirats arabes unis, fin mai dernier, les accusant de fournir des drones aux Forces de soutien rapide (FSR). Le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l’armée, a dénoncé une “agression émiratie” et promis de “vaincre cette milice et ceux qui la soutiennent”. Le ministre de la Défense a quant à lui qualifié l’implication des Emirats de “crime contre la souveraineté du Soudan”.

Avec Rfi

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Jean-Marie Robert : la conscience d’un pacificateur dans la guerre d’indépendance algérienne

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Guerre-d-Algerie-Journal-d-un-pacificateur

Journal d’un pacificateur est un témoignage rare et bouleversant. À travers les archives de son père, Jean-Marie Robert, sous-préfet d’Akbou entre 1959 et 1962, Hugues Robert dévoile l’histoire d’un homme pris dans les rouages d’un État colonial en pleine crise, qui choisit pourtant de ne pas se taire face aux violences et aux silences d’une époque.

Dans la vallée de la Soummam, cœur stratégique de la Kabylie insurgée, la guerre d’Algérie déchaîne ses violences les plus brutales. Villages incendiés, tortures infligées aux prisonniers, populations déplacées de force : Jean-Marie Robert est le témoin direct de ces exactions. Mais là où beaucoup acceptent ou taisent ces réalités, lui les consigne avec une rigueur quasi clinique. Son journal, ses rapports et ses lettres témoignent d’une lutte intérieure permanente, tiraillé entre le devoir administratif, les pressions militaires et sa conscience morale.

Le sous-préfet ne se contente pas d’observer : il s’engage. Il tente d’intervenir, d’alerter, de faire stopper certaines pratiques. Ses démarches sont souvent vaines, mais son obstination fait de lui une exception au sein de l’appareil colonial. Il devient la voix d’une vérité que l’État préfère ignorer, parfois même réprimer.

Après 1962, alors que l’Algérie devient indépendante, Jean-Marie Robert poursuit son combat dans l’ombre. Il alerte sur le sort tragique des harkis, ces Algériens qui ont combattu aux côtés de la France et qui, abandonnés, seront massacrés dans leur pays ou parqués dans des camps insalubres en France. Ce double abandon reste une blessure ouverte, et son travail de mémoire vise à briser ce silence complice.

Deux figures viennent incarner cette violence d’État, qu’elle soit coloniale ou post-coloniale : Mohand Medjoub, militant mort sous la torture française en 1960, et Hocine Maloum, maire d’Akbou assassiné en 1962 par l’Armée nationale populaire algérienne. Leur présence en dédicace donne au livre sa dimension universelle et humaniste : la souffrance et la mort n’ont pas de camp, elles sont le prix terrible payé par les peuples pris dans les conflits.

Ce récit évite avec soin tout manichéisme. Il montre la complexité d’un homme et d’une époque, les contradictions d’un système qui broie, mais aussi d’individus qui tentent de préserver une parcelle d’humanité. Jean-Marie Robert ne se pose pas en héros, mais en témoin obstiné, conscient des limites de sa position mais résolu à ne pas céder au silence.

Guerre d’Algérie – Journal d’un pacificateur éclaire aussi les coulisses de l’État français, révélant les tensions, les silences et les complicités qui ont permis que perdurent des crimes de guerre. Le livre dévoile un pan méconnu de l’histoire : celui des fonctionnaires qui, à leur manière, ont essayé de freiner la machine répressive.

L’ouvrage invite ainsi à une réflexion profonde sur la mémoire, la responsabilité et la réconciliation. Il rappelle que celle-ci ne peut naître que d’une reconnaissance entière, sans parti pris ni déni, condition sine qua non pour apaiser des blessures encore vives.

À travers la plume sobre et efficace d’Hugues Robert, ce journal d’un pacificateur donne voix à un passé complexe, douloureux, mais indispensable à entendre. Il est un pont entre deux mémoires blessées, un appel à la vérité et à la paix entre les peuples français et algériens.

Mourad Benyahia

Lecture de Guerre d’Algérie – Journal d’un pacificateur, Hugues Robert, Max Milo, 2022

Repères historiques

Jean-Marie Robert
Sous-préfet d’Akbou de 1959 à 1962, diplômé de l’ENA, il s’oppose aux méthodes répressives de l’armée française en Kabylie et lutte pour la reconnaissance et la dignité des harkis après l’indépendance.

La vallée de la Soummam
Zone stratégique de la résistance algérienne, la Soummam subit une répression intense de la part des forces coloniales, notamment via des opérations de ratissage, des déplacements forcés et des violences généralisées contre les civils.

Akbou
Ville au carrefour des enjeux militaires et politiques, Akbou est un lieu emblématique des fractures provoquées par la guerre, où se mêlent violence, résistance et contestations multiples.

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OM – Aston Villa (3-1) : les Marseillais concluent leur préparation avec panache

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OM

L’Olympique de Marseille a parfaitement bouclé sa préparation estivale en dominant Aston Villa (3-1) ce samedi soir à l’Orange Vélodrome. Dans une ambiance estivale et face à un adversaire de Premier League, les hommes de Roberto De Zerbi ont affiché un visage séduisant, à une semaine de la reprise de la Ligue 1.

Mason Greenwood, encore lui, a ouvert le score dès la 5e minute en profitant d’une erreur de Mings pour inscrire son septième but de l’été. Mais la réaction anglaise a été immédiate : McGinn a égalisé dans la foulée (7e), laissant planer un doute sur une position de hors-jeu. Bien en place, l’OM a multiplié les offensives sur son flanc gauche, porté par Ulisses Garcia et Jonathan Rowe, sans parvenir à concrétiser avant la pause.

Au retour des vestiaires, les Marseillais ont haussé le ton. Pierre-Emerick Aubameyang, entré en jeu, a signé un doublé (64e et 72e) sur deux offrandes, dont l’une de Greenwood, intenable tout au long du match. Les jeunes Vaz, Bakola et Nadir ont ensuite profité de minutes précieuses, tandis que Rulli assurait derrière.

