2 avril 2025
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Les uns marchent sur la Lune, les autres fixent la nuit du doute…

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L’an dernier ce fût l’Algérie qui avait fait l’honneur de fixer la nuit du doute pour le début du Ramadan …cette année, c’est la Grande Mosquée de Paris qui s’en mêle via un communiqué officiel. Mais, tenez-vous bien, le CFCM nous joue un autre tempo :

« Alors que le Conseil français du culte musulman (CFCM) a annoncé la date du début de la période de jeûne mardi 4 février 2025, la Nuit du doute doit encore l’entériner. Cette dernière aura lieu le vendredi 28 février 2025 à la Grande Mosquée de Paris, comme on l’apprend dans un communiqué publié le 1ᵉʳ février 2025 ».

Pourvu qu’il n’y ait pas coïncidence entre les deux dates, nous verrions alors si tout ce beau monde est prêt à s’étriper autour d’un dilemme qui n’a pas lieu d’être… Des siècles de sciences permettent à l’Homme de situer la position de la Lune avec exactitude sur des périodes s’étalant sur des millénaires, et voilà que des Ulémas acquis à la cause des ténèbres nous jouent le tour de la connaissance supérieure…

Dieu que tout cela est ridicule et pathétique ! Ridicule n’étant qu’un euphémisme absolu.

Fatigué de ressasser les mêmes envolées pour dénoncer l’abrutissement de nos sociétés, contentons-nous de résumer une ancienne chronique :

Cette nuit du doute qui s’invite chaque année pour annoncer le mois du Ramadan délimite à elle seule le gouffre abyssal qui sépare le monde musulman de tout ce qui est en rapport avec les sciences et les avancées scientifiques !

Pendant que toute une mascarade d’observations du croissant lunaire est organisée chaque année dans tous les pays musulmans, le monde qui avance s’agite autour d’une question relative au pluralisme cosmique ; c’est à dire de la possibilité des mêmes règles d’apparition et de développement de la vie à l’échelle galactique.

Les missions spatiales, en cours et en projet, sont si nombreuses qu’il est impossible de toutes les répertorier, encore moins les détailler, dans une seule chronique. Le but ultime de ces missions étant de découvrir si la vie telle que nous la connaissons sur Terre a pu se développer dans d’autres planètes et lunes de notre système solaire et si elle s’y développe encore, avant d’en étendre les mêmes lois à tout l’univers.

Au milieu de ces nombreuses certitudes scientifiques, le doute subsiste encore !

Pendant ce temps, la nuit du doute, cette certitude béante nous est présentée sous forme d’incertitude absolue, à ne remettre en question sous aucun prétexte sous peine de représailles dont des Raef Badawi en subissent encore les séquelles à la source même de cette certitude. Les non-jeûneurs de Tizi-Ouzou en connaissent un bout…

Quant à la position de la Lune par rapport à la Terre, on sait la calculer pour des siècles  à venir !

Au milieu des évidences scientifiques absolues, le regard pointé et limité à notre Lune, le monde musulman se complait dans le doute permanent.

Et ça continue encore et encore… vie extraterrestre ou pas ! Al wakhda !

Kacem Madani

Algérie/Union européenne : vers une révision stratégique de l’accord de partenariat

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Diego Mellado
L’ambassadeur de l’Union européenne en Algérie, Diego Mellado

L’ambassadeur de l’Union européenne en Algérie, Diego Mellado, a souligné le caractère « fondamental et stratégique » des relations entre l’Algérie et l’Union européenne (UE), affirmant que le moment est venu de revoir l’accord de partenariat sur la base du principe « gagnant-gagnant ».

S’exprimant lors d’une conférence intitulée « Les zones économiques spéciales comme outil d’attraction des investissements en Algérie », organisée par la délégation de l’Union européenne en Algérie en collaboration avec l’ambassade de Pologne et l’Agence algérienne d’investissement, M. Mellado a mis en avant la nécessité d’adapter le partenariat aux évolutions géopolitiques et économiques.

Après deux décennies d’application, l’accord de partenariat entre l’Algérie et l’UE mérite, selon l’ambassadeur, une réévaluation approfondie. Il a insisté sur la nécessité d’une approche globale, intégrant les nouvelles dynamiques régionales et internationales, notamment à travers la nouvelle charte de la Méditerranée.

L’année 2025 constituera, selon lui, une opportunité clé pour approfondir et valoriser ce partenariat, en le rendant plus équilibré et mutuellement bénéfique.

M. Mellado a également mis l’accent sur le potentiel de renforcement des échanges commerciaux et d’intégration économique entre les deux parties. Il a salué la démarche de diversification économique engagée par l’Algérie, la qualifiant de « légitime » et alignée sur les objectifs de l’UE visant à consolider sa propre base industrielle.

L’Algérie plaide pour une révision de Algérie – Union européenne

La révision de l’accord de partenariat avec l’UE s’inscrit dans une dynamique voulue par les autorités algériennes. Lors d’un récent Conseil des ministres, le chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune a réaffirmé la volonté de l’Algérie de renégocier cet accord, soulignant qu’elle repose sur des « données économiques réalistes ».

Depuis son entrée en vigueur en 2005, l’accord a principalement soutenu des exportations algériennes dominées par les hydrocarbures. Or, ces dernières années, l’Algérie a amorcé une diversification de ses exportations, avec une montée en puissance de l’agriculture, des minéraux, du ciment, des produits alimentaires et autres secteurs industriels.

Cette évolution économique justifie, selon Alger, la nécessité d’une réadaptation de l’accord pour mieux répondre aux besoins actuels et renforcer les opportunités d’investissement pour les entreprises européennes en Algérie.

Vers une nouvelle ère de coopération ?

La volonté exprimée par les deux parties laisse entrevoir un rééquilibrage du partenariat, ouvrant la voie à une relation plus dynamique et équitable entre l’Algérie et l’Union européenne. La prochaine étape consistera à définir les axes prioritaires d’une nouvelle coopération, tout en veillant à ce qu’elle profite équitablement aux deux partenaires.
La rédaction

Coupe d’Algérie : le CRB bat le MCA (1-0) et file aux 1/8es

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CRB

Dans un derby âprement disputé, le CR Belouizdad s’est qualifié aux 1/8es de finale de la Coupe d’Algérie 2024-2025, en battant le MC Alger 1-0 (mi-temps : 0-0), dimanche soir au stade olympique du 5-juillet d’Alger, en mise à jour des 1/16es de finale.

Le début du match a été à l’avantage du MCA, qui a réussi à monopoliser la balle. La première et unique alerte de la première période, coté mouloudéen, a été l’œuvre du milieu offensif ivoirien, Kipré Jr, dont le tir est passé à côté du cadre (16e).

Le Chabab est sorti de sa zone à partir de la 20e minute, pour inquiéter la défense du Mouloudia, mais ni Mayo ni encore Meziane, n’ont réussi à concrétiser leur légère domination.

L’entraîneur tunisien du «Doyen» Khaled Benyahia, a opté pour un turn-over, opérant pas moins de six changements, par rapport au dernier match du championnat, remporté jeudi dernier à domicile face à la JS Kabylie (3-2).

Après la pause citron, le Chabab est revenu avec des intentions offensives, ce qui a permis au buteur maison, Mahious, d’ouvrir la marque (48e), profitant d’une bourde défensive commise en pleine surface, par le défenseur central mouloudéen, Ghezala.

Le MCA a repris le contrôle du match, en imposant sa domination devant une équipe belouizdadie qui a inexplicablement reculé derrière, une manière de préserver son maigre avantage.

Le milieu défensif ivoirien, Zougrana, a failli remettre les pendules à l’heure, mais son tir est passé à côté du poteau droit du gardien, Maâchou (66e). Ce dernier a sauvé son équipe en repoussant un puissant tir de Kipré Jr (88e).

Le but d’égalisation était dans les pieds de Bayazid, mais son tir a touché la transversale (90e), alors qu’il était en face des buts.

