Les récentes déclarations d’Abdelmadjid Tebboune soulèvent plusieurs enjeux critiques concernant la gouvernance et la vision politique de l’Algérie. En mettant en avant la menace des « lobbies » et en évoquant une « époque de la Issaba » révolue, le président semble naviguer entre une volonté d’affirmer une autorité ferme et un besoin de rassurer la population sur la stabilité de l’État.
1. La notion de lobbies et de déstabilisation
Tebboune insiste sur l’existence de lobbies cherchant à déstabiliser le pays, un discours qui peut être perçu comme une stratégie de diversion. En pointant du doigt des forces externes et internes, le président se positionne en défenseur de la nation, mais cela pose la question de la transparence et de la responsabilité. Qui sont réellement ces lobbies ? Sont-ils identifiables et leurs actions clairement définies ? Une telle approche peut être interprétée comme une tentative de désigner des boucs émissaires, en évitant d’aborder des problèmes structurels plus profonds, tels que la corruption ou la gestion inefficace des ressources publiques.
2. Le rôle de l’Armée nationale populaire (ANP)
La mise en avant de l’ANP comme garant de la sécurité nationale soulève des préoccupations concernant la militarisation de la politique. Si la sécurité est essentielle, le recours systématique à l’armée pour légitimer des décisions politiques peut engendrer une érosion des institutions civiles et une défiance vis-à-vis des processus démocratiques. Cela soulève également la question de l’équilibre des pouvoirs, essentiel dans une démocratie moderne. La dépendance à l’égard de l’armée pour faire face à des défis internes peut également être perçue comme un signe de faiblesse institutionnelle.
3. Numérisation et bureaucratie
Le processus de numérisation annoncé par le président est, à première vue, une initiative positive visant à moderniser l’État. Cependant, il est crucial de s’interroger sur les moyens concrets mis en œuvre pour atteindre cet objectif. La bureaucratie, souvent évoquée comme un obstacle au développement, ne peut être éliminée par des simples processus technologiques. Une réforme réelle nécessite un changement culturel et structurel au sein de l’administration. Les défis liés à la formation, à l’équipement et à la sensibilisation des fonctionnaires sont souvent négligés dans de telles initiatives.
4. Dialogue national et réformes législatives
L’annonce d’un dialogue national prévu pour 2025-2026 après la révision des lois relatives aux organes de l’État moderne soulève des questions sur la sincérité et l’urgence des réformes. Pourquoi attendre si longtemps pour engager un dialogue sérieux sur les préoccupations qui touchent directement la population ? Les promesses de concertation avec les partis politiques doivent être confrontées à la réalité des pratiques politiques algériennes, souvent marquées par l’exclusion et la marginalisation des voix dissidentes. Aussi, cette annonce restera un voeu pieux. Une manoeuvre pour endormir l’opinion et la tromper encore une fois.
5. Transparence et investigations électorales
Enfin, les résultats préliminaires des dernières élections, accompagnés de promesses d’investigations, soulèvent des inquiétudes quant à la transparence du processus électoral. L’absence de résultats clairs et d’explications sur les irrégularités alléguées peut alimenter des suspicions et miner la confiance des citoyens dans leurs institutions. L’engagement à rendre publics ces résultats est une étape nécessaire, mais il doit être soutenu par des actions concrètes pour garantir des élections libres et équitables à l’avenir.
Conclusion
Les déclarations d’e’Abdelmadjid Tebboune, bien qu’ambitieuses et prometteuses sur le papier, nécessitent un examen critique.
La véritable modernisation de l’Algérie dépendra d’une approche holistique, intégrant transparence, dialogue inclusif et réformes profondes, plutôt que de simples déclarations et promesses. L’enjeu est de construire un État qui non seulement résiste aux déstabilisations, mais qui soit également capable d’évoluer en fonction des attentes et des besoins de sa population.
La rédaction