Avec cette victoire, l’OM termine sa préparation sur un bilan positif et un moral regonflé. Les cadres sont en forme, les automatismes se précisent, et la confiance semble de retour avant un déplacement périlleux à Rennes, vendredi prochain, pour le coup d’envoi de la saison.

Djamal Guettala

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Algérie : le 08 août 2025, une euthanasie avortée d’un régime à l’agonie

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Tebboune et Chanegriha

Le régime algérien est entré dans une phase de faillite morale profonde, marquée par une perte irréversible de crédibilité auprès de sa population, et particulièrement auprès de la jeunesse.

Cette dernière, majoritaire en nombre, se heurte à un pouvoir qui non seulement la méprise, mais la réprime violemment dès qu’elle manifeste pacifiquement ses aspirations. Ce refus de reconnaître la légitimité de la contestation traduit un cynisme d’État qui érode la confiance sociale.

I. La faillite interne du régime algérien

1. Faillite morale

Le mépris se manifeste dans le langage, les actes et les décisions du pouvoir. L’absence de réponse politique sérieuse face aux revendications légitimes des manifestants, combinée à la brutalité policière, souligne une posture qui déshumanise les citoyens, réduits à des trouble-fêtes plutôt qu’à des acteurs légitimes d’un débat national. Cette posture dégrade non seulement la relation entre État et société, mais provoque une fracture morale dont les effets sont durables et corrosifs.

2. Faillite politique

Sur le plan politique, le régime algérien est enfermé dans un cercle vicieux d’autoritarisme et d’immobilisme. Les institutions, verrouillées par une oligarchie militaire et bureaucratique, ne disposent d’aucune autonomie réelle et fonctionnent comme des instruments au service d’un pouvoir centralisé et opaque. Cette configuration politique empêche toute réforme authentique et annihile la possibilité d’un dialogue national constructif. La légitimité du régime repose exclusivement sur la force et la peur, ce qui explique sa défiance envers toute opposition organisée ou toute expression démocratique. Cette impasse politique est une source majeure de crise permanente, car elle aliène la société au lieu de la rassembler.

3. Faillite économique

L’économie algérienne est, quant à elle, en crise profonde. Loin de représenter un levier de stabilité, elle est le terrain d’un désastre structurel : chômage massif, précarité généralisée, corruption systémique et dépendance écrasante aux hydrocarbures. Ces facteurs alimentent un climat social explosif. La jeunesse, première victime de cette crise économique, subit le chômage et l’exclusion, ce qui alimente son ressentiment et sa révolte.

Le régime, incapable de diversifier l’économie ou d’instaurer des politiques sociales efficaces, laisse le pays dériver vers une instabilité durable, mettant en péril sa propre survie. Cette triple faillite (morale, politique, économique) constitue le cœur de la crise qui a explosé le 8 août, révélant un pouvoir en bout de course, mais encore incapable de se défaire de ses mécanismes de domination.

II. Le rôle passif et complice des élites intellectuelles

1. Cooptation et neutralisation

Une des caractéristiques les plus tragiques de la crise algérienne est la passivité, voire la complicité, d’une large part des élites intellectuelles — universitaires, politologues, économistes et journalistes. Au lieu de jouer leur rôle d’éclaireurs et de critiques, ces acteurs sont souvent captés par le système par des mécanismes de cooptation.

Qu’il s’agisse d’augmentations de salaire, de postes académiques confortables, ou de statuts protégés, ces privilèges fonctionnent comme autant de chaînes invisibles qui neutralisent toute velléité critique. Ce dispositif assure au régime une zone de confort intellectuelle, où la pensée libre est étouffée au profit d’une parole domestiquée.

La dissidence, quand elle existe, reste marginalisée ou criminalisée, ce qui empêche la société de se doter d’un véritable espace critique nécessaire à son renouvellement. 

2. Stagnation intellectuelle et plagiat omniprésent

Par ailleurs, cette élite captive est souvent enfermée dans un confort intellectuel qui mène à la stagnation et au recyclage d’idées éculées, trop souvent au plagiat. L’absence d’audace, d’originalité et d’engagement sérieux rend ces intellectuels incapables d’élaborer des diagnostics précis ou des propositions alternatives.

Le manque de prise de risque dans la pensée se traduit par une incapacité collective à imaginer un avenir différent, et laisse la jeunesse sans relais crédibles ni projets porteurs. Cette crise de la pensée aggrave la crise politique et sociale, en vidant le débat public de sa substance.

3. Médias officiels et propagande

Le rôle des médias est tout aussi critique. La majorité des organes officiels, contrôlés par l’État, fonctionnent comme des instruments de propagande. Ils pratiquent la censure, la désinformation, et minimisent ou déforment systématiquement les revendications populaires.

Cette stratégie médiatique vise à étouffer toute contestation et à imposer un récit officiel déconnecté de la réalité vécue par les citoyens. Elle contribue à renforcer la fracture entre le pouvoir et la société, accentuant le sentiment d’injustice et de marginalisation. En somme, le silence ou la complaisance des élites intellectuelles et médiatiques ne sont pas de simples dysfonctionnements, mais un facteur aggravant de la crise profonde que traverse l’Algérie.

III. L’infréquentabilité diplomatique : l’isolement régional et international

1. La rupture avec la France et l’Europe

Le régime algérien s’est progressivement isolé sur la scène internationale, rompant ses liens avec ses partenaires historiques et stratégiques. La relation avec la France, longtemps marquée par une complexité inhérente à l’histoire coloniale, a atteint un point de rupture inédit. L’accumulation d’incidents diplomatiques, de propos hostiles, et de mesures unilatérales a érodé toute confiance.

La France, autrefois premier interlocuteur économique et politique, regarde désormais l’Algérie avec prudence, voire méfiance. Cet isolement s’étend à d’autres pays européens comme l’Espagne et le Portugal, avec lesquels les relations se tendent sur des dossiers sensibles tels que la gestion des flux migratoires, l’énergie et la sécurité régionale. Ce durcissement diplomatique fragilise la position de l’Algérie en Méditerranée et compromet ses intérêts économiques et stratégiques.