Le Chabab se rachète ainsi, huit jours après sa défaite face au MCA (2-2, aux t.a.b : 3-4), en Supercoupe d’Algérie.

Le CRB poursuivra la défense de son trophée, en recevant aux 1/8es de finale l’US Chaouia (Ligue 2), le mardi 11 mars prochain au stade du 5-Juillet.

APS

La ministre française Rachida Dati en visite au Sahara occidental

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Rachida Dati au Sahara occidental
Rachida Dati au Sahara occidental

La ministre française de la Culture Rachida Dati a qualifié d’« historique » sa visite lundi 17 février dans le territoire non autonome et disputé du Sahara occidental, estimant qu’elle « démontre que le présent et l’avenir de cette région s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine ». 

Provocation ou raison d’Etat ? Rachida Dati, ministre de la Culture française, a fait une visite sur le territoire du Sahara occidental. C’est une première pour ministre français après la déclaration d’Emmanuel Macron fin août dernier soutenant le plan marocain. « C’est la première fois qu’un ministre français vient dans les provinces du Sud », a déclaré à l’AFP Rachida Dati, en utilisant la terminologie employée par le Maroc pour désigner ce territoire au statut non défini à l’ONU, peu après son arrivée à Laâyoune, la ville la plus importante du Sahara occidental, pour lancer un centre culturel français.

Le Sahara occidental, vaste zone désertique, est contrôlée à environ 80% par le Maroc, mais revendiquée depuis 50 ans par les indépendantistes du Front Polisario, soutenus par l’Algérie.

Fin juillet, le président français Emmanuel Macron a apporté un soutien appuyé à un plan d’autonomie du territoire « sous souveraineté marocaine » proposé par Rabat, rompant avec la position traditionnelle française favorable au processus de l’ONU, et provoquant une grave crise avec Alger.

Un référendum d’autodétermination a été prévu par l’ONU lors de la signature d’un cessez-le-feu en 1991, mais ne s’est jamais concrétisé. En octobre dernier, une résolution du Conseil de sécurité, soutenue par 12 des 15 membres, a appelé à une solution « réaliste et mutuellement acceptable » au Sahara occidental.

Lors d’une visite fin octobre au Maroc, Emmanuel Macron a promis l’engagement « diplomatique » de la France pour pousser la solution marocaine sur le Sahara occidental à l’ONU et au sein de l’Union européenne.

Selon Rachida Dati, l’antenne de l’Alliance française prochainement installée à Laâyoune sera « une ouverture sur le monde, sur la France, avec des activités culturelles, notamment dans l’apprentissage de la langue, avec des échanges d’artistes, avec des parcours éducatifs ».

« Nous souhaitons que cette Alliance française devienne un lieu phare dans notre coopération France et Maroc », a dit la ministre, en évoquant un « aspect symbolique » et son « attachement » personnel au Maroc dont est originaire son père.

En compagnie de son homologue marocain Mehdi Bensaïd, Rachida Dati s’est aussi rendue à Dakhla, à 500 km au sud de Laâyoune, pour donner le coup d’envoi à une annexe de l’Institut supérieur des métiers du cinéma ISMAC.

Selon un communiqué du ministère de la Culture marocain, la visite des deux responsables « revêt une dimension politique après la reconnaissance par la France de la pleine souveraineté du Maroc sur ses provinces du Sud ».

Avec RFI/AFP

Boudjema Aït Aoudia : « Taqbaylit d tamedyazt » 

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Boudjema Aït Aoudia.
Boudjema Aït Aoudia.

Boudjema Aït Aoudia est un poète hors du commun, hors des sentiers battus, c’est un poète du terroir, il magnifie et cisèle la langue kabyle avec une dextérité rare, une langue qu’il versifie et orne tel un orfèvre, les poèmes de Boudjema Ait Aoudia sont le diamant et l’écrin, sa poésie semblent bénéficier de la protection et de la bénédiction des ancêtres, dans un souci de transmission et de préservation des valeurs ancestrales berbères kabyles, plusieurs fois millénaires.

Boudjema Ait Aoudia vient de publier un magnifique recueil de poésie en langue kabyle « Tamuɣli-w » chez les éditions Tanekra, créées par le poète écrivain Amar Gacem, auquel Boudjema Ait Aoudia a rendu un vibrant hommage, au café littéraire parisien de l’impondérable, invité par Youcef Zirem.

Nous avons pu voir la grandeur et la profondeur du poète lors de ses lectures et de ses échanges avec le public où l’émotion était à son paroxysme, captant admirablement l’attention des gens présents, ajoutant à l’atmosphère conviviale une brise de fraternité.

Boudjema Ait Aoudia a également rendu hommage à Nour Ould Amara qui nous a quittés prématurément il y a quelques années à la suite d’une longue maladie, Boudjema Ait Aoudia nous a raconté combien Nour reste toujours présent dans son cœur et sa mémoire, il n’oublie pas son amitié et ses encouragements.

Ce magnifique recueil de poésie « Tamuɣli-w » est préfacé par le talentueux Djamel Arezki, qui a su libérer sa plume pour aller vers l’essentiel, tout en creusant pour en saisir la profondeur et la portée de l’élan poétique de Boudjema Ait Aoudia. 

Boudjemaa Ait Aoudia est le poète vrai, la poésie est chez lui une manière d’être, c’est un humaniste généreux, il dédie d’ailleurs son recueil à son village Ait Antar, ce beau village de la commune d’Ait Yahia à proximité des villages Ait Djebbara et Tagoulmimt.

 Il dédie également ce recueil à sa famille et ses amis, Dda Salem Ould Slimane, le père du célèbre artiste Mennad, Mhenna Boudinar, Nour Ould Amara, Moumouh Icheboudene, Hanafi Ait Mimoune, Amar Ould Mohand, Abdelghani Ouali, Idir Madadi, Ali Belarif, Adjoudj Ahmed, Ahmed Boualili, Bachir Bouadaoud, Bahi Hamadi, Trifi Naziha, Naima Bibi, Amokrane Ait Ouyahia, Fasia Hafsi, on peut aisément mesurer la générosité du poète par l’énumération de tous ces noms, chose, tout de même assez rare.

Cet élan du cœur inonde évidemment sa poésie, et l’œil averti ou pas se retrouve happé par la beauté poétique qui s’élève atteignant les cimes magnifiant chaque rime.

Boudjemaa Ait Aoudia anime une émission hebdomadaire sur la poésie « Agraw n imedyazen » dans ce nouveau média qui vient de naître comme une bouffée d’oxygène dans le paysage médiatique, Voix-Med Radio-TV.

Quand on lit Boudjema Aït Aoudia, on se dit que la poésie en langue kabyle a encore de beaux jours devant elle.

Le Matin d’Algérie : De la Kabylie à Paris, qui est Boudjema Aït Aoudia ?

Boudjema Ait Aoudia : Tout d’abord merci pour l’intérêt que vous portez à ma modeste réalisation poétique et littéraire, si je puis dire ainsi.

De la Kabylie à Paris, c’est toujours le même Boudjema Ait Aoudia, certes, aguerri, malgré le poids de l’exil, mais je suis resté toujours moi-même, simple, modeste et surtout humain.

J’ai toujours milité en faveur des causes justes en l’occurrence la revendication de notre identité, la langue et la culture amazighes.

J’ai découvert la poésie très jeune et j’ai commencé à déclamer les premiers vers au collège, je n’avais pas encore 14 ans. Mais c’était plus de la poésie révolutionnaire souvent d’auteurs inconnus.

J’ai grandi dans cet univers poétique merveilleux qui m’a permis de résister aux difficultés de la vie, de positiver et de croire en un avenir meilleur, ce qui m’a aidé à surmonter les difficultés de la vie.

Le Matin d’Algérie : Comment un poète de votre envergure a-t-il mis si longtemps pour publier ?

Boudjema Aït Aoudia : Merci pour ce compliment d’envergure ! Croyez-moi, ce n’est pas de la fausse modestie mais je ne me vois pas, comme on aime bien me nommer, un « grand poète ». J’aime la poésie et j’essaie de l’élever et de l’amener aux cimes qu’elle mérite.

À propos de la publication tardive, je pense qu’on n’est pas toujours les maîtres de ce qui doit être réalisé. Au moment où vous vous dites, je suis prêt, un empêchement inattendu survient comme tombé du ciel.

Et au moment où vous perdez espoir en baissant les bras, une porte s’ouvre quelque part comme par magie, et vous redonne un nouveau souffle et vous n’avez plus qu’à vous laisser guider. N’est-ce pas le destin peut-être ?

Et le poète est l’une des clés du mystère. J’avais dès mon jeune âge cette envie de publier un jour mes poèmes, mais les conditions ne le permettaient pas. Les obstacles étaient nombreux, manque de moyens financiers, de moyens techniques et humains et surtout manque de liberté.

À l’époque, ceux qui maîtrisaient l’écriture en tamazight étaient peu nombreux. L’accès à l’ordinateur n’était pas à la portée de tous comme aujourd’hui. L’imprimerie qui accepte d’imprimer un livre en tamazight est rare pour ne pas dire introuvable. À tout cela s’ajoute la volonté politique visant par toutes ses entraves à ralentir au maximum la promotion et l’émancipation de l’écriture et de la lecture en tamazight.

Vous comprenez très bien à quel point il était difficile d’éditer un livre en Berbère surtout pour un jeune chômeur. Mais l’envie d’écrire à toujours été là, la poésie fait partie de moi, elle est ma respiration.

C’est en 2001, à mon arrivée en France, que mon meilleur ami Nour Ould Amara, enseignant de tamazight et producteur animateur d’émissions à Berbère télévision, a réveillé en moi ce rêve de publier. Il m’a offert un ordinateur et m’invita régulièrement à Berbère télévision lorsqu’elle était rue du Cherche-Midi dans le XIe arrondissement de Paris, Nour était un grand homme de culture, il a laissé des émissions mémorables.

Nour Ould Amara tomba malheureusement malade, mais il a continué à m’encourager et à m’aider malgré sa maladie.  De grands hommes comme Nour Ould Amara sont rares aujourd’hui.

La maladie a malheureusement pris le dessus après 7 ans de lutte et de résistance, que sa belle âme repose en paix, et là encore c’est une porte qui se ferme, qui met fin à mon rêve.

Mais son départ tragique a amplifié mon inspiration. Il est omniprésent dans mes pensées, il continue toujours à m’encourager et moi je continue à écrire.

C’est en 2022 que je croise un nouvel ami, lui aussi enseignant de tamazight et qui, après lui avoir raconté un peu mon parcours, a voulu prendre la relève et se charger de la saisie et de la correction de mon futur livre. Il s’agit de mon ami Mohammed Gaya. En l’espace de 3 mois environ et avec la contribution précieuse de mon ami Djamel Arezki qui a corrigé et par la suite préfacé mon livre et les encouragements de mes mis, Bachir Boudaoud, Nadia Ladj, Naziha Trifi, Ali Belarif, Amar Gacem, Amokrane Ould Younes et tant d’autres, mon petit bijou, mon recueil « Tamuɣli-w » a vu le jour, cela restera l’un des meilleurs jours de ma vie.

 N’est-ce pas encore un imprévu qui m’ouvre cette porte que je croyais fermée à jamais ? Vous connaissez maintenant les raisons de ma publication tardive.

Le Matin d’Algérie : Le génie poétique vous habite, racontez-nous ?

Boudjema Aït Aoudia : Encore merci pour le compliment. Je ne sais pas vraiment si un génie poétique m’habite, mais c’est mon refuge. C’est un peu mon Amghar azemri, chez qui je trouve des réponses à mes interrogations, de la patience, du courage, de l’amour, de la sagesse et de la compassion.

Vous savez, on a grandi moi et mes sœurs dans la pauvreté. Mon père (at irhem rebbi) était très malade, de l’hôpital à la maison de repos et puis à l’hôpital. C’est ma mère qui s’est chargée de notre éducation (que Dieu lui prête longue vie), elle a eu une vie pénible sans jamais se plaindre.

Ma mère, cette femme admirable, était toujours aux champs par tous les temps, à cultiver, oignons, pommes de terre, navets, tomates, citrouilles, ramasser les olives, faucher et ramasser le foin, je la voyais parfois les yeux brillants contenant des larmes qui ne sortaient pas.

Je reste marqué par les hivers des années 70 où nous devions manger vite le soir pour aller dormir chez une vieille voisine (paix à sa belle âme) de peur que notre maison complètement dégradée nous tombe dessus.

Toutes ces péripéties et souffrances ont contribué à forger mon expression artistique. J’essaie d’apporter dans mes poèmes, de l’amour, du courage, de la patience et du soutien à tous ceux qui en ont besoin, les orphelins, les malades, les prisonniers, les opprimés, les pauvres, d’où jaillit ma source d’inspiration, car je hais l’injustice.

Le Matin d’Algérie : Quels sont les poètes kabyles qui vous influencent ?

Boudjema Aït Aoudia : J’ai eu la chance de grandir dans un milieu féminin entouré de femmes courageuses et responsables dont faisaient partie mon arrière-grand-mère paternelle, mes deux grands-mères, ma tante et ma mère. C’est chez elles, sans doute, que j’ai entendu les premières berceuses avec des rimes captivantes. Ces femmes étaient marquées par les tragédies de la guerre de libération nationale à laquelle elles ont pris part, elles ne cessent de réciter des poèmes révolutionnaires dont certains sont de leur propre composition et d’autres d’auteurs inconnus et voir même de certains moudjahidine (maquisards).

Quelque temps plus tard, nous eûmes la chance d’avoir notre première radio (transistor), achetée par ma mère grâce aux petites économies réalisées dans la vente d’œufs, de lapins, foin, et quelques légumes de saison.

C’est à travers cette radio que j’ai découvert le chanteur Taleb Rabah (paix à son âme) avec son chef-d’œuvre Ttrunt wallen jarhent d idammen, (les yeux pleurent et saignent), une chanson qui raconte la douleur, l’injustice mais aussi le courage qui régnaient pendant la guerre d’Algérie de 1954 à 1962.

J’ai continué à écouter régulièrement, Taleb Rabah, ce génie poétique qui m’a sans doute influencé pour continuer à persévérer dans la poésie.

Bien entendu, je ne peux nier l’apport incontestable de nos grands poètes, Mohamed Belhanafi, Ben Mohamed, Si Muh U Mhend, l’incontournable Slimane Azem, le vagabond Si Muhend Ouyidir, l’oublié Si Muhand  Said Amlikech dont on ne parle pas ou très peu, le précurseur Youcef Uqasi, Si Yusef Ulefqi.

Hadjira Oubachir est aussi une poétesse incontournable dans la poésie féminine kabyle, elle nous transmet par sa poésie les valeurs kabyles.

Le Matin d’Algérie : La langue kabyle semble ne faire qu’un avec la poésie, chaque mot prononcé a une dimension poétique, qu’en pensez-vous ?

Boudjema Aït Aoudia : Oui, vous avez entièrement raison. La langue kabyle déborde de sens, de métaphores et souvent de mots composés où chaque mot prend des fois la place d’une phrase, comme le souligne le proverbe suivant, anheddar cwit, anfahhem atass, (parler peu et comprendre beaucoup).

Le kabyle est une langue riche, quand on la maîtrise on se régale, dans l’écoute et le discours, que ce soit dans Tajamaat ou dans le règlement de différends. Les mots dépassent parfois le sens.

Dans les fêtes kabyles on entend toujours des poèmes chantés par les femmes (Izlan).

Taqbaylit d tamedyazt, la langue kabyle est poésie.

Le Matin d’Algérie : À l’heure des réseaux sociaux, la poésie kabyle est-elle encore vivante ?