2. Le contentieux avec le Maroc

Le conflit larvé avec le Maroc demeure un facteur majeur de l’isolement régional du régime algérien. Cette hostilité chronique, qui dépasse largement la question du Sahara occidental, est devenue un élément structurant de la politique algérienne. Au lieu de rechercher la détente et la coopération, Alger choisit la confrontation, alimentant une guerre froide maghrébine qui bloque toute perspective d’intégration régionale. Ce contentieux durable aliène les chances de stabilité et de développement commun, et enferme l’Algérie dans une posture d’isolement et d’intransigeance qui nuit à sa propre sécurité.

3. Relations fragiles avec les pays du Sahel

Dans le Sahel, région stratégique et en proie à des crises multiples, l’Algérie prétend jouer un rôle stabilisateur, mais ses relations sont marquées par la méfiance et la compétition. Ses voisins sahéliens perçoivent souvent Alger comme un acteur intéressé, voire manipulateur, et non comme un partenaire fiable. Cette dynamique fragilise les efforts régionaux de sécurité et de développement, et souligne l’incapacité du régime à bâtir des alliances solides dans une zone clé de son environnement géopolitique.

4. L’épisode libanais : un symbole d’infréquentabilité

L’un des épisodes les plus révélateurs de cette situation est l’aide financière de 200 millions de dollars que l’Algérie a accordée au Liban lors de la visite du président libanais Joseph Aoun. Alors que ce geste aurait pu être un acte de solidarité et de diplomatie constructive, certains observateurs libanais ont vivement critiqué le choix du président Aoun de s’afficher avec un régime « infréquentable », compromettant ainsi la position du Liban vis-à-vis de ses partenaires occidentaux comme la France, l’Espagne, ou encore le Maroc.

Cette controverse illustre à quel point l’Algérie est perçue aujourd’hui comme un acteur diplomatique isolé, dont la posture et les choix politiques suscitent gêne et réticence, même au sein de ses alliés traditionnels. Cette infréquentabilité est non seulement un handicap diplomatique majeur, mais aussi un symptôme du déclin politique global du régime, enfermé dans un cercle vicieux d’isolement et de défiance.

IV. Le 8 août comme révélateur et tournant

1. Déstabilisation du régime

Le 8 août 2025 s’impose comme une journée historique qui a brutalement mis à nu les faiblesses accumulées du régime algérien. Face à une contestation populaire massive et déterminée, le pouvoir s’est montré non seulement désarçonné, mais aussi incapable de contenir la vague sans recourir à une répression aveugle. Cette déstabilisation révèle à quel point le système, malgré ses apparences de stabilité, est fragile, fissuré au cœur même de son appareil. Ce moment a démontré que la légitimité du régime est désormais contestée sur toute la ligne, qu’elle ne repose plus que sur la peur et la violence, et que la confiance entre gouvernants et gouvernés est irrémédiablement rompue.

2. Un souffle populaire latent mais puissant

Malgré les divisions, les répressions et les tentatives d’étouffement, le souffle populaire qui s’est exprimé ce jour-là témoigne d’une force vive, d’une aspiration profonde au changement. La jeunesse, moteur principal de cette mobilisation, incarne un espoir mais aussi un défi pour l’avenir de l’Algérie. Ce souffle n’est pas un simple feu de paille, il est la manifestation d’une colère accumulée et d’une quête de dignité qui, même dispersée, porte en elle le potentiel d’une transformation majeure.

3. Un avenir en suspens

Toutefois, l’avenir reste incertain. Le régime peut choisir la voie de la répression accrue, creusant encore plus la fracture sociale et politique, ou tenter, à contre-courant, des réformes réelles, qui impliqueraient un renoncement partiel au pouvoir et un dialogue sincère avec la société. Il y a également la possibilité d’un effondrement progressif du système, mais sans garantie d’une transition pacifique ou démocratique. Le défi majeur demeure la capacité d’une société longtemps fracturée à se recomposer autour d’un projet politique inclusif.

Le 8 août est ainsi un tournant crucial, un signal fort qui résonne bien au-delà de cette journée, ouvrant la porte à une période d’instabilité mais aussi, potentiellement, de renaissance.

Conclusion

Le 8 août 2025 restera inscrit dans l’histoire algérienne comme le jour où le masque du régime est tombé, révélant sans fard sa faillite morale, politique, économique, et son isolement diplomatique profond. Cette journée a marqué une euthanasie avortée, où le pouvoir, malgré sa fragilité extrême, a résisté, non par légitimité, mais par la force et le mensonge. Ce régime, à la fois abject et arrogant, est aujourd’hui déstabilisé sur tous les fronts. Son incapacité à écouter, à se réformer et à renouer un dialogue sincère avec sa jeunesse et sa société lui ferme toutes les portes d’un avenir stable et digne. L’infréquentabilité diplomatique n’est que le reflet extérieur de ce naufrage intérieur.

Pour l’Algérie, le chemin est semé d’embûches. La faillite d’un système ne garantit pas l’émergence d’un autre, et la recomposition politique et sociale qui s’impose sera le fruit d’une lutte acharnée, d’un engagement renouvelé de tous les acteurs authentiques du pays. Le 8 août est donc un cri, un avertissement, mais aussi un appel silencieux à la nécessité d’un renouveau profond, politique, moral, et civilisationnel. C’est à ce prix seul que l’Algérie pourra espérer sortir de l’impasse dans laquelle ce régime l’a plongée.

Hassina Rabiane

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Tunisie : le discours de Kaïs Saïed sur l’attaque contre l’UGTT déclenche une tempête politique

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Kais Saied
Noureddine Taboubi (SG de l'UGTT) et Kais Saied

Les propos du président tunisien Kaïs Saïed, minimisant la tentative d’attaque contre le siège de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) survenue deux jours plus tôt, ont provoqué un véritable séisme dans le paysage politique et syndical du pays.