Boudjema Aït Aoudia : C’est une question un peu complexe qui nécessite un débat sérieux et approfondi mais je pense que les réseaux sociaux sont un plus non négligeable pour la promotion et la vulgarisation de cette poésie ancestrale.

Si, Si Muh U Mhand avait eu internet et les réseaux sociaux, on aurait pu sauvegarder beaucoup plus de ses poèmes.

Certes, il y a beaucoup de médiocrité dans les réseaux sociaux, mais c’est à nous d’inonder ces plateformes avec des produits sérieux, éducatifs et instructifs. Il faut impérativement prendre le dessus sur ceux et celles qui s’exhibent sur les réseaux sociaux pour détourner, salir et banaliser notre culture.

Mais, il n’y pas de raison de désespérer, la poésie kabyle se porte bien, il y a beaucoup de talents, poètes et poétesses qui veillent sur cet héritage inestimable.

Le Matin d’Algérie : Quel regard portez-vous sur la poésie d’aujourd’hui ?

Boudjema Aït Aoudia : J’ai un regard plutôt positif, même si l’histoire nous a montré que beaucoup de grands poètes ont été découverts et admirés que très tard, voir même après leur disparition, Youcef Uqasi, Si Mohand Said Amlikech et beaucoup d’autres.

 Aujourd’hui la scène déborde de poésie et de grands poètes parmi lesquels on peut citer, Amar Gacem, Brahim Saci, Hadjira Oubachir, Ghani At Hemmouche, Amokrane Nait Ouyahia, Wanza, Amirouche Amwanes, Mernissa Kedouni, la liste est encore longue.

Donc, pour répondre clairement à votre question, je dirai que la poésie se porte merveilleusement bien.

Le Matin d’Algérie : La poésie enrichit le cœur et élève l’esprit, peut-elle contribuer à l’émancipation des sociétés ?

Boudjema Aït Aoudia : Bien sûr que oui, la poésie aide à se sentir connecté avec soi-même et ce n’est pas rien, c’est même magique de se sentir en compagnie de soi-même. La poésie permet de combattre la solitude et tout ce qu’elle engendre comme angoisse et souffrance.

 La poésie nous permet d’atteindre ce qu’il y a de plus vrai, de plus sensible en soi, en mettant du sens, en éveillant les cinq sens et parfois moi au-delà.

La poésie permet de développer l’imaginaire. Elle nous permet de dénoncer les injustices et contribue à faire adhérer des personnes à des causes justes.

Les poèmes sèment l’amour, le pardon, l’union, la tolérance, la joie, le partage, l’entraide, la poésie permet de mettre des mots sur des maux pour apaiser l’esprit, calmer la douleur, guerir les blessures et croire en un avenir meilleur.

Imaginez un monde où règnent l’amour, la justice, la joie, le pardon, la tolérance, l’entraide et où sont absents la haine, la violence, le mépris, l’injustice !

Seule la poésie peut nous rapprocher d’un tel monde paradisiaque.

Le Matin d’Algérie : Beaucoup de chanteurs kabyles ont fait carrière sur la sueur des autres, en chantant des poètes dont ils taisent les noms, ceci doit cesser, qu’en dites-vous ?

Boudjema Aït Aoudia : Absolument ! Il faut que cela cesse, comme vous le dites si bien.

Sans citer de noms, (du moins pour l’instant), beaucoup se sont fait un nom sans avoir jamais composé un vers poétique. Ils se sont enrichis avec la sueur des autres sans avoir l’honnêteté de citer les noms des auteurs de ces textes.

Je ne suis pas contre le fait de chanter les textes d’autrui, bien au contraire, le meilleur hommage qu’on peut rendre à un poète ou à un chanteur c’est de reprendre ces textes ou ses chansons.

Même lorsqu’il s’agit de textes d’auteurs inconnus, il faut avoir l’honnêteté intellectuelle de le signaler. Mais se faire passer pour un auteur compositeur de ce qu’on n’a jamais composé c’est de l’ingratitude, de l’hypocrisie et de la trahison. Il faut que cela cesse.

Le Matin d’Algérie : Avez-vous des projets en cours ou à venir ?

Boudjema Aït Aoudia : je viens de rééditer en France mon recueil de poésie intitulé, Tamuɣli-w, chez les éditions Tanekra de mon ami Amar Gacem, je le laisse faire son petit bout de chemin. J’ai entamé l’écriture d’un autre livre de poésie où il y aura justement des textes magnifiques d’auteurs inconnus dont certains ont été repris sans la moindre précision, c’est peut-être une façon de crever l’abcès !

J’ai d’autres projets plutôt collectifs, notre association AFAB (l’association franco-amazighe de Bobigny), que j’ai l’honneur de présider, prépare un grand salon du livre pour l’automne prochain à Bobigny et nous sommes en discussion sur la tenue d’un éventuel salon de peinture au printemps, toujours à Bobigny.

J’anime une émission hebdomadaire sur la poésie, Agraw n imedyazen, sur ce nouveau média qui vient de naître, Voix Med Radio-tv. La poésie a encore de beaux jours devant elle.

Le Matin d’Algérie : Un dernier mot peut-être ?

Boudjema Aït Aoudia : j’ai passé un excellent moment lors de cette interview, je vous remercie beaucoup du temps que vous m’avez accordé. Mon dernier mot est peut-être le souhait de voir la paix, l’amour et la justice dans le monde et dans notre beau pays L’Algérie.

Entretien réalisé par Brahim Saci

Livre publié :

Tamuɣli-w, éditions Tanekra.

https://www.youtube.com/@voixmedRADIOTV

Félix Louis Giro Colozzi : une vie dédiée à la libération et à l’amour de l’Algérie

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Le militant anticolonialiste et ancien membre des Combattants de la Libération (CDL, organisation militaire du Parti communiste algérien), Félix Louis Giro Colozzi, est décédé le dimanche 16 février 2025 en France, à l’âge de 95 ans. L’information a été confirmée par le ministère des Moudjahidine et des Ayants-droit, selon l’Agence Presse Service (APS).

Un engagement précoce pour l’indépendance

Né le 12 mars 1930 à Alger, Félix Colozzi a grandi dans le quartier populaire de Belcourt, au sein d’une famille européenne d’Algérie. Très tôt, il s’engage dans le combat pour l’indépendance aux côtés d’autres militants d’origine européenne, tels qu’Henri Maillot, Fernand Iveton, Maurice Laban, Jacqueline Guerroudj, Georges Acampora et Raymonde Peschard. Il devient ainsi l’un des visages marquants des Combattants de la Libération (CDL), également connus sous le nom de Maquis Rouge, un groupe de guérilla formé par le Parti communiste algérien (PCA) après le déclenchement de la guerre d’Algérie.

Dans une note biographique publiée par Boualem Khalfa dans Les syndicalistes algériens, Félix Colozzi est décrit comme « un militant très actif du syndicat CGT des postiers et un camarade du PCA acquis à la cause de la lutte pour l’indépendance algérienne ». Il milite aux côtés de figures telles que Yahia Briki (Alger républicain), M’hamed Hachelaf, Abdelkader Guerroudj, Fernand Iveton et Boualem Makouf.

Un acte de résistance marquant

Membre du commando de choc du Grand Alger, dirigé par Djillali (nom de guerre d’Abdelkader Guerroudj) et en liaison avec le FLN-ALN, Félix Colozzi participe activement aux opérations de sabotage contre l’administration coloniale.

L’une de ses actions les plus spectaculaires a lieu au printemps 1956. Aux côtés de M’hamed Hachelaf, Fernand Iveton et Boualem Makouf, il mène une opération visant les Bouchonneries Internationales situées au-dessus d’Alger. Il conduit alors une Lambretta, facilitant l’exécution de l’attentat, qui figure parmi les premiers du genre dans la capitale algérienne.