Dans une vidéo publiée à l’aube sur la page officielle de la présidence, le chef de l’État a affirmé que « les manifestants n’avaient pas l’intention ni d’agresser ni d’envahir » le siège de la centrale syndicale, tout en soulignant que les forces de l’ordre avaient empêché tout contact physique. Ce ton jugé conciliant a été perçu par de nombreuses voix comme un soutien implicite à l’action de ceux que l’UGTT qualifie clairement « d’agresseurs ». Pourquoi donc cette banalisation de la violence de la part d’un chef d’Etat qui par ailleurs ne supporte aucun débordement.

Une levée de boucliers dans les rangs syndicaux et civils

Les réactions n’ont pas tardé. Pour Hassam El Hami, coordinateur de l’initiative Ettilaf Ssumoud, « celui qui criminalise l’action syndicale et justifie l’attaque contre la maison de Farhat Hached ne peut parler au nom des pionniers du mouvement ouvrier ». Il accuse le pouvoir de vouloir détourner l’attention de son incapacité à répondre aux urgences sociales.

Même constat pour Ramadan Ben Omar, porte-parole du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, qui dénonce une « tentative de recycler la théorie du complot » en ciblant les leaders syndicaux les plus actifs et en criminalisant les mouvements sociaux, à l’image de la répression des grandes mobilisations de 2008, 2010-2011 ou encore 2021.

Un discours jugé menaçant

L’universitaire Adel Ltifi voit dans les paroles du président « une appropriation politique » de l’incident et une menace directe à l’égard de l’UGTT, notamment lorsque Kaïs Saïed évoque la possibilité de supprimer les prélèvements automatiques des cotisations syndicales et d’ouvrir des dossiers de corruption.

L’analyste et journaliste Nourredine Mbarki, quant à lui, estime que ce discours marque « l’ouverture d’une nouvelle page » dans les relations entre le palais de Carthage et la centrale syndicale, dont l’issue dépendra de la réaction de cette dernière.

L’UGTT dénonce une attaque préméditée

Dans un communiqué publié le 7 août, l’UGTT a qualifié l’incident de « tentative d’agression planifiée » par des individus « étrangers à l’organisation et à l’action syndicale », mobilisés via les réseaux sociaux avec date et lieu précis. Le porte-parole Sami Tahri va plus loin : « Il s’agit d’assaillants proches du président ou de son camp politique ».

Vers un bras de fer prolongé ?

Alors que la crise socio-économique continue de peser lourdement sur les Tunisiens, la confrontation ouverte entre Kaïs Saïed et la plus puissante organisation syndicale du pays pourrait alimenter de nouvelles tensions. Le spectre d’une rupture durable plane, dans un contexte où les négociations sociales sont gelées et où les grèves se multiplient dans les secteurs clés.

Mourad Benyahia

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Boualem Rabia inhumé à Ath Ziki :  l’adieu à un esprit multiple

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Boualem Rabia

Intellectuel et créateur  aux mille éclats,  parolier du groupe Yugurthen, dialoguiste de cinéma, homme de radio, peintre, chanteur, enseignant, Boualem Rabia est un passeur de sens et de mémoire qui a  marqué des générations d’élèves, d’artistes et d’auditeurs. Il s’est éteint, jeudi dernier, après une longue maladie. A travers lui, la Kabylie a perdu l’une de ses figures culturelles majeures.  

Désormais,  c’est un grand silence qui s’installe autour de tous ceux qui l’ont connu, du monde culturel et artistique qu’il a servi assidûment.  Le manque est encore plus intense et vif ce samedi 9 août, jour de son enterrement, dans son village natal, dans la commune d’Ath Ziki, haut perché, si près du ciel, sur l’une des cimes du Djurdjura, dans la région de Bouzguène.

 Ceux qui l’ont côtoyé, à l’image de la poétesse et femme de radio Hadjar Oubachir ou du journaliste Ali Boukhlaf, son élève au lycée d’Azazga, lui rendent hommage par des mots qui disent l’amitié, l’admiration et la gratitude.

Professeur de français au lycée d’Azazga, il a marqué des générations d’élèves par sa rigueur, son élégance et sa passion. « C’est un homme exigeant envers ses élèves comme envers lui-même, toujours impeccable dans son allure, mais d’une simplicité désarmante dans sa vie quotidienne », témoigne le journaliste Ali Boukhlef, son ancien élève. « Sa passion pour les lettres, la musique et les arts plastiques semblait inépuisable… Malgré ses multiples talents, il restait farouchement attaché à la discrétion».

Homme de savoir et de création, il a su mêler la rigueur de la recherche à la sensibilité de la poésie, la force de la pensée à la délicatesse du trait. Son œuvre, riche et plurielle, portait les couleurs de l’Algérie, de Tamazgha, de la Kabylie et les nuances de l’universel. Chaque rencontre avec lui était un voyage, chaque échange une ouverture sur un autre horizon, témoigne-t-on encore.

Pour la poétesse et femme de radio Hadjira Oubachir, Boualem Rabia était « une conscience humble, attentive, qui embrase le monde au feu de sa passion ». Elle se souvient d’un créateur « maniant d’une façon originale le langage poétique, que ce soit en kabyle ou en français », capable de « tisser les ‘jours de Kabylie’ de sons et de cris face à l’indifférence ». 

Artiste complet, il a écrit des recueils de poésie, traduit et collecté des centaines de poèmes kabyles, participé à des œuvres cinématographiques comme Si Mohand U M’hand, l’insoumis, et animé des émissions culturelles sur la radio nationale et locale. Peintre autodidacte, il travaillait parfois sur des supports atypiques comme des pierres ornées de motifs ancestraux.