Arrestation et emprisonnement

À la suite de cette action, Félix Colozzi est arrêté par les autorités coloniales et condamné aux travaux forcés à perpétuité. Il est incarcéré dans plusieurs prisons, notamment Serkadji, Lambèze et d’autres établissements pénitentiaires en France.

Malgré les souffrances endurées en détention, Félix Colozzi reste fidèle à son engagement révolutionnaire.

Un retour en Algérie et une vie au service du pays

Libéré en 1962, après l’indépendance, Félix Colozzi choisit la nationalité algérienne et bénéficie d’une bourse pour poursuivre des études en ingénierie en Bulgarie. À son retour en Algérie, il occupe plusieurs postes de cadre dans des entreprises nationales, contribuant ainsi à la reconstruction du pays jusqu’à sa retraite en 1992.

En 2022, à l’occasion du 60ᵉ anniversaire de l’Indépendance, le ministère des Moudjahidine et des Ayants-droit publie ses mémoires intitulées « Mémoire carcérale 1956-1962 », dans lesquelles il relate son expérience en prison et les conditions de détention en Algérie et en France.

Hommage de la nation

Abdelmadjid Tebboune a exprimé ses condoléances à la famille du défunt dans un message officiel :

« J’ai appris avec une grande tristesse la nouvelle du décès de Félix Colozzi, cet ami de la Révolution qui a rejoint ses rangs dès son déclenchement. En tant que combattant et moudjahid, il croyait en la justice de la lutte du peuple algérien contre la domination coloniale et a subi l’amertume des prisons de Serkadji, Lambèze et de France. L’Algérie, où il a choisi de vivre, l’a accueilli en lui accordant la citoyenneté et en lui permettant d’occuper des postes importants dans ses institutions. »

Une ultime volonté : être inhumé en Algérie

Resté fidèle à son engagement anticolonialiste et à l’Algérie jusqu’à son dernier souffle, Félix Colozzi, converti à l’Islam, avait exprimé son souhait d’être inhuméen terre algérienne. Un geste symbolique qui témoigne de son attachement profond au pays qu’il a contribué à libérer.

Son parcours incarne celui d’un combattant qui, au-delà des origines et des appartenances, a fait le choix de la justice et de la liberté.

Samia Naït Iqbal

Huit mois après son arrêt cardio-respiratoire, Nabil Bentaleb de retour avec Lille

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Nabil Bentaleb
Nabil Bentaleb

Nabil Bentaleb a pris son mal en patience. Huit mois après son arrêt cardio-respiratoire, le feu vert de la Fédération française de football autorisant son retour sur les terrains est tombé. Quelques jours plus tard, le voilà déjà de retour dans le groupe lillois pour le déplacement à Rennes en Ligue 1 ce dimanche.

Huit mois après son arrêt cardio-respiratoire, Nabil Bentaleb a reçu le feu vert de la FFF pour faire son retour en compétition avec Lille avec un défibrillateur. Mieux encore, l’international algérien fait partie du groupe de Lille qui se déplace à Rennes ce dimanche, comme en témoigne une vidéo postée par le club sur X.

Un retour très attendu dans le Nord, une première en France et surtout « une délivrance » pour le joueur. « Il a fallu un temps d’adaptation pour s’habituer à un défibrillateur sous-cutané mais ce n’est pas du tout contraignant », a rassuré l’intéressé en conférence de presse.

Ce retour marque la fin d’un long processus pour le milieu défensif originaire de Wazemmes, un quartier populaire de Lille, où il s’était effondré le 18 juin 2024 alors qu’il disputait un cinq contre cinq avec son frère et des amis. Plongé dans un coma artificiel, Nabil Bentaleb s’était réveillé deux jours plus tard, le 20 juin, au CHU de Lille sans « vraiment de souvenirs » de sa journée. S’est ensuivi « un mois et demi de repos », le temps de réfléchir à la suite de sa carrière. « Bien sûr, j’ai dû consulter ma famille, parce que je l’embarquais en prenant une décision », a raconté le Nordiste.

Des échanges avec Christian Eriksen

L’un des tournants a été une conversation avec le footballeur danois Christian Eriksen, qui vit et joue à Manchester United avec un défibrillateur depuis un malaise similaire le 12 juin 2021 lors de l’Euro en Angleterre : « J’ai eu la possibilité de parler avec lui quand j’étais à l’hôpital, il m’a énormément aidé parce que j’étais dans le flou. »

Accompagné par le Losc, Nabil Bentaleb s’est entouré d’un groupe d’experts composé d’un cardiologue néerlandais, le même que celui qui avait accompagné Christian Eriksen, mais aussi « de cardiologues belges, suisses et français », a expliqué le président du club Olivier Létang, qui évoque « cinq étapes » à valider, « à chaque fois de quatre à six semaines » entre Amsterdam et la France. « S’il y avait la moindre alerte, on arrêtait tout de suite », a précisé le dirigeant lillois.

Des ressources mentales pour revenir au football

Le tout jusqu’à l’avis favorable rendu par la commission médicale de la FFF mercredi soir, qui crée un précédent en France, où aucun autre joueur professionnel n’a pu jouer avec un dispositif médical, même si cela n’est pas formellement interdit.

« On ne se réjouit pas qu’un joueur ait un problème cardiaque, mais s’il peut jouer avec un défibrillateur, pourquoi pas, explique Emmanuel Orhant, directeur médical de la Fédération française de football. Il est le premier en France, mais ce genre de décision ne doit pas être pris à la légère. Au-delà de son cas (…), dans l’absolu, on peut vivre avec un défibrillateur et de nombreuses personnes pratiquent un sport avec. »

Si le joueur n’a pas loupé grand-chose de la très belle première partie de saison des Dogues, notamment en Ligue des champions (septième de la première phase), il s’est « découvert une nouvelle personnalité, de nouvelles ressources ». « Moi qui pensais être fort mentalement, j’ai découvert une autre forme de force mentale », a-t-il assuré.

Car l’ancien joueur de Tottenham avoue avoir traversé des phases de doute et de crainte : « Il y a eu des moments où je pensais que c’était fini. » L’international algérien n’a plus joué en compétition officielle depuis le 10 juin 2024, lors d’un match de qualification pour la Coupe du monde 2026 contre l’Ouganda.

« Bien sûr, il a des repères à retrouver parce que ça fait un petit moment qu’il n’a pas joué, mais physiquement, il est prêt », assure son entraîneur Bruno Genesio, qui l’a accueilli jeudi pour son retour à l’entraînement avec le groupe professionnel.

« Je pense que je connais par cœur la forêt de Luchin [le centre d’entraînement du Losc, NDLR] », a plaisanté le milieu défensif, en référence aux nombreuses séances de cardio qu’il a effectuées pendant sa convalescence. Bruno Genesio va récupérer pour la deuxième partie de la saison une arme supplémentaire dans l’entrejeu. Celle qui avait guidé le Losc à la quatrième place du championnat la saison dernière.

RFI

Secteur de l’éducation : des syndicats appellent de nouveau à la grève

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Cnapeste
Les syndicats de l'éducation appellent à la grève.

Malgré les restrictions imposées aux manifestations, les syndicats autonomes de l’éducation réaffirment leur détermination à poursuivre leur mouvement de protestation jusqu’à l’aboutissement de leurs revendications. 

Dans un communiqué conjoint, cinq syndicats autonomes de l’éducation ont  annoncé la reprise  de leur grève nationale  pour ce  lundi 17 et mardi 18 février, en signe de protestation contre les dispositions de la loi portant statut particulier et  régime indemnitaire  du secteur.

Ils appellent ainsi l’ensemble des enseignants à une mobilisation massive pour la deuxième phase de la grève périodique nationale. L’objectif est de maintenir la pression  pour obtenir des réformes concrètes et durables en faveur de l’éducation.

Le communiqué appelle également à l’organisation de manifestations régionales simultanées mardi 18 février à 10h, devant les directions de l’éducation des wilayas de Constantine, Oran, Tizi-Ouzou et Laghouat.

Condamnation des restrictions et des arrestations

Les syndicats ont dénoncé avec fermeté les entraves aux manifestations, notamment les arrestations et le harcèlement signalés dans certaines wilayas, dont Oran et Alger. Ils estiment que ces pratiques, jugées inconstitutionnelles, ne feront que renforcer la détermination des enseignants à poursuivre leur combat.

« Ces entraves aux libertés syndicales ne feront qu’accroître notre engagement à défendre nos droits jusqu’à la satisfaction de nos revendications légitimes », lit-on dans le communiqué.

Les syndicats rappellent l’importance d’une mobilisation continue et permanente pour protéger les acquis du secteur et obtenir une révision en profondeur du statut particulier. Ils insistent sur la nécessité de revaloriser le statut des enseignants au sein du système éducatif, conformément aux engagements du chef de l’Etat visant à promouvoir la profession d’enseignant.

Une mobilisation grandissante

Le communiqué des syndicats salue la forte participation des enseignants lors de la première phase de la grève, ainsi que le succès des manifestations locales, qui témoignent de la prise de conscience collective des problématiques du secteur.

Les syndicats dénoncent par ailleurs le contenu de la loi portant statut particulier de l’éducation nationale, qu’ils jugent injuste et inadaptée aux aspirations des enseignants et aux ambitions du système éducatif. Ils exhortent ainsi les autorités à engager un dialogue sérieux pour répondre aux attentes légitimes de la communauté éducative.

Annulation de la grève dans le secteur de la santé publique après des engagements du ministère de la Santé 

Quatre syndicats agréés du secteur de la santé publique ont annoncé l’annulation de la grève nationale initialement prévue les 17 et 18 février 2025. Cette décision fait suite aux engagements pris par le ministère de la Santé pour répondre aux revendications des professionnels concernant le statut particulier et le régime indemnitaire 

Les syndicats représentant les biologistes (SABSP), les paramédicaux (SAP), les psychologues (SNAPSY) et les praticiens de la santé (SNPSP) ont salué l’ouverture d’un dialogue avec le ministre de la Santé, qui a promis d’examiner les irrégularités relevées dans ces textes.

Deux principales mesures ont été annoncées. Elles portent, respectivement, sur la création d’une commission pour analyser les irrégularités et proposer des ajustements, avec un rapport attendu avant février 2025 et l’organisation de réunion de réconciliation entre le ministère et chaque syndicat, en présence de représentants du ministère du Travail et de la Fonction publique.

Les étudiants en médecine poursuivent, pour leur part, leur mouvement de grève. Avec notamment un rassemblement prévu le 18 février au CHU d’Oran pour dénoncer la répression subie par les grévistes la semaine dernière.

Tout en restant vigilants quant à la mise en œuvre de ces engagements, les syndicats affirment garder toutes les options ouvertes en cas de non-respect des accords conclus.

Samia Naït Iqbal

Le Kanem, pilier économique du Tchad : entre fidélité et marginalisation, l’urgence d’un réveil politique

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Kanem

Le Tchad traverse une période cruciale de son histoire politique, avec un gouvernement censé marquer un tournant. Pourtant, les inégalités régionales persistent, accentuant une répartition déséquilibrée du pouvoir.

Si le Sud est notoirement sous-représenté malgré son poids démographique, le Kanem – berceau historique du pays – subit une marginalisation à la fois subtile et profonde.

Le Kanem : une région stratégique, mais écartée des décisions

Le Kanem a joué un rôle fondamental dans la formation du Tchad moderne. De ses dynasties historiques à ses engagements contemporains, il a toujours été un acteur majeur de la stabilité nationale. Pourtant, il demeure exclu des grandes décisions politiques.

  • Un peuple axé sur le travail et la dignité

Les Kanémis occupent une position dominante dans presque tous les secteurs du commerce tchadien. En effet, ils détiennent la majorité des établissements et magasins sur les grands marchés de la capitale et des principales villes du Tchad, exerçant ainsi un quasi-monopole sur le secteur commercial. Ils privilégient le travail acharné à l’intrigue politique, et ce, malgré une pression constante – sous forme de racket exercé par le fisc et par les douanes – qui profite ironiquement aux acteurs proches du système.

  • Une fidélité mal interprétée

La loyauté historique du Kanem envers le pays et ses institutions est souvent perçue comme un acquiescement passif aux régimes en place. Cela a permis aux élites de divers gouvernements de l’écarter sans crainte de contestation, alors même que son engagement, bien que silencieux, aurait dû être reconnu compte tenu de sa position stratégique et de son poids économique.

  • Une marginalisation organisée

Le régime actuel concentre le pouvoir dans un cercle restreint, marginalisant non seulement le Kanem, mais aussi d’autres régions et ressortissants du Tchad. Cette exclusion repose sur plusieurs stratégies :

  • L’absence de reconnaissance politique et économique

Malgré sa position stratégique et sa contribution à l’échiquier économique (notamment via les taxes et les droits de douane), le Kanem n’est ni représenté ni valorisé à la hauteur de son importance.

En termes d’infrastructures, la région semble plongée dans le néant : ni hôpitaux, ni dispensaires, ni centres de soins adéquats ne sont disponibles. L’accès à l’éducation est quasiment inexistant, tout comme le réseau routier. Le marché central de Mao, par exemple, ressemble à un simple marché hebdomadaire, et les rares édifices publics – dont certains datent de la période coloniale – témoignent d’un développement largement laissé aux initiatives locales.

  • La division des élites locales

Comme dans d’autres régions, la politique du « diviser pour mieux régner » a fragmenté les élites du Kanem. Les rares personnalités politiques issues de cette région se retrouvent souvent isolées ou cooptées, limitant ainsi toute action collective.

  • L’invisibilisation de son rôle historique

Alors que des figures du Kanem ont marqué les luttes pour la justice et la démocratie, leur contribution est trop souvent ignorée.

Un héritage de résistance et d’engagement

Loin d’être une région effacée, le Kanem a toujours été un bastion de justice et de dignité.

  • Dès le mouvement de contestation du FROLINAT, des figures telles qu’Ibrahim Abatcha (dans une certaine mesure), Abakar Djallabou, Tahir Abbari, Ali Mahamat Saboune et bien d’autres ont été à l’origine de ce soulèvement. Rapidement, les idéaux d’équité et de justice pour tous ont été détournés et ont scindé le mouvement en plusieurs tendances dont les répercussions se font encore sentir dans les régimes successifs, y compris le régime actuel.
  • Les ressortissants du Kanem ont également joué un rôle majeur dans la formation de plusieurs mouvements rebelles – notamment le MPLT (Mouvement Populaire de Libération du Tchad), le MDD (Mouvement pour la Démocratie et la Justice) et le FACT (Front pour l’Alternance et la Concorde au Tchad). Le MDD (actif dans les années 1990 jusqu’à 1998-1999) et le FACT (depuis 2016) témoignent de la longévité d’une résistance que peu d’autres mouvements au Tchad peuvent revendiquer.

La longévité de ces mouvements a elle seule reflète une lutte pour plus d’équité, non seulement pour le Kanem, mais pour l’ensemble des régions marginalisées. Et bien que certains mouvements aient été créés de toutes pièces pour discréditer ces luttes, la réalité ne se lit pas dans les journaux de tous les soirs.

Entre ces grandes périodes, le MDJT de Youssouf Togoïmi – auquel des ressortissants du Kanem ont également participé – a représenté une lutte pour l’égalité et la justice face au même régime et dans les groupes armés qui avaient opéré dans l’est du Tchad (comme le FUC, l’UFDD entre autres).

Tous les mouvements et aspirations pour un Tchad meilleur ont vu les Kanémis répondre présents, unissant leurs forces avec celles d’autres groupes ethniques – même dans le cas des FAN et FAP, qui se sont alliés pour écraser le MPLT. Ces luttes n’avaient pas pour but de revendiquer une place dans le pouvoir central ou d’occuper quelques postes, mais bien de combattre l’injustice et l’exclusion systématique du Kanem et d’autres régions.