Mouloud Mammeri avait salué dans son livre majeur Cheikh Mohand a dit Boualem Rabia. Citant toutes les personnes qui l’ont aidé, Mouloud Mammeri écrit : « Boualem Rabia le plus jeune de tous, a apporté zèle et compétence à recueillir des dits du cheikh ». La grande poétesse Hadjira Oubachir garde aussi le souvenir d’un collaborateur précieux : « Dialoguiste et décorateur sur le plateau, il nous éblouissait par ses dessins chargés de symboles et sa dextérité à tatouer les visages des femmes et broder les costumes. »

Jusqu’à ses derniers jours, Boualem Rabia a publié des poèmes sur les réseaux sociaux, poursuivant inlassablement son travail de passeur de culture. « Nul n’est prophète en son pays », aimait-il répéter. Mais dans sa Kabylie natale, ses mots, ses chants et ses images continueront de résonner.

La voix de l’artiste résonnera longtemps encore.

Sofiane Ayache

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Algérie Télécom introduit l’anglais dans ses factures : modernisation ou virage linguistique ?

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Depuis le 9 août, les factures et reçus de paiement d’Algérie Télécom ne seront plus seulement en arabe et en français. L’opérateur public a annoncé l’intégration de l’anglais aux côtés de l’arabe, faisant de ses documents officiels des supports bilingues arabe–anglais.

Présentée comme une étape dans « le processus de modernisation des prestations», la mesure s’inscrit dans un contexte où l’entreprise veut répondre aux besoins d’une clientèle plus variée : expatriés, multinationales, étudiants étrangers, ou encore professionnels anglophones. L’anglais, langue internationale des affaires, est perçue comme un outil d’accessibilité et de conformité aux standards internationaux.

Selon Algérie Télécom, cette orientation s’inscrit dans une stratégie plus large : elle avait déjà introduit une version anglaise de son site web et entend ainsi « améliorer l’expérience client » et « anticiper la digitalisation » de ses services.

Si l’initiative est présentée comme un geste d’ouverture et de modernisation, elle ne manquera pas d’alimenter le débat sur la place des langues dans l’espace public en Algérie. Le passage à l’anglais, même partiel, intervient alors que la présence du français, héritage colonial et langue longtemps dominante dans l’administration et les affaires, est remise en question dans plusieurs secteurs.

Pour l’entreprise, il s’agit avant tout d’une adaptation au marché et aux usages internationaux. Pour ses détracteurs potentiels, cette décision pourrait être lue comme une forme d’« épuration linguistique » progressive, au profit de l’anglais et au détriment du français. Reste à voir si ce choix s’étendra à d’autres documents officiels et inspirera d’autres institutions publiques.

Les langues en chiffres en Algérie (*)

Arabe : langue officielle et nationale, utilisée dans tous les documents administratifs et l’enseignement public.

Tamazight : langue nationale et officielle depuis 2016, présente dans les médias publics et l’éducation dans certaines régions.

Français : parlé par environ 33 % de la population comme langue seconde, dominant historiquement dans les affaires, la médecine, les sciences et certains secteurs publics.

Anglais : parlé par environ 10 à 15 % de la population, principalement parmi les jeunes diplômés, les cadres, et dans les milieux scientifiques et techniques. Sa présence institutionnelle connaît une progression notable depuis 2022, portée par des réformes dans l’enseignement et l’administration. Une dynamique que certains perçoivent comme un choix stratégique d’ouverture, mais qui, pour d’autres, revêt un caractère éminemment idéologique et sert de vitrine démagogique plus que de réponse à une réelle demande sociale.

Taux de francophonie : estimations de l’OIF (Organisation internationale de la Francophonie) dans son Rapport sur la langue française dans le monde (édition 2022), qui situe à environ un tiers la proportion d’Algériens capables de s’exprimer en français.

Usage de l’anglais : données issues de sondages et enquêtes comme EF English Proficiency Index (édition 2023) et de rapports du British Council sur l’apprentissage de l’anglais en Afrique du Nord, croisés avec des estimations d’universitaires algériens (Université d’Alger II, travaux en sociolinguistique).

Statut de l’arabe et du tamazight : textes officiels de la Constitution algérienne (révisions 2002 et 2016) et documents du ministère de l’Éducation nationale.

(*) Les chiffres mis dans l’encadré proviennent de plusieurs estimations combinées :

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Zelensky rejette l’«échange de territoires » proposé par Trump, selon le New York Times

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le président ukrainien Volodymyr Zelensky
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky

Selon un article du New York Times daté du 9 août 2025, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté fermement la proposition de Donald Trump visant à inclure dans un accord de paix avec la Russie un « échange de territoires », ce qui reviendrait à céder des terres à Moscou.

« Les Ukrainiens ne donneront pas leur terre à l’occupant », a-t-il déclaré dans une allocution vidéo depuis Kyiv, soulignant qu’« aucune décision ne peut être prise sans l’Ukraine ».

Le journal new-yorkais rapporte que cette prise de position frontale risque d’irriter l’ancien président américain, qui fait de la conclusion d’un accord de paix l’un de ses objectifs majeurs, même au prix de concessions territoriales. Trump a annoncé qu’il rencontrerait Vladimir Poutine le 15 août en Alaska pour discuter de ce scénario, évoquant des « échanges de territoires au bénéfice des deux parties ».

Le New York Times cite un sondage du Kyiv International Institute of Sociology : plus des trois quarts des Ukrainiens s’opposent à toute cession de territoires sous contrôle de Kyiv, même si une minorité croissante (38 % aujourd’hui contre 10 % il y a deux ans) envisage cette option face à l’usure de la guerre. Pour de nombreux Ukrainiens, abandonner des régions comme le Donbass ne serait pas la paix, mais un simple répit avant une nouvelle attaque russe.

L’article rappelle aussi que la Constitution ukrainienne garantit l’intégrité et l’inviolabilité du territoire, et que Zelensky insiste sur un cessez-le-feu préalable avant toute discussion, là où Moscou exige d’entrer directement dans des négociations sans suspension des combats. Pour le président ukrainien, il s’agit d’obtenir « une paix réelle et durable — une paix qui ne s’effondre pas au gré des désirs de Moscou ».

Djamal Guettala

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Le Prophète trahi d’Ali Malek : un regard phare sur l’histoire de l’Islam

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Le prophète trahi

Ali Malek est un écrivain algérien né dans la région de Tizi Ouzou, au cœur des montagnes kabyles. Ce lieu, chargé d’histoire et de mémoire, imprègne profondément son imaginaire littéraire, Ali Malek choisit très tôt de rester dans l’ombre. Il écrit sous pseudonyme et cultive une discrétion quasi ascétique. Ce retrait du monde médiatique n’est pas un simple refus de la célébrité, mais une posture littéraire et éthique : préserver la sincérité du geste d’écrire, ne pas diluer l’œuvre dans le bruit du paraître. Il incarne ainsi une forme de résistance silencieuse, fidèle à une idée rigoureuse de la littérature. 

C’est en 2000 qu’il entre en scène, discrètement mais avec force, avec Les yeux ouverts, un essai publié chez Barzakh. Dès ce premier texte, Ali Malek impose un ton, un regard, une écriture tendue vers la vérité, sans concession. Il enchaîne avec le recueil de nouvelles Bleu mon père, vert mon mari (2002), où l’on perçoit déjà cette volonté de raconter l’intime dans un contexte social marqué par la résignation et le délitement des liens. Son premier roman, Les chemins qui remontent (2003), prolonge ce sillon avec une structure narrative plus ample, tout en conservant une économie de mots frappante. Il poursuit dans cette veine avec Le Chien Titanic (2005), un texte bref et métaphorique, où l’errance d’un chien devient une parabole poignante sur la solitude et l’abandon, puis Une année sans guerre (2015), roman d’une grande retenue sur les lendemains d’un pays encore hanté par la violence, où l’attente devient le moteur du récit.

Plus tard, Ali Malek se tourne vers la scène éditoriale française, notamment avec les éditions Non-Lieu. Il y publie Une terre bénie de Dieu (2006), un récit poignant sur la « décennie noire », cette période sanglante qui a profondément marqué l’Algérie des années 1990. À travers ce roman, il donne à voir la tragédie sans tomber dans le sensationnalisme, en adoptant un ton sobre, qui rend les événements d’autant plus bouleversants. En 2014, il revient avec La mise à pied, une allégorie sombre et ironique de l’Algérie post-indépendance, où le destin d’un simple fonctionnaire devient le miroir des dysfonctionnements de l’État et de l’absurdité bureaucratique.

Ce qui frappe dans l’œuvre d’Ali Malek, c’est la cohérence du style et la constance du regard. Il opte pour des formes brèves, des récits resserrés, où chaque mot semble pesé, ciselé. Sa langue, épurée jusqu’à l’os, tranche avec la grandiloquence ou le lyrisme parfois excessif d’autres voix francophones. Il écrit sans bruit, sans détour, avec une clarté qui n’exclut ni la complexité des sentiments ni la profondeur des situations. Cette écriture dépouillée n’est pas minimaliste par effet de style, mais parce qu’elle traduit une exigence éthique : ne pas trahir la douleur, ne pas enjoliver la vérité.

Les paysages kabyles sont omniprésents dans son œuvre, non pas comme décors pittoresques, mais comme espaces clos, traversés par les tensions du réel. Les villages qu’il décrit sont hantés par la guerre, l’ennui, la misère matérielle et morale. Ce sont des lieux de silence, où les frustrations bouillonnent sous une surface d’apparente normalité. Ali Malek excelle à y inscrire des trajectoires humaines fragiles, complexes, souvent marquées par l’échec ou l’oubli. Il donne une voix à ceux qu’on n’entend pas : les femmes enfermées dans les codes sociaux, les anciens combattants désabusés, les jeunes tiraillés entre traditions et désirs d’ailleurs.

L’un des procédés récurrents de son écriture est le monologue intérieur. Par ce biais, il plonge dans l’esprit de ses personnages, explore leurs contradictions, leurs peurs, leurs illusions. Ce travail sur la voix intérieure permet une plongée sensible dans la subjectivité, tout en révélant les blessures collectives d’un pays encore en quête de lui-même. Chez Ali Malek, l’intime et le politique s’entrelacent sans jamais se confondre. Il ne donne pas de leçons, ne cherche pas à dénoncer de manière frontale, mais invite à comprendre, à ressentir, à s’interroger.

En somme, l’univers d’Ali Malek est à la fois profondément enraciné et universel. Il puise dans la terre kabyle, dans l’histoire algérienne, mais atteint des questions humaines fondamentales : la solitude, la perte, le silence, la mémoire, le poids des choix. À travers une écriture sobre et vibrante, il construit une œuvre discrète mais puissante, qui interroge le présent tout en honorant la complexité du passé.

L’auteur revient encore en Algérie en 2016 avec un nouveau roman, Jour de feu, toujours publié chez Barzakh. Le récit suit plusieurs personnages, vieux, jeunes, perdus, dont les existences s’entrelacent lors d’un incendie dévastateur. Ce roman réaffirme son talent : rendre la simplicité puissante, dévoiler les dérélictions et les fragilités de l’âme humaine.

Les Chemins qui remontent, publié en 2003 aux éditions Barzakh, est un court roman d’une grande densité, à la fois intime et profondément enraciné dans la réalité sociale de l’Algérie rurale. Dans un village kabyle figé dans l’ennui, l’attente et les silences, le personnage principal, Saïd, ancien chauffeur de taxi privé de son outil de travail, erre dans une vie en suspens. Il tue le temps, entre discussions fades avec ses amis. Rien ne se passe vraiment, et c’est bien ce vide, cette stagnation, que le roman explore avec une acuité rare.

Tout semble s’être rétréci autour de lui : les perspectives d’avenir, les liens humains, l’envie de vivre. 