Ainsi, l’implication politique des ressortissants du Kanem ne se limite pas au FACT.

Les luttes des Kanémis ne relèvent pas uniquement de l’héritage du passé. Avec la montée du FACT, une nouvelle génération – inspirée par des figures telles qu’Ali Teguil, l’un des derniers commandants en chef du MDJT – a repris le flambeau, refusant de se soumettre à un pouvoir qui porte atteinte à leur dignité. Le FACT, bien que récent, bénéficie d’un soutien considérable de la part des Kanémis, soulignant l’engagement continu de la région dans la quête d’un Tchad démocratique.

Il convient également de rappeler l’implication des Kanémis dans la défense de la patrie, qu’il s’agisse des conflits pour récupérer la bande d’Aouzou aux Libyens ou des combats contre Boko Haram. Leur engagement, tant politique que militaire, témoigne d’une volonté inébranlable de défendre des idéaux de justice et de réformes.

Une région de paix et de travail, loin de toute victimisation

Contrairement à d’autres régions qui utilisent leurs souffrances comme levier politique, le Kanem refuse de se victimiser. Son peuple privilégie l’effort, la résilience et l’autosuffisance.
Pourtant, cette posture honorable a conduit à son exclusion des sphères du pouvoir, renforçant ainsi la nécessité d’un réveil collectif.

La lutte démocratique et l’implication politique

Le Kanem s’est illustré dans la lutte pour la démocratie, notamment par l’intermédiaire du Rassemblement pour la Démocratie et le Progrès (RDP), principal challenger du régime lors des premières élections démocratiques. Bien que sa victoire ait été entravée par un système politique autoritaire – contraignant ainsi le RDP à endosser, de facto, le rôle d’allié du régime – l’élection présidentielle de 1996 demeure un jalon déterminant dans l’histoire politique tchadienne.

Il est également important de rappeler le rôle fondamental joué par des figures emblématiques telles qu’ Allahou Tahir, premier président de l’Assemblée nationale tchadienne, Ali Kosso, sénateur, député et ministre, ainsi que Lol Mahamat Choua, ancien président de la République dans le cadre de la transition de 1979 et acteur majeur de la transition démocratique en tant que président du RDP. Leur engagement et leur leadership ont profondément marqué l’histoire du pays, en contribuant à l’accession du Tchad à l’indépendance, à la consolidation de l’État-nation et à l’essor des valeurs démocratiques.

Au-delà de cet engagement politique, les Kanémis ont également investi la société civile. En rejoignant diverses ONG et en participant activement aux mouvements de défense des droits humains, ils se sont positionnés comme des acteurs incontournables du changement. Leur implication s’étend même aux domaines de l’art et de la culture, illustrant ainsi une influence qui dépasse largement le cadre strictement économique et témoigne d’une volonté de transformation sociale globale.

Le soft power du Kanem : un leadership au service du Tchad

Dans un Tchad où les rapports de force dictent la politique, le Kanem doit désormais adopter une nouvelle stratégie :

  • Utiliser son influence économique et culturelle pour s’imposer comme un acteur incontournable.
  • Ne devrions-nous pas utiliser notre influence économique et culturelle pour nous imposer comme des acteurs incontournables ?
  • Les Kanémis, conscients de leur poids, ne pourraient-ils pas envisager des mesures temporaires – par exemple interrompre brièvement leurs importations ou fermer leurs établissements dans les principaux marchés de la capitale et dans les grandes villes du pays – afin de mettre en évidence leur rôle dans la stabilité et la gouvernance nationale ?
  • Et pourquoi ne pas étendre cette logique à l’ensemble des acteurs économiques concernés, pour que chacun se rende compte de l’importance de son implication dans le développement du pays ?
  • Dénoncer la marginalisation et les abus
  • Il est temps de dénoncer la marginalisation, les tortures, arrestations et exécutions extra-judiciaires dont sont victimes les ressortissants du Kanem, qu’elles soient perpétrées par les forces de l’ordre ou par des agents de renseignements, du fait de leur engagement auprès du FACT et d’autres mouvements. Il faut également exiger la fin des abus aux douanes et auprès des agents de l’État.
  • Réinvestir les contributions fiscales dans la régionrégion

Exiger qu’une partie des recettes fiscales soit utilisée pour construire des infrastructures modernes dans une région où les rares édifices actuels résultent soit d’initiatives locales, soit de vestiges coloniaux.
Revendiquer, par ailleurs, que le pétrole de Rig-Rig bénéficie directement au développement du Kanem.

  • Renforcer l’unité des régions marginalisées : Du Tchad, unir les forces pour exiger un partage plus équitable du pouvoir.

L’heure du réveil a sonné

Rappeler l’engagement et les apports du Kanem à l’édification du Tchad n’est pas une démonstration de vantardise, mais la reconnaissance d’un rôle essentiel trop longtemps ignoré. Il est temps de se connaître suffisamment pour s’édifier mutuellement et rappeler à chacun le rôle vital à jouer.

Le Kanem ne doit plus être un simple spectateur de l’histoire du Tchad. Il doit reprendre son destin en main – non pas par la force, mais par l’intelligence, l’organisation et un leadership affirmé.

L’avenir du Tchad repose sur l’inclusion de toutes ses composantes. Un pays qui considère certaines régions comme acquises et invisibles se prive d’un avenir juste et stable.
Il est temps que les fils et filles du Kanem, ainsi que tous les Tchadiens marginalisés, réclament leur juste place dans la gestion nationale. Ceux qui n’ont pas voix au chapitre ne peuvent espérer en tirer des bénéfices.

Qui mieux que le Kanem pourrait incarner le rôle de trait d’union entre les multiples composantes du Tchad ?

Abdallah Saleh

Jean Amrouche et Albert Camus dans l’Algérie en guerre

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Jean Amrouche et Albert Camus
Jean Amrouche et Albert Camus

Jean Amrouche et Albert Camus qui incarnaient l’intelligence et l’humanité de la société algérienne furent sans doute parmi les personnalités les plus tourmentées quand il leur fallut choisir un camp dans un pays en guerre.

Au fond de leur réflexion, les valeurs communes d’humanité qu’ils portaient et leur connaissance du pays, voulaient réveiller dans la masse des citoyens des deux camps un esprit de paix négociée qui aurait permis d’éviter une guerre sanglante. Mais il était déjà trop tard.

Après la terrible répression qui suivit le meurtre d’une centaine d’Européens en mai 1945 à Sétif et les milliers de morts du côté algérien, les indépendantistes comprirent que le lobby colonialiste dirigeait la politique française en Algérie et qu’ils n’obtiendraient pas leur objectif pacifiquement.

Même si des démocrates comme Ferhat Abbas, Albert Camus, Jean Amrouche et bien d’autres pensaient encore pouvoir éviter la guerre, ils ne parvinrent pas à déclencher une réflexion sur l’avenir du pays auprès de toute la population. Aussi le 1er novembre 1954 le conflit éclata En 1954, soit quelques années avant la mort de ces deux écrivains qui l’incarnaient, la population algérienne était de 9.370.000 personnes.

Les pieds-noirs, ces migrants originaires du sud de l’Europe, en majorité des Espagnols, Italiens ou Maltais. Ils étaient venus, pour beaucoup d’entre eux, travailler chez le colon français pour les mêmes raisons que celles des migrants Africains et Maghrébins qui aujourd’hui quittent leur pays pour l’Europe. Ils fuyaient la faim, la pauvreté, l’oppression politique et voulaient donner une vie meilleure à leurs enfants. La seule chose qu’ils désiraient était de continuer à vivre en Algérie.

Rappelons à ce sujet que le terme pied-noir choisi pour désigner les Européens d’Algérie n’est pas né en 1830 mais au début de la guerre d’Algérie. Cette expression qui évoque le va-nu-pieds avait d’abord désigné les Arabes d’Algérie (Dictionnaire Petit Robert 1917) et, en 1955, dans le même dictionnaire elle désignait les Français d’Algérie.