Les Chemins qui remontent est un roman discret et profondément humain, un texte de l’attente, de la lente remontée vers la possibilité d’un souffle. Dans cette Kabylie rude et refermée sur elle-même, Ali Malek trace les contours d’un monde où, malgré tout, l’homme peut encore choisir de ne pas sombrer.

Ali Malek vient de publier un essai percutant intitulé Le Prophète trahi, chez les éditions Télémaque. Cet ouvrage marque un tournant dans son parcours intellectuel, car il s’inscrit dans une démarche critique et audacieuse, visant à revisiter l’histoire complexe de l’Islam à travers une lecture réévaluée de ses fondements. Dans Le Prophète trahi, Ali Malek avance une thèse controversée : selon lui, le texte du Coran, dans sa forme originelle, aurait conservé une clarté et une transparence intactes, mais cette pureté aurait été progressivement altérée par l’instrumentalisation des hadiths, ces recueils de paroles et d’actes attribués au Prophète Muhammad, par les premiers califes. Ces derniers, en utilisant ces traditions orales et écrites, auraient cherché à consolider leur autorité politique et religieuse, modifiant ainsi la perception et l’interprétation du message coranique.

L’essai s’inscrit donc pleinement dans le courant « coraniste », un mouvement intellectuel qui prône une lecture exclusivement coranique du texte sacré, rejetant l’autorité des hadiths et des traditions postérieures considérées comme des constructions humaines susceptibles de déformer le message originel. Ali Malek, en rejoignant ce courant, remet en question des siècles de dogmes et d’interprétations établies, ce qui provoque un débat passionné dans les milieux religieux et intellectuels, notamment au Maghreb où les questions de religion et de pouvoir restent sensibles.

Dans Le Prophète trahi, Ali Malek ne se contente pas d’une critique historique : il engage aussi une réflexion éthique et politique sur les conséquences de cette manipulation du message religieux. Il souligne comment cette instrumentalisation a contribué à figer des systèmes de pouvoir et des dogmes rigides, souvent au détriment de la liberté de pensée, de la justice sociale et du progrès intellectuel. En défendant une lecture affranchie des traditions postérieures, il invite à un retour aux sources, à une lecture du Coran comme un texte ouvert, accessible à la raison, capable de dialoguer avec les enjeux contemporains.

À travers cette œuvre, Ali Malek s’affirme comme un intellectuel profondément engagé, qui n’hésite pas à se confronter aux débats les plus sensibles et aux controverses parfois vives. Sa démarche dépasse le simple exercice littéraire ou historique : il s’agit pour lui de défendre une vision de la foi authentique, débarrassée des récupérations politiques et des interprétations rigides qui figent le discours religieux. Dans Le Prophète trahi, il entreprend une réévaluation critique de l’histoire de l’Islam, mettant en lumière les manipulations des premiers califes et leur instrumentalisation des hadiths pour asseoir leur pouvoir. Ce travail rigoureux, à la fois historique et intellectuel, s’inscrit dans une quête morale, où la vérité prime sur les intérêts personnels ou communautaires. En cela, l’essai devient un jalon central, non seulement dans la réflexion globale de Ali Malek sur la société algérienne, mais aussi dans son regard porté sur le monde musulman contemporain, marqué par des tensions entre tradition et modernité, autoritarisme et liberté.

Le Prophète trahi d’Ali Malek apporte une contribution majeure au débat intellectuel et religieux contemporain, particulièrement dans le contexte maghrébin. En proposant une relecture critique de l’histoire de l’Islam, l’ouvrage met en lumière les distorsions introduites dès les premiers temps de la religion, notamment par l’instrumentalisation des hadiths par les califes pour consolider leur pouvoir politique.

Cette approche coraniste, qui privilégie une interprétation exclusivement fondée sur le texte coranique, libère le discours religieux des couches additionnelles de traditions postérieures souvent utilisées pour justifier des régimes autoritaires ou des conservatismes rigides.

L’apport principal du livre réside donc dans sa capacité à bousculer les cadres établis et à inviter à une réforme profonde de la pensée islamique, fondée sur la lucidité et l’exigence morale plutôt que sur la tradition figée. En cela, Le Prophète trahi ouvre des pistes de réflexion cruciales pour les intellectuels, les croyants et les acteurs sociaux qui cherchent à concilier foi, modernité et justice. Le livre contribue aussi à désamorcer certains tabous en questionnant les fondements mêmes de l’autorité religieuse, ce qui peut encourager un dialogue plus ouvert et pluraliste dans le monde musulman.

Enfin, par son courage intellectuel et sa rigueur historique, cet essai renforce la position d’Ali Malek comme une voix essentielle, non seulement dans la littérature algérienne, mais aussi dans les débats religieux et sociétaux du Maghreb, proposant une lecture renouvelée, critique et éclairée de l’Islam.

Ali Malek est une plume rare, dont la force tient autant à son anonymat qu’à sa sensibilité profonde. Son retrait volontaire de la scène publique ne traduit pas une volonté d’effacement, mais un choix clair et assumé de recentrer l’attention sur ce qui importe vraiment : la parole écrite, pure et sans artifice, libérée du vacarme médiatique. Cette discrétion, loin d’affaiblir son œuvre, lui confère au contraire une gravité silencieuse, presque sacrée, comme si chaque mot portait le poids d’une vérité à écouter avec attention. Ali Malek écrit comme on tend l’oreille à une voix intérieure, à la fois lucide et exigeante, qui invite le lecteur à une écoute attentive, une réflexion profonde et une remise en question constante.

À travers ses livres, Ali Malek dresse un portrait sans fard de l’Algérie  contemporaine, notamment de sa Kabylie natale, marquée par la guerre, la pauvreté, et les désillusions politiques.

Mais au-delà du simple constat social, c’est surtout l’humain qu’il scrute : ses failles, ses errances, ses résistances. Ses personnages sont souvent des êtres modestes, cabossés, en lutte contre un destin trop étroit. Il donne la parole à ces figures du silence, celles que l’histoire officielle oublie ou méprise. En cela, il agit en passeur de mémoire, mais aussi en révélateur de souffrances tues.

Ses réflexions sur la foi et le pouvoir, notamment dans Le Prophète trahi, déplacent les lignes du débat intellectuel au Maghreb. Il s’inscrit dans une démarche critique et réformatrice du discours religieux, en défendant une lecture du Coran affranchie des constructions politiques ultérieures. Cette position courageuse, témoigne de son engagement pour une pensée libre, fidèle à l’esprit plus qu’à la lettre. Elle révèle également une autre facette de l’auteur : celle d’un intellectuel intransigeant, attaché à la vérité plus qu’à la tradition.

Sa langue, claire, dense, épurée de toute prétention stylistique, touche au cœur. Elle va à l’essentiel, sans effet inutile, et parvient ainsi à une forme de beauté grave, digne, discrète. Dans un monde saturé de bavardage et de complaisance, cette économie de moyens produit un effet puissant. Ali Malek est de ces écrivains qui parlent peu, mais dont chaque mot reste. Il trace une œuvre cohérente, honnête, patiente, où la littérature n’est pas un artifice, mais un acte de lucidité et de transmission.

Son style épuré, d’une grande sobriété, se distingue par une économie de mots qui va droit à l’essentiel. Chaque phrase est soigneusement pesée, débarrassée de tout artifice superflu, ce qui confère à son écriture une clarté rare, à la fois limpide et intense. Ce dépouillement stylistique ne diminue en rien la profondeur de ses réflexions ; au contraire, il les amplifie, permettant au lecteur de se confronter directement aux émotions, aux silences, aux tensions sous-jacentes.

Son regard, à la fois incisif et empreint de compassion, scrute sans concession les réalités sociales, politiques et culturelles de l’Algérie, en particulier celles de sa Kabylie natale. Mais ce regard ne se limite pas à un simple constat : il est animé par une quête de sens profonde, un besoin de comprendre les racines des maux et des espoirs, des fractures et des résistances qui traversent son pays.

Ali Malek ne s’inscrit pas dans la polémique facile ni dans le désir de reconnaissance immédiate ou spectaculaire. Il évite les prises de position outrancières ou les appels à la provocation qui, souvent, saturent le débat public. Sa démarche est au contraire exigeante, humble et sincère, fondée sur une véritable humanité. Il s’efforce d’éclairer les zones d’ombre sans juger, de poser des questions plus que de fournir des réponses toutes faites. Cette posture lui permet d’atteindre une dimension universelle, où la littérature devient un espace de réflexion, de méditation, et parfois de réconciliation avec soi-même et avec le monde.

L’impact de son écriture est subtil mais durable. Il ne fait pas de bruit, mais ses mots creusent des sillons profonds dans la conscience collective. Son œuvre ouvre des brèches, ces espaces où s’insinuent des idées nouvelles, des émotions souvent tus, des vérités difficiles à exprimer autrement. Elle invite à la réflexion, à la remise en question, à une résonance intérieure qui dépasse le simple plaisir esthétique. Par cette force silencieuse, Ali Malek parvient à toucher des lecteurs de différentes générations, qui trouvent dans ses textes un écho à leurs propres interrogations et combats.

Ainsi, sans ostentation ni effet de mode, il s’impose progressivement comme une voix durable et incontournable dans le paysage intellectuel algérien. Sa littérature, ancrée dans une réalité complexe mais transcendée par une exigence éthique et esthétique, contribue à nourrir le débat culturel et social du pays. Plus qu’un auteur, il devient un passeur de mémoire, un éclaireur de conscience.

Brahim Saci
Le Prophète trahi, éditions Télémaque, 2025

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Affaire Amir DZ : la justice française lance un mandat d’arrêt international contre un ex-diplomate algérien

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Amir Dz
Amir Dz au coeur d'un affaire qui va compliquer les déjà explosives relations algéro-françaises.

Nouveau coup de tonnerre dans un ciel déjà orageux entre Paris et Alger. Selon une source diplomatique à Paris, un juge d’instruction français a délivré, le 25 juillet, un mandat d’arrêt international contre un ancien premier secrétaire de l’ambassade d’Algérie à Paris (2021-2024).

Il est soupçonné de « participation à une association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation de l’un ou plusieurs crimes » dans le cadre de l’enquête sur l’enlèvement d’Amir Boukhors, alias « Amir DZ ». Ce youtubeur, réfugié politique en France, avait été kidnappé fin avril 2024 dans le Val-de-Marne, avant d’être retrouvé sain et sauf quelques jours plus tard.

Saisi par le juge en vertu de la procédure dite de « soit-communiqué », écrit Le Monde, le parquet national antiterroriste (PNAT) avait requis, le 23 juillet, la délivrance d’un mandat d’arrêt le 25 juillet dernier, contre M. Selloum en raison de « présomptions graves » le visant quant à son implication dans « l’arrestation, la séquestration, l’enlèvement et la détention arbitraire » d’Amir DZ.

L’affaire rendue publique avait provoqué un séisme médiatique et politique, la justice française suspectant l’existence d’un réseau organisé avec de possibles ramifications diplomatiques algériennes.

Cette information arrive quelques jours seulement après une énième passe d’armes entre Alger et Paris, suite à la lettre d’Emmanuel Macron à son premier ministre dans laquelle il insiste auprès de ce dernier de durcir le ton avec l’Algérie.

Ce mandat d’arrêt international risque de tendre davantage les relations franco-algériennes, déjà au bord de la rupture par des différends sur les questions migratoires, sécuritaires et mémorielles. Pour Alger, qui n’a pas encore réagi officiellement, ce dossier pourrait être perçu comme une intrusion judiciaire dans ses affaires internes.

Quant à Amir DZ, figure suivie par des dizaines de milliers d’internautes, il reste au cœur d’un dossier explosif, où se mêlent enjeux politiques, diplomatiques et sécuritaires, et qui pourrait constituer un nouveau point de rupture entre les deux capitales.

Mourad Benyahia  

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