Ces derniers, après l’avoir pris comme une forme péjorative à leur égard s’en emparèrent ensuite comme un blason pour défendre leur identité. Comme l’écrit l’Historien Jean Jacques Jordi, il y avait dans l’Algérie coloniale une sorte de hiérarchie des populations : ”en haut de l’échelle, le Français de France, en bas l’Arabe musulman, entre les deux, selon les régions et surtout les époques, les Français d’origine espagnole, italienne, maltaise, les Juifs et les Kabyles”.

Aujourd’hui encore, ces Pieds-Noirs sont souvent perçus comme Français, mais des Français vaguement étrangers C’est dans cet univers rétréci que Jean Amrouche et Albert Camus vécurent les prémices de la guerre d’Algérie et son déroulement jusqu’à leur mort.

Albert Camus était un homme de gauche qui, dès sa jeunesse, dénonça le colonialisme et plaida pour l’égalité entre Européens et Algériens. En 1936, il défendit le projet Blum-Violette, timide avancée qui donnait le droit de vote à 22.800 musulmans mais échoua sous la pression du lobby colonialiste.

En 1939, il s’éleva contre la misère économique des Indigènes et le « mépris général où le colon (tenait) le malheureux peuple de ce pays »” ». Il écrivait dans la revue Ensemble de Ferhat Abbas, défendait son ami Messali Hadj dont des partisans étaient arrêtés et publia Misère de la Kabylie sur Alger républicain.

En 1945 ce fut l’un des rares Journalistes à se rendre à Sétif et à dénoncer le massacre fait aux musulmans. Il n’épargna aucun camp.

En janvier 1956, il appela à une trêve et se rendit à Alger ou les Pieds-Noirs l’accueillirent par des insultes et en octobre 1957, dans un texte peu connu publié dans la revue Révolution Prolétarienne, il condamna les attaques des syndicats proches du MNA par le FLN : « A chaque militant qui tombe, l’avenir s’enfonce un peu plus dans la nuit. Il faut le dire, au moins, et le plus haut possible, pour empêcher que l’anti colonialisme devienne la bonne conscience qui justifie tout, et d’abord les tueurs. »

Il accusait par ailleurs le FLN d’avoir écarté le Parti communiste alors qu’il était le plus apte à rallier des Européens à la cause de l’indépendance, lui reprocha de mépriser Ferhat Abbas et de mener une guerre sans merci contre le MNA. Le journaliste Faris Lounis qui analysa l’excellent ouvrage de l’écrivain Tarik Djerroud, Albert Camus et le FLN publié en 2022 aux éditions Erick Bonnier écrit à ce sujet : « Djerroud le dit clairement : la dénonciation du colonialisme français par Camus restait réformiste, dans le sens d’une égalité politique et juridique entre tous les citoyens d’Algérie, sans distinction de religion et d’appartenance communautaire, cela dans le respect total et inconditionnel des différences linguistiques, religieuses et sociales. Ce rêve de justice et de fraternité avait sa grande part d’illusions, perdues peut-être par avance ! Cette aspiration à un dépassement du système colonial passait aussi par l’appel à remédier sans tarder à la détresse économique du plus grand nombre, notamment avec « Misère de la Kabylie »…. Djerroud y voit un engagement sincère de Camus pour les droits et besoins humains les plus élémentaires, et en premier lieu la justice… Djerroud brosse ainsi le portrait d’un Camus non pas « colonialiste » ou « paternaliste », mais humaniste, inquiet et incertain, cherchant, depuis le milieu européen pauvre dont il est issu, sa place face à l’altérité des colonisés. Il voulait faire entendre la voix des damnés de cette terre, dont il n’a cessé de célébrer la beauté et la grandeur. »

Ainsi, à la différence de Jean Amrouche partagé entre l’amour mythique qu’il vouait à la France des lumières et les racines berbères qui irriguaient profondément sa vie 7 et sa culture, Albert Camus n’idolâtrait pas la France. Dans sa jeunesse, lors de ses premiers voyages en Europe, il écrivait sur les fiches d’identité des hôtels où il résidait, à la rubrique nationalité, Algérien. Pour Camus, il y avait, avant la France, les pieds-noirs pauvres comme sa famille, espagnols, italiens, maltais, le tout symbolisé par sa mère. symbolisée dans par sa mère.

Ces pieds-noirs constituaient avec les musulmans la masse des travailleurs algériens. Leur seul privilège était d’être Européens, ce qui ne changeait rien à leur statut social.

L’historien Jean-Jacques Jordan écrit à ce sujet : “Il existait en Algérie comme sans aucun doute en France une sorte de “hiérarchie” plus ou moins bien définie parmi les populations. En haut de l’échelle, le Français de France, en bas l’Arabe musulman, et entre deux, selon les régions et surtout les époques, les Français d’origine allemande, espagnole, italienne, maltaise, les Juifs, les Kabyles” C’est ce choix indéfectible du pays natal et de la mère qui valut à Albert Camus, malgré son talent et son prix Nobel, d’être rejeté par l’intelligentsia française y compris par son ami Jean-Paul Sartre qui le traitait de « petit voyou d’Algérie ».

En 2013, Albert Camus aurait eu 100 ans. Interrogée pour savoir si les autorités l’avaient contactée pour une quelconque manifestation du souvenir, sa fille Catherine répondit : “Ceux qui détiennent le pouvoir, ne peuvent pas aimer Camus, surtout quand on est de gauche. Pour eux il reste un type pauvre, un petit voyou des rue d’Alger qui s’en est sorti.”

La relation avec l’intelligentsia parisienne c’est Jean Amrouche qui la réalisera. Poète, essayiste, journaliste littéraire et homme de radio, il inventa les entretiens radiophoniques ou défilaient les grands noms de la littérature français dont ses amis et en particulier André Gide.

En 1943, à Alger, il noua avec le général De Gaulle qui l’appréciait des relations qui durèrent malgré son engagement avec le FLN et qui l’amenèrent à donner à plusieurs reprises son avis sur la guerre, sans être entendu.

Jean Amrouche connut Albert Camus en 1941 à Oran mais leur affinité était faible sur les plans spirituel, sociétal et même linguistique, le premier étant plus raffiné et le second plus populaire.

La guerre d’Algérie les sépara malgré les tentatives de Jean Amrouche pour unir leurs efforts et obtenir la paix mais le jugement que portait Camus sur le FLN empêchera toute action commune.

Une lettre envoyée par Jean Amrouche à l’un de ses amis, un an avant sa mort, témoigne de la souffrance personnelle de l’écrivain et de son désir d’être compris : « Je suis le pont, l’arche, qui fait communiquer deux mondes, mais sur lesquels on marche, et que l’on piétine, que l’on foule. Je le resterai jusqu’à la fin des fins. C’est mon destin. Le subissant, je suis plus fort que lui, mettant ma satisfaction, ma consolation dans l’effort que je fais pour ressembler chaque jour davantage au roseau de Pascal. Il me suffit de la connivence d’amis fraternels tels que toi pour me sentir justifié. J’ai engagé toutes mes forces au service du peuple algérien : non pour des raisons proprement politiques, mais pour une raison d’honneur et pour des raisons d’ordre spirituel. »

S’ils s’étaient rencontrés comme le voulait Jean Amrouche, ces deux génies algériens auraient su au moins laisser un récit pour l’Histoire de la guerre d’Algérie qui fut, de fait, une guerre civile. Mais l’Algérie dont ils rêvaient n’aurait pas existé pour cela.

Cette Algérie souveraine, indépendante, fraternelle et laïque, un modèle pour le monde en quelque sorte n’a jamais vu le jour car, en août 1962, le Gouvernement provisoire de la République algérienne, seul légitime, était renversé par une armée qui après avoir tué un millier de moudjahidine de l’intérieur s’emparait d’un pouvoir qu’elle ne lâchera plus.

Emile Martinez